Avant Vol au-dessus d'un nid de coucou : la meilleure histoire d'amour perfusée aux antidépresseurs

Léo Martin | 15 août 2023 - MAJ : 17/08/2023 13:48
Léo Martin | 15 août 2023 - MAJ : 17/08/2023 13:48

Film testament méconnu de Robert RossenLilith fut l’un des premiers drames américains à plonger dans le monde de la psychiatrie avec autant de grâce, avant Vol au‐dessus d’un nid de coucou.

"Lilith, seul film qui ait su traiter l’aliénation mentale de l’intérieur, crée un univers et rend inacceptables des réalisations comme The Cobweb ou David et Lisa qui paraissaient pourtant honnêtes." Voilà ce qu’écrivirent Bertrand Tarvernier et Jean-Pierre Coursodon dans 50 ans de cinéma américain à propos de Lilith, film aussi étrange que passionnant. Et il est aussi étrange qu’il ne passionne pas plus.

Ce dernier long-métrage écrit et réalisé par Robert Rossen (L’Arnaqueur) anticipait déjà la naissance du Nouvel Hollywood, se heurtant frontalement aux nouvelles réflexions sociales de l’Amérique moderne. 11 ans avant le superbe Vol au‐dessus d’un nid de coucou de Milos Forman avec Jack Nicholson, Lilith explorait pour la première fois, avec autant de romantisme que de pragmatisme, l’univers de la psychiatrie. Et comme un complément essentiel au film de Forman, il expose à travers celui-ci les fêlures d’une société elle-même schizophrène. 

 

Lilith : Photo Jean Seberg, Warren BeattyUn amour faussement pastoral

 

therapie taxi driver 

En 1964, tandis que le code Hays poussait ses derniers soupirs agonisants, Robert Rossen fut l’un des premiers à tenter de lui couper le souffle pour de bon. Pour cela il invoque une héroïne transgressive et troublée (interprétée par Jean Seberg, qui y trouvera son rôle favori) et qui ne peut que vivre hors du monde. Arrive à sa rencontre Vincent Bruce (incarné par Warren Beatty), de retour de la guerre de Corée et pour qui la vie civile fait bien peu de sens. 

À l’instar du Travis Bickle de Taxi Driver, Vincent souhaite se réintégrer, mais ne sait pas comment faire. Pour compenser son vide intérieur, il cherche alors un moyen de se rendre utile et de faire le bien. Il devient infirmier et tente ainsi de prendre soin d’une population fragile qui, un peu à son image, semble totalement déconnectée des autres. Si ce parallèle est déjà éloquent en soi, c’est au travers de la relation (puis la romance) qu’il va lentement tisser avec Lilith, que le film mettra véritablement à nu son propos. 

 

Lilith : Photo Jean SebergJean Seberg dans un rôle immense

 

En parlant de Lilith, on pourrait facilement tomber dans un discours se fixant sur sa prétendue romance maudite. La patiente égarée entraîne son bienveillant soignant dans les limbes et un fatal dénouement s’en suit. Il serait superficiel de s’arrêter là. La jeune Lilith est une figure bicéphale et aucune de ses têtes ne peut faire l’objet d’un portrait précis, si elle est séparée de l’autre. Nymphomane et sensuelle, la patiente n’est pas pour autant une femme fatale. Troublée psychologiquement et vulnérable, elle n’est pas non plus une absolue aliénée.

La suite est réservée aux abonnés. Déjà abonné ?

Accèder à tous les
contenus en illimité

Sauvez Soutenez une rédaction indépendante
(et sympa)

Profiter d'un confort
de navigation amélioré

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.
Vous aimerez aussi
commentaires
Aucun commentaire.