Vikings : Valhalla saison 2 - critique des Normands qui font des vidéos sur Netflix

Lino Cassinat | 12 janvier 2023
Lino Cassinat | 12 janvier 2023

Curieux phénomène que celui de Vikings de Michael Hirst, série "historique" devenue un fait majeur de la pop-culture (un peu) grâce à quelques qualités inattendues et (beaucoup) à la faveur de la mode persistante de la culture nordique. Un accident heureux, qui ne pouvait en rester là et qui, naturellement, a été déclinée en spin-off / suite spirituelle plus ou moins inutile avec Vikings : Valhalla de Jeb Stuart - c'est du moins le sentiment que nous laissait la saison 1. La saison 2, toujours emmenée par Leo Suter, Frida Gustavsson et Sam Corlett, relève-t-elle le niveau ? Réponse de normand : oui et non.

LEIF, HARALD ET FREYDIS SONT DANS LE même BATEAU

Comme pour rassurer tout le monde, la somme de renouvèlement artistique de la saison 1 de Valhalla était précisément égale à 0. Bien à l’aise dans ses pantoufles, riche en action mais très pauvre en substance, elle a préféré balancer rapidement des sièges épiques, des grosses haches pleines de sang et des barbes fournies pour que personne ne panique, remettant ainsi les personnages à plus tard. Voici donc ce plus tard, avec cette saison 2 beaucoup plus proche de ses protagonistes.

 

Vikings Valhalla : photo, Frida Gustavsson, Leo Suter, Sam CorlettOn dirait des figurants, mais ce sont nos héros Freydis, Harald et Leif

 

Une évolution qu'on salue, tant la précédente fournée négligeait complètement cet aspect de l'écriture et nous imposait de suivre les pérégrinations de pantins anonymes dont on se fichait éperdument, mais qui n'est pas sans poser de nouveaux problèmes. On pourrait d'ailleurs résumer la saison 2 ainsi : comme consciente de ses manquements, Valhalla cherche son équilibre et sa raison d'être, toutefois sans parvenir à les trouver. Au moins a-t-elle le mérite d'essayer, et d'être un cas particulièrement parlant pour tout apprenti en scénario.

Cela se traduit à l'écran par un changement de braquet aussi majeur que discret : l'action ne prend pas la direction attendue. Après une saison 1 très guerrière, faite de sièges et de batailles rangées, la saison 2 est donc un temps de voyage et d'exploration. Du moins, pour deux de ses trois arcs narratifs, celui de Londres étant uniquement composé d'intrigues de cour, et donc, statique. Ceux qui avaient hâte de retrouver les conflits armés à grande échelle qui ont accompli une partie de la gloire de Vikings seront donc déçus : il n'y a tout simplement aucune séquence de ce type dans Valhalla saison 2. En échange : plus de développement et d'intimité avec les héros. Chouette ?

 

Vikings Valhalla : photoRetenez-nous

 

PEU DE PERSOS COOLS, BEAUCOUP DE PERSOS COULENT

Probablement sans le savoir, Valhalla a confirmé ce qui demeurera son plus gros défaut pour longtemps : ses protagonistes, sans aucune saveur. Et par extension, son casting, au diapason. On s'en plaignait déjà quand on côtoyait de loin chaque personnage pendant la saison 1, mais maintenant qu'on les connait de bien plus près, c'est d'autant plus choquant. Tous plus insipide qu'une armée de Jon Snow tartinée sur une galette de riz trempée dans de la Contrex, aucun membre de l'équipe principale ne parvient à laisser une impression durable sur la rétine ou dans les cœurs. Pire encore, plus on se rapproche du trio de tête Leif/Freydis/Harald, plus on touche du doigt la solution de l'équation anti-vie. 

Si ce ne sont Harald - qui se dote d'un début de personnalité en cours de route - et l'insaisissable Godwin, absolument tout le monde est interchangeable. C'est d'autant plus criant qu'a contrario, par on ne sait quel contre-miracle, les rôles secondaires, voire tertiaires, semblent tous plus prometteurs les uns que les autres, en particulier du côté des nouveaux venus : l'exploratrice Mariam, le duo d'escroc Kaysan-Batu et Kurya, l'homme brisé qui a tout perdu. Personnage tragique et infirme, ce dernier est même au cœur de la scène la plus déchirante (la seule en fait) de cette saison et vole la vedette à tout le monde lors du grand boum final.

 

Vikings : Valhalla : photo, Hayat Kamille, Tolga SaferIl y a des jours ou on aimerait être Kurya

 

Mais, malgré tout le potentiel dramatique de l'équipe B, Valhalla s'acharne à imposer ces deux tanches inexpressives de Freydis et Leif comme meneurs de la série. Cela fait 16 épisodes que Valhalla a commencé, et Leif ne sait toujours rien faire de mieux que bouffer des rollmops en imitant Rantanplan dans l'ombre d'Harald. De son côté, Freydis, proclamée élue des dieux cent fois par épisode, beurre des krisprolls en attendant de pondre son môme et se fait berner comme une oie blanche par le premier conspirateur à l'oeil torve et suspicieux. Nos héros mesdames et messieurs.

Il paraît que c'est toujours les meilleurs qui partent en premier : la preuve, Freydis et Leif sont toujours vivants et partis pour durer. Pour couronner le tout, Sam Corlett et Frida Gustavsson nous gratifient d'interprétations particulièrement rigides et coincées, entre la courgette constipée pour lui et une endive se présentant au concours de Miss France pour elle. Le temps de Ragnar, Floki, Ivar et autres Lagertha paraît bien loin en compagnie de Tom-Tom et Nana, même dilués dans un casting d'ensemble.

 

Vikings Valhalla : photo, Frida GustavssonLâche cette épée en plastique à bout rond, tu risques de tuer personne

 

Où est OLAF GROSSEbaf ?

Évidemment, le bilan de cette saison entière passée à surdévelopper des personnages sous-conceptualisés est mitigé. D'un côté, la série en profite pour enterrer un peu la hache de guerre et renouer avec ses joyeux tours des mondes, des cultures et des géographies, parfois pour les opposer, parfois pour les faire dialoguer, comme Vikings a toujours su le faire. Mais d'un autre côté, Valhalla met plus que jamais en lumière son absence d'essence. C'est d'autant plus vrai que, censée raconter la christianisation à marche forcée de la Scandinavie, Valhalla se retrouve obligée de renvoyer le thème fondateur qui justifie (supposément) son intérêt à la toile de fond, le temps que l'échiquier finisse de s'établir.

En résulte le sentiment que cette saison 2 est moins un pas en avant qu'un pas de côté, corrige des erreurs, mais crée de nouvelles béances, confirme ses défauts et se raccroche à d'anciennes qualités. Signe ultime qu'il y a comme un trouble dans la direction prise par la série (ou une grosse coupe dans le budget ?) : les huit épisodes qui composent cette série sont les moins amples visuellement depuis la saison 2 de Vikings il y a 10 ans. Il faut même bien l'admettre, pour la première fois de son existence, la série se montre techniquement assez défaillante du côté de ses effets spéciaux.

 

Vikings Valhalla : photo, Jóhannes Haukur JóhannessonIl paraît que ceci est une armée

 

Les abominables brasiers numériques de l'épisode 1 sont juste impardonnables, tandis que l'épisode 7 nous propose un étonnant champ-contrechamp dont l'étalonnage change de dominante de couleur d'un plan à l'autre, passant de bleu à jaune. Une expérimentation presque Godardienne dans l'esprit qui aurait pu être intrigante dans le cadre d'un essai artistique, mais qui a ici moins sa place dans un musée que sur le mur de la honte de Netflix entre Bright et Death Note.

À moins qu'il ne faille lire dans le minima technique global une forme de désengagement d'une marque en perte de vitesse créative. Même si la saison 3 est déjà commandée, on ne peut pas dire qu'on serait surpris.

La saison 2 de Vikings : Valhalla est disponible en intégralité sur Netflix depuis le 12 janvier 2023

 

Vikings : Valhalla : photo

Résumé

Un pas en avant, un pas en arrière, quatre pas sur le côté, trois petits tours sur soi-même et puis s'en va : Vikings : Valhalla se cherche une raison d'être sans la trouver. Distrayante certes, mais la dernière fois qu'on a oublié huit heures de notre vie aussi vite, il y avait plus de techno et moins de péquenauds.

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Lecteurs

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commentaires
Loulsly
17/02/2023 à 09:35

Ya tellement d'autre series, dégageaient les aigris !!

Squoal
17/01/2023 à 23:14

c'est un véritable massacre cette serie Viking Valhalla. ils nous à pas menti Mr NETFLIX . Il a tenu ses promesses ! on ne peut pas le nier .
Comment encore une fois Netflix détruit une excellente série qui était un chef d'oeuvre au départ malgré les quelques libertés historique .
Va vraiment falloir que tu te calme là Mr Netflix ......tu vas arréter les conneries et surtout pas faire de saison 3 !! hein ?!!!

Yoyo
13/01/2023 à 11:39

Pour moi viking s'est arrêté à la saison 4.

youl
13/01/2023 à 11:03

Une série qui tourne dans le vide depuis le début, mais qui connait la recette pour attirer le spectateur en manque de masculinité...

C'est caricatural, et avec 10 ans de retard. Bref une perte de temps, il suffit de regarder les 4 premières saisons de Viking, le reste est navrant.

Scream King
12/01/2023 à 18:01

@ Lediseurdeverité
donc pour toi, l'homosexualité masculine existe autant que les licorne a poil de genou... Inintéressant et révélateur...

Libellule
12/01/2023 à 17:57

@aiden ?? Quel besoin ?
Pour cocher des cases? Il y avait bien de l’amour entre le prêtre et ragnar.

Lediseurdeverité
12/01/2023 à 16:25

@Adrien R Oh oui et il manque les licorne a poil de genou. Comment je vais pouvoir continuer à vivre sans ces deux représentations ?

Bruce
12/01/2023 à 14:46

Aiden R pourquoi c’est une obligation de la représenter ?

Aiden R
12/01/2023 à 14:01

Ce que je trouve déplorable (frustrant, allez) c'est qu'en six saisons de la série mère et ici dans ce spin-off, il n'y a eu aucune représentation de l'homosexualité masculine (argr ou ergi) dans la culture viking. Sans doute pour ne pas rebuter le spectateur viriliste, alors qu'on mettait en scène une romance lesbienne avec Lagertha il y a quelques années, bien qu'il n'y ait pas de mot pour décrire l'homosexualité féminine dans cette culture.

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