Jurassic World : Le Monde d'après - critique 65 millions de navets

Simon Riaux | 10 juin 2023 - MAJ : 12/06/2023 10:17
Simon Riaux | 10 juin 2023 - MAJ : 12/06/2023 10:17

Le précédent chapitre de la saga s'est achevé sur la promesse d'un déferlement de dinosaures. Mais Jurassic World : Le Monde d'après a-t-il les mâchoires pour ? Après le succès tonitruant de l'opportuniste Jurassic World, la profession de foi esthétique de Jurassic World : Fallen KingdomColin Trevorrow est au pied du mur avec ce troisième opus, attendu par des hordes de fans, toujours mené par Chris Pratt et Bryce Dallas Howard et ramenant le trio Sam Neill-Jeff Goldblum-Laura Dern.

LE MONDE D’APRÈS D’AVANT 

Après plus de dix ans de déroute narrative et artistique, le cinéma de divertissement américain ne devrait plus surprendre par sa médiocrité. Et pourtant, Jurassic World : Le Monde d'après réussit l’exploit d’établir de nouveaux standards dans la foirade industrielle et s’impose comme un long-métrage putréfié des crocs jusqu’à l’extrémité de la queue. Une charogne que les archéologues du futur hésiteront sans doute à déterrer dans 65 millions d’années. La liste est longue, mais tentons d’établir comment un film qui s’annonçait, au pire, comme une préhistorique et régressive récréation, a pu se nécroser de la sorte. 

 

 

Commençons par la première étape indispensable à tout deuil digne de ce nom : l’acceptation. En dépit de son titre, de l’intégralité de sa promotion, des interviews de ses auteurs, et de la conclusion du précédent volet, le film ne traite pas d’un monde bouleversé par la présence de dinosaures. Pire, il fait des pattes et des mains pour ne pas avoir à traiter la question. Passé une introduction incapable de travailler correctement les notions de perspective ou de gigantisme (pourquoi diable ces dinos ne sont-ils presque jamais dans les mêmes plans que les humains qu’ils côtoient ?), il vient l’heure de dérouler ce qui tiendra lieu d’intrigue.

Soit une pelote ridiculement emberlificotée qui met côte à côte caricature hypocrite des vilains capitalistes de la Silicon Valley, angoisse écologique... et recréation ex nihilo d’un simili park Jurassic. Eh oui, nos vilains richards du jour ont pour grand projet diabolique d’exploiter le potentiel des sauriens qu’ils rassemblent donc... dans une enceinte close. Certes, il faut une bonne heure au récit pour nous y enfermer, mais ne comptez pas sur ce qui précède pour étancher votre soif d’apocalypse dinosaurienne.  

 

Photo Sam NeillSam nie

 

Exception faite de quelques bébêtes dans la neige, d’une course-poursuite maltaise aux perspectives tragiquement bouchées et d’un marché clandestin si bien planqué que même les figurants semblent ignorer son existence, le blockbuster a choisi de piétiner sa promesse initiale.

Le doigt d’honneur est tel que jamais le scénario ne se risquera à explorer les pistes passionnantes ouvertes par le court-métrage promotionnel découvert avant la crise sanitaire. On y découvrait, à la faveur d’une mise en scène rigoureuse et d’effets spéciaux impressionnants, que la présence des dinos impactait spécifiquement certains pans de la société américaine. Si le film de Colin Trevorrow décide de s’assoir sur son propre concept, que nous propose-t-il à la place de ce dernier ? 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : photo, Chris PrattDe bien beaux décors

 

COPAINS NAVRANTS 

La nouvelle n’a rien d’un scoop, Jurassic World : Le Monde d’après entendait également réunir le casting original de Jurassic Park et les endives élevées en batterie depuis le reboot de 2015. Mais là aussi, la déconvenue est sévère. Parce qu’aucun des personnages originaux n’est présent à l’écran. Certes, Sam Neill, Laura Dern et Jeff Goldblum ont bien été filmés, dans des répliques de leurs costumes de 1993, mais personne ne s’est inquiété de leur donner un rôle. 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : photo, Sam Neill, DeWanda Wise, Chris Pratt, Jeff GoldblumVous ne vous moquerez plus jamais des acteurs français

 

Les uns souffrent d’enjeux d’une platitude absolue tant ils ont été essorés par des palanquées de blockbusters (faire famille, renouer avec un ex...), quand leurs motivations ne sont pas platement similaires au film originel de 1993. Réduits à des caricatures d’eux-mêmes, ils doivent composer avec une écriture qui essaie d’accoupler un souvenir boursoufflé des héros d’hier aux énormes incohérences de l’histoire d’aujourd’hui. La première victime n’est autre que Malcolm, qui surgit après avoir éternué son cerveau. Transformé en débile léger, commentaire méta de la célébrité Goldblum, il doit se coltiner une partition en contradiction totale avec la logique interne de son personnage. 

Il en va de même pour Wu, ex-laborantin anonyme devenu génie du mal, et à présent métamorphosé en lanceur d’alerte aux cheveux gras. On sent bien, dans cette volonté de ramener jusqu’aux seconds couteaux émoussés de Jurassic World – piteusement affichés sur un fond d’écran - un désir de satisfaire un fan impatient d’assister à une grande réunion de famille. Encore eût-il fallu que ses membres n’aient pas été empaillés et remplis de pus préhistorique pour que l’entreprise nous séduise. 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : photoLa vengeance du serpent à plumes

 

DINOS FUCK FEST 

Fantasme de cinoche, personnages... voilà qui est bien beau, mais dans le fond, ne regarde-t-on pas Jurassic World avant tout pour être aspergé d’une bouillonnante orgie de dinosaures ? Au premier degré, c’est l’unique motif de satisfaction de ce Monde d’après. On y trouve une quantité et une variété de dinosaures assez impressionnantes. Plus que dans n’importe quel film de la saga, la moindre saynète est l’occasion d’introduire une nouvelle espèce, de la jeter aux trousses de malheureuses doublures numériques, tandis que les effectifs des sauriens s’avèrent plus musclés que dans les précédents chapitres. 

Les fous furieux des théropodes en goguette ressentiront une joie enfantine alors que défilent atrociraptors, giganotosaurus, pyroraptor, quetzalcoatlus ou autres therizinosaurus, avant qu’un dimetrodon noctambule ne vienne chatouiller de ses crocs les voûtes plantaires de simili-figurants. Pourtant, ces incursions répétées de titans d’autrefois laissent presque systématiquement un goût amer.

On a beau être loin de la catastrophe technique du premier Jurassic World, la régression numérique opérée depuis Fallen Kingdom laisse parfois pantois. En témoignent ces séquences neigeuses, où Blue semble avoir été incrustée n’importe comment, ou les nombreuses poursuites, hommage involontaire au Blob de 1988, tant leur découpage vire parfois au gloubli-boulga informe. 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : Photo BD WongJean Louis Davidosaure

 

Mais c’est surtout la dramaturgie de leurs apparitions qui confine à l’hémorragie cérébrale. On pense à ce sinistre bestiaire, dont les spécificités varient parfois au sein d'une même séquence, à la manière d'un embarrassant plumitif, caractérisé comme une créature à la vue en berne, mais aux autres sens parfaitement aiguisés, incapable de pister une humaine aussi discrète qu'un goret sous kétamine. On aimerait sauver ici et là un plan, une idée, mais jamais le découpage ne semble au diapason des rarissimes propositions du film.

Le scénario refuse, plus qu’aucun autre épisode avant lui, à sacrifier ses personnages, ne mastiquant qu’un figurant numérique, un vague sous-fifre, et son grand méchant, sorte de stomie façonnée pour évoquer Steve Jobs. Dès lors que le métrage refuse de mettre en place la moindre menace un peu convaincante, chaque confrontation saurienne tourne à la course-poursuite. Le dispositif est répétitif en diable, mais pourrait, devant la caméra d’un cinéaste expérimenté, revêtir quelque intérêt. Manque de pot, c’est Colin Trevorrow qui est aux manettes. 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : Photo Mamoudou AthieLa version sans gluten de Samuel L. Jackson

 

COLIN TROP TROP TROP 

Il est des réalisateurs dont on serait bien en peine de définir le style, mais dont le travail a plus d’une fois été celui d’un solide artisan, un narrateur accompli, capable de mener à bien des projets complexes, sans apposer une signature au forceps, mais en assurant à son public le respect qui lui est dû. Ainsi, des orfèvres tels que Joe Johnston, Ron Howard ou dans une moindre mesure Jon Favreau ont récemment rappelé qu’assurer la capitainerie d’un blockbuster nécessitait une polyvalence ainsi qu’une maîtrise certaines. Deux qualités tout à fait absentes de la mise en scène de Trevorrow. 

Absolument aucune séquence, aucun plan, ne fait sens. La gestion de l’espace est perpétuellement aux fraises (on ne compte plus les scènes au cours desquelles les déplacements des personnages frisent l’absurde). Mais surtout, jamais le réalisateur ne paraît avoir la plus petite idée de là où placer sa caméra. Quel point de vue propose-t-il au spectateur ? Comment maximise-t-il la dimension spectaculaire ? Comment orchestre-t-il la montée en puissance de sa partouzerie mézozoïque ? 

 

Jurassic World : Le Monde d'après : photoComment transformer une scène légendaire en trou noir

 

Autant de questions qu’on aurait aimé le voir se poser. Mais non, l’héritier auto-proclamé de Steven Spielberg (au même titre que le premier proctologue venu descend des pionniers de la spéléologie), préfère transformer son film en nouveau remake de Jurassic Park. Il rejoue ainsi l’intégralité des scènes cultes imaginées par Spielberg... un jeu dangereux, tant il est risqué pour un placenta percé d’affronter Rafael Nadal au bras de fer.

Inlassablement, notre Colin mal rissolé rejoue des entités devenues célèbres soulignant ici son incapacité à poser le rythme de l’action, là l’inanité de son montage, quand il ne s’impose pas avec vigueur comme un des divertisseurs les plus incapables de son époque. La régularité kamikaze avec laquelle il se vautre dans une myriade de clins d’œil au fan force le respect, tant l’entreprise n’essaie même plus de masquer sa radioactive stérilité. Reniant sa promesse initiale, vomissant tout ce à quoi il prétend se mesurer, Jurassic World : Le Monde d’après s’impose comme le stade terminal de la métastase hollywoodienne.

 

Jurassic World : Le Monde d'après : Affiche française

Résumé

Trahissant rapidement sa promesse d'orgasme jurassique, le blockbuster de Colin Trevorrow enferme son intrigue idiote dans un énième enclos à concepts, qui l'autorise à rejouer le film originel, orchestré avec une incompétence quasi-miraculeuse. Et cette entreprise techniquement inégale de s'égarer dans les égouts du fan service, qui dévore l'entreprise à la manière du nuage de sauterelles qui vampirise son synopsis.

Autre avis Antoine Desrues
Aussi bête que platement mis en scène, Jurassic World 3 réunit à peu près le pire de ce que les legacyquels peuvent offrir. Trevorrow se contente de faire une relecture crétine du chef-d’œuvre de Spielberg, et conclut sa trilogie dans un fan-service mortifère. Et en plus, le rythme de ce foutoir est proprement indigent.
Autre avis Mathieu Jaborska
Passé une scène d'action franchement généreuse, le film renie ses promesses et gâche les uns après les autres tous les nouveaux dinosaures. La faute à l'héritage de cette trilogie bancale, mais surtout à un scénario ahurissant de bêtise.
Autre avis Geoffrey Crété
Jurassic World 3 est une escroquerie déguisée en orgie de dinos, et un royal ratage qui marque le triomphe du vide, du bête, et du niais. Vainqueur par chaos d'incompétence : Colin Trevorrow, orfèvre de la non-mise en scène.
Autre avis Arnold Petit
Oubliant les belles promesses de la fin du précédent opus, Jurassic World : Le Monde d'Après creuse toujours plus dans la paresse et la stupidité pour essayer de redonner vie au fossile de Jurassic Park et recréer l’émerveillement d’un monde définitivement perdu.
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Lecteurs

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commentaires
t-rex
22/09/2023 à 19:01

c'est vrai quand meme que le dernier film de jurassic world 3: le monde d'après ( jurassic park 6 ) meritait mieux comme grand final , un final qui aurait pus etre épique , grandiose ,émouvant , avec des scènes d'action plus énormes et de terreur... mais rien de tout sa , les personnages du d.r henry wu et de lewis dodgson le méchant principal aurait méritait une meilleur évolution un meilleur traitement , ainsi que alan grant , ellie sathler et ian malcolm et des dinosaures qui evolue dans la nature , ainsi que l'entreprise biosyn genetics qui aurait méritait une meilleur importance dans la capture des dinosaures et du trafics et des véhicules de biosyn qui capture des dinosaures dans la nature et en ville mais rien vus sa , le méchant dodgson aurait dus etre plus méchant , plus malin , un grand stratège, et qui n'hésite pas a se salir les mains pour avoir se qu'il veut... et henry wu aurait méritait une meilleur fin et meilleur traitement du personnage , comme les autres héros du film , biosyn au lieu de faire des sauterelles , écologie... , aurait dus faire éclore des dinosaures , crée des hybrides a des fins personnel , pour faire vendre des dinosaues au marché noir et s'inquiéter des dinosaures qui peuplent la terre , comme les dinosaures qui envahissent les villes et les humains , comme l'allosaure attaquant un camping en foret de big rock ou le t-rex qui terrorise un in drive cinéma de pleine air et biosyn qui se fait plein de frics ,il y aurait du avoir des véhicules de biosyn capture et chasse des dinosaures en scène d'action , comme la séquence de la capture de chasse des dinosaures par ingen sur isla sorna site b avec roland tembo dans le monde perdu : jurassic park 2 de 1997...

Miami81
12/09/2023 à 00:05

J'ai certes retrouvé certains défauts soulevés par votre critique, mais j'ai trouvé le film pas mal du tout. En tout cas, il ne méritait pas ce déferlement de haine et cette petite étoile de notation.
On ne s ennuit pas, le film est généreux en scènes d action pour certaines intenses. Et Treverrow, même si je ne suis pas spécialement fan s'en sort très honorablement malgre des references plus ou moins grossieres aux volets precedents.. Bonne surprise pour ma part, je trouve même ce volet meilleur que le précédent dont la dernière partie était juste ratée.

NB9
04/05/2023 à 12:53

Quel nanar !
Eh ben ce sera le dernier Jurassic Park que j'irai voir.

NB9
01/05/2023 à 15:41

Quel nanar !
Eh ben ce ser

Bouns
27/12/2022 à 22:53

Le top de la nullité hollywoodienne ;(((
Mièvre , invraisemblable, sans scénario , situations debiles
On se demande comment des acteurs peuvent signer pour jouer dans un tel navet
Mais qui voit encore ce genre de film ??

Kyle Reese
16/12/2022 à 18:53

Mauvais, mauvais, mauvais. Il n'y a que la fuite à malte et sa poursuite qui crée un bon moment d'adrénaline. Le reste, oublié dés la fin du film, film que j'ai été obligé d'accélérer vers les 3 quarts tellement s'était long et inintéressant. il n'y a que le 2 a sauver dans cette trilogie.

Riton paleo
16/12/2022 à 18:50

Orgasme jurassique, le blockbuster de Colin Trevorrow s autorise à génialement rejouer le film originel, orchestré avec le brio d unréalisateur français. Techniquement superbe et bourré de fan service, qui dévore les cinéphiles de pacotille.

Blockbuster
20/07/2022 à 00:56

Dans cette trilogie la magie des premiers films a tout simplement disparue, quelle tristesse que cette saga soit si bousillée, ils auraient dû confier les suites à Spielberg.
Le premier Jurassic Park reste un chef d'œuvre malgré les années.

Maisie Lehola
11/07/2022 à 10:12

Certes c'est un film pour les enfants, les dinos semblent aussi dangereux que Casimir.

Friedermann
07/07/2022 à 19:19

Le cinéma n'a pas d'autre ambition que de divertir. Ce Jurassic World tient parfaitement son rôle. Ultra-divertissant ! Et tant pis pour les pisse-vinaigre.

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