Solo : A Star Wars Story - le meilleur, le pire et le moyen du spin-off sur Han Solo
Retour sur Solo : A Star Wars Story.
Après Rogue One : A Star Wars Story, premier spin-off de Star Wars dans l'ère Disney, Solo : A Star Wars Story est donc arrivé, pour revenir sur la jeunesse de Han Solo, héros incontournable de la trilogie originale incarné par Harrison Ford.
Alden Ehrenreich reprend le rôle culte, aux côtés d'Emilia Clarke, Woody Harrelson, Thandie Newton et Paul Bettany, dans un film officiellement réalisé par Ron Howard.
Retour sur le blockbuster - le meilleur, le pire, et le moyen.
ATTENTION SPOILERS (BIEN EVIDEMMENT)
LE MEILLEUR
LE BESTIAIRE
Depuis Le Réveil de la Force, Disney a pris grand soin de travailler un des à côtés préférés des fans de Star Wars, à savoir le bestiaire dit secondaire. Et une fois de plus, la foule de créatures aperçues ici et là convainc autant qu’elle amuse. De la reine de Corellia qui semble sortie d'un monde de Dark Crystal aux nombreuses bestioles autour des tables de poker de l'espace, en passant par du pur numérique comme les tentacules monstrueux autour de Kessel, Solo : A Star Wars Story surprend et enchante.
Il ne s’agit certes que de tapisser les arrières-plans et doper un peu l’immersion, ou offrir une pompe à merchandising comme avec les Porgs des Derniers Jedi, mais à nouveau on se réjouit d’admirer des effets live très réussis, voire indissociables des créations numériques. Les extra-terrestres et créatures qui défilent sous nos yeux constituent peut-être un des points les plus attachants du film.
LA SCÈNE DU TRAIN
LES DÉCORS ET AMBIANCES
Si la prélogie de George Lucas a failli s'étouffer par overdose de fonds verts et machins en affreuses images de synthèse, à l'aspect périmé quatre mois après la sortie des films, la renaissance de Star Wars chez Disney a pris la noble décision de revenir à du solide, des effets plateaux et des créatures en "chair" et en latex - chose que la machine promo met particulièrement en avant depuis Star Wars : Le Réveil de la Force.
Solo : A Star Wars Story ne déroge pas à la règle. Au milieu de blockbsusters vilains et témoins à très court terme de leur époque, la faute à une utilisation trop systématique et grossière des incrustations, le spin-off sur Han Solo a choisi le camp du décor en dur, le plus souvent. Du sable, de la roche, de la ferraille : le film vend moins du pur rêve et fantasme, qu'un monde spatial concret et terre-à-terre. C'est sans nul doute l'un des aspects les plus malins de la production, qui installe ainsi ses héros dans un décor crédible et tangible, et maîtrise le numérique avec savoir-faire.
La direction artistique meuble par ailleurs ce décor avec de nombreux beaux éléments, qui composent un univers de métal, de ferraille, de bois et autres matières qui donnent une réelle dimension à l'aventure. Et si la photographie de Bradford Young n'est pas vraiment satisfaisante (voir plus bas), Solo : A Star Wars Story bénéficie d'une jolie direction artistique. L'ambiance se révèle souvent charmante, des scènes de poker au cockpit du Faucon Millenium. Et lorsque le film sort l'artillerie lourde des effets spéciaux, comme lors de la fuite sensationnelle de Kessel, le résultat est assez excitant.
De l'utilisation enthousiasmante des non-fonds verts
LE MOYEN
L'INTRIGUE MOLLE
Solo : A Star Wars Story se résume finalement à une succession de braquages entre infiltration et explosion, où un héros court après de l'argent pour s'acheter un vaisseau, lequel devait lui permettre de venir sauver une fille qu'il retrouve par hasard au premier tiers du film. En arrière-plan, tout le monde court après un objectif désespérément concret (de l'argent, du carburant), et le film avance étape par étape vers cette destination claire.
Certes, il n'y a rien de profondément honteux, et l'intention de créer une sorte de western et film de casse en groupe semble évidente, et amusante. Mais le film laisse finalement la sensation d'une petite aventure, qui manque cruellement d'ampleur. Les enjeux restent forcément moindres comparés à Rogue One : A Star Wars Story, dont la mission (un braquage, là encore) était chargée d'une grande émotion liée à la trilogie originale, et même si le spin-off sur Han Solo n'a jamais eu l'intention d'être aussi sombre et sérieux, il lui manque une certaine envergure dramatique.
Solo : A Star Wars Story tentera bien dans sa toute dernière ligne droite de s'ouvrir à des enjeux plus grands et embrasser la mythologie, avec le retour de Maul et le basculement de Qi'ra, ainsi qu'une mention de Tatooine. Mais le film reste globalement très refermé sur lui-même. Ce qui l'empêche de réellement décoller vers quelque chose de fantastique, trépidant et excitant.
C'est l'histoire d'un type et son Chewie
UN BEAU CASTING DE SECONDS RÔLES (SOUS-EXPLOITÉS)
Thandie Newton : l'atout bêtement sacrifié du film
LA MUSIQUE
Depuis Star Wars : Le Réveil de la Force, et malgré la présence largement médiatisée de John Williams, Disney aura eu le plus grand mal à offrir à sa saga spatiale un enrobage musical à la hauteur de sa gloire passée. Coincé entre recyclage et redite, Star Wars n’a pas franchement démérité, mais n’est jamais parvenu à installer une singularité symphonique quelconque depuis son retour sur grand écran.
À cet égard, il faut saluer dans Solo : A Star Wars Story le travail du compositeur John Powell, qui est peut-être le plus syncrétique, entraînant et abouti entendu récemment dans le cadre de la franchise. Capable de réciter ses classiques dans Reminiscence Therapy ou d’emballer de pures thèmes aventureux (Meet Han et Break Out) qui louvoient entre grande odyssée, action coolos et envolées orchestrales, le musicien impressionne souvent. Mais rendons à César ce qui est à César et n’oublions pas non plus le renversant The Adventures of Han de John Williams.
ALDEN EHRENREICH
LANDO ET L3
On le sait, ce n’est plus une surprise : les futurs (et anciens) réalisateurs de Star Wars doivent respecter un cahier des charges imposé par Disney, comme pour la plupart des blockbusters. Un peu d’amour, des vaisseaux spatiaux, quelques éléments qui rappellent la saga originelle, et surtout de l’humour avec des droïdes. Sauf qu’un jour, il faudra se mettre dans le crâne que le binôme R2D2/CP3PO n’aura jamais d’équivalent.
Et pourtant, Ron Howard y a cru. Il a tenté, et il a plutôt échoué avec la pseudo-relation entre Lando (Donald Glover) et L3. Plus gênant et bancal qu'autre chose, le « couple » ne nous fait jamais esquisser ne serait-ce qu’un début de sourire, et le scénario traite la chose du bout des doigts. Bien que le personnage de L3 apporte une touche de fraîcheur dans sa manière de combattre l’oppression de ses congénères, avec un aspect jusque là inédit dans les robots de la saga, elle est vite ramenée à des plaisanteries sur son sale caractère et ses capacités sexuelles ("Ça marche", assure t-elle à Qi'ra).
La scène où L3 se baisse pour couper la grille en demandant à ce que personne ne la regarde illustre bien la manière dont le film hésite sur le traitement du robot, entre sous-texte politique et humour bas de gamme, tandis que son sort ultime (être téléchargée dans le Faucon Millenium, comme un objet assouvi par l'Homme) confirme le trouble. Même les larmes dramatiques de Lando sur le champ de bataille de Kessel semblent artificielles.
DARK MAUL
Personnage parti trop tôt aux goûts des fans dans La Menace fantôme, Dark Maul revient finalement grâce à son frère dans la série animée Star Wars : The Clone Wars et Star Wars : Rebels, en quête de vengeance. On vous passera tous les détails du dessin-animé pour passer directement à l’étape Solo.
Donc, comme un mauvais méchant de série B qui apparaît durant les dernières secondes pour faire miroiter la suite et obtenir un regain d’intérêt pour la série, Dark Maul (encore incarné par Ray Park) surgit de l’ombre (ou de l’hologramme), l’air triomphant et vengeur. On voit donc cette vieille trogne de Sith un peu diminué et changé à la suite de son combat contre Obi-Wan dans La Menace fantôme, avec des prothèses aux jambes. Il dégaîne son fameux sabre laser, unique, pour aucune autre raison que celle de la mise en scène à l'adresse du spectateur.
Si son retour permet à l'histoire de se replacer dans la mythologie, recoller quelques morceaux et réparer ce que beaucoup considèrent comme une erreur de George Lucas vu l'allure très réussie du personnage, cette apparition pose surtout une plâtrée de questions et de problèmes. Les aventures en marge des films officiels (Star Wars: Rebels et autres The Clone Wars) sont-elles obligatoires pour celui qui veut suivre l'histoire ? Seront-elles remixées et incorporées aux films, quitte à répéter ce qu'une partie des fans connaît et maîtrise ? Que se passera t-il pour Maul et toutes ces pistes, si une suite de Solo : A Star Wars Story devait être remise en question vu le box-office qui s'annonce très tiède ?
Ray Park dans Star Wars Épisode I : La Menace fantôme
LE PIRE
EMILIA CLARKE
Elle a beau avoir marqué les esprits dans Game of Thrones avec un rôle très populaire, elle a laissé supposer dans Terminator : Genisys ou la bluette Avant toi qu'elle n'avait pas un jeu d'une grande ampleur. Emilia Clarke a bien du mal à donner vie à Qi'ra, personnage féminin mystérieux, ambigü et central, censé passer de la femme-enfant à la femme fatale vénéneuse. L'actrice utilise bien sûr son attirail avec joli sourire d'un côté et sourcils froncés de l'autre, mais difficile de voir dans sa prestation une proposition à la hauteur d'un personnage si complexe sur le papier. Une complexité d'ailleurs si peu traitée à l'écran (la faute à un scénario qui survole de loin le sujet), que Qi'ra avait besoin d'une interprète qui amène d'emblée une profondeur et un trouble.
Un rapide combat hors-champ, caché derrière une jolie cape rouge et une porte, puis un duel entre un sabre et des lames rougeoyantes, ne viendront que nourrir le sentiment confus autour de Qi'ra, dont la dimension noire reste désespérément maigre à l'écran. Dans une telle superproduction, les acteurs ont peu de place pour exister et faire exister leurs personnages. Emilia Clarke, de toute évidence, a été au mieux très mal dirigée, au pire incapable d'insufler toute la force nécessaire au personnage.
Joli costume, joli coiffure, joli verre d'eau
L'ÉQUIPE DE BECKETT
Rarement aura-t-on vu un film (à fortiori un Star Wars) ignorer à ce point comment gérer ses personnages. En témoigne l’introduction de l’équipe de Beckett, mélange de renégats et de pieds nickelés, plutôt plaisants et forts sur le papier. Sauf que le film s’attarde inutilement sur leurs personnalités et interactions, puisqu’il s’apprête à tous les zigouiller comme un malpropre.
On sent évidemment la volonté grossière d’émuler Rogue One : A Star Wars Story et de surprendre un peu le spectateur, mais le procédé est si évident, si mal amené, si dénué d’impact sur le personnage de Beckett, et finalement si inutile au vu de l’arc narratif global, qu’on se demande encore pourquoi le film a alourdi son rythme déjà pataud avec ces personnages secondaires écrits à la hache et dégagés de l’intrigue à la va-comme-je-te-pousse.
LA PHOTO
LES "TWISTS" DE FIN
S’il y a bien une dimension de Solo : A Star Wars Story dont on attendait beaucoup, et qui semblait être un objectif atteignable pour un film porté par un studio aussi puissant que Disney, c’était la volonté affichée de marier film de casse et western. Deux genres ultra-balisés, classiques, normés, que le public connaît et apprécie, qui requièrent finalement peut-être plus de savoir-faire old school que de folle originalité.
De ce point de vue, le choix de Ron Howard pour remplacer Lord et Miller pouvait s’entendre. Hélas, le metteur en scène fait au cours de la dernière demi-heure preuve de son incapacité à s’emparer du matériau entre ses mains.
Je te trahis (pas) (enfin si) (enfin non) (MAIS SI, ET VOILA)
Le script était-il trop saturé de micro-twists, rempli d’allers-retours thématiques, pour que ce cinéaste à la signature extrêmement classique trouve son rythme ? A-t-il voulu dynamiser le dernier acte ? Impossible de le savoir, mais le résultat est un enchaînement de saynètes absolument dépourvues de rythme, et dont les grotesques retournements successifs apparaissent soit grossièrement mécaniques, soit artificiellement surprenants.
Pire encore : ce Solo qui a l’ambition d’être un des divertissements majeurs de l’été accuse un retard thématique d’un bon demi-siècle. Exemple typique : la « trahison » de Beckett, annoncée 12 trillions de fois, selon des procédés qui sentent le vieux linge de sport. Jouer le coup du « ne fais confiance à personne gamin… », pourquoi pas ; mais convoquer un procédé aussi ancien et connu du public réclame de l’enrober de foi et d’intensité dramatique, pas de le faire déclamer à un Woody Harrelson manifestement diverti par son postiche en poil de yack, sous un soleil qui évoque plus le ciel de novembre à Rungis qu’une épopée spatiale. Qi'Ra ne s'en sort guère mieux avec ses multiples petits retournements, et notamment son faux moment où elle s'interpose entre Han et Dryden Vos, dans une manoeuvre purement artificielle.
Dryden Vos : joli nom, jolies cicatrices, jolie cape, et voilà
Très mal parti au box-office, condamné à certainement être le plus petit succès de Star Wars période Disney, Solo : A Star Wars Story de Ron Howard (et Chris Miller et Phil Lord) va sans nul doute payer les pots cassés de Star Wars : Les Derniers Jedi, épisode de la discorde qui continue à hanter les cauchemars de certains spectateurs.
Mais en plus d'être un pur produit de l'industrie Disney, sûrement sorti trop tôt (cinq mois après l'Episode VIII) et sur une idée probablement fort dispensable, Solo : A Star Wars Story porte en lui de nombreux problèmes, évidents à l'écran, qui l'empêchent de totalement épouser ses ambitions de grand spectacle. D'où un accueil finalement très tiède, et un résultat si peu enthousiasmant.
08/06/2018 à 20:04
Pour ma part c'est une très bonne surprise, un bon film d'aventures sans temps mort avec d'excellentes scènes d'action.
02/06/2018 à 20:21
Malgré toutes les critiques, j'espère que ce film sera un succès car il le mérite largement, et qu'il y aura une suite. Super film, je le recommande.
30/05/2018 à 15:34
Je suis d’accord, mais je trouve quand même Solo supérieur à SW 8 qui est une vraie daube pour moi, sur tous les plans malgré son résultat au box office.
Même si SW 9 est bon (on verra, mais j’en doute, car il ne peut construire sur rien), ses résultats au box office seront hélas mauvais, car il paiera pour SW 8. C’est juste mon avis...
29/05/2018 à 11:14
Prochain point sur Solo : la venue d'Emilia Clarke dans les bureaux d'Ecranlarge pour célébrer le film et une interview exclusive sur "comment ils sont nuls les metteurs en scène". Merci de lui réserver un accueil chaleureux :)
28/05/2018 à 19:24
@F4RR4LL
Justice League a toujours été conçu comme leurs Avengers, avec une construction différente (pas de films solo pour tous avant), mais clairement la même ambition financière (y'avait même deux parties à la base, donc des projets encore plus grands). D'où la rencontre au sommet BvS qui tease bien grossièrement les autres héros dans une scène. D'où les annonces sur Aquaman lancé dans le même mouvement, et le projet de Flash (qui patine).
L'Episode IX : perso je me prononce pas, tout le monde a la tête dedans, entre les prédictions de fin du monde des uns et les procès des autres contre Disney. Les deuxième épisodes de trilogie ont toujours à peu près moins marché dans SW, et parfois le 3ème est bien remonté. Et c'est dans un an et demi : ça fera une "vraie" pause, ce que Solo n'a pas eu depuis le VIII.
28/05/2018 à 19:03
Dès le début Justice League n'avait pas la vocation à être un Avengers, l'ambition était moindre, surtout quand la date de sortie était calée a novembre.
L'épisode IX risque de se prendre un petit contre coup, je le vois pas refaire le score du VII (vraiment pas mais alors pas du tout, heureusement pour lui qu'Avatar est repoussé). Si l'épisode IX ne dépasse pas les 1.5M ça sera la grosse gamelle, malgré le rêve qu'est ce score pour n'importe quel studio. Et je doute qu'il atteigne ce pallier au BO.
28/05/2018 à 18:42
@F4RR4LL
Sauf que Solo n'a pas la même place qu'un Justice League, grosse réunion de super-héros censé être le paroxysme qui pète tout. La comparaison aurait du sens avec un Episode IX, censé être l'apothéose, le rendez-vous pris et incontournable. Là, Solo, c'est un Shazam ou un Aquaman plutôt.
Enfin bref. A voir le score final, certains sites spécialisés Box-office tablent sur 700-800.
28/05/2018 à 18:38
Quitte à aller dans le burlesque autant conserver l'humour 21 jump street insufflé par Lord et Miller. Faut assumer jusqu'au bout, à défaut on finit avec un film frankenstein comme celui-ci. Finalement, Disney l'a eu son épisode "Justice League". A chacun son ratage intersidéral.
Solo devrait finir sous les 600M.