Killers of the Flower Moon : critique d'un immense chef d'œuvre de Martin Scorsese

Alexandre Janowiak | 18 octobre 2023 - MAJ : 31/10/2023 12:07
Alexandre Janowiak | 18 octobre 2023 - MAJ : 31/10/2023 12:07

Killers of the Flower Moon est l'adaptation du livre éponyme de David Grann revenant sur la série de meurtres dont a été victime la communauté Osage dans les années 1920 en Oklahoma. Martin Scorsese y réunit pour la première fois derrière sa caméra ses deux acteurs fétiches, Robert De Niro et Leonardo DiCaprio, autour de l'impressionnante Lily Gladstone et du précieux Jesse Plemons. Et à plus de 80 ans, Martin Scorsese livre une sorte de magnum opus jonglant entre le polar, le western romantique, la tragédie horrifique, la fresque historique et le devoir de mémoire.

il était une fois... scorsese

Dès la première apparition de Leonardo DiCaprio, Killers of the Flower Moon semble bel et bien s'ancrer dans le genre du western qui a tant bercé l'enfance de Martin Scorsese. Alors que Ernest Burkhart débarque par le train dans la ville de Fairfax, son arrivée à la gare remémore immédiatement celle de Claudia Cardinale dans Il était une fois dans l'Ouest de Sergio Leone. La quasi-similitude de plan est criante et le prolongement de son accueil également, avec cette virée en voiture au milieu des puits de pétrole rappelant ce fameux voyage en calèche au coeur de Monument Valley.

Ce n'est pas anodin puisque Martin Scorsese a toujours rêvé de faire un western. Voir le cinéaste se démener pour reconstituer avec une précision redoutable l'époque dans laquelle il va nous plonger, à travers les décors somptueux de Jack Fisk (habitué des films d'époque entre Le Nouveau monde, There Will Be Blood ou encore The Revenant) et les costumes resplendissants de l'éminente Jacqueline West (Le Nouveau monde et The Revenant aussi d'ailleurs), promet une entrée fracassante dans le genre. Toutefois, cela cache les vrais desseins de Martin Scorsese.

 

 

Le réalisateur n'a en effet aucune intention de reproduire ce qui a déjà été fait en mieux avant lui (Sergio Leone et surtout John Ford en tête) et préfère subvertir les attentes en s'affranchissant des codes du western. Loin des courses-poursuites rythmées, des fusillades en fanfare ou des duels tonitruants, Killers of the Flower Moon se refuse à simplement raconter l'enquête menée dans les années 1920 pour résoudre cette succession de crimes visant le peuple Osage baptisée « règne de la terreur ».

Ni véritable western, ni polar classique, Killers of the Flower Moon est finalement une “grande tragédie américaine” comme le décrit elle-même Lily Gladstone où les “autochtones” ne sont pas déshumanisés, mais de véritables humains qui racontent leur propre histoire. À une époque charnière où tout le monde réécrit l’Histoire à sa guise, en particulier ceux qui détiennent le pouvoir, le message est puissant. D'autant plus qu'avec son budget de 200 millions de dollars, Killers of the Flower Moon met en lumière ces groupes marginalisés et les sort des stéréotypes dont ils ont été victimes historiquement (et cinématographiquement) parlant pour les laisser s’exprimer à une échelle complètement démesurée.

 

Killers of the Flower Moon : photoAprès Monument Valley et avant Silicon Valley, voici Petroleum Valley

 

how bloody was this valley

De facto, même si le livre éponyme de David Grann est absolument passionnant, le film de Martin Scorsese s'en détache très largement. Ainsi, son enquête criminelle est reléguée à quelques scènes mineures du dernier tiers et Killers of the Flower Moon transforme son dit western en quête de vérité sur un épisode oublié de l'HistoireMartin Scorsese ne veut pas jouer la carte du suspense sur l'identité des meurtriers en suivant l'enquête de l'agent du Bureau, Tom White (Jesse Plemons très bien), il veut raconter pourquoi les personnages ont commis ces meurtres et pourquoi il faut l’exhumer au grand jour.

Étrangement à l'opposé du page turner de David Grann, le film repose d'ailleurs essentiellement sur une dynamique à la lenteur hypnotisante. Un choix hallucinant sur 3h26 qui devrait faire décrocher les moins persévérants, mais qui dévoile toute l'ingéniosité de Martin Scorsese, de son co-scénariste Eric Roth, de son regretté compositeur Robbie Robertson (dont la bande-originale lancinante vient porter ce rythme inattendu) et de sa fidèle monteuse Thelma Schoonmaker : le film agit alors comme un lent poison, venant nous transir pour mieux injecter sa puissance sourde et nous en faire prendre conscience.

 

Killers of the Flower Moon : Photo Leonardo DiCaprioDiCaprio tentant de percer le mystère du livre de David Grann

 

Une sorte d'engourdissement faisant carrément corps avec le personnage de Mollie Burkhart, la véritable âme du film incarnée par l'impressionnante et bouleversante Lily Gladstone. Pendant qu'elle subit un traitement vicieux contre son diabète, voyant sa famille s’écrouler un à un, elle se meurt à petit feu sans rien pouvoir faire. Et c’est seulement à partir du moment où elle commencera à se relever que le film va regagner une sorte d’énergie, de lumière.

En s'intéressant avant tout à Mollie Kyle et Ernest Burkhart, le film capture ainsi toute la violence et l’ambiguïté de ces meurtres à l’intérieur de l’intimité d’un couple et d’une famille à cheval entre deux civilisations. Le moyen de raconter cette Histoire à travers la traîtrise d’Ernest envers sa propre famille pour l’argent, le pouvoir... d’un côté et, de l’autre, de se focaliser sur la déliquescence de Mollie à cause de sa maladie (et pas uniquement) pour raconter l’Histoire des Osage du point de vue de ceux qui l’ont vécue. Soit probablement une des idées les plus malignes pour explorer la disparition d’une culture, voire son invisibilisation au fil des décennies, avec une incroyable ambition.

 

Killers of the Flower Moon : Photo Lily GladstoneLily Gladstone, l'une des grandes émotions du film

 

les loups de l'Oklahoma

Killers of the Flower Moon débute en effet sur l'inhumation d'un calumet Osage dans un signe de paix avec la communauté blanche américaine. C’est littéralement la mise en terre d'un héritage, d’une époque, d’une façon de vivre, de croire... acceptée de bonne volonté, mais qui va venir signer leur propre arrêt de mort, laissant peu à peu les Blancs prendre leur pouvoir, leur richesse et tout ce qu'ils avaient réussi à créer jusqu’ici. Pendant 3h26, Martin Scorsese observe l'extinction des Osage, ce peuple subissant l'hubris de la communauté blanche despote et surtout un capitalisme avide d'appropriations et de domination.

Un capitalisme infernal qui repose beaucoup sur la prestation magistrale de Robert De NiroDans la peau de la William Hale, faux mécène de la communauté, vrai architecte de la tragédie et surnommé “roi des collines osages”, l'acteur fétiche de Martin Scorsese (les deux ont désormais tourné 10 films ensemble) offre une performance sinistre et cynique. Difficile d'imaginer un acteur jongler plus habilement que lui entre cet homme généreux persuadé d’être un ami des Osages et cet assassin sans scrupule qu’il dissimule, lui qui se croit prophète ayant droit de vie ou de mort sur une civilisation.

 

Killers of the Flower Moon : Photo Robert De NiroRobert De Niro dans un de ses rôles plus crasseux

 

L’observation de Martin Scorsese provoque en tout cas un parallèle troublant avec notre époque, les tenants et aboutissants du récit ayant inévitablement un retentissement contemporain déconcertant sur le fonctionnement de notre système économique, politique et social. Mais plus encore, Killers of the Flower Moon semble vouloir dénoncer la spoliation culturelle et cinématographique du monde actuel.

S'il avait renoué avec son style caractéristique dans Le loup de Wall Street (après des incartades moins scorsesiennes comme Hugo Cabret et Shutter Island), Martin Scorsese semble ne plus se soucier de ce que le public attend réellement de son cinéma voire se soustrait à tout ce qu’Hollywood recommande pour faire des succès commerciaux. Silence plongeait les spectateurs dans une longue réflexion austère sur la Foi et la religion quand The Irishman désacralisait le monde des gangsters dans une longue marche funèbre sur le temps qui passe de 3h29.

Avec Killers of the Flower Moon qui dure donc 3h26, Martin Scorsese continue à affirmer sa conception du cinéma pour venir en livrer une œuvre d’une maîtrise absolue.

 

 

 

cinema's savior

En mai 2023, à quelques jours de dévoiler le film au Festival de Cannes, Martin Scorsese avait expliqué à Deadline "commencer seulement à voir la possibilité de ce que pourrait être le cinéma", mais qu'il était trop tard, citant l'immense Akira Kurosawa. Devant la complétude de Killers of the Flower Moon, Martin Scorsese atteint en effet une virtuosité sans pareil en souverain inconditionnel de sa mise en scène, comme s’il avait trouvé les clés suprêmes de son art, qu'il infuse continuellement dans Killers of the Flower Moon.

Sous-texte plus ou moins frontal, son rapport anxieux au cinéma a toujours été au coeur de sa filmographie, mais se ressent de plus en plus depuis Silence (où l'affrontement de deux personnages sur la Foi faisait écho au 7e art) et The Irishman dont le portrait de Frank Sheeran faisant la rétrospective de sa vie de mafieux reflétait un Martin Scorsese faisant le bilan de sa vie de cinéaste. Alors quand Martin Scorsese filme l'extinction commanditée des Osage dans Killers of the Flower Moon, il semble conter aussi l'extinction d'une forme de cinéma, celui qu’il veut préserver à tout prix des dérives hollywoodiennes.

 

Killers of the Flower Moon : Photo Leonardo DiCaprio, Lily GladstoneRegarder le cinéma s'effondrer au loin

 

Car oui, le cinéma a cédé aux sirènes de l'argent, les grands studios préférant compiler les œuvres sans saveur plutôt que de prendre le risque de se planter. Avec Killers of the Flower Moon, reposant sur une narration à l'opposé des préférences du grand public, Martin Scorsese prend tous les risques. Il déploie une fresque criminelle épique, violente, mais surtout exténuante, amère et funèbre sur la cupidité et la cruauté humaine. Il semble carrément exhorter les spectateurs à explorer de nouveaux territoires, à rallumer la flamme sur le point de s'éteindre, notamment à travers le personnage de Leonardo DiCaprio.

Si DiCaprio est dément, lui qu'on n'avait jamais vraiment vu dans un rôle à la fois ignoble et grotesque, jonglant entre une réelle culpabilité, un sincère sentiment d'innocence et une étrange naïveté, son Ernest Burkhart est un peu une sorte d’allégorie du public. Même si Ernest est amoureux de Mollie, il participe à la conspiration contre elle, sans qu’on ne sache vraiment s’il en a totalement conscience. Dans la continuité de cette réflexion, comme Ernest, le spectateur se retrouve, lui aussi sans s'en rendre compte, complice de la disparition programmée du cinéma, en se laissant noyer, acculer, berner par un système opprimant qui l’oblige progressivement à se contenter des films qui “vont marcher”.

 

Killers of the Flower Moon : Photo Leonardo DiCaprio, Lily GladstoneL'espoir de l'amour éternel envers et contre tous

 

Mais il n'est jamais trop tard pour cesser d'accepter un ordinaire fabriqué de toute pièce et dont on ne maitrise (plus) rien. Au contraire, il est toujours possible de se rebeller pour Martin Scorsese et de reprendre les rênes pour sauver ce qu'il reste encore de notre monde, de nos acquis et, ici, de l'idée de cinéma. D’où le geste absolument miraculeux des derniers instants du film où Martin Scorsese rappelle qu’en théorie, un modeste tambour, une simple voix et un peu d'ingéniosité peuvent suffire à raconter les plus grandes histoires, à émouvoir, surprendre, interroger, stimuler... pour l'éternité. This is cinema.

 

Killers of the Flower Moon : Affiche française officielle

Résumé

Avec Killers of the Flower Moon, Martin Scorsese démultiplie la puissance du cinéma et confirme un peu plus la préciosité du sien. Un chef d'œuvre.

Autre avis Antoine Desrues
D'une richesse et d'une densité folle, Killers of the Flower Moon semble condenser toutes les obsessions du cinéma de Scorsese. Le maître y diagnostique les stigmates de son pays, pour évoquer en creux la puissance d'un storytelling écrit par les vainqueurs de l'histoire. En 3h26, c'est presque trop court !
Autre avis Geoffrey Crété
Jusqu'à la toute fin, Killers of the Flower Moon raconte l'importance des récits, pour détruire ou reconstruire le monde. C'est particulièrement beau et tragique du côté de Lily Gladstone et Leonardo DiCaprio, mais Scorsese tire un peu sur la corde avec 3h26 au compteur, et quelques ficelles trop familières de son cinéma.
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commentaires
Plop
28/11/2023 à 20:20

Scenario nul, on n'y crois pas une seconde! Lumières nulles, photos nullle, zéro même pas une série B tellement y a des plans qui durent 30 sec pour rien Triste a mourir.......

Antoine Gn
02/11/2023 à 22:58

J'ai trouvé cela long, Dicaprio surjoué et Robert De Niro grimaçant. Un film sans âme qui se perd et qui ne capte pas son public.

Dr.ik
02/11/2023 à 00:12

Sacrée claque ce film. Je ne sais vraiment pas quoi en penser. Je comprends ceux qui glorifient ce film en criant au chef d oeuvre. Scorcese est arrivé à me mettre dans le film, et les très longues 3h26 du film sont étrangement passées très vite alors que tout se passe très lentement, sans le moindre mystère. J ai pensé que ça allait pêter vers la fin, mais non, aucune tension, ou oui mais tellement maintenue, enfouie... Mais je reste subjugué par le lente évolution des personnages. Au début, pendant une petite heure, je me suis pris d affection pour l oncle et son neveux qui ont l air tellement soucieux de ce peuple et tellement ouverts à leurs usse et coutumes... et je trouve d ailleurs que le bande annonce nous montre tout de suite quels genre de c... ils sont. J aurais aimé suivre le film d un regard plus neutre.

Flo
31/10/2023 à 13:42

https://www.premiere.fr/Cinema/News-Cinema/Un-entracte-au-milieu-de-Killers-of-the-Flower-Moon–Des-salles-bravent-linterdit
C’est bête, les entractes ça donne un côté encore plus vintage à un film, ça aurait été pile poil dans le ton.

Au fond, ce film est-il une blague de mauvais goût ? Parce-que si on regarde bien, la succession de meurtres devient carrément une référence à Agatha Christie. Sauf qu’on a plus que 10 Petits Indiens, en qu’en plus on connaît très tôt les coulisses des meurtres. On nous y fait participer, en quelque sorte, peut-être pour nous faire culpabiliser.
Et on nous prend aussi pour des idiots, puisque ces meurtres sont surexpliqués – à quelques moments cruciaux on a l’image, mais on a aussi les personnages qui décrivent (tout de suite, ou plus tard) ce qu’on voit exactement à l’image. Une erreur de débutant impardonnable pour Scorsese ? Ou bien la preuve qu’il a lui (et sa fidèle monteuse Thelma Schoonmaker) été contaminé par la tendance actuelle à surcharger didactiquement les films d’auteurs (mine de rien, on trouve pas ça dans un Marvel).
De l’espoir peut-être avec Marco Bellocchio, rare vieux de 80 ans à avoir encore de la maîtrise…

Au fond, ce film est-il un peu réac ? Parce-qu’en montrant des blancs voler des Natifs, Scorsese montre aussi des émigrés spolier des autochtones. Ils ne se sont pas nécessairement installés dans ce pays pour des raisons vitales, mais en tout cas ils lui sucent la moelle. Anti blancs ou anti migrants, allez savoir.
Et puis faire du FBI le grand garant de la Justice, c’est sacrément malvenu quand on sait ce que sera capable de faire le bureau de Hoover ensuite (pas toujours joli).

https://www.premiere.fr/Cinema/News-Cinema/L-actrice-native-americaine-Devery-Jacobs-critique-la-representation-des-Osages-dans-Killers-of-the-Flower-Moon
Eux et aussi les femmes… Ce qui ne fait qu’appuyer la misogynie lattente de Scorsese, héritée de vieux réflexes italo-américains. On le voit beaucoup dans son cinéma, les femmes se limitent à être garces, banales ou subissant les évènements. Il a beau citer « L’héritière »comme inspiration pour Mollie (la même coupe de cheveux, et on drague les érudits du cinéma au passage), on est quand-même loin de Olivia de Havilland et de ses révoltes sourdes.
Cara Jade Myers, dans le rôle de Anna la sœur la plus rebelle et active, ça c’est un rôle plus intéressant parce-que plus énergique, plus passionné et bordélique. Dommage.

Reste la mise en avant des Osages, dont le périple n’a jamais complètement fini.
Alors bon, Wah’Kon-Tah Forever.
_

Marc
29/10/2023 à 07:26

Killers of the Flower Moon de Martin Scorsese un grand film sur une histoire sombre de l'Amérique.
Je n'ai pas sentie la durée de 3h26 on peux remarquer la réalisation brillante de Scorsese .
Un casting impeccable un bémol sur Leonardo DiCaprio surjoue et l'acteur qui interprète l'Agent Smith du bureau d'investigation manque de charisme. De Niro brillant qui interprète William Hale en oncle cupide prêt à tout pour que la famille récupère le terrain de la famille de Mollie de la tribu des Osages .
Première enquête du bureau d'investigation le FBI une longue enquête qui conduit à metre sous les verrous William Hale et Ernest Burkhat pour complicité de meurtre.
Le dernier plan un tambour une danse des Osages vu de haut fini le film .
Killers of the Flower Moon un grand film par un grand réalisateur au sommet de son Art.

Maurice7
27/10/2023 à 10:07

Une belle déception que cette fresque à Oscars. Une réalisation poussive et incroyablement désincarnée. C'est le premier (et j'espère le dernier) film de Scorsese que je vois où le réalisateur semble distancié avec son sujet, un peu comme s'il n'était pas vraiment concerné. Il se sent même obligé de se mettre en scène lui-même sur la fin pour montrer qu'il y croit ! Derrière la débauche de moyens et la mise en scène somptueuse, le film ressemble à une énième fresque historique pleine de poncifs et d'intrigues sans intérêt. L’actrice principale, Lily Gladstone est probablement la plus juste dans son interprétation fine et puissante, simplement présente sans en faire des tonnes. De Niro et Di Caprio sont dans une course à l’échalote à celui qui fera le plus la tête de mérou (façon Brando... Di Carpio gagne à mon sens). Peut-être est-ce le signal de la retraite pour ce grand cinéaste ?

Prometheus
26/10/2023 à 12:52

Vu avant hier.
Un film intéressant mais long, vraiment.
Tout est bien fait (acteurs, décors, ambiance) mais clairement, des scènes où des personnages auraient pu être coupés.
Ça reste une expérience à vivre au cinéma. Sans doute que ce genre de film tend à disparaît et se fera de plus en plus rare.

Tatalochin
25/10/2023 à 08:30

Enfin du cinema. Du vrai celui du grand ecran car impossible a voir sur un petit écran. Lumiere musique image acteur mise en scene scenario idee de fond tout est la. On ne sort plus de la salle tellement on y est bien.du grand du tres grand

Flo
24/10/2023 à 12:24

"Oui, trois plombes pour enfoncer des portes ouvertes (ça alors, des Natifs qui se font avoir par des blancs, comme si on n'était pas au courant, depuis des décennies que ça dure - vous vous souvenez plus de "Wind River" ?).
Avec un de Niro qui grimace plus en un seul film que tous les acteurs du MCU. Et DiCaprio qui n'a aucune crédibilité en homme amoureux d'une femme de 35 ans sans taille mannequin".

C'est ce qu'on pourrait déclarer en guise de critique, vite fait et pour attirer l'attention avec ironie... surtout quand on n'a pas vu du tout ce film - ni même un seul film de s.... .....
Et si on fait sérieusement le boulot d'analyse, sans faire dans le superficiel et la brosse à reluire ?
Eh bien c'est une histoire intéressante et aussi peu connue que celle de Tulsa (qu'on cite trois fois), le budget est bien présent à l'écran, dans des normes de gros films d'auteurs - reconstitution et langage soignés, photo désaturée etc, avec les sempiternels tons gris et ocres très travaillés, et quelques jolis effets de style mélangeant les formats d'images (il y a des passages de l'un à l'autre qui sont virtuoses).
Également des fulgurances dans les mouvements de caméra et l'action mais pas de scènes trop chocs, et tant de monde à l'écran que le film vibre de vie... dans un sujet pourtant ultra morbide.

Et néanmoins, Martin Scorsese n'était peut-être pas le réalisateur approprié pour cette histoire, tant le résultat reste un "film de vieux" : avançant à deux à l'heure, laissant traîner les dialogues comme si les personnages à l'écran ne comprenaient rien tout de suite ("heing ? commeng ? t'as compris ? sûr sûr ? sinon ça va ?").
Il faut savoir qu'au cinéma, le temps long ne marche très bien qui si le film est bien rempli et ne se répète pas trop. Ou bien si on prend le spectateur par la main, pour une ballade se rapprochant du temps réel.
Pas comme ici, quand ça se passe sur une durée de plusieures années, avec énormément de répétitions (hop, un Indien mort de plus, facile), des actes clairs trop de fois commentés, et certaines ellipses déstabilisantes.

Là ça devient un peu du forcing, symbole de projets n'ayant aucun producteur suffisamment éclairé pour demander un montage plus concis, plus dense, ne débordant pas de l'orgueil de celui qui ne veut rien couper de son travail. Et qui puisse faire confiance en la capacité des spectateurs à comprendre une situation en une poignée d'images évocatrices.
Ce n'est plus complètement du Cinéma, c'est de la production dite prestigieuse pour plateforme numérique, le squelette d'une mini-série dont on peut morceler la vision - sauf que dans une salle, vous êtes coincé, vous n'avez pas le contrôle du déroulé du produit.
Pire, ça peut se retourner contre le film en créant de la complaisance pour les crimes à la chaîne qu'on y voit, si aisés que ça en vient à prendre les Natifs Osages pour une bande de faibles qui n'ont que ce qu'ils méritent (c'est évidemment ce que pensaient leurs assassins, mais on ne devrait normalement pas partager cette idée).

Pas du tout un Western contrairement aux apparences, car il n'y a pas la thématique de la Frontière, de l'éclosion de la Civilisation au détriment de la Nature, sauvage mais moins ordonnée, moins contrôlable - sans parler de la Loi de Lynch, à laquelle beaucoup ont succombé.
Ici c'est plus le Capitalisme qui est sauvage, où les notions hors-la-loi n'ont pas besoin de grands espaces pour savoir exister. Bel et bien une histoire de gangsters, majoritairement présents dans la filmographie du réalisateur, de façon directe ou non.
Il y a des films où le Bien domine sur le Mal, même en brouillant les pistes, et ça fait du bien, ça amuse, rassure et détend... Scorsese lui a été clairement intéressé depuis longtemps par le pendant inverse : ses personnages (avec ou sans trognes), idiots vociférants, qui manipulent le Rêve Américain pour leur profit égoïste, sans se préoccuper des autres, confirment que ce sont bien les (super) vilains qui ont sa préférence - c'est pourquoi il ne comprend rien aux super-héros...

Médiocres, puants, xenophobes, machistes, enfoirés de c*nnards de crétins... En choisissant de suivre l'intrigue à travers eux, on nous intime de se mettre dans les pas de protagonistes actifs qui n'ont... aucun point de vue sérieux. Ils volent, ils dominent, ils mentent ouvertement, ils ne font que jouer les rôles d'une pièce morbide et ils se gavent. Certains étant bons acteurs (essentiellement William Hale, Janus immonde), d'autres pas vraiment.
C'est aussi un remake officieux des "Affranchis", et si la logique analytique nous laisse entendre que l'auteur du film se projette (à nouveau) dans le personnage du jeune escroc, qui symbolise ce que Scorsese aurait pu devenir s'il n'avait pas été sauvé par l'Art et qu'il était rentré dans un gang - c'est à dire un abruti...
Impossible de ne pas voir dans la figure de "King" Hale un portrait démiurgique du cinéaste, devenu lui aussi donneur de leçon, manipulateur et souvent méprisant face à un public qu'il jugerait infantile et incompétent.

Le degré de sidération dépasse donc tout entendement alors que les Osages côtoient ces individus ouvertement perfides, faux amis (et faisant même partis de groupes extrémistes ou complotistes, histoire d'en rajouter une couche)... Qu'en plus ils le savent, et qu'ils se laissent faire !!? Et on doit continuellement subir ce défilé de morts, représentés à l'image tels des traits d'union !?
Mais pourquoi ? Quel est le fonctionnement de ce déni généralisé, qui se dissout à peine au moment où on a déjà atteint une trentaine de décès suspects ?
Idée fascinante, et jamais on n'en saura la raison... à défaut tout ce qu'on peut se dire, c'est que c'est la nature humaine à l'œuvre, dans toute sa bêtise.
Sauf que ce ne sont pas des hommes qu'on voit là, ce sont des enfants naïfs, tous. Avec au centre un seul adulte Père Fouettard, qui a accumulé tellement de respect qu'il en est intouchable. Une espèce de diable de proximité, qui ment encore et encore et encore. En attendant une révolte interne qui jamais n'arrivera, jusqu'à ce que le FBI vienne enfin nous soulager de toute ces horreurs en injectant de l'intelligence et du professionnalisme au récit.
Merci à la présence de Jesse Plemons, à nouveau impressionnant... mais arrivé si tard qu'on ne l'attendait plus.

Le prétexte de Leonardo DiCaprio pour ne pas incarner les "saveurs blancs" dans ce projet (changeant ainsi sa teneur) tient peut-être moins au Politiquement Correct qu'à l'effet de redite qui aurait pu se produire, puisqu'il a déjà joué J.Edgar Hoover (l'épaisseur de Plemons l'évoque aussi). Alors il ne sera pas comme Jake Sully dans "Avatar", mais peut-être un équivalent de ce qu'aurait été le frère jumeau de Sully s'il n'était pas mort (avec De Niro en Quaritch, trop grotesque pour être complètement effrayant). Par contre, même sur trois heures, Scorsese nous montrera l'inverse des autochtones idéalisés de James Cameron - ils sont gras, ils sont littéralement empoisonnés par les immigrés "blancs".
Impossible donc de mettre du plomb dans la tête de Ernest Burkhart, fidèle simplet dénué de la moindre personnalité, et qui apparaît frustrant pour le spectateur puisqu'il n'a pas droit à la logique d'évolution de tout protagoniste principal : le surgissement d'une Épiphanie qui le menerait juste à temps vers l'indépendance par l'intelligence, l'empathie et la rébellion - DiCaprio joue un pastiche de Marlon Brando (mais pas celui de "Sur les quais"), de Jack Nicholson, avec un peu de Ray Liotta bien sûr. Et creuse surtout la même thématique récurrente de l'acteur de "Titanic", à propos des hommes incompatibles avec la vie en couple.

Pas du tout une histoire d'Amour, comment cela pourrait-il être possible alors que cet homme trouve moins important de protéger sa femme et sa famille, que de suivre benoîtement les ordres d'un oncle autoritaire ?
Pas possible... cette Mollie s'est juste attachée à ce grand gamin moins moche que les autres. Elle avait plus une attitude mi-maman mi-squaw soumise... mais au delà de la séduction initiale, il n'y a jamais eu d'amour vraiment réel là dedans, c'était là aussi une comédie ne reposant que sur les apparences - une fois confirmé que Ernest n'a jamais pu atteindre la maturité, ça sera définitivement terminé et il sera l'heure de la résilience (la suite de la carrière de Lily Gladstone promet elle aussi d'être compliquée).

Dans ce cas-là, si tout n'est que comédie noire sur la stupidité américaine, les réalisateurs idoines pour ce genre de film auraient dû être les Frèr€s Coen.
Comment pourrait-il en être autrement alors que le film commence par une tribu enterrant un calumet après des années de conflits, pour enchaîner avec une scène où le pétrole donne l'impression de jaillir À Cause de cet enterrement ?
Et que ça finit sur une scène décalée de théâtre radiophonique (cette façon qu'à l'Amérique de mythologiser toute son histoire), où Scorsese apparaît in extremis pour faire un mea culpa à la place de William Hale ?
Un cinéma de poissards, de tête de pioches et de gros c*ns burlesques, ça aurait été le sujet rêvé pour les Frèr€s, capables de dynamiser cette histoire.

On aurait même aimé que le Cinéma se sorte de cette structure si restrictive du Roman journalistique (de David Grann) pour reprendre le contrôle, devenir enfin Western et fantasmer la vengeance brutale des Natifs - là ça serait plutôt du Tarantino.. Peu importe la violence, celle-ci se justifiant par ces meurtres et spoliations, et pour rendre hommage aux guerriers d'antan qui ne sont pas toujours morts à petit feu, eux.

Bref Scorsese fait son devoir de mémoire culpabilisant, toujours envahi par la Mort, tant qu'il a encore lui-même la force de filmer. Il le fait très bien, mais il ne fait que confirmer que les films à gros budgets actuels sont des machines encore trop grippées, qu'il y ait ou non un auteur réputé comme chef principal.

"Tueurs de Temps fleuri".

Dario 2 Palma
21/10/2023 à 23:50

Martin Scorsese et ses acteurs grimaçants s'embourbent dans un récit étrangement anecdotique et dévitalisé, platement mis en scène, dénué de rythme et dilué péniblement sur trois heures et vingt-six minutes. Un (télé)film boursouflé et convenu mais un futur "grand" vainqueur aux Oscars de 2024?

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