De la TV au Ciné: les différents visages de Hulk

Damien Virgitti | 23 juillet 2008
Damien Virgitti | 23 juillet 2008

Monstre fou furieux ou savant extrêmement intelligent. Les deux faces de la même pièce Hulk qui rend ce « super-anti-héros » si difficile à adapter. Comment rendre un personnage complexe quand son alter ego est un monstre vert qui veut tout casser et qui ne connaît que deux mots de vocabulaires : « Hulk smash » (« Hulk écrase ! » en VF).

 

Ses différentes adaptations rendent compte de ce terrible constat. Que ce soit sur petit ou grand écran, il est passé de simple faire-valoir pour les super-héros au personnage fascinant quand il est en fuite contre lui-même. Dans tous les cas Hulk semble un personnage tellement énorme que l'on n'a jamais pu saisir toute son ambiguïté.

 

 

 

 

Retour sur les mutations au ciné et à la tv du géant vert  


 

 

 

 

 

1966 : Monstre de carton-pâte

 

Au commencement il y avait Dr Jekyll et Mister Hyde. Puis il y eut Frankenstein. Et il y eut La Chose, le golem des 4 Fantastiques. Tous ces personnages mélangés donnèrent naissance en 1962 à Hulk, savant timide et malingre le jour, monstre enragé (et gris à l’origine) quand il se met en colère, après avoir été bombardé par des rayons gammas. Sa force brute pouvait alors aussi bien servir à tout casser sur son passage qu’à sauver des vies. Cette sorte de Lennie du célèbre Des Souris et des hommes version super-héroïque lui valut rapidement du succès. Mais une fois passé le petit écran, il allait rapidement être réduit à ses kilos de biceps.

 

 


 

L’une des premières adaptations télé des héros Marvel était un simple montage des cases de la bd, agrémenté de bruitages et de sons. Le Marvel Superheroes Show faisait vivre en 5 segments de 7 minutes les célèbres épisodes des Vengeurs, groupe composé de Captain America, Iron Man, Thor, Namor et Hulk. Déjà, le géant vert souffrait de la comparaison de ses confrères Captain America ou Namor et se retrouvait un peu délaissé.

 

Pour beaucoup de fans, la première (et unique) adaptation qui a donné toutes ses lettres de noblesses au Titan de Jade est la série live L’incroyable Hulk avec le duo mythique Bill Bixby/ Lou Ferrigno.

 

1977 : « Don’t make me angry. You would’nt like me when I’m angry »

 

 


 

Jamais égalée alors que cette version commence à dater, souvent citée comme source d’inspiration pour tous les auteurs qui reprennent le mythe, la série est celle qui a le plus touché l’humanité du personnage. Le scientifique Bruce Banner porte ici sa double personnalité comme un fardeau et fuit de ville en ville les ravages qu’il crée afin de trouver un remède à sa condition. Dans la série, Hulk est peut-être trop gentil et ne fait que servir les bonnes actions de Banner. La créature représente en fait les obsessions enfouies dans chacune des personnes que Banner rencontre et Hulk les aide à guérir. Par deux fois (Copie conforme et La Tombe sacrée) Hulk affronte des personnes comme lui : un Hulk meurtrier et un autre qui aurait vécu à la préhistoire (!). Preuve que la créature Hulk symbolise la rage et la colère de l’humanité, thème central de la série, que seul Banner peut arrêter. Cette série avec son héros mélancolique, accompagné sur les routes par son triste thème au piano, dura 5 années avant de s’heurter à son manque de moyens dans trois téléfilms furieusement kitschs : Le retour de l’incroyable Hulk (avec Thor), le Procès de l’incroyable Hulk (avec Daredevil et Le Caïd) et même la Mort de l’Incroyable Hulk (en tombant d’un avion).

 

 

1982 : les seconds rôles

 

 

 

Au moment de la fin de la série avec Bill Bixby, un dessin animé arriva le samedi matin sur NBC, diffusé en même temps que Spider-man and his amazing Friends. Plus proche de la bd, le show a surtout eu la bonne idée de développer une autre caractéristique qui fait tout le sel de l’univers de Hulk : ses seconds rôles, son entourage et ses interactions avec Bruce Banner. De Rick Jones, le meilleur ami de Hulk après qu’il l’ait sauvé, jusqu’au Général Ross qui pourchasse inlassablement le monstre vert en passant par Betty Ross, l’éternel amour de Bruce Banner. Cette série animée est d’ailleurs la première version à faire de Betty une scientifique intelligente au lieu d’une simple demoiselle en détresse, qui va aider activement Bruce à se sortir de sa condition. A la place du héros qui court après sa dulcinée, la romance Hulk-Betty durement installée participa à la vie de la série.

Joies de la censure, les armes des militaires étaient remplacées par des fusils lasers (comme dans le dessin animé Spider-man de 94) et la pantalon de Hulk « repoussait » quand il redevenait Bruce Banner.

 

 

Les années 90 : le super-vilain

 

   

 

Et puis Batman, la série animée est arrivée (1992). Et ce petit bijou noir changea l’animation super-héroïque pour toujours. Les dessins animés Marvel, même s’ils n’atteignent pas sa qualité graphique, font des héros plus nuancés et adaptent leurs plus grandes sagas. Hulk devient donc un super-vilain plein de fureur qu’on va croiser aussi bien dans Iron Man (Rencontre avec Hulk) que dans les 4 Fantastiques (Un cauchemar vert) et nous offre de spectaculaires scènes de combats. Doublé par Ron Perlman et sa voix de Hellboy rocailleuse, Hulk pousse nos super-héros dans leurs derniers retranchements lors de combats icôniques qui ont beaucoup de résonances dans le comics actuel (la saga World War Hulk où le Titan de Jade combat avec tous les héros après qu’ils l’aient envoyés dans l’espace pour se débarrasser de lui). Son tiraillement entre ses deux personnalités est beaucoup plus accentué et va trouver son apothéose dans l’un des meilleurs shows de Hulk après la série avec Bill Bixby : L’incroyable Hulk de 1996, considéré comme le dessin animé le plus noir de Marvel.

 

 

1996 : The best dark show. Ever

 

 

 

 

L’incroyable Hulk, la série animée, reprend exactement la même histoire que la série live tout en l’étoffant de personnages secondaires. Cette fois-ci Hulk ignore lui-même qu’il est le Dr Bruce Banner et le déteste cordialement et surtout, il a de vraies motivations : c’est un géant incompris qui veut qu’on le laisse tranquille. Il est pourchassé en même temps par le Général Ross et le Leader, un Hulk super-intelligent qui veut lui voler sa force. Ce show très noir avec ses personnages très fouillés culmine jusqu'à un épisode final en trois parties (Le jour et la nuit) qui va même plus loin que la mythologie établie par le comic. Betty finit par trouver un remède avec le Docteur Samson (le psychologue aperçu dans la bande annonce de l’incroyable Hulk 2008) et alors que Bruce arrive enfin à se débarrasser de Hulk, le Leader s’empare de sa force, plongeant le monde dans le chaos. Bruce est alors forcé de redevenir Hulk, ne pouvant échapper à sa création et à lui-même. Si la première saison fut particulièrement noire, la Fox mit son hola et décida d’atténuer cette tonalité en introduisant le personnage de Miss Hulk, la cousine du géant vert. La deuxième saison ne dura que huit petits épisodes.

 

 

 

Mais ce dessin animé avait définitivement trouvé un ton : exacerber l’ambiguïté entre Bruce et Hulk, tout en renforçant ses liens avec les personnages secondaires.

Six ans plus tard, Ang Lee essayait lui aussi d’imposer son ton sur le géant vert, mais le film fut plus ou moins mal accueilli par le public.

 

 

2003 : l’expérience Ang Lee

 

 

 

 

Le Hulk de Ang Lee est pourtant un film non dénué de bonnes idées : renverser la schizophrénie de Hulk vers un complexe oedipien était intéressant, malheureusement plombé par des idées nanardes comme les chiens mutants ou encore le cabotinage de Nick Nolte. Ses images splittées pour imiter les cases de la bd frôlaient aussi un peu le m’as-tu vu et acheva le projet, preuve qu’on ne joue pas impunément avec la mythologie Hulk.

 

 

2004-2008 : Régression et Renaissance

 

Après toutes ses expériences sur le personnage, Hulk mit du temps à reprendre forme humaine. Après un premier projet avorté de Hulk Jr (Hulks) avec un possible fils du géant vert, doublé par James Marsden (le Cyclope des X-Men), Hulk redevint cet éternel méchant dans l’adaptation du comics Ultimates, The Ultimates Avengers. A l’origine, la bd The Ultimates est une version « 12 salopards » des Vengeurs : les super-héros sont arrogants, se prennent pour les gendarmes du monde et ont tous des problèmes psychologiques (Giant Man, par exemple, bat régulièrement sa femme, la Guêpe). Le dessin animé destiné aux jeunes ne pouvait s’embarrasser de tous ces aspects et fut très édulcoré. Mais s’il n’y avait qu’une scène à retenir, ce serait le combat final entre Hulk et tous les super-héros, prouvant bien qu’il reste le héros le plus puissant de l’univers Marvel.

 

 

 

Hulk passe donc régulièrement de méchant surpuissant à un héros victime de sa propre force et ses différentes adaptations n’ont pas encore réussi à capter la parfait mélange qui jonglerait avec toutes ces facettes. A l’heure où L'incroyable Hulk de Louis Leterrier essaie de remettre les choses au clair en essayant de mixer personnages pertinents et scènes d’actions spectaculaires, espérons que ce Hulk ait assez de succès pour qu’il ait le temps de s’exprimer et de nous montrer sa diversité. Ou alors il aura définitivement prouvé qu’il est trop fort, même pour le cinéma.

 

 

 

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