Redfall : les développeurs voulaient que le jeu soit annulé par Microsoft

Léo Martin | 2 juin 2023
Léo Martin | 2 juin 2023

La sortie désastreuse de Redfall n'est pas passée inaperçue et, a priori, les développeurs d'Arkane avaient senti le fiasco arriver de très loin.

Si Le Seigneur des anneaux : Gollum pourrait bien être le jeu plus raté de ce dernier mois de mai, c'est plutôt l'échec d'Arkane et de Microsoft, avec le calamiteux Redfall, qui risque de rester dans les mémoires. Alors que le studio lyonnais (également basé à Austin) avait habitué ses joueurs à des titres toujours d'une grande qualité (Deathloop, Dishonored, Prey), le fiasco de Redfall a irrémédiablement entaché leur réputation. En effet, le jeu est aux antipodes de ce qui avait fait la renommée du développeur, tant sa production est ratée et sans intérêt. 

Fustigé à la fois par les joueurs et la critique, Redfall a été aussi désavoué par Phil Spencer, patron de Xbox, qui a lui-même reconnu que cela avait été une véritable erreur de sortir le jeu dans cet état. Ce qui devait être un atout pour son précieux Xbox Game Pass s'est ainsi très vite changé en un poids mort pour le catalogue. Comment un tel désastre a-t-il pu arriver ? Grâce à de nouvelles et récentes informations, on en sait désormais un peu plus sur le chaos qui a mené Arkane à la déroute. 

 

Redfall : photoIl n'y a pas de quoi se réjouir 

 

Red Flag

Dans un papier de Bloomberg, écrit par Jason Schreier, on vient ainsi d'apprendre qu'une grande partie des développeurs d'Arkane espérait que Microsoft annule (ou réinitialise) le projet de Redfall après leur rachat de Zenimax (à qui appartient Bethesda, leur éditeur). Car si Arkane a toujours fait des jeux avec le cœur – et avec une conception audacieuse du game design –, Redfall aurait été leur tout premier projet indésirable. Pour de justes raisons, celui-ci aurait été ainsi victime d'un désamour total de la part des développeurs. 

Le développement de Redfall aurait donc démarré en 2018 du côté d'Arkane Austin (qui venait de sortir Prey) tandis qu'Arkane Lyon était occupé à la production de Deathloop (un jeu solo beaucoup plus proche de l'esprit du studio). ZeniMax souhaitait alors que ses studios développent des jeux susceptibles de générer une rentabilité au long terme – ce qui n'est clairement pas le point fort d'Arkane. Le projet de créer un jeu service multijoueur (tel que Fortnite ou Apex Legends) leur a alors été imposé pour cette raison.

 

Redfall : photoUn carnage non maîtrisé

 

PLUS DURE SERA LA CHUTE

Harvey Smith et Ricardo Bare (vétérans de la compagnie) n'auraient par la suite pas réussi à fédérer leur équipe autour de ce projet réprouvé par celle-ci. Du fait de leur savoir-faire lacunaire sur le multijoueur et d'une indécision globale sur la bonne direction à prendre, Redfall est vite devenu une cause perdue d'avance. Malgré les aides extérieures, les moyens de production et les ressources humaines (seulement une centaine de personnes travaillaient sur le jeu) n'étaient pas non plus suffisants pour gérer les ambitions du jeu.

Les doutes et la frustration des employés d'Arkane Austin ont eu tôt fait de pousser la majorité d'entre eux à quitter le navire. Selon Bloomberg, près de 70% des développeurs qui avaient travaillé sur Prey ont quitté l’entreprise à la fin du développement de Redfall. Le chaos interne à la production n'a fait que croître et les difficultés de recrutement n'ont certes pas aidé. En somme, la création du jeu s'est muée en calvaire pour la firme... et cette agonie ne demandait qu'à être abrégée lorsque Microsoft est arrivée dans l'équation.

 

Redfall : photoLa deuxième Suicide Squad a s'être bien planté cette année

 

Si redfall ne tue pas... il rendra plus fort ?

Phil Spencer l'avait déjà avoué il y a quelques semaines : Microsoft n'a pas souhaité intervenir dans le développement de Redfall et ce choix leur a coûté cher. Le patron de Xbox s'était dit être persuadé à l'époque que le jeu avait du potentiel malgré tout, confiant dans les compétences d'Arkane et dans les premiers aperçus, assez positifs, de la presse.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, Phil Spencer, tout comme ZeniMax, ont tout simplement sous-estimé la difficulté rencontrée pour développer un jeu service et multijoueur pour un studio spécialisé dans les jeux solo. À titre d'exemple, même Naughty Dog (studio ô combien plus gros) serait en ce moment en grandes difficultés pour développer son mode multijoueur de The Last of Us. On imagine ainsi aisément l'enfer que cela a dû être pour la petite équipe d'Arkane – qui était de plus en plus en sous-nombre à mesure que la production avançait.

 

Deathloop : photoPour se rappeler du talent d'Arkane : Deathloop

 

Il y a donc d'importantes conclusions à tirer de tout ça. Il était bien évidemment irréaliste pour ZeniMax de lancer Arkane Austin dans une telle aventure et en étant si peu préparée. De la même façon, Xbox a eu tort de ne pas encadrer plus sévèrement un projet d'une telle ambition et de ne pas écouter les plaintes des développeurs lorsqu'ils étaient les plus avertis des problèmes.

Puisqu'elle est riche d'enseignements, on espérera au moins que cette affaire a servi à nourrir la collaboration entre Arkane et Xbox dans le bon sens. Et loin de désespérer, on attendra donc désormais le futur projet d'Arkane Lyon de pied ferme... en espérant qu'il suffise à compenser l'échec cuisant de Redfall

Tout savoir sur Redfall

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