Festival des Antipodes 2010

Louisa Amara | 19 octobre 2010
Louisa Amara | 19 octobre 2010

Le 12e festival des antipodes consacré au cinéma australien et néo-zélandais s'est installé pour 7 jours à Saint-Tropez. Le jury présidé par Miranda Otto est composé de Tina Arena (chanteuse), Philippe Harel (acteur et réalisateur), Sophie Guillemin (actrice), Colette Dinnigan (styliste) et Gérard Camy (historien du cinéma et critique).

Gratuit et ouvert au public, le festival accueille des spectateurs toujours plus nombreux curieux de découvrir des films venus du pays où il existe bien plus que des kangourous et des kiwis.

 


 

Départ pour Saint-Tropez retardé de 3 heures à cause des grèves de la SNCF. Je reste calme en voyant passer le défilé de la CGT. Prenons notre mal en patience, car le beau temps et une sélection intéressante nous attendent dans quelques heures.

Arrivée à la gare, puis 1h de route, avec des virages (non je n'ai pas vomi), je rencontre mes compagnons de voyage, d'autres journalistes aussi chanceux que moi d'avoir été invités à ce festival. Après quelques minutes pour découvrir notre somptueux hôtel, on attaque par la première projection : Beautiful Kate.

Film australien en compétition, avec la jeune Sophie Lowe que je rencontrerai demain. Beautiful Kate est l'adaptation d'un roman, comptant les secrets d'une famille isolée dans une station d'élevage de l'arrière pays australien. Ned, 40 ans, romancier à succès, revient au chevet de son père mourant. Il se souvient alors de son adolescence troublée par la mort de sa sœur jumelle et de son frère.

 

 

On attaque donc très fort avec ce film traitant des rapports très ambigus entre frères et sœurs. Le public semble chamboulé par cette histoire d'inceste. Ils sont fous ces australiens ? Touchant, le film reste pour le moment intéressant et sensible mais aura-t-il convaincu le jury ?

Petite pause pour découvrir la fameuse place des lices, le port de Saint Tropez, et accessoirement becqueter un peu avant le prochain film : Balibo.

Ce dernier est co-produit par Anthony LaPaglia, président l'an dernier du festival, qui joue également dans le film. Inspiré de faits réels, Balibo est un village du Timor oriental où disparurent en 1975 cinq journalistes australiens venus faire un reportage sur l'invasion du Timor par les indonésiens.

Thriller politique, Balibo permet de révéler au plus grand nombre des faits cachés pendant plus de 30 ans. Certains reprocheront au film ses scènes choc et ses effets « tire-larmes ». Mais on ne peut que saluer l'initiative de LaPaglia, qui réussit à mettre en lumière les actes criminels indonésiens, ainsi que l'inaction de l'Australie toute proche. On pense au Rwanda. L'histoire se répète inlassablement. Quant à la complicité des américains pour aider les indonésiens, par l'intermédiaire de Kissinger à l'époque, on en reste coi. Kissinger mériterait un biopic de 4 heures à lui tout seul tant ses actions positives ou négatives ont eu un impact sur le monde politique.

 

 

Après le film, pour nous remettre de nos émotions, le jury, la presse et l'équipe du festival sont invités au Kube pour un buffet. Un lieu très classe pour clore une journée intense.

Plusieurs films au choix au programme, mais on commence de bon matin par les interviews. Rendez-vous avec Miranda Otto, Sophie Lowe et Cameron Daddo.

Après ces belles rencontres, on enchaîne avec la projection de Boy. Joli film néo-zélandais très populaire qui a déjà raflé plusieurs prix dans d'autres festivals. Boy est le surnom de son héros, un jeune maori de 11 ans, fan de Michael Jackson. Plein d'imagination, Boy compense l'absence de son père Alamein en le rêvant en héros samouraï. Vivant avec sa grand-mère, son petit frère, et une armée de cousins en couche-culottes (tous adorables), il va vite découvrir que son père n'est pas un héros. Boy restera le coup de cœur d'une grande partie du public et de la presse tant il nous a fait rire et nous a ému. Personne n'oubliera la chorégraphie mi-thriller mi-haka imaginé par son réalisateur et acteur Taika Waititi ! On espère donc que son formidable jeune acteur, James Rolleston, aura les faveurs du jury.

 

 

Petite pause et retour au cinéma de la Renaissance pour la présentation hors compétition de Passengers, en présence de Cameron Daddo, du réalisateur Michael Bond, et du directeur de la photo Laszlo Baranyai... Mais la salle est pleine.

 

 

 

Tourné en DV, le film est une sorte de road-movie citadin. Un couple se prépare à une soirée, et s'engouffre dans les embouteillages du vendredi soir. La discussion commence, les révélations ne tardent pas à arriver. On découvre les doutes, les suspicions d'un couple qui vit ensemble depuis 8 ans, et dont les aspirations semblent changer. La tension monte à mesure que le trafic s'intensifie. Un film étonnant dans la forme et dans le fond. Une performance d'acteurs car le film se résume à un huis clos dans une voiture. Existe-t-il une situation plus claustro ?

 


 

Au jeu des questions réponses, le public participe pleinement, notamment les australiens qui savent à quel point les trajets en voiture peuvent être longs aux USA ou en Australie, et combien ils sont générateurs de tension. Je ne peux m'empêcher de demander à Cameron Daddo si le joli fessier que l'on voit dans la première scène du film (une scène d'amour) est bien le sien et pas celui d'un body double. Rires dans la salle et petite pirouette de l'intéressé : « comme si on avait les moyens de s'offrir une doublure ! ».

Cela deviendra une private joke durant tout le festival à chaque fois qu'on se recroisera, pour le plus grand plaisir de mes collègues et moi-même.

Mes confrères iront eux à la projection suivante, Bran nue dae, comédie musicale néo-zélandaise délirante en compétition. Certains ont même osé la comparaison avec Michel Gondry. J'ai raté ça mais je ne regrette pas d'avoir choisi Passengers. Car l'intérêt d'un festival n'est pas que dans sa compétition, les films présentés en dehors sont souvent de petites perles.

 

Buffet le soir en compagnie du jury et des équipes, je commence à trouver normal de croiser ces acteurs et actrices au détour d'une brochette, en toute simplicité. Et oui, on n'est pas à Cannes, pas de bracelet de couleur, pas de discrimination, Dieu qu'on est bien à Saint Tropez !

 

Dernier jour et pas des moindres : 3 films au programme dont  1 en compétition, rencontre avec l'ambassadeur d'Australie, le déjeuner de délibération, la remise des prix, le dîner de clôture, ouf !

On commence par The Waiting city, film interprété et coproduit par Radha Mitchell, actrice qui semble avoir été touchée par cette histoire d'autraliens venus en Inde pour adopter une petite fille et qui vont se perdre dans les limbes et les lenteurs du système indien.

 

 

A la fois émouvant et dépaysant, le film nous fait découvrir l'Inde mystique, traditionnaliste et parfois cruelle, à travers le destin de ce couple ordinaire venu chercher le bonheur d'être enfin parents. Entre désillusions et belles rencontres, ils vont apprendre à mieux se connaître, et à ouvrir leur esprit. Le film a conquis le public tropézien et certains membres du jury, semble-t-il. Les débats vont être animés.

Après le cocktail avec David Ritchie, l'ambassadeur d'Australie, où il y avait du champagne, mais pas de ferrero. On déjeune rapidement, pour filer à la projection de Birthday. Le thème du film attire les curieux, moi la première : une prostituée travaillant dans une maison close se remet en question le jour de son anniversaire.

 

 


 

L'actrice et co-productrice Natalie Eleftheriadis et le réalisateur,James Harkness sont dans la salle. A deux rangs derrière nous, nous n'osons donc pas sortir de la salle. Pourtant l'envie s'en est fait sentir plusieurs fois. Sans être obsédé, la chair est bien triste et absente de ce film, un comble ! On y parle plus de la Bible que dans La Petite maison dans la prairie. On peut concevoir qu'une prostituée ayant pour client régulier un prêtre, ait des conversations animées sur tel ou tel verset. Mais de là à occuper la moitié du film... Chacun ses goûts, apparemment le journaliste de Brazil a apprécié.

 

Un peu plus tard, on découvrira en avant-première La veine du vigneron,  réalisé par Niki Caro, avec Jérémie Renier et Gaspar Ulliel. L'occasion de confirmer que l'on voit parfois en festival des films complètement barrés. Donc une histoire de vigneron du 19e siècle qui rencontre un ange déchu « so gay » n'a rien de très étonnant en fait.

 

Et le palmarès tant attendu, lors de la cérémonie présentée par Alexis Trégarot, en grande forme :

 

Le grand prix : Beautiful Kate de Rachel Ward. L'actrice Sophie Lowe qui joue le rôle de Kate a accepté le prix pour la réalisatrice qui ne pouvait être présente.

Meilleure actrice : Radha Mitchell pour son rôle dans The Waiting City de Claire McCarthy,

Meilleur acteur : Anthony LaPaglia pour son rôle dans Balibo de Robert Connolly.

Le prix du public, sponsorisé par Cinefestoz, a été attribué au film The Waiting City.

 

On regrette un peu que Boy n'ait pas eu de récompense, mais on saura lui créer le buzz qu'il mérite. Merci à tous et à l'année prochaine !

 

 

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