On the Line : critique au bout du fil du rasoir

Ange Beuque | 15 février 2023 - MAJ : 15/02/2023 18:25
Ange Beuque | 15 février 2023 - MAJ : 15/02/2023 18:25

Après nous avoir infligé Connectés en 2020, film de confinement en forme de double peine pour le spectateur astreint à résidence, Romuald Boulanger se retrouve à cornaquer Mel Gibson dans On the Line. Cette co-production américano-européenne envoie William MoseleyKevin Dillon et Nadia Farès en découdre avec Paul Spera dans les locaux d'une émission de radio de confessions nocturnes, et sort en DVD après une diffusion initiale sur Canal+.

Le jeu de la mort et du standard

Le présentateur d'une émission de radio nocturne se retrouve aux prises avec un mystérieux auditeur assurant avoir pris sa femme et sa fille en otage : sur le papier, articuler la tension d'un huis clos autour d'échanges téléphoniques constitue un high-concept plutôt stimulant, qui s'inscrit dans la lignée du Phone Game de Schumacher mais également de l'excellent Buried. Il renoue avec une exigence d'unité de lieu, d'action et de temps propice à prendre le spectateur au piège d'une intensité anxiogène.

En concentrant les péripéties dans les studios d'enregistrement, On the Line s'offre un terrain de jeu relativement original, même s'il manque un peu de singularité esthétique et conceptuelle. Un décor quasi unique qui permet d'évidentes économies des frais de tournage, et instaure une ambiance nourrie de hors-champ grâce au confessionnal nocturne radiophonique animé par le héros : au fond, sait-on jamais réellement qui est au bout du fil ?

 

On the Line : Mel GibsonUn thriller en audiodescription

 

De fait, le début d'On the Line est plutôt solide, installant ses protagonistes à coup de dialogues parfois piquants. La situation liminaire est posée en quelques plans, sans tenter de tirer artificiellement à la ligne. On entre rapidement dans le vif du sujet et dans le studio, où la réalisation s'efforce d'insuffler un peu de dynamisme à son décor étriqué, permettant d'orchestrer une montée en tension efficace dans l'attente de l'inévitable bascule.

 

On the Line : Mel Gibson, Enrique Arce, William MoseleyQuitte à jouer à cache-cache, on veut la version Squid game

 

La tension joue à cache-cache

En dépit d'un démarrage prometteur, la tension ne tient pas tout à fait la distance et tend à s'effilocher au gré des bobines. La suggestion laisse place à une menace plus explicite... et plus convenue. S'ensuit une partie de cache-cache qui, si elle s'efforce d'exploiter le moindre recoin de son décor unique (le hall d'entrée, le toit), reste très programmatique dans ses effets.

Le film est adapté de Talk, un court métrage du même réalisateur paru en 2019, et on peut questionner la pertinence de l'avoir dilué de la sorte. Le scénario tente d'entretenir l'intérêt à coup de dilemmes moraux et de comptes à rebours divers, tandis que l'antagoniste en fait des caisses dans la folie démonstrative « à la Moriarty » de Sherlock. Jamais franchement déplaisant, On the Line peine toutefois à dépasser le cap du pilote automatique.

 

On the Line : Mel GibsonFade Max

 

Reste Mel Gibson, plutôt à son aise dans ce rôle de plaisantin bourru sur les charbons ardents. On est toujours content de retrouver l'acteur, au service d'un réalisateur français de surcroît (avec un tournage à Paris, quand bien même le film est censé se dérouler à Los Angeles), mais sa présence interroge sur l'inflexion donnée à sa carrière. Aucune de ses multiples apparitions récentes, dans des films davantage dimensionnés pour la VOD que pour le grand écran, n'a marqué les esprits.

Si se tenir à l'écart des projecteurs médiatiques peut constituer un objectif tout à fait légitime (d'autant plus au vu de son passif controversé en la matière), ce n'est certes pas On the Line qui le remettra en haut de la chaîne alimentaire hollywoodienne. La modestie du projet et la limpidité du concept auraient pu lui conférer une certaine aura de sympathie, mais après Connectés, il laisse surtout l'impression tenace d'un nouveau film de confinement, avec ses limites inhérentes.

 

On the Line : Mel GibsonSurtout, ne raccrochez pas, la tension va revenir

 

Twist téléphone studio

On the Line compte certainement sur ses twists finaux pour marquer les esprits. Il annonce la couleur dès son ouverture, placée sous le signe de l'illusion avec son faux sang en forme de lointain écho à Sleepy Hollow. Le problème, c'est que si son retournement de situation principal est certes inattendu, il dévalue le film plus qu'il ne le renforce.

Surtout, il calque si étroitement les articulations d'un autre qu'on se gardera bien de le nommer ici, sous peine d'éventer les tenants et aboutissants du scénario à tous ceux qui l'auraient déjà vu (et qui, pour la plupart, feront d'eux-mêmes le rapprochement). Sauf que contrairement à son évident modèle, le twist d'On the Line apparaît bien moins organiquement lié au concept du film, et plutôt plaqué pour un effet aussi choc que gratuit.

 

On the Line : photo, Mel GibsonThe phone game

 

D'autant qu'une fois ce modèle en tête, le twist enchâssé devient par ricochet tristement prévisible, et laisse un goût d'autant plus amer qu'il renforce une certaine impression de vanité. Le film abat ses cartes trop tard pour se transformer en écheveau réellement ludique, et donne davantage le sentiment de rire du spectateur que de s'amuser avec lui.

On the Line est disponible en DVD et VOD depuis le 15 février 2023 en France

 

On the Line : Affiche

Résumé

Lorsque survient le générique de fin, il apparaît clairement que certains personnages du film ont pris leur pied quand d'autres ont vécu un calvaire : une parfaite mise en abîme de la dichotomie qui frappe le spectateur, constamment sur le fil de la curiosité et de l'affliction.

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Lecteurs

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commentaires
john76
14/06/2023 à 23:46

Film en suspense total, j ai adoré merci

Andolini
21/02/2023 à 22:53

Divertissant sans plus. Mel Gibson cachetonne dans un tas de petits films pour renflouer sa société de prod ICON et financer la suite de La Passion du Christ dont le tournage devrait d'ailleurs commencer au printemps d'après ce que j'ai pu lire récemment. Gibson a déclaré plusieurs fois ces dernières années que le métier d'acteur ne l'intéressait plus vraiment et qu'il préférerait se consacrer à la réalisation. Étant un immense fan du bonhomme en tant qu'acteur et surtout en tant que réalisateur, je suis extrêmement curieux de voir à quoi va ressembler cette suite de l'un de ses plus grand chef-d'œuvre (avec Braveheart et Apocalypto). Malgré tout ça fait toujours plaisir de le voir jouer à fond... Mais je suis désolé mais sans la VF de Jacques Frantz c'est plus pareil.

Tuco
16/02/2023 à 14:55

Pas tenu 20 minutes, c'est rare pour moi. Moche, mal écrit, mal joué... une vraie daube

The insider38
16/02/2023 à 13:30

Bon bah c est tellement de la merde que je vais spoil, ça évitera de perdre du temps : Revoyez plutôt le The Game de fincher ..

Lord Sinclair
16/02/2023 à 09:36

On en est où du retour de l'arme fatale ? C'est tombé à l'eau ?
Parce que Mel il va finir comme Bruce. Et ça fait de la peine...

Bigsoul
16/02/2023 à 03:48

Un film poussif et décevant avec un final ridicule... Mel Gibson (que j'adore) semble s'être perdu dans ce "téléfilm" de seconde zone.

Carte plan
15/02/2023 à 22:56

Le film est assez divertissant mais les deux twist finaux sont catastrophiques c'est limite on c'est foutu de ta tronche c'est honteux comme final sérieux , sûrement une des pires fin de films que j'ai vu dans ma vie et j'en ai vu passer des fins naze

Pseudo1
15/02/2023 à 22:32

@Satine21
Alors j'adore clairement Jacomy, mais j'ai énormément de mal à me faire à Gibson avec la voix de Denzel, Brosnan ou Whitaker... Mais bon, je vois pas qui aurait de toutes façons pu passer après l'indétronable Jacques Frantz.

Satine21
15/02/2023 à 22:09

Sinon vous êtes toujours aussi intoxiqué sur ce site de m ......
Mel Gibson est controversé ?Pas plus que Polanski (que vous aimez beaucoup),Depp, Woody Allen,Piere Palmade (oui je l'ajoute à la liste des .,.....),Cosby , Epstein, Weinstein, Beatty Warren,Ariel Emanuele (oui oui propos homophobes, Eastwood,Baldwin ,Pitt, Berry,Brisseau Jean Claude..on peut continuer...Tous ont des casseroles graves ..Tous !!!!!

Satine21
15/02/2023 à 21:57

Emmanuel Jacomy le nouveau doubleur de Mel est vraiment top..

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