Ant-Man 3 : pourquoi Quantumania est un carnage en 5 raisons (de vomir)

Ant-Man 3 : Quantumania démarre la Phase 5 de Marvel par un sacré faux-départ. Décryptage d'un foirage en 5 points.

Notre critique d'Ant-Man 3 : Quantumania

Si ses films solo ont toujours été assez anecdotiques, le personnage d'Ant-Man, et son rapport au monde quantique, se sont révélés importants dans les événements du Marvel Cinematic Universe. Après avoir été la clé pour corriger le Snap de Thanos dans Avengers : Endgame, le personnage incarné par Paul Rudd a la responsabilité d'introduire la Phase 5 du MCU, et avec elle son grand méchant : Kang.

Pour autant, Ant-Man et la Guêpe : Quantumania, toujours réalisé par Peyton Reed, est un véritable pétard mouillé, qui semble confirmer la direction peu encourageante prise par la franchise de Kevin Feige. Comme avec Thor : Love and Thunder, les pires travers de la saga se mêlent à une exécution en pilotage automatique, qui méritaient bien un décryptage approfondi en 5 points.

ATTENTION SPOILERS

1. ant-man 3 est très laid (le film, pas paul rudd)

Sexiest man alive in ugliest film

On en rigole (ou pleure) depuis que le premier Ant-Man a échappé à Edgar Wright, mais son remplaçant Peyton Reed est bien l’exemple parfait du yes-man (et pas seulement parce qu’il a réalisé un film avec ce titre). Cela étant dit, le réalisateur reste un exécutant avec un certain savoir-faire technique, et surtout une curiosité dès qu'il s'agit de nouvelles technologies. Si les deux premiers Ant-Man sont loin d'être les Marvel les plus convaincants, il faut quand même faire preuve d'honnêteté intellectuelle, puisque Peyton Reed a réalisé certains des meilleurs épisodes de The Mandalorian, à commencer par le dernier chapitre de la saison 2 (oui, celui avec un certain Jedi).

Or, The Mandalorian a justement popularisé à Hollywood l'emploi du StageCraft, un studio avec projection sur écrans LED de décors la plupart du temps réalisés à partir de moteurs graphiques de jeux vidéo. Au-delà de remplacer les fonds verts surexploités par Marvel, la technologie permet aux acteurs de directement interagir avec l'espace qui leur est présenté, et de simplifier les projections et reflets lumineux sur les corps selon le type d'environnement.

Acteurs sur fond d'écran n°666

A vrai dire, le StageCraft a surtout pour lui de combattre l'effet d'aplati que provoque régulièrement le fond vert. Ou du moins, c'est ce qu'a promis The Mandalorian, avant que les cinéastes ayant testé l'outil ne fassent n'importe quoi avec. Taika Waititi avait déjà appauvri sa mise en scène avec Thor : Love and Thunder, et Ant-Man 3 souffre du même problème. Plutôt que de créer de meilleures compositions, avec plus de perspective et de profondeur de champ, Quantumania a des airs de pièce de théâtre terriblement statique, où on ressent les limites du studio entouré d'écrans (même si tout le film n'a pas été tourné de cette manière). Les personnages semblent coincés sur une piste de cirque, à se débattre face à des fonds d'écran Windows qui renforcent leur artificialité.

Tout sonne faux et anti-spectaculaire, ce qui est peu aidé par une réalisation régulièrement centrée sur des champs-contrechamps. Ajoutez à cela des incrustations numériques pas toujours heureuses (notamment avec le costume de Kang) et quelques aberrations conceptuelles (on y reviendra plus tard), et vous avez là le meilleur gerbotron-numérico-nawak de Marvel en date, qui tendrait à se standardiser.

2. ant-man 3 ne sert à rien

"Attendez, vous voulez dire qu'on ne sert à rien ?"

Les deux premiers volets sur Ant-Man présentaient déjà un problème majeur : leurs événements n’avaient pas de gros impacts sur le reste du MCU. Le premier film évoquait rapidement HYDRA et permettait simplement d’introduire le super-héros avant Civil War et c’était un peu la même chose avec Ant-Man et la Guêpe. S’il donnait plus de place à la Guêpe, son intérêt reposait uniquement sur sa scène post-générique replaçant les personnages au moment du Blip et avant Avengers : Endgame.

Autant dire que lancer la Phase 5 avec l’Homme-fourmi semblait sacrément farfelu puisque ses aventures solos se sont toujours déroulées en marge du grand arc de la Saga de l’Infini. Avec Ant-Man et la Guêpe : Quantumania, le super-héros monte donc légèrement en grade puisqu’il est le premier des Avengers à affronter Kang le Conquérant, alias le grand méchant de la Saga du Multivers. Problème : le film est une minuscule introduction sans véritable conséquence (une fois de plus).

"Pourquoi on se cache, on n'est pas censé faire un film ?"

L’action du film ayant lieu dans le monde quantique, l’affrontement n’a pas de répercussions immédiates sur le monde humain. Le film n’a d'ailleurs aucun effet sur les personnages de ladite aventure. Avec son manque de courage habituel, Marvel se refuse à tuer des personnages secondaires importants (Hank, Janet ou la Guêpe) ou Ant-Man lui-même pour créer une certaine dramaturgie. Au contraire, elle préfère carrément tuer son grand méchant en fin de film pour mieux renforcer Ant-Man et sa troupe.

Autant dire que les enjeux sont faibles, voire inexistants, ce qui est sacrément ennuyeux quand le film était censé introduire les objectifs et défis de cette nouvelle ère du MCU. La seule révélation un tant soit peu intéressante arrive bien tardivement : dans la première scène post-générique. On y découvre que le Kang le Conquérant de Ant-Man 3 n'était qu'un Kang parmi des milliers de Kang, et que sa mort a bien énervé les autres, prêts à tout casser. Bref, le film se termine là où il aurait dû commencer... c'est dire sa non-importance. 

3. ANT-MAN 3 SACCAGE LE ROYAUME QUANTIQUE

Sous l'océan

La scène d’introduction du film nous montre une Janet prisonnière du monde quantique et qui aide Kang à affronter une bestiole non-identifiée qui n’a pas l’air commode. Leur environnement est abstrait, une sorte de nébuleuse bleutée sert de ciel à un sol rocailleux. L’effort de créer une dimension qui n’obéit pas aux règles de notre monde est présent, et si le visuel n’est pas révolutionnaire, il laisse penser que Janet est restée coincée toutes ces années dans un monde austère et hostile qui a dû la transformer.

Malheureusement, cette idée est très vite abandonnée et plus on en découvre du Royaume Quantique, plus il ressemble à un environnement terrestre avec des couleurs tout juste un peu différentes de celles d'un quotidien normal. Le film passe complètement à côté de l’opportunité de créer un monde étonnant et nouveau qui aurait pu le démarquer d’une science-fiction lissée encore moins originale que Valérian et la Cité des mille planètes.

Exemple de cosplay low-cost

Le design des habitants du Royaume Quantique n’est que redite sans cohérence de créatures déjà vues et revues au cinéma, et au-delà de leur apparence inintéressante, aucun trait psychologique ou comportemental ne les caractérise au-delà d’une tapisserie de figuration. Parmi eux, une bonne partie d’humains déguisés comme les indigènes d’une kermesse de mauvais goût achèvent de décrédibiliser ce monde soi-disant surprenant. 

Seule belle invention visuelle du film : le générique de fin, agrémenté d'arabesques aux couleurs vives (plus vives que la somme de toutes les scènes du film), et qui fait regretter que cette esthétique n'ait pas davantage inspiré le reste de la direction artistique du film. En somme, Ant-Man et la Guêpe : Quantumania ne nous montre rien qu'on n'ait déjà vu beaucoup mieux fait ailleurs, et ignore chacune des opportunités de créer quelque chose d'original et insuffler un minimum de folie dans sa dimension quantique.

4. ant-man 3 est chiant comme la pluie

Les Gardiens de la mini-galaxie

Ça commençait pourtant bien dans le Royaume Quantique, avec une forêt enchantée, des cascades de lave dans le ciel, et des giga-monstres qui se bouffent entre eux. Ant-Man 3 qui se positionne comme un remix de L'Aventure intérieure et Tron avec une saveur de Jules Verne grotesque ? Oui, merci. Mais très vite, la faune et la flore locales laissent place à un restau et un village. Tout le monde s'arrête pour parler dans des couloirs, des bureaux et des vaisseaux. Et malgré des tonneaux de CGI, toute la direction artistique redevient un peu trop tristement grise et plate. Ant-Man 3 aurait pu devenir une sorte de douce folie à la Aquaman (une attraction full CGI assumée : ça donne la nausée, mais c'est fait exprès, et ça ne s'arrête pas), mais préfère ralentir dès la première heure.

Bien sûr, Ant-Man 3 reste bien plus coloré que Black Widow et autres blockbusters urbains, où le summun de la folie devient une lumière rouge dans un bureau ou une explosion au milieu des nuages. Mais l'univers est d'une pauvreté folle, puisque le bestiaire de ce Royaume Quantique se résume finalement à quelques tronches d'aliens recalées au casting de Thor, et une armée de soldats qui donnent envie de relancer Doctor Who.

L'Ascension de Skywant-man

Dans la deuxième moitié, le film se plaît même à devenir un sous-sous-Star Wars avec une ville futuriste générique, qui empile tous les clichés (le pont, le dôme, les buildings, le QG, la prison... et même la réunion "surprise" des rebelles). On est dans le Royaume Quantique, et pourtant, le combat final commence sur le parvis d'un immeuble (équivalent d'un parking ou d'un aéroport), et se termine dans un bureau quasi vide (équivalent d'environ 153 scènes du MCU). Marvel est donc sur un niveau de recyclage qui a sûrement enchanté la COP27.

Bref, malgré quelques passages un peu plus colorés (notamment le lieu où Ant-Man doit plonger pour récupérer la babiole de Kang), Ant-Man et la Guêpe : Quantumania est beaucoup trop terne, et se contente de beaucoup trop de facilités pour véritablement profiter de ce soi-disant royaume.

5. Kang est une déception

Kang ça veut pas

Ant-Man 3 est une publicité dédiée à Kang le Conquérant, et c'est logique : c'est sa première véritable apparition, après son passage dans le dernier épisode de la saison 1 de Loki, sous le nom de Celui Qui Demeure. C'est ce film qui présente ses origines, ses motivations, ses pouvoirs et sa personnalité, avec bien évidemment une tractopelle de teasing sur les événements à venir. Et Ant-Man et la Guêpe : Quantumania a bien du mal à porter ce fardeau.

En un film, il faut présenter ce personnage mais pas trop. Il faut montrer ses pouvoirs, mais pas trop. Il faut qu’il affronte les héros, mais pas trop, parce que Kang pourrait sans problème écraser Ant-Man et la Guêpe. C’est la mission quasi impossible d’Ant-Man 3 : raconter une bataille contre Kang, mais également préparer toutes les autres batailles contre Kang. Il faut penser le personnage sur un film de deux heures, mais aussi sur trois ans et dix films (sans compter les séries...). Comparé à Thanos, qui avait commencé à se bagarrer et déclencher le chaos dès sa première rencontre avec un Avenger dans Infinity War, c'est une toute autre paire de manches.

Power Rangers force bleu

Ant-Man 3 force tellement le freinage que Kang ressemble finalement à un méchant générique. En faisant le choix d'un affrontement final où le Conquérant est vaincu (certes temporairement), le film le condamne à n'être ici qu'une petite aventure passagère. Bien sûr, le scénario fait répéter à tout le monde que Kang est bien plus que ça. Il y a même une ridicule voix-off à la fin, au cas où quelqu'un avait raté l'info en allant vomir après avoir vu la tronche de M.O.D.O.K. Et les scènes post-générique enfoncent le clou, pour que personne ne ressorte de la salle en se disant autre chose que "mais ils sont dans la merde avec tous ces Kang non ?".

Mais jamais le film n'arrive à MONTRER et METTRE EN SCÈNE cette menace. Tout est dit, rien n'est compris ou démontré au-delà de quelques effets faciles (Kang a plein de pouvoirs, et Michelle Pfeiffer a tellement peur qu'elle met 1h à donner des infos vitales). Jonathan Majors a beau jouer Kang comme si c’était du Shakespeare, être posé dans un trône et agiter des gadgets surpuissants, il n'est jamais iconisé.

Là encore, la comparaison avec Thanos est intéressante, puisque dès sa première apparition, il mettait KO Thor et Hulk avant de tuer Loki. C'était une manière toute simple de le placer sur l'échiquier du MCU. Que reste t-il de Kang après son premier film ? Si peu. Beaucoup de blabla, de promesses, et des scènes post-générique gentiment nulles (particulièrement la première, qui fait un peu peur).

Bonus : M.O.D.O.K.

Cringe incoming !

L'humour post-moderne de Marvel a toujours pollué ses productions en se moquant de l'univers débridé qu'il pille pourtant sans vergogne. Néanmoins, Ant-Man 3 est un doigt d'honneur particulièrement remarquable, puisque le film s'avère incapable de prendre au sérieux ses enjeux et ses personnages.

On se demande alors pourquoi s'être embêté à caler au forceps un méchant aussi bizarre que M.O.D.O.K. si c'est pour le transformer en pantin ridicule, raillé tout le long du film pour son design tout droit sorti des enfers d'un département de VFX en plein crunch. On plaint le pauvre Corey Stoll (le méchant du premier Ant-Man), sans doute obligé contractuellement de se soumettre à cette humiliation publique. Marvel assumerait presque de façon méta de se moquer de ses spectateurs via ce personnage, au point même de désamorcer de la pire des manières sa dernière scène. Le symptôme terminal d'une franchise en roue libre.