Shangri-la Frontier : quand le shonen joue avec la frontière du jeu vidéo

Flavien Appavou | 8 septembre 2021 - MAJ : 04/10/2021 12:28
Flavien Appavou | 8 septembre 2021 - MAJ : 04/10/2021 12:28

Pour un éditeur, la rentrée est signe de grosses sorties. C'est le cas chez Glénat, qui mise tout sur son nouveau shonen, mi-jeu vidéo, mi-histoire d'aventure aux graphismes hallucinants. Zoom sur ce manga à la frontière du réel. 

Pour se frayer un chemin dans toutes les sorties de la rentrée, il faut trouver un titre qui sort du lot. C'est ce que fait Glénat en sortant Shangri-la Frontier, un shonen sur fond de jeu vidéo et d'histoire d'aventure. Cette fois-ci, ce n'est absolument pas un isekai (une histoire où un personnage se retrouve dans un monde fantastique, soit par réincarnation, soit parce qu'il a été projeté), mais tout simplement l'illustration d'un jeu vidéo qui se joue limite en temps réel. Attention, ça castagne sévère. 

Publié à l'origine dans le Weekly Shonen Magazine de Kodansha, ce manga est écrit par Katarina et dessiné par Ryosuke Fuji. Tiré d'un light novel, il s'est très vite hissé dans les rangs des meilleures ventes de manga au Japon. D'ailleurs, Glénat s'est empressé de créer un site internet dédié à ce phénomène. Et c'est tout à fait normal, car son principal attrait, mis à part son scénario sympathique, est vraiment son design et son découpage précis et net. Une belle prouesse dans le genre qu'on va expliquer point par point.

Et si l'envie et la curiosité sont déjà trop fortes, vous pouvez lire le premier chapitre de Shangri-la Frontier ici, chez Glénat.

 

Planche 6, Katarina, Ryosuke FujiUn héros à la tête de piaf

© Katarina, Ryosuke Fuji / Kodansha Ltd.

 

Histoire Efficace

À l'origine, Shangri-la Frontier est un light-novel écrit par Katarina. Il s'est vu adapté en manga assez rapidement après sa sortie. Partant d'une histoire presque classique dans le genre, le manga tire son épingle du jeu sur plusieurs combinaisons d'éléments. Ce shonen nous raconte l'histoire de Sunraku, un lycéen passionné de jeu vidéo virtuel. Ici, il n'y a plus de console à proprement parler, tout se fait au casque VR, pour une immersion la plus complète possible. Sunraku passe ses journées à jouer à ce qu'il appelle "des bouses", des jeux totalement loupés, bourrés de bugs, dans lesquels il s'éclate à dénicher la moindre faille pour l'exploiter à son compte et enfin annoncer que ce jeu, c'était bien de "la merde", pour reprendre ses dires.

Après avoir écumé la plupart des bouses de son magasin de jeu préféré, on lui conseille un jeu ultra populaire du nom de Shangri-la Frontier. Un MMORPG qui cumule trente millions de membres inscrits. Sunraku s'essaye donc à ce Greatest Of All Time (ou GOAT pour les intimes) et customise son personnage pour qu'il soit le plus efficace. Il s'affuble donc d'un masque d'oiseau pour cacher son identité et se balade presque à poil pour économiser de l'argent qu'il pourra investir dans des équipements. Mais Sunraku se rend compte que le jeu est plus difficile qu'il n'y paraît.

 

Planche 2, Katarina, Ryosuke FujiUn skin particulier

© Katarina, Ryosuke Fuji / Kodansha Ltd.

 

En essayant de se level up, il tombe sur des monstres surpuissants et révèle toute sa virtuosité aux jeux vidéo pour les combattre au maximum et surtout, ne pas oublier de sauvegarder après la bataille ! C'est dans ce contexte que le livre dévoile petit à petit son intrigue. Le héros est tellement habitué aux bugs et failles des jeux qu'il comprend rapidement les mécaniques de celui-ci, tout en risquant la mort de son personnage à tout instant. Ce qu'il est intéressant de noter, c'est que son personnage n'est absolument pas cheaté, comme on peut le lire dans certains scénarios de manga. Ici, rien n'est simple et efficace, tout est purement réfléchi. 

Dans ce premier tome très en exposition, les auteurs préfèrent prendre leur temps pour poser le décor, les protagonistes et antagonistes, ainsi que la quête principale, tout en mettant des petites surprises. Celles-ci sont plus ou moins attendues, mais le plaisir reste intact pour une raison particulière : le dessin.

 

Planche 5, Katarina, Ryosuke FujiLumière sur le dessin

© Katarina, Ryosuke Fuji / Kodansha Ltd.

 

Un dessin plus que soigné

L'attrait principal de Shangri-la Frontier est son dessin soigné et son découpage maitrisé. Vu qu'il n'y a que très peu de dialogues et que le tout est en "voix off", les auteurs se concentrent sur la mise en scène de leur univers de fantasy. Et ici, tout le lore est mis en image avec une justesse irréprochable. Ryosuke Fuji aime prendre son temps sur les détails de son personnage hors du commun, sur les décors et sur les monstres. Sunraku agissant comme une pièce rapportée dans cet univers, le dessinateur n'hésite pas à le mettre en scène pour montrer sa valeur et non pas son physique. 

Cela se concrétise par des posings et un découpage surprenant. Les angles de vue sont littéralement tirés de ce qu'on pourrait avoir sur un jeu vidéo. Ce sont donc des vues à la troisième personne ou à la première personne qui s'imposent au lecteur, tout en n'oubliant pas de montrer le décor environnant. Le manga jongle dynamiquement entre ces différentes propositions pour rendre le discours le plus précis possible. Le lecteur se retrouve projeté dans cet univers maitrisé au détail prêt, comme s'il était lui-même un joueur de Shangri-la Frontier.

 

Planche 4, Katarina, Ryosuke FujiL'apparition de l'antagoniste

© Katarina, Ryosuke Fuji / Kodansha Ltd.

 

Dans Shangri-la Frontier, une attention particulière est portée à l'ombre et la lumière. Pour donner encore plus de relief au récit, Fuji sensei alterne les séquences entre jour et nuit et les apparitions de monstres qui vont avec. Mais ce qui ressort le plus dans son design, c'est la précision dont il fait preuve dans ses effets de lumière. L'encrage de ses planches est une merveille de détails, comme le témoigne la planche ci-dessus, avec la lune qui se reflète sur le pelage du Lycaon et le personnage en second plan totalement dans l'ombre de la bête. C'est époustouflant. 

L'œil du lecteur est très souvent pris à parti pour regarder les détails et les effets, on navigue littéralement sur des toiles en noir et blanc. C'est somptueux et on prend un réel plaisir à rester contempler les planches. Ne pas s'attarder dessus serait véritablement un crime, c'est ce qui fait la vraie puissance de ce manga.

 

Planche 1, Katarina, Ryosuke FujiMouvement fluide et efficace

© Katarina, Ryosuke Fuji / Kodansha Ltd.

 

Combat acharné

Dans tout bon shonen, il faut des phases de combat bien menées et pas ennuyeuses. Surtout qu'ici, on est dans un univers de fantasy mélangé à du jeu vidéo, donc des combats, il y en a vraiment pas mal. C'est en gros une combinaison qui peut être très mal maitrisée. Ce qui n'est absolument pas le cas ici. D'une part, chaque action est documentée par la voix off pour donner une parfaite compréhension au lecteur néophyte. D'autre part, la composition des planches mise sur le dynamisme et le mouvement, dans ces phases-là. 

Les auteurs s'amusent des codes du jeu vidéo et déploient un véritable arsenal de termes et de phases de combat qu'on peut retrouver dans tout bon MMORPG. Les pouvoirs et les débuffs sont posés avec minutie pour ne pas donner l'impression d'une facilité scénaristique. Dans tout bon jeu, on apprend via l'échec et si c'est trop facile, on se lasse vite. C'est ce que veulent montrer Katarina et Ryosuke Fuji à travers leur manga : un bon combat se mène par l'expérience et c'est ce que va ressentir Sunraku dans son évolution dans le jeu.

 

Tome 1, Katarina, Ryosuke FujiUn premier tome plein de belles promesses

 

Shangri-la Frontier est une véritable surprise. Avec son scénario basique et truffé de détails relatifs au jeu vidéo, on aurait pu s'ennuyer très vite. Mais la recette fonctionne grâce à sa maitrise du design et de la composition. L'articulation des deux est finement jouée par les auteurs qui promettent encore plus de combats acharnés et de surprises hors normes. D'ailleurs, la fin du premier tome est assez surprenante en fin de compte, ce qui laisse un champ libre à notre imagination, et ce n'est pas plus mal ! 

Le premier tome est donc disponible chez Glénat et le second tome est prévu pour novembre 2021. A contrario du personnage qui veut aller vite dans le jeu, prenez le temps de temps d'observer les planches et leur découpage. Ça nous met véritablement une bonne claque. 

Ceci est un article publié dans le cadre d'un partenariat. Mais c'est quoi un partenariat Ecran Large ?

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commentaires
Mushy
08/09/2021 à 14:01

J’espère que mon com ne sera pas encore supprimé ( Webedia sortez du corps d'EL ! ) mais il faut le dire :

Shangri-La F est clairement un très bon shonen et un jolie Pied de nez à tous ces clones d'Isekai