Dune : pourquoi l'adaptation de Denis Villeneuve n'est pas parfaite (et c'est tant mieux)

Après un projet d'adaptation raté de Jodorowsky et une adaptation ratée de Lynch, Denis Villeneuve serait parvenu à cracker le code du roman de Frank Herbert. En réalité, ces trois tentatives révèlent à quel point il est riche.

L'adaptation du mastodonte Dune a toujours posé une multitude de problèmes. Trop ambitieux, trop spectaculaire, trop politique, trop long, trop mystique... Autant de raisons qui en feraient selon ses admirateurs un roman quasi inadaptable. Et ils sont loin d'avoir tort.

• À lire aussi : notre critique de Dune 2

Le diptyque de Denis Villeneuve revendique une fidélité peu discutable, surtout en comparaison du film qu'il l'a précédé, lequel a largement divisé les connaisseurs... et fait toujours débat chez les cinéphiles. Pourtant, il esquive sciemment certains sous-textes et prend tout de même quelques libertés. Il est un produit de son époque, comme le blockbuster bancal de Lynch et même la tentative mégalo avortée de Jodorowsky. Car Dune a cela de fascinant que chacune de ses adaptations prélève en lui les thèmes et les esthétiques de son temps. 

 

 

Spice opera

L'une des différences les plus frappantes entre la version abandonnée de Jodorowsky et celle de 2021, c'est le traitement de l'épice. Dans le livre, sa perception change au cours du récit. Au départ abstraite ressource stratégique au coeur de conflits de pouvoir (c'est la substance qui justifie la colonisation de la planète), elle révèle ses véritables propriétés mystiques au fur et à mesure de la conversion de Paul et du lecteur aux us et coutumes des fremens.

Villeneuve, lui, préfère se concentrer sur la première interprétation. Bien entendu, il se doit d'évoquer son importance culturelle pour le peuple fremen, ainsi que ses effets sur ses consommateurs. Mais il la décrit principalement comme une ressource, puis comme une drogue, au sens strict du terme. Si bien d'ailleurs qu'il ne la montre que succinctement, comme un phénomène naturel tout ce qu'il y a de plus normal. Il n'est pas seul.  Certains sont même allés bien plus loin, comme le chimiste du CNRS Fabrice Chemla, qui a publié plusieurs articles pour rationaliser la chose. Et ça peut fonctionner : dans les colones de CNRS news, il fait un parallèle passionnant avec des psychoactifs bien connus.

 

L'épice est le plus souvent représentée sous la forme d'une poudre