On a vu May December, le duel sensuel et ambigu entre Natalie Portman et Julianne Moore

Antoine Desrues | 1 décembre 2023
Antoine Desrues | 1 décembre 2023

Alors que May December de Todd Haynes sort aux États-Unis sur Netflix, retour sur notre avis cannois pour le thriller avec Natalie Portman et Julianne Moore.

Une actrice vient rencontrer la femme qu’elle va incarner prochainement dans un film, et dont la vie amoureuse a enflammé la presse à scandale. Alors qu’elle se passionne pour cette mère de famille mystérieuse, elle se perd petit à petit dans son personnage. Ce pitch, diablement excitant, semblait tout indiqué pour Todd Haynes, qui revenait en compétition au Festival de Cannes avec May December et son génial duo d'actrices : Natalie Portman et Julianne Moore.

Si en France, on aura la chance de pouvoir découvrir le long-métrage en salles à partir du 24 janvier 2024, il est sorti directement sur Netflix aux États-Unis ce 1er décembre 2023. L'occasion de se repencher sur notre chronique du film, découvert pendant le Festival de Cannes.

(N.B. : une critique plus complète du film sera proposée lors de sa sortie française)

 

 

Miroir, mon beau miroir

À notre grand désarroi, May December a été l’une des douches froides du Festival de Cannes 2023. Pourtant, la rédaction d’Ecran Large ne tarit pas d’éloges sur le cinéma de Todd Haynes, que ce soit dans ses purs mélodrames sirkiens (Loin du paradis, Carol) ou dans ses expérimentations aux élans camp et queer flamboyants (Velvet Goldmine, I’m Not There).

À première vue, son nouveau film est à la jonction de ces éléments, dans un écrin qui flirte avec le thriller obsessionnel à la De Palma. Sur le papier, la combinaison semble idéale, et Todd Haynes ne tarde pas à marquer le coup par sa manière de diriger son casting hollywoodien glamour.

 

May December : photoNous, à la rédaction de cet article

 

Alors qu’elle débarque pour observer la femme qu’elle va incarner au cinéma, Elizabeth (Natalie Portman) s’immisce dans la famille de Gracie (Julianne Moore) et de son mari Joe (Charles Melton), au point de bouleverser les acquis de leur relation. Des années auparavant, Gracie a pourtant été emprisonnée pour avoir couché avec Joe alors qu’il était encore mineur. Malgré le scandale, le couple ne s’est jamais quitté, et Elizabeth essaie de déchiffrer cet étrange personnage, qui semble ne jamais remettre en cause ses actions passées.

Autant dire que Todd Haynes cherche clairement à déstabiliser le spectateur, ce qu’il fait en étant épaulé par des comédiens qu’il dépeint dans la séduction permanente (en particulier Portman, dont il appuie le moindre micro-geste et les regards langoureux). May December est un film de façade, qui justifie dès lors sa dimension opaque, pour ne pas dire insaisissable. On est curieux de voir où le récit nous emmène dans la première demi-heure, mais il faut bien admettre que le jeu de piste avec le spectateur s’étiole bien vite, la faute à des changements de tons ouvertement grotesques et systématiques.

À vrai dire, May December semble poser trop tard ses cartes sur la table, alors que l’enquête d’Elizabeth réveille les fêlures du passé et un ressentiment jamais énoncé. C’est d’ailleurs lorsqu’il embrasse ce thème que le film s’offre des fulgurances pour le coup fascinantes (comme ce premier joint partagé entre un fils et son père).

 

May December : photoDuo ou duel ?

 

On sent l’émotion et le mystère de sa narration aux portes du long-métrage, mais Todd Haynes y préfère une lecture méta appuyée par cette actrice un peu trop impliquée. Le cinéaste y met en abyme sa propre fascination pour ses personnages, et il faut bien admettre que certaines interactions donnent lieu à des séquences envoûtantes (dont une scène de maquillage en face-à-face entre Portman et Moore). Néanmoins, l’exercice de style semble vain à force d’accumuler les moments de gêne et la magnificence d’un surjeu volontaire de ses acteurs. Tout ça pour quoi ? Pour une réflexion sur notre besoin maladif de résumer les gens, de les mettre dans des cases, en faisant fi de leur complexité et de leurs contradictions.

Une idée finale pour le coup réussie, même si elle confirme la complaisance avec laquelle Todd Haynes attend son dernier acte pour donner les clés de l'œuvre poussive. On admettra néanmoins que dans l'énergie globale d'un festival où les visionnages s'enchaînent, May December a le mérite d'intriguer, et de rester dans notre esprit depuis mai. Si la déception a été grande, nul doute qu'on lui redonnera sa chance en janvier prochain.

Tout savoir sur May December

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commentaires
Deaged Actress
02/12/2023 à 18:42

comment se fait -il que l'actrice J Moore, néé en ..1960 paraisse aussi "jeune" que Portman cuvéee 1981( wtf!) à, l'image?