Mank sur Netflix, Hollywood, liberté artistique... David Fincher se confie

Gaël Delachapelle | 3 décembre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Gaël Delachapelle | 3 décembre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

En pleine promotion pour le très attendu Mank, David Fincher a donné son avis sur Hollywood, Netflix et le cinéma.

Alors que la sortie de son onzième long-métrage, Mank, est très attendue six ans après Gone Girl, la promotion du nouveau film de David Fincher bat son plein, le cinéaste s’exprimant régulièrement en ce moment dans la presse sur sa vision pessimiste d'Hollywood, sur ce qu'il a pensé du Joker ou sa relation tendue avec Jake Gyllenhaal sur Zodiac.

Mais évidemment, David Fincher parle également de son amour du cinéma qu’il tente de transmettre au spectateur à travers Mank. Avant son arrivée sur Netflix, le cinéaste derrière Seven et The Social Network était l’invité d’Augustin Trapenard, dans l’émission Boomerang, ce 2 décembre 2020, sur France Inter.

 

Photo Gary OldmanHerman J. Mankiewicz (Gary Oldman), le véritable auteur de Citizen Kane d'Orson Welles ? 

 

Une interview qui fut l’occasion pour le réalisateur d’évoquer Mank dans les grandes lignes. Pour rappel, le film revient sur l’histoire de Herman J. Mankiewicz (Gary Oldman), célèbre scénariste hollywoodien derrière le scénario du chef-d’œuvre d’Orson Welles, Citizen Kane. Un film consacré donc à un auteur, qui se cache derrière l’ombre d’un cinéaste légendaire et orgueilleux. Il paraissait donc comme une évidence que Fincher évoque la question de ce qu’est un auteur de cinéma dans cette émission, une question délicate selon le cinéaste :

« Voilà une question bien délicate, et j’espère que mon film montre à quel point c’est compliqué de donner naissance à un film. J’ai tendance à voir les choses en termes de chromosomes, le scénariste va apporter 23 chromosomes et le réalisateur aussi. Tout ça parce qu’avoir un canevas, un projet écrit qui soit clair, à partir duquel vous pouvez travailler, c’est essentiel. Donc, il est très difficile de répondre à cette question. Qui va être responsable du scénario, ça, c’est une question plus facile. Qui va être responsable de la mise en scène, aussi, mais qui est le véritable auteur d’un film ? Je pense que c’est un travail d’équipe. »

 

Photo Amanda SeyfriedAmanda Seyfried qui passe une tête pour écouter Fincher... 

 

Il est en effet difficile d’être un véritable auteur aujourd’hui à Hollywood, et Mank interroge précisément cette question de la liberté d’un artiste dans une industrie, mais aussi son identité. Le film, conçu comme un authentique "film des années 1940" dans sa forme, n’aurait probablement pas vu le jour auprès des grosses majors hollywoodiennes, alors qu’il s’agit d’un film de cinéma sur le cinéma.

Tout comme Alfonso Cuarón avec Roma, ou plus récemment Martin Scorsese avec The Irishman, David Fincher semble avoir trouvé refuge chez la plateforme au N rouge, devenu depuis quelques années le porte-étendard de la liberté artistique. Interrogé sur son contrat d’exclusivité avec le géant du streaming, sur la liberté donnée par Netflix, et sur le fait que son film ne sera pas vu dans les salles en France, Fincher a été très clair :

« J’aimerais beaucoup que les gens découvrent le film sur un grand écran, on a beaucoup travaillé pour qu’il mérite d’être projeté sur un écran de 15m. Mais nous faisons face à une crise sanitaire énorme, et elle doit passer avant tout. Et moi, je n’ai pas envie de voir les spectateurs tomber malades au cinéma. Et puis, pour être sincère, les gens de Netflix, l’exigence technique qu’ils s’imposent, le 4K par exemple, l’image HDR, tout ça a des résultats très bons. »

 

Photo Gary OldmanL'ombre d'un cinéaste qui plane au-dessus d'un auteur... 

 

Une certaine exigence technique, donc, bien connue chez le cinéaste avec son perfectionnisme légendaire, qui ne serait possible que chez Netflix, selon lui. Ce qui n’empêche pas David Fincher d’être nostalgique d’une certaine époque du cinéma, auquel il rend hommage avec Mank. Mais malgré cette nostalgie d’un cinéma qui n’existe plus, le cinéaste n’est pas si pessimiste à propos de l’avenir de l’industrie hollywoodienne : 

« Par certains aspects, ce n’est pas plus mal. Je pense que c’est une très bonne chose que les comédiens ne soient plus sous contrats à long terme avec les studios, qu’ils puissent faire des choix selon leur tempérament. Donc oui, il y a une part de moi-même qui regrette l’époque où un technicien avait la possibilité de travailler 320 jours par an, s’il bossait pour la MGM. Mais tout ceci mis à part, les moyens techniques pour produire des contenus narratifs linéaires vont changer, encore et encore. La technologie nous permet de trouver des caméras qui ne pèsent rien. Et tout ça évolue sans cesse, et selon moi, c’est pour le meilleur du cinéma. »

 

Photo Tom BurkeTom Burke, ébloui par une sublime lumière... 

 

Même si Mank est une lettre d’amour au cinéma du vieil Hollywood, David Fincher semble apparemment voir du bon dans l’évolution de l’industrie, au vu de ses propos plutôt optimistes sur l’avenir du cinéma.

Pour rappel, son très attendu Mank avec Gary Oldman, Amanda Seyfried, ou encore Charles Dance, est prévue pour le 4 décembre 2020 sur Netflix. Encore un peu de patience, donc. En attendant, le cinéaste David Fincher dit comment il veut terminer sa série Mindhunter, avec son plan précis pour la saison 3.

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commentaires
Cépafo
03/12/2020 à 18:36

@Beyond.

J'allais le dire. Même si c'est l'un de mes réal favoris si ce n'est mon réal favori,je trouve qu'en ce moment il a le verbe facile et parfois insupportable l'ami Dave. Normal avec la promotion de Mank ... Mais c'est vrai quitte à choisir entre 2 insupportables de service (et si j'avais un flingue sur la tempe précisement) je préfererai mille fois le Papa de Zodiac et Fight Club que le papa sénile d'inglorious Bastard .

Fincher d'ailleurs,à l'instar des Del Toro et consorts,n'est pas le seul à avoir été écarté des projets ambitieux. Le problème est un problème insoluble:

1) Il y'a les producteurs qui laissent carte blanche à des reals connus avec un budget démesuré .Pour au final ,et on va pas s mentir ce sont malheureusement des résultats décevants. Pas des cas singuliers j tenais à préciser

2) il y'a des producteurs qui préferent mettre des bleus à la place de réalisateurs confirmés pour ces mêmes projets.Afin de chapeauter et les budget et les prises de vue et les montages surtout.
3) il y'a des heureusement des producteurs courageux qui laissent carte blanche à des réalisateurs ambitieux .Et qui nous pondent des chef d'oeuvres intemporels.Malheureusement on aimerait en voir souvent.

La politique est très ancrée dans le cinéma. Les producteurs sont avant tout des businessman qui pensent aux produits dérivés peluche chaussettes et autres pin's et fourchettes.


Ca me fait penser au Jorodowski's Dune et le melon incommensurable de Chef Alejandro qui vendait son projet à qui voulait l'entendre comme le film qui allait changer la face du cinéma à tout jamais.

beyond
03/12/2020 à 14:21

@Sigi Fincher aussi pourrait s'écouter parler des heures.

Sigi
03/12/2020 à 13:46

Je pourrais écouter Fincher parler des heures durant. Contrairement à Tarantino.

Birdy
03/12/2020 à 13:46

@ Kyle : Pareil... Ce film va mettre une tarte à tous les amoureux cinéphiles...

Kyle Reese
03/12/2020 à 12:14

C'est fou, chaque nouveau plan que je vois de Mank révèle un travail du cadre et de la photo exceptionnel. J'espère que le film sera dans sa globalité à la hauteur de ses qualités techniques.