Séquences choc pour films ratés
Syndrome bien connu du cinéphile, qui peut le pousser à regarder inlassablement un long-métrage qu'il a pourtant trouvé médiocre, la super scène nichée au coeur d'un film super pourri est un piège fatal. Frustrantes et rageantes, ces séquences nous restent en mémoire tant pour leurs qualités intrinsèques que pour la déception engendrée par l'oeuvre dans son ensemble. Soucieuse de vous faire partager sa peine et sa frustration, la team E.L vous livre un petit tour d'horizon des scènes réussies de films loupés.
Attention, avant de s'énerver vigoureusement sur son clavier, il s'agit d'une sélection des plus personnelles, bon nombre de films cités dans ce dossier sont considérés par d'autres membres de la rédaction comme des grands films (ceci est un message personnel de notre rédac chef adoré qui est désormais en salle de réanimation après avoir accepté de publier un dossier où figurent rien moins que trois films de son cinéaste fétiche, Mr Spielberg).
Blade, de Stephen Norrington, 1998
Laurent Pécha
Rien n'y fait : autant Blade 2 reste un sommet du cinéma d'action horrifique, à mes yeux le meilleur film de Del Toro, autant Blade m'insupporte. J'ai beau l'avoir revu plusieurs fois, rien n'y fait, je m'y ennuie prodigieusement quand je ne rigole pas devant la médiocrité de la plupart des séquences. Mais c'est peut être aussi parce que la séquence d'ouverture du film reste à ce jour l'une des plus stimulantes et jouissives que j'ai pu voir dans le cinéma moderne. Traci Lords qui nous invite dans les entrailles d'un immeuble dont les bas fonds sont transformés en discothèque décadente, je disais déjà sacrément oui. Mais quand la musique techno se met en branle avec une puissance dévastatrice et que les douches incendies se mettent à déverser du sang et l'assistance de dévoiler leur nature de vampires dans une excitation peu commune, j'exulte. Au point d'avoir envie moi aussi d'entrer dans cette folle danse macabre et pourtant étonnamment excitante. Un vampire sommeillerait-il en moi ? A chaque fois que je revois cette séquence, le doute s'immisce !
Maximum Overdrive, de Stephen King,1986
Patrick Antona
Il n'est pas aisé
de trouver un motif de contentement à la vision de ce film honni
depuis sa sortie par le public ainsi que par son infortuné
réalisateur, Stephen King le décrivant comme "un des pires
films jamais réalisés". Mais on peut garder en mémoire cette
spectaculaire séquence d'ouverture qui provoque un malsain sentiment
jubilatoire à chaque fois, avec cette rébellion des objets
domestiques contre l'homme: action vengeresse qui va du distributeur
de canettes se transformant en catapulte à la tondeuse à gazon se
muant en guillotine, en passant par les instruments de cuisine qui
trouvent que c'est bien plus marrant de trancher de l'humain plutôt
que du veau ou du poisson. Mais cette anthologique ouverture gore
puissamment portée par la musique de ACDC ne sera suivi que par un
insupportable ballet de poids-lourds s'évertuant à faire des ronds
autour d'une station-service, dernier refuge d'humains dont on se
fout complètement. Le King a d'ailleurs juré depuis (c'était en
1986) que l'on n'y reprendrait plus à vouloir se prendre pour
Carpenter ou De Palma, et à délaisser sa machine à écrire, comme
avait réussi à le convaincre ce vieux briscard de Dino de
Laurentiis à l'époque !
Le Royaume de Ga'Hoole, de Zack Snyder, 2010
Louisa Amara
le premier truc qui me vient, c'est la
scène au ralenti dans la forêt en feu dans Le Royaume de Ga
Hoole avec la musique de Dead Can Dance "the host of
Seraphim", chanson qu'on entend aussi à la fin de The Mist. Et
que c'est quand même la classe d'utiliser cette chanson pour rendre
de simples chouettes, héroïques et tout :)
(merci à Julien, qui
a retrouvé le titre)
Matrix reloaded des frères Wachowski, 2003
Perrine Guennesson
Matrix reloaded est une grande déception. Plus le film avance, plus l'espoir de voir une suite aussi brillante que l'original s'étiole pour n'être plus aussi épais qu'une fine feuille à cigarette. Mais qu'est-ce qui leur a pris? Pourquoi un tel bazard non-sensique, faussement intello, faussement mystique, faussement métaphorique? Et si la douleur perdure pendant les 2h et quelques du film, une scène vient toute fois nous sauver de l'encéphalogramme plat. La scène de danse souterraine est le moment où le peuple de Zion relâche la tension nerveuse, exulte, vie et vibre et nous avec. Enfin le film nous permet de ressentir quelque chose. Chaque battement de coeur s'accorde sur le tempo de cette musique tribal et sensuelle. Cette petite part d'humanité toute sale et sexy dans cet univers informatique tout lisse et propre offre donc le petit répit nécessaire pour endurer le reste du film.
Star Wars Episode I : La Menace fantôme, de Georges Lucas,1999
Tonton BDM
La découverte de Star Wars Episode I a été, pour moi comme pour beaucoup de fans de La guerre des étoiles, un crève-cœur. Et c'était d'autant plus rageant que le film introduisait un personnage fascinant mais très largement sous-exploité (quelques minutes et puis s'en vont), celui du guerrier sith Dark Maul, avec son double sabre laser (les filles en rêvent). Interprété par Ray Park, le personnage réussissait à rehausser vivement l'intérêt du spectateur pendant ses cinq ou six minutes de présence à l'écran (ce combat final !). Sans cette présence trouble et magnétique et les deux-trois accords d'un John Williams en grande forme qui lui sont consacrés, le film n'aurait plus le moindre intérêt à mes yeux.
Lord of war d'Andrew Niccol , 2005
Clément Benard
Quand on pense à Lord of war, ce qui vient en premier à l'esprit c'est cette superbe séquence d'ouverture où, juste après que Nicolas Cage ait prononcé son fameux "il y a 1 homme sur 12 qui est armé sur cette planète. La seule question c'est : comment armer les 11 autres ?", on suit le voyage d'une balle de sa fabrication à son utilisation. Visuellement bluffant, cette séquence marque irrémédiablement les esprits grâce à son côté conceptuel. Mais, il faut bien l'avouer, cette introduction est totalement indépendante du reste film et peut être vue un peu comme un court-métrage. Ainsi, à force de jouer la carte du cynisme à outrance, le film a lui finalement tendance à enfoncer des portes ouvertes (Faire de l'argent en vendant des armes, c'est pas bien ! A ouais ? Oui, car les armes ça tue des gens ? Non sans blague ?) et peu même agacer à cause de son côté faussement subversif. Lord of war a finalement plus des allures de pétard mouillé que de véritable pamphlet...
Batman & Robin, de Joel Schumacher, 1997
Damien virgitti
Toujours dans mes vieilles obsessions,
une scène de Batman & Robin, le film le plus nul de la franchise
(oui je n'inclus pas Forever car quoqu'il se passe, Jim Carrey reste
un mec qui me fait rire).
Batman & Robin est clairement un
nanar, et la vue des chaussons en forme d'ours polaire de Schwarzy
continue de m'arracher la rétine... MAIS il y a une scène
déchirante au milieu de tout ce déluge de mauvais goût : un échange
bref entre George Clooney et Alfred, alors qu'il est mourant. Une
scène où tout d'un coup le scénariste à l'intelligence de tirer
un parallèle touchant entre la mort imminente du père de
substitution de Batman et la tragédie qui l'a frappé étant gamin.
En une seule tirade, Alfred résume alors parfaitement le rôle
symbolique de Batman à mes yeux: un gamin que la vie a forcé trop
vite à grandir et qui croit encore naïvement qu'il peut se battre
contre la Mort. Et dans un silence plein de doutes, George Clooney
relève la tête et murmure "But I can't, can I?"
La
réponse du vieux sage ne se fait alors pas attendre: "None of
us can..."
Une scène puissante qui résume parfaitement
toute la dramatique des superhéros, doublé d'un flashback de
l'enterrement des parents Wayne, imprimé sur une fenêtre et qui
alors reprend en clin d'oeil la structure des cases de BD... Tant
d'intelligence porte à croire que cette scène à été filmée
pendant que Schumacher dormait dans sa loge!
"Death
and Chance stole your parents. But rather than become a victim, you
have done everything in your power to control the fates. For what is
Batman...if not an effort to master the chaos that sweeps our world.
An attempt to control death itself"
A.I de Steven Spielberg, 2001
Simon Riaux
La découvert de
Rouge City, coeur palpitant du stupre et de la luxure d'un futur en
déréliction est un des rares moments de grâce de A.I. L'étrange
équipe formée par Jude Law, Haley Joel Osment et son ours en
peluche, s'engage dans d'immenses bouches de néon et offre une
séquence onirique et vertigineuse. On se prend un instant à croire
que Spielberg va enfin trouver le rythme de sa narration, et nous
offrir ce que réclame tout bon récit de science-fiction : une
vision. Mais non, sitôt achevée cette séquence poétique, le film
retrouve sa raideur et sa maladresse pour rapidement achever le
public.
Indiana jones et le royaume du crâne de cristal, de Steven Spielberg, 2008
Vincent Julé
La dernière (des dernières ?) aventures d'Indiana Jones est une purge simiesque et numérique. Pourtant, le temps d'une scène, il se passe quelque chose. Non pas que la saga retrouve la gloire de ses épisodes passés, bien au contraire, mais le spectateur maso est caressé, malaxé, dans le sens de sa pop culture. Voilà, aussi ridicule et kitsch soit-il, le grand final avec soucoupe volante, E.T. et SF de bas étage file ce petit frisson coupable. Ouais, je kiffe, et ouais, je devrais pas. C'est quand même Indiana en plein X-Files par LucasArts, merde. Nuke the fridge !
Jason X de James Isaac, 2002
Jonathan Deladerriere
Le dixième opus de la célèbre
saga Vendredi 13 n'est que rarement cité en exemple
parmi les nombreuses aventures de Jason Voorhees, l'impitoyable tueur
au masque de hockey. Pourtant, malgré un scénario incroyablement
débile (cryogénisé, le bourrin le plus célèbre de l'histoire des
slashers se réveille en 2455 à bord d'un vaisseau spatial!), un
cabotinage totalement inutile de David Cronenberg et des
personnages tous plus cons les uns que les autres, tout
fantasticophile qui se respecte ne peut que repenser à cet épisode
avec un minimum d'affection.
En effet, lors d'une séquence
instantanément culte qui me laissa les yeux emplis de larmes devant
telle trouvaille de mise à mort, le film provoque une hilarité
communicative lorsque l'assassin à la machette décide d'en finir
avec deux jeunes écervelées. Il "fourre" donc les deux
simplettes dans un sac de couchage et se met à les cogner comme un
damné contre un tronc d'arbre! je vous met au défi de ne pas vous
pisser dessus devant ce pur moment de bravoure! Un vrai plaisir
coupable donc mais plaisir quand même!
Tomb Raider, de Simon West, 2001
Stéphane Argentin
Tomb Raider constituant
encore aujourd'hui l'un des meilleurs souvenirs vidéoludiques,
quelle ne fut pas ma joie à la découverte de cette première scène
de retrouver la Lara Craft tout en jolies formes, pleine de punch, de
répondant et armée jusqu'aux dents avec ces fameux Desert Eagle.
D'autant que le bonhomme derrière la caméra, Simon West, nous avait
pondu quelques années plus tôt le fort sympathique car totalement
barré Les Ailes de l'enfer. Hélas, ma joie de découvrir enfin une
adaptation réussie de jeu vidéo sur grand écran fut de courte
durée, la suite du film allant de mal en pis... et je m'abstiendrais
de mentionner la purge que constitue le 2ème opus !!!.
Death Sentence, de James Wan, 2007
Julio Lopez
Le vigilante movie, c'est un genre que je trouve en général bête, méchant et réac. Ca me fait bien marrer ceux qui s'insurgent contre A serbian film, nettement moins dangereux que 90% des histoires de vengeance à deux balles, celles où il faut faire justice soi-même pour arriver à ses fins et trouver la paix intérieure (sic). Death sentence est un bel exemple de navet bourrin ultra-classique où Kevin Bacon joue au justicier dans la ville. Impossible de trouver le moindre intérêt quand tout d'un coup, il y a LA scène qui rappelle que le réalisateur n'est pas si nul - l'homme qui se cache derrière la plus grande saga du cinéma d'horreur (Saw) ne peut pas être non plus un crétin des Alpes. James Wan nous sort de nulle part un plan-séquence de 2min15 dans un parking qui réussit à créer une tension admirable d'efficacité. Une vraie bulle d'air dans l'espace. Après, ça redevient médiocre mais finalement, mieux vaux une bonne grosse merde avec une scène inoubliable qu'un film banal qu'on a déjà oublié quand le générique de fin commence, non ?
Il faut sauver le soldat Ryan, Steven Spielberg, 1998
Sandy Gillet
Scène d’anthologie s’il en est qui a repoussé les limites cinématographiques à tous les niveaux (sensorielles, physiques, psychiques…), bref on vomit avec les GI’s dans le canot de débarquement, on bouffe le sable des plages de Normandie, on devient sourd l’espace d’un instant avec Tom Hanks, on a littéralement la peur au ventre… C’est tout simplement un truc de fou qui pour l’instant n’a jamais été ne serait-ce qu’égalé… Et puis patatras la suite n’est qu’une litanie sans fin sur la morale d’une Amérique bien pensante et bien chiante qui pour se donner bonne conscience va sauver un homme parmi des millions parce qu’il est le dernier survivant d’une fratrie broyée par l’Oncle Sam. On aurait pu se gausser avec Spielberg de ce cynisme étatique mais non au contraire, il l’embrasse avec drapeau étoilée flottant fièrement sur la fin grâce au vent de la miséricorde. Beurk ! Restera donc ce début comme une éjaculation bien trop précoce mais pour le coup ultra jouissive.