Django: critique du western spaghetti de Canal+

Mathieu Jaborska | 13 mars 2023 - MAJ : 13/03/2023 18:50
Mathieu Jaborska | 13 mars 2023 - MAJ : 13/03/2023 18:50

Se réapproprier librement un personnage emblématique du western Spaghetti, déjà sublimé par Corbucci, Miike et Tarantino, c'est l'ambition de Django, dont les derniers épisodes sont diffusés le 13 mars sur Canal+. Avec Matthias Schoenaerts dans le rôle-titre, Noomi Rapace en antagoniste et Nicholas Pinnock en chef utopiste, la nouvelle création de Leonardo Fasoli et Maddalena Ravagli (scénaristes sur Gomorra et ZeroZeroZero) avait donc de quoi intriguer les passionnés de l'Ouest sauvage... mais a déçu beaucoup d'entre eux.

Django enchaine

La prétention affichée par l'accroche marketing ("Place au nouveau western", rien que ça) a beau faire grincer des dents, le postulat de la série est tout à fait honorable. Le héros, créé dans le légendaire film de Sergio Corbucci, est très vite devenu un argument promotionnel et par conséquent un symbole du western spaghetti. Suite à son succès initial, il a engrangé malgré lui une pléthore de copies, pour la plupart des westerns aléatoires retitrés "Django" en France, histoire de surfer sur la vague. Django est une mascotte, une marque du Far West qui a arboré bien des visages en fonction de l'exploitation du genre en Europe.

D'ailleurs, d'autres cinéastes, nostalgiques de l'âge d'or des westerns transalpins, n'ont pas hésité à jouer de la pluralité de ces visages, comme Takashi Miike, avec son Sukiyaki Western Django, et bien entendu Quentin Tarantino, avec son Django Unchained. Les deux films n'empruntant que des codes esthétiques ou même des pistes musicales au classique de Corbucci. La série Canal+ assume se placer dans ce sillage, s'autorisant même, comme dans le Tarantino, un caméo de Franco Nero, ici l'un des personnages secondaires.

 

Django : photo, Matthias SchoenaertsAvec Django, ça va saigner (sauf quand il passe en prime time)

 

Le premier épisode se charge de tisser le lien, avec son Matthias Schoenaerts (parfait pour le rôle) renfrogné, archétype du sombre inconnu venu apprendre à un patelin paumé qu'il est assez habile de la gâchette (ou du direct) pour refuser de se faire jeter. Sauf que le patelin en question est "New Babylon", refuge des laissés pour compte d'une Amérique qui se remet à peine de la guerre de Sécession, mené plus ou moins adroitement par le féroce John Ellis. Pour Django, il ne s'agit pas d'un rade de passage, puisqu'il cherche une personne en particulier.

La vision contemporaine du western revendiquée par Leonardo Fasoli et Maddalena Ravagli, c'est donc celle d'une plaie ouverte au milieu d'un pays en convalescence, alors en train de revoir sa définition de frontière à l'échelle humaine. Des thématiques caractéristiques du genre, concentrées dans ce décor de ville-cratère assez impressionnant, que le réalisateur des trois derniers épisodes  se permet même de traverser le temps d'un long plan-séquence chorégraphié. Dommage que les audaces formelles de ce type soient aussi rares... et que cette volonté de prolonger les sujets traités par les grands classiques du genre soit sapée par une construction à ce point artificielle.

 

Django : photo, Matthias SchoenaertsWhite savior malgré lui

 

Django porte sa croix

Car la modernité selon Django 2.0, c'est aussi une panoplie de lubies narratives, à commencer par cette avalanche de flash-back indigestes, au service d'une suranalyse de la personnalité de chaque protagoniste. Le moindre détail de leur vie passée doit apparaître à l'image, dans une logique qui se voudrait pleine de rebondissements, mais qui devient feuilletonesque lorsqu'elle expose des évidences ou des sous-entendus qui auraient mieux fait de le rester. Imprégné de cette obsession très contemporaine pour l'ambiguïté postiche des personnages de fiction, le scénario finit paradoxalement par gommer leurs aspérités et nous désintéresser de leur sort.

Les deux plus grandes victimes de cette structure vite barbante sont probablement l'antagoniste Elizabeth et le patriarche John. La première est le porte-voix d'un fanatisme religieux qui n'a plus que la victimisation pour entrainer ses congénères dans sa croisade aveugle. Une idée intéressante... jusqu'à ce que les révélations de l'intrigue lui inventent un traumatisme sentimental difficile à prendre au sérieux. Le second est un souverain étrillé, futur époux un poil autoritaire d'un mariage semi-arrangé dont beaucoup questionnent la légitimité.... Sauf que son arc narratif va peu à peu se détourner de cette question.

 

Django : photo, Noomi RapaceÀ regarder juste pour l'accent texan de Noomi Rapace

 

Bref, cette saison 1 aurait pu, comme prévu, devenir à son échelle un jalon de l'histoire du western, d'autant que prendre place dans un Sud post-guerre de Sécession lui permet de s'attaquer frontalement à une fracture américaine (donc occidentale) qui n'a jamais vraiment cicatrisé : les héros se sont retrouvés dans l'un ou l'autre des camps, y ont commis des exactions diverses et variées sous des bannières qui n'ont jamais vraiment considéré leur individualité et doivent suturer dans l'urgence le tissu social. Dommage qu'elle soit aussi balourde... et donc si difficile à suivre

Tous les épisodes de Django sont disponibles sur Canal+ à partir du 13 octobre 2023.

 

Django : Affiche officielle

Résumé

Django semble presque manier avec adresse les thèmes et codes du western spaghetti... jusqu'à ce qu'il essaie de les moderniser à coups de flash-back intempestifs.

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commentaires
Papa Panda
16/03/2023 à 08:46

Hell on whells est magistrale et l'évolution du personnage principal est formidable d'écriture.
Quant à Django, j'ai tenu jusqu'à la scène de la bagarre moi-aussi et j'ai coupé le visionnage. C'est moche, illisible, ça sonne tellement faux. Berk. Canal sait faire d'exceptionnelles séries (Les revenants, Maison Close et plus récemment l'excellente Infiniti) mais aussi de très très mauvaises. Je classerais aisément Django dans cette catégorie !

Altaïr Demantia
14/03/2023 à 19:06

C'est ultra mauvais. j'ai arrếté lors de la bagarre d'intro. Il y a longtemps que je n'avais pas vu une scène d'action aussi mal filmée et montée. On ne comprend rien à ce qui se passe.Rien. Ça n'a rien à voir avec le western et rien avec les saghettis. Aucune ambition visuelle ou narrative. On se croirait devant une série TV et non une série.

Franken
14/03/2023 à 13:42

La découverte récente du projet m'avait fait lever un sourcil jusqu'à la racine des cheveux.
Puis j'ai vu la bande-annonce...

Bon bah, +1 pour Hell on Wheels !

Pseudo1
14/03/2023 à 11:36

+1 pour Hell on Wheels.
D'ailleurs, sur l'affiche de Django, le héros me fait méchamment penser à Bohannon.

vxcv
14/03/2023 à 10:42

xcvcxv

djodjo
13/03/2023 à 22:31

j'ai tenu 10min

XG58
13/03/2023 à 21:00

Hell on whells et la première saison Westworld reste des references. Ceux qui suivent = next

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