Malgré Oppenheimer, Christopher Nolan affirme que "le biopic est un genre inutile" (et il a raison)

Axelle Vacher | 30 octobre 2023 - MAJ : 30/10/2023 14:34
Axelle Vacher | 30 octobre 2023 - MAJ : 30/10/2023 14:34

Malgré son tout récent Oppenheimer, Christopher Nolan affirme que "le biopic est un genre" inutile"... et ses arguments tiennent la route.

Attendu de pied ferme par la sphère cinéphile plusieurs mois durant, loué par pléthore de cinéastes à grands coups de dithyrambes et succès commercial pour le moins honorable, le dernier projet de Christopher Nolan s'est bien entendu inscrit au panthéon des gros succès de l'année... tant et si bien qu'Oppenheimer pourrait bien changer la donne à Hollywood.

À noter également que le film s'est offert quelques records au passage. En effet, avec ses 945,5 millions de dollars engrangés au box-office mondial, l'histoire du physicien et père de la bombe atomique s'est tout simplement imposée comme le biopic le plus fructueux de tous les temps, juste devant le Bohemian Rhapsody de Bryan Singer et Dexter Fletcher. Alors forcément, personne n'aurait pu s'attendre à ce que le cinéaste britannique se décide soudainement à tacler le genre tout entier.

 

 

le guide pour comprendre (et aimer ?) le nouveau Christopher Nolan

 

Le biopic, un genre trompeur ?

C'est à l'occasion d'un évènement organisé par le City University de New York, auquel Nolan, sa femme et productrice Emma Thomas, ainsi que le co-auteur Kai Bird ont été invités à participer, que le cinéaste a décidé de tenir des propos relativement sévères envers le genre biographique, auquel son film est pourtant rattaché (bien qu'il rejette fermement cette appellation) :

"Si vous écrivez un livre 500 ou 1000 pages, il y a toujours moyen d'équilibrer cette longueur grâce aux expériences des personnages, à leur individualité. Mais lorsque vous comprimez tout ça jusqu'à ne conserver que le nécessaire pour les besoins d'un script, alors le résultat est terriblement limité. C'est en ça que le concept même du biopic faillit au spectateur en tant que genre. Il est inutile, et j'aime travailler pour des genres utiles."

 

Oppenheimer : Photo Robert Downey Jr.Procès au biopic

 

"Dans Oppenheimer, le point fort du film s'articule autour du projet Manhattan, autour du procès qui s'en est suivi. Il y a un effet salutaire à découvrir les conventions de ces genres-ci, étudier comment ils captivent et communiquent avec un public. Le fait d'appeler un film un biopic n'engage aucun enjeu. On ne qualifie pas Lawrence d'Arabie de biopic. One ne qualifie pas Citizen Kane de biopic. Ce sont des films d'aventures, des films relatifs à la vie de quelqu'un. Le biopic n'apporte pas ce que le drame propose. Il ne propose rien auquel se raccrocher."

Ajoutons à cela que les films biographiques ont tendance à enjoliver ou omettre certains évènements pour le bien d'un scénario, voire, dans certains cas, à réinventer la réalité, et les propos de Nolan tombent gentiment sous le sens. Sans rancune, donc.

Tout savoir sur Oppenheimer

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.
Vous aimerez aussi
commentaires
Morcar
31/10/2023 à 00:25

Pour le coup, Nolan dit de la merde (ou bien les journalistes raccourcissent son discours) puisqu'un biopic peut très bien être intéressant, selon comment il est construit, autour de quoi, etc... la preuve avec son Oppenheimer qui en est en, quoi qu'il en dise. Donc soit il considère que des films comme son Oppenheimer peuvent être intéressants, et alors le biopic peut l'être, soit il considère que le biopic en général ne peut pas l'être mais alors c'est aussi le cas du sien.

Birdy l'inquisiteur
30/10/2023 à 22:45

Un biopic relate la vie d'un personnage réel.
Une fiction raconte une histoire, en respectant des principes narratifs établis qui rythment le récit, et permettent sa progression.
Difficile de structurer la vie de quelqu'un ainsi, car une personne ne "s'explique pas" sur la base d'un évènement ou deux. Parfois, cet évènement fondateur cristallise l'essence du personnage, mais tout de même, difficile de résumer qq'un à un moment de sa vie.
C'est la magie de la fiction, et cela éloigne par définition le biopic de la réalité. On n'a ni le temps, ni la structure pour. On va donc schématiser, synthétiser, ce que l'on souhaite raconter à travers des faits plus ou moins manipulés pour tenir en 2h.
Et après, il a bien sur l'envie d'épater le spectateur par des artifices qui le séduiront. La réalité a beau dépasser très souvent la fiction, les scénaristes peuvent rarement se réduire à des faits bruts et souvent complexes à vérifier. Alors on brode, on arrange, on amplifie, on condense... pour le meilleur et pour le pire. En vérité, tout est toujours question d'inspiration et de talent.

Mathilde T
30/10/2023 à 19:55

Un film ne demeure qu'un point de vue donc oui un biopic ne sera jamais une bonne biographie et un film historique ne renseigne pas tout à fait sur une époque. Ce sont des événements fictionnalisés Reste un point positif à ces genres : permettre à des personnes de s'intéresser à un fait, un personnage méconnu et approfondir après . Personnellement j'ai souvent utilisé ce type de films à cette fin .

Osheridan
30/10/2023 à 19:34

Le biopic se rapproche trop du documentaire.
J'ai vu Oppenheimer au cinéma à cause de l'effet médiatique mais après l'avoir vu, j'ai aussitôt regretté. Ni l'histoire ni son récit ne m'a plu. Je ne vois que très peu de films au cinéma alors quand j'en choisis un, j'espère qu'il sera bon.
Ce n'était pas le cas pour Oppenheimer, malheureusement.

xav
30/10/2023 à 15:45

Il y a deux sortes de biopics: ceux qui partent de "tiens, tels événements de la vie de ce monsieur-là feraient une bonne histoire" (The social network, Amadeus, Oppenheimer....), et ceux qui partent de "tiens, ce monsieur-là a beaucoup de fans, ça serait profitable de remplir deux heures de film qui montrerait leur idole dans ses moments iconiques".

Je crois que c'est surtout cette deuxième catégorie que Christopher définit comme inutile.

Un bon biopic est un film qui resterait passionnant même si on sait qu'il était totalement fictif. Si on a besoin d'aimer le personnage dans la vraie vie pour trouver de l'intérêt dans son biopic, alors c'est pas du cinéma, c'est un documentaire Arte.

Hasgarn
30/10/2023 à 12:30

De rien John.

Les tiens me…
Ben je ne sais pas, en fait. Tu ne m’évoques rien.

Grey Gargoyle
30/10/2023 à 11:40

Hello,

le paradoxe du biopic est que c'est une fiction, contrairement au documentaire ou au reportage, mais utilisant des personnages basés sur des personnes ayant véritablement existées d'où sa nature essentiellement ambiguë.

Le problème, très souvent, c'est que les spectateurs prennent pour argent comptant le scénario d'un biopic comme étant le fruit d'un travail d'historien, c'est à dire respectant la méthodologie des sciences humaines et sociales. Or, ce n'est quasiment jamais le cas bien que les campagnes de communication autour du biopic prétendent souvent le contraire.

D'ailleurs, très fréquemment, les témoins vivants des événements décrits dans un biopic indiquent que ça ne s'est pas passé comme ça dans la réalité. Du coup, plus les événements sont anciens, moins appuyées sont les protestations.

Tout dépend quel est l'angle de vue du réalisateur et quel intérêt peut présenter le scénario ou les personnages historiques concernés, je suppose.

Bien cordialement

John Dahl
30/10/2023 à 11:37

Hasgarn,

Tes commentaires me font toujours rire, merci.

rien à ajouter !
30/10/2023 à 11:29

rien à ajouter !

Hasgarn
30/10/2023 à 10:49

Bien dit.
Et surtout, bien vrai.

Son Oppenheimer réussit une approche qui s'éloigne du biopic classique (hagiographique) en construisant une histoire autour de son personnage et de 2 événements significatifs.

Ce que RocketMan a largement réussi à faire à l'inverse de Bohemian Rapsody