The Craft, Halloween... 10 mauvais films cultes qu'on aime quand même (un peu)

La Rédaction | 25 octobre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
La Rédaction | 25 octobre 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

The Craft, Halloween, Urban Legend, Souviens-toi... l'été dernier... la vague de films d'horreur des années 90-2000, pas toujours très bons, mais souvent très cool.

Un nouveau Scream, une série Souviens-toi... l'été dernier, un retour d'Urban Legend, l'increvable Michael Myers qui reviendra dans Halloween Kills et Halloween Ends, l'interminable saga Chucky, et une suite-remake de Dangereuse Alliance intitulée The Craft : Les nouvelles sorcières (notre critique de The Craft 2020 par ici)... Le film de genre, c'est comme la mode : ça revient par vague, ça tourne en rond, et ça promet de la nouveauté en recyclant les idées d'hier.

Parce qu'on a (presque) tous succombé à ces petits phénomènes, et forgé notre amour du cinéma de genre avec de sympathiques mauvais films, l'équipe d'Ecran Large se prend un coup de vieux pour revenir sur 10 films d'horreur, tendance slasher, des années 90 et 2000. Parfois considérés comme cultes, souvent aimés en dépit du bon sens, mais toujours amusants à revoir, ils restent de petits plaisirs même pas coupables.

PS : Oui, Ça : Il est revenu est une mini-série, pas un film, mais tant pis.

 

photo, Zoey Luna, Cailee Spaeny, Gideon Adlon, Lovie SimonePriez pour qu'on puisse berner le public

 

Halloween : 20 ans après

Le prétexte : Comme Scream a marché, et que la saga Halloween prend la poussière depuis le mauvais Halloween 6 : La Malédiction de Michael Myers en 1995, les producteurs décident de mixer Michael Myers avec la vague de teen slasher horror drama whatever movie. Ils engagent pour ça le scénariste Kevin Williamson, superstar de l'époque puisqu'il va enchaîner Scream, Scream 2, Souviens-toi... L'été dernier et The Faculty. Celui-ci trouve un moyen de ramener Laurie Strode, censée être morte dans Halloween 4, et comme ça se passe 20 ans après le premier film, le titre est tout trouvé. Le scénario, lui, sera beaucoup remanié, et Williamson ne sera crédité officiellement que sur l'histoire.

Jamie Lee Curtis accepte de revenir pour la première fois depuis Halloween II en 1982, et John Carpenter lui-même devait en être, avant de claquer la porte : il voulait un contrat pour trois films et un gros chèque pour rattraper les bénéfices qui lui ont échappé sur la saga, mais Dimension Films (les Weinstein donc) ont refusé. Steve Miner (réalisateur de suites de la saga Vendredi 13) a récupéré le film.

Vingt ans après, Laurie Strode a changé de nom après avoir mis en scène sa mort, est devenue la mère de Josh Hartnett et travaille dans une école privée. Mais elle ne s'est tellement pas remise des événements qu'elle s'enfile parfois deux verres de vin d'affilée, et tremble encore en pensant à son frérot psycho. Ce qui tombe bien puisqu'il revient sans raison, pour faire peur dans la cour d'école.

 

photo, Jamie Lee Curtis"Ça te va si on va dans le ravin avec la franchise ?"

 

Le résultat : Un mauvais film, mais un Halloween passable, au vu des errances de la saga. Car malgré la bonne idée de Laurie Strode traumatisée et à moitié alcoolique, qui donne un peu de matière au personnage, ce retour de Michael Myers est d'une platitude folle. Si la franchise s'était perdue dans des impasses et tentatives parfois absurdes, ce retour sur les rails du spectacle carré n'est rien de plus qu'un sous-Scream, bête, même pas méchant, mais forcément amusant.

Personnages secondaires sans aucune saveur, mises à mort timides, poursuites banales... Hormis une intro assez réussie où Joseph Gordon-Levitt finit avec un patin dans la tronche, ce H20 passe une bonne heure à tourner en rond, avec du teasing de bas étage et un Michael Myers digne d'un sketch (la scène où il observe LL Cool J). Après deux ou trois meurtres pas très marquants, la confrontation tant attendue entre Laurie et The Shape arrive, donnant l'impression que le film commence enfin. Sauf que tout ça est expédié en 10 minutes stupides, avec notamment une scène de cache-cache sous les tables qui donne plus envie de rire qu'autre chose.

La dernière ligne droite, qui finit littéralement dans un ravin, est plus excitante, notamment avec cette fin claire et nette où Laurie règle enfin ses comptes - le tout dernier plan, avec la musique et l'adrénaline de Laurie, reste très bon. Mais ce petit plaisir sera perdu dès la suite Halloween : Resurrection, qui réécrit l'histoire pour sauver Myers et assassiner le peu de crédibilité encore là. Pas étonnant que tout ça ait été jeté à la poubelle avec Halloween 2018.

 

Photo Josh Hartnett, Michelle WilliamsJosh Hartnett et Michelle Williams : pas simple de démarrer à Hollywood

 

Le meilleur/pire moment : Chaque utilisation grotesque des musiques de Scream et Scream 2, notamment dans les scènes de poursuite et suspense. John Ottman avait composé une musique originale pour Halloween : 20 ans après, mais Bob Weinstein a décidé de tout changer en post-production, et a viré son travail pour coller celui de Marco Beltrami.

Une manoeuvre d'une bêtise affligeante, qui montre parfaitement à quel point les intentions derrière cette suite étaient cyniques. Ce qui en devient même comique lorsque dans une scène, Scream 2 passe à la télévision sans que personne ne la regarde, et qu'un personnage arrive en appelant "Sarah"... alors même que c'est la scène avec Sarah Michelle Gellar dans le Wes Craven.

 

photoMichael Myers débilos

 

Ça : Il est revenu

Le prétexte : En 1986, quand le roman Ça de Stephen King est publié, l'auteur est particulièrement à la mode dans les salles de cinéma. Shining, Cujo, Dead Zone, Christine, CharlieLes Démons du maïs, Simetierre ou encore Stand by Me viennent de s'enchaîner. C'est le succès de ces derniers qui va définitivement motiver la chaîne ABC à adapter le clown des enfers, et c'est un risque : pas grand monde n'associe la télévision, plutôt à destination des familles, à l'horreur. Mais le vent commence à tourner, comme le prouvent les phénomènes Twin Peaks et Les Contes de la crypte.

Stephen King est le premier à ne pas trop y croire, même si (ou peut-être : précisément parce que) Tobe Hooper avait adapté Salem en mini-série en 1979. Avec ses images sanglantes et scènes perturbantes, notamment la fameuse communion sexuelle entre les héros, Ça n'a rien d'un programme familial lisse, mais ABC fonce, et n'y va pas de main morte puisque le grand George A. Romero est annoncé à la réalisation en 1989. Il ne tardera pas à partir, refroidi par les décisions des producteurs (la mini-série de 8-10 heures est passée à 3-4 heures).

Tommy Lee Wallace, réalisateur de Halloween III : Le sang du sorcier, est engagé dans la foulée. Le scénario est signé Lawrence D. Cohen, derrière l'adaptation de Carrie au bal du diable de Brian De Palma et la future mini-série Les Tommyknockers. Cohen avait un temps envisagé de séparer l'intrigue des enfants de celle des adultes comme les récents films Ça. Pendant le tournage, le scénario est en partie réécrit par Wallace, et allégé pour tenir en trois heures. Sans surprise, Stephen King sera moyennement convaincu, notamment par le personnage de Richie, trop simplifié selon lui.

Avec un budget de 12 millions, la mini-série est un gros pari, et ABC ne le regrettera pas : avec près de 30 millions de spectateurs, Ça : Il est revenu devient vite le succès de 1990, vendu à travers le monde (M6 en France, on s'en souvient tous). Pour l'anecdote historique, la diffusion aux États-Unis était entrecoupée d'images de George H.W. Bush, alors en visite en Europe et le golfe persique.

 

Photo, Tony Dakota, Tony Dakota"Ils flottent tous en bas", comme on le sait tous

 

Le résultat : Nul doute que Ça : Il est revenu a marqué l'imaginaire de beaucoup de monde, et largement participé à la renommée du roman de Stephen King en plus de désespérer toutes les associations de clowns à travers le monde. Difficile d'oublier l'interprétation de Tim Curry, absolument génial en Pennywise grotesque, burlesque, qui donne autant envie de rire que d'aller pleurer dans les jupons de sa maman.

Avec le recul, la mini-série oscille entre le bon et le très mauvais, avec une grille de lecture qui peut finalement être très simple : les apparitions de Pennywise sont plutôt bien, et le reste, plutôt pas bien. La scène d'intro avec Georgie, le lavabo de la salle de bain de Bev avec son père qui lui caresse le visage avec ses gros doigts sanglants, les ballons dans la bibliothèque, l'apparition dans les douches... Ça : Il est revenu regorge de moments flippants et bien pensés, notamment lorsque l'horreur n'est pas sponsorisée par le kitsch des effets de l'époque. Dès que Tim Curry est là avec la musique, il envahit l'écran, et avale tout.

Le reste, c'est un niveau d'écriture, mise en scène et interprétation très typé TV, c'est-à-dire un peu grossier, niais et fade. Difficile de s'attacher à ces versions adultes neuneu de Bill, Beverly, Ben, Eddie, Richie, Mike et Stanley, tant les scènes dédiées sont plates au possible. Côté enfants, c'est néanmoins un peu plus solide, heureusement.

 

photoLa lose, oui

 

Le meilleur/pire moment : Il y aurait bien la scène de Pennywise et Richie dans la bibliothèque, où on voit très bien les figurants tenter de rester impassibles quand les ballons de sang explosent sur leur visage, mais difficile de ne pas revenir sur la fameuse araignée finale.

Créée par le studio Fantasy II de Gene Warren (oscarisé pour La Machine à explorer le temps des années 60), la forme arachnéenne de Pennywise a demandé 13 semaines de travail et 200 000 dollars, pour un résultat qui n'a pas marqué (en bien) les esprits. Warren était le premier à sentir le problème, comme raconté à Yahoo en 2015 : "Même dans le livre, j'avais un problème avec l'araignée. King a pu imaginer ça dans sa tête, mais c'était difficile à retranscrire à l'écran. On a donné le ton et les paramètres dans la première partie avec Pennywise. Mais quand on arrive à l'araignée, on est dans un autre monde. Ça devait être un film d'horreur, pas Jason et les Argonautes."

Mix entre une grosse araignée sur le plateau (avec un comédien à l'intérieur et une dizaine de techniciens et opérateurs pour les différentes parties de la bestiole), et des images en stop-motion, la créature n'a même pas convaincu l'équipe. Pas grand monde ne sera satisfait de la créature à l'écran, que ce soit Stephen King, les acteurs ou le réalisateur Tommy Lee Wallace - qui expliquera que jamais la bête n'aurait dû être filmée d'aussi près, et qu'elle aurait dû rester mystérieuse.

Pour le spectateur, c'est assurément l'un des moments les moins excitants, effrayants et marquants de la mini-série. Mais c'est potentiellement le plus drôle, et le meilleur marqueur temporel, qui rappelle les problématiques du cinéma de genre au début des années 90 avant l'avènement des images de synthèse.

 

photoAh, les années 90...

 

Dangereuse Alliance

Le prétexte : L'idée de Dangereuse Alliance (ou The Craft en version originale) est née d'un brainstorming entre le producteur Douglas Wick et le scénariste Peter Filardi (sortant tout juste de L'Expérience interdite). Les deux hommes avaient envie de faire un film d'ado différent du tout venant, suivant un groupe de filles marginalisées, au milieu d'un monde d'hommes qui commencent à avoir du désir sexuel, afin de voir comment elles réagiraient si elles étaient dotées de pouvoirs surnaturels. Filardi écrit donc un scénario puis Andrew Fleming entre dans la danse pour  s'occuper de la réalisation.

Comme Fleming l'a confié dans une interview à Entertainment Weekly, leur objectif était donc de faire un film d'ados sortant des codes : "Les films au lycée étaient tout roses et amusants, ils tournaient toujours autour du bal, mais mon souvenir du lycée, c'était qu'il y avait beaucoup de pression". Un moyen d'attirer le public en capitalisant sur la mode des teen movies, mais en se focalisant cette fois sur un groupe féminin et une histoire beaucoup plus sombre et sérieuse.

Car oui, Wick, Filardi et Fleming ne veulent surtout pas faire de leur quatuor féminin de simples adolescentes comme les autres à la recherche de leur cavalier pour le bal de fin d'année. Le fameux rendez-vous ne sera d'ailleurs jamais évoqué durant le film (sans doute une première). Au contraire, ce sont des sorcières aux pouvoir féroces, qui ne se laisseront pas faire, et certainement pas par les mecs.

 

Photo Fairuza BalkElles ne se laisseront pas faire

 

Le résultat : Dangereuse Alliance a été un joli succès en mai 1996. Avec un budget d'environ 15 millions, il en a récolté plus de 55 millions à travers le monde, malgré sa classification Rated R (soit interdit aux moins de 17 non accompagnés d'un adulte aux États-Unis). Plus de 20 ans après sa sortie, le film est toujours culte, comme l'a rappelé le documentaire Beyond Clueless.

Techniquement parlant, le film se défend bien avec plusieurs scènes toujours solides avec le recul (le grand final a plutôt bien vieilli), dont les effets spéciaux impressionnent. Mais globalement, c'est très kitsch, avec une utilisation de la musique à outrance et un récit au déroulé bien trop classique.

Non, là où le film marque des points, c'est parce qu'il a surtout le mérite de développer des sujets majeurs et souvent glissés sous le tapis à l'époque (racisme, viol, culte de l'apparence, slut-shaming...). Voir un groupe d'adolescentes prendre le contrôle de son destin force donc le respect tant cela allait à l'encontre des codes de l'époque. Les valeurs féministes et contestataires du film sont assez jubilatoires, et lui donnent une aura très moderne.

À côté de cela, le film a permis de donner naissance à deux actrices célébrées par la suite : l'excellente Robin Tunney et surtout l'incontournable Neve Campbell dont c'était le premier grand rôle au cinéma, quelques mois avant l'avènement de Scream. Par ailleurs, certaines anecdotes de tournage sont venues alimenter son petit statut de culte, plusieurs sources internes ayant affirmé que lors des incantations wiccans du quatuor féminin, des phénomènes étranges s'étaient déroulés (des chauves-souris volant au-dessus du plateau, des marées rapides, une mer déchainée) au point d'inquiéter le consultant en sorcellerie du film.

 

Photo 2 The CraftDes incantations qui ont failli mal tourner... en vrai

 

Le meilleur/pire moment : Deux scènes sont particulièrement marquantes pour deux raisons très différentes : celle des serpents et celle du bus. La première est particulièrement réussie tant l'ambiance créée par les décors, la musique et l'accumulation incessante des bestioles qui envahissent la maison et l'écran, offre une belle dose d'angoisse. D'autant plus que la jeune Sarah pense que ses parents viennent de mourir dans un accident d'avion lorsqu'elle découvre des (fausses) images à la télévision.

La deuxième est sans doute celle qui démontre le mieux à quel point le film était en avance sur son temps. Alors qu'elles descendent du bus, le chauffeur leur dit : "Faites gaffe aux dingues, les filles", ce a quoi la cheffe du groupe, Nancy (Fairuza Balk) répond : "C'est nous les dingues, monsieur". Un échange extrêmement bref qui est toutefois lourd de sens : dans Dangereuse Alliance, les filles contrôlent leur vie et reprennent confiance en elles, et c'est de ça que les hommes devraient avoir peur.

 

Photo Neve CampbellNeve Campbell avant le succès de Scream

 

SOUVIENS-TOI L'ÉTÉ DERNIER

Le prétexte : Le succès de Scream marque le début d'un phénomène de néo-slashers, et la Columbia Pictures y voit l’occasion de concrétiser un scénario écrit quelques années plus tôt. C’est une lointaine adaptation du roman Comme un mauvais rêve, de Lois Duncanque la romancière tentera d’interrompre, tant le projet tranche avec son texte et la ramène au meurtre de sa propre fille, assassinée par un inconnu en 1989.

Mais qu’importe, cette adaptation intitulée Souviens-toi... l’été dernier a été écrite par le père de Scream, le scénariste Kevin Williamson, instantanément propulsé faiseur de billets verts pour un Hollywood désireux de battre le fer tant qu’il est rougi de sang. Le studio met donc en branle la production à toute vitesse, avec pour ligne de mire une sortie au courant 1997.

Ces origines et cette deadline serrée expliquent en grande partie le fait que le métrage soit un ersatz de celui de Wes Craven, en cela qu’il s’agit d’un pur slasher, dont il ne reproduit jamais l’état d’esprit. En effet, le film n’est jamais second degré, et déroule son intrigue sans effets méta, puisqu’il a été conçu dès ses racines comme un film de genre pur sucre, sans aucune intention de réfléchir ou de pasticher son thème. 

Nous y suivons quatre jeunes gens, qui ont fêté la fin de leurs études secondaires assez spectaculairement, en écrasant un malheureux pêcheur. Afin de préserver leur avenir et leurs casiers judiciaires, ils dissimulent son corps. Mais un après, alors que leur amitié s’est délitée, des meurtres pour le moins étranges et des messages sibyllins leur font comprendre que quelqu’un connaît leur méfait et veut leur faire payer. 

 

photo, Jennifer Love HewittScream princesse

 

Le résultat : Comparé au slasher méta de Wes Craven, Souviens-toi... l’été dernier fait office de petit cousin imbibé de white spirit, longtemps bercé près d’un mur aux chevrons apparents. Aucune prise de distance ou conscience de lui-même, pas le plus petit début d’une réflexion sur le genre ou son évolution, juste une avalanche de clichés et de stéréotypes précipités sur le chemin d’un tueur sadique. 

Et en fait, ça marche plutôt bien, tant le film semble dénué de cynisme, et pourrait avoir été extrait d’un carton oublié au mitan des années 80. Par conséquent, et pour tous les amateurs de petits slashers des familles, l’ensemble a de beaux airs de madeleine de Proust.

Autre raison de s’en délecter : le casting. On y retrouve les enfants chéris de l’époque (Sarah Michelle GellarRyan Phillippe, Freddie Prinze Jr. et Jennifer Love Hewitt), tous aussi mauvais que charismatiques, aussi lisses que beaux.

Enfin, Souviens-toi l’été dernier est une des rares tentatives réussies de retrouver quelques-uns des grands motifs de l’âge d’or du genre. Le film parvient notamment à se doter d’une mythologie plus efficace que la moyenne, et inventer un tueur au look et aux accessoires plutôt sympathiques. Tout ça avec des meurtres plutôt réussis (pauvre Buffy dans la ruelle), et au tempo bien trouvé.

 

photo, Jennifer Love Hewitt, Ryan Phillippe, Sarah Michelle GellarL'été de leurs vingt ans...

 

Le meilleur/pire moment : Quand Jennifer Love Hewitt, manifestement dénuée d’odorat, découvre que quelqu’un a rempli le coffre de sa voiture de choucroute de la mer (et d’un cadavre). Alors qu’elle s’en va prévenir ses amis, ils constatent que ces déchets aqueux ont disparu du dit coffre. La pauvre Julie est alors submergée par l’émotion, et tandis que la caméra pivote autour d’elle, la jeune femme se laisse aller à un pur moment de vulnérabilité. “WhhHHhaaAaattT are YoU WaITIng fOr ?” hurle-t-elle, des trémolos dans la voix.

Le résultat est à la fois instantanément mémorable, et intensément stupide. Emphatique à l’extrême, surjouée comme pas possible, la scène qui entend nous montrer à la fois la force, mais aussi les failles de son héroïne, n’a pas grand sens. Ce qui est sûr, c’est que le résultat reste une des scènes les plus emblématiques du film, qui contient juste ce qu’il faut d’émotion hollywoodienne, de superficialité et de kitsch.

Et c'est assez logique, puisque la séquence à une origine pour le moins incongrue. Durant la fabrication du film, la production a lancé un concours, avec la possibilité pour un fan de cinéma de genre d'imaginer une scène, et de la diriger. Comme le racontera plus tard l'actrice principale, lors d'une conférence de presse de Television Critics Association (en 2018), l'équipe de tournage s'est donc retrouvée avec un jeune garçon fan de slasher, rêvant de voir une scream queen sortir de sa voiture et hurler sa détresse à la face de l'univers. Eh oui, les slashers aussi ont un coeur.

Notre dossier sur la suite Souviens-toi... l'été dernier 2, qu'on aime aussi.

 

photo, Jennifer Love HewittLes enfants sont merveilleux

 

Urban Legend

Le prétexte : Après Souviens-toi... l'été dernier, il y a donc eu Urban Legend. Le jeune scénariste Silvio Horta imagine un slasher autour des légendes urbaines, et il n'en faut pas plus pour convaincre le producteur Neal H. Moritz, déjà derrière Souviens-toi l'éte dernier.

Le producteur applique exactement la même formule, à commencer par le casting : de jeunes acteurs issus pour la plupart des séries à la mode (Joshua Jackson de Dawson, Jared Leto d'Angela, 15 ansMichael Rosenbaum dans Smallville). C'est le premier film de Jamie Blanks, qui avait failli se charger de Souviens-toi... l'été dernier, et signera plus tard une belle niaiserie, Mortelle Saint-Valentin.

À sa sortie, Urban Legend prouve la limite de la formule, ne récoltant que 72,5 millions de dollars, ce qui est loin des 173 millions de Scream, et des 125 millions de Souviens-toi l'été dernier. Mais ça n'empêchera pas la mise en chantier d'Urban Legend 2 : Coup de grâce et Urban Legend 3 : Bloody Mary.

 

photoCoucou !  

 

Le résultatUrban Legend souffre du mal commun du slasher des années 90, à savoir une application à la lettre de la formule du genre. Si Souviens-toi l'été dernier avait quelques idées inventives, le film de Jamie Blanks arrive déjà trop tard, et peine à convaincre ou même amuser réellement.

Le film partait pourtant bien, avec une scène d"ouverture franchement pas mal foutue, et qui a marqué les esprits. Et sans surprise, les meilleurs moments restent les scènes de meurtre, que ce soit Tara Reid en larmes, la voisine de chambre dans le dos de l'héroïne, ou le micro-ondes.

Le scénario de Silvio Horta entame un début de réflexion méta pas inintéressant, notamment sur la manière dont ces histoires ancrées dans l'imaginaire collectif, évoluent dans notre époque contemporaine, racontées et réinterprétées de manières différentes. Mais n'est pas Wes Craven/Kevin Williamson qui veut : Urban Legend se recentre vite sur le recyclage pénible de tous les clichés du genre, avec des personnages bêtes et sans saveur, un tueur à capuche pas vraiment stylé (iconographie niveau zéro), des jumps-scares débiles dès qu'un personnage se trouve derrière notre héroïne, et des allusions sexuelles hyper lourdes parce qu'on est dans un teen movie des années 90.

Ajoutez à ça un twist de la mort qui tue, où la tueuse révèle ses motivations comme dans un exposé, avec des motifs de vengeance plus qu'éculés, et vous obtenez ce qui se faisait de pire dans le genre, à l'époque. Heureusement que Rebecca Gayheart s'en donne à coeur joie en folle furieuse.

 

photo Urban LegendAprès le crochet, la hache. Pas très original tout ça...

 

Le meilleur/pire moment : La scène d'ouverture, bien sûr. Une jeune femme s'arrête dans une station service isolée, et tombe sur un employé bègue et louche (Brad Dourif). Alors qu'il tente difficilement de lui dire quelque chose, il devient réellement creepy, si bien que la femme le repousse avec une bombe lacrymo, et s'enfuit, paniquée.

Dommage pour elle : ce charmant employé voulait simplement la prévenir qu'il y a quelqu'un caché sur la banquette arrière. Sur fond d'orage et Bonnie Tyler (TURN AROUND qu'elle dit), une ombre apparaît, avec une grosse capuche et une grosse hache. Ce qui, au passage, est un plan un peu foireux de la part de notre tueur, puisque la voiture est en marche. Ca n'en reste pas moins une scène d'intro malicieuse, pleine d'ironie et cruauté, qui aurait eu sa place dans un Scream.

Notre dossier complet sur Urban Legend par ici.

 

photoUn Brad Dourif tout mouillé...

 

13 fantômes

Le prétexte : On est au tout début des années 2000, et le studio Dark Castle, fondé par Joel Silver et Robert Zemeckis, se fend de plusieurs remakes pour se faire une place sur le marché de la série B hollywoodienne. Leur cible est l’homme qui a donné son nom à la firme : William Castle, réalisateur de classiques du cinéma d’épouvante des années 50-60. Produit pour un confortable budget de 37 millions de dollars, La Maison de l'horreur en rapporte quelque 42 millions, ce qui, pour citer Alain Chabat, est "bien, mais pas top".

Ça ne décourage pas les patrons de la firme, qui mettent encore 5 millions de plus sur la table pour produire un remake de 13 Fantômes, un des films les plus célèbres de Castle. Et si l'original est aussi culte, c'est aussi parce qu'il a été vendu sur un gimmick qui a beaucoup fait parler de lui à l'époque : on pouvait choisir de voir le film sans lunettes 3D et manquer les fantômes du titre, ou faire preuve de courage et affronter ces revenants sanguinaires.

Derrière la caméra, on trouve Steve Beck, qui récidivera peu de temps après avec Le Vaisseau de l'Angoisse, premier film Dark Castle à ne pas être un remake. Au casting se pressent Shannon Elizabeth d'American PieMatthew Lillard de Scream, F. Murray Abraham et même le Tony Shalhoub de Monk. Une distribution étonnante, donc, au service d'une production qui est, contrairement à son prédécesseur, rentrée dans la tête de ses spectateurs.

À l'époque, elle fonctionne bien mieux que La Maison de l'horreur, avec 68,4 millions de dollars de recettes, malgré une critique assassine. Elle permet surtout à la machine Dark Castle de se mettre en route, pour quelques-uns des films d'horreur hollywoodiens les plus emblématiques des années 2000, tels que La Maison de cireEsther ou Splice.

 

photo, Matthew LillardLes fameuses lunettes

 

Le résultat : Vous vous souvenez du gimmick des lunettes ? Et bien, dans le remake, ce ne sont pas les spectateurs qui ont des lunettes, mais les personnages. Et le long-métrage, pour simuler à la fois la présence et l'absence des fantômes, cède à un style de mise en scène particulièrement présent dans les années 2000 : la saignée de rétine à blanc.

Ne respectant que très rarement ce que voient en réalité ses protagonistes, 13 Fantômes est monté comme un jeu de flashs permanents où chaque plan sur une créature est un jumpscare en soi. Chaque confrontation est conçue comme un clip de nightcore réalisé sous speed, incapable de mettre en valeur ses effets autrement qu'en les projetant aléatoirement et à toute vitesse à l'écran, avec l'effet sonore le plus brutal possible, histoire de lier tous nos sens dans la douleur.

Et c'est dommage, puisqu'outre leur incrustation dans un décor très inspiré de La Maison de l'horreur, les fantômes en question ont plutôt de la gueule. Conçus en partie par Robert Kurtzman, maquilleur émérite qui a eu la chance de débuter sa carrière avec Evil Dead 2 et de la poursuivre avec Phantasm IIFreddy 5 et Halloween 5, ils auraient été très agréables à l'oeil si le montage ne s'employait pas à achever tous les épileptiques de la salle. 13 Fantômes symbolise tout ce qui se faisait de pire visuellement dans les années 2000.

 

photo, Shannon ElizabethÀ droite: avant le film. À gauche: après le film

 

Le meilleur/pire moment : La mort de l'avocat qui, avant de déclencher le mécanisme qui causera sa perte par mégarde, prend bien le temps de narguer chacun des fantômes bientôt en liberté. Et finalement, ce n'est même pas eux qui le tueront, car il finira sectionné en deux sur une vitre : c'est le meilleur effet gore du film, et il n'a vraiment pas vieilli.

Pour le reste, on va se contenter de décrire le comportement de chaque esprit rencontré en 2 minutes 30. Le premier esprit apparait, disparait, apparait puis disparait. Le deuxième esprit apparait à gauche, apparait à droite, réapparait à gauche puis disparait. Le troisième esprit apparait, apparait pas gentil, apparait très vénère, apparait... en blanc puis apparait calme.

L'avocat en question enclenche le mécanisme, puis se retrouve de nouveau nez à nez avec le troisième esprit qui apparait, disparait, apparait, disparait, apparait, apparait deux centimètres plus près, disparait, apparait, puis se casse. À noter que chacune de ces apparitions est accompagnée d'un effet sonore particulier et d'un flash aveuglant. Cette analyse de séquence vous a été proposée par Ecran Large.

 

photoChampionne du monde 2002 de cache-cache

 

Chucky, la poupée de sang

Le prétexte : Le prétexte, c'était plutôt à nous de le trouver. Comment constituer une telle liste sans évoquer les Chucky, l'une des seules sagas d'horreur des années 1990 avec Scream à avoir su se constituer une communauté de fans, guettant chaque nouvel opus ? Mais il était difficile d'en piocher un dans le tas, tant la franchise a connu de changements.

Et si Jeu d'enfant est à la fois bien trop honnête et légèrement trop vieux pour s'inviter dans le classement (le long-métrage du seul Tom Holland qui transpire la classe dans ce monde reste un modèle de transgression sale gosse des thèmes de l'enfance), ses suites les plus célèbres relèvent plus de la parodie rigolarde que de l'authentique film d'épouvante culte, dans l'idée qu'on s'en fait.

Il restait donc les premières suites, et notamment ce deuxième opus réalisé par John Lafia (scénariste de Jeu d'enfant), toujours avec Alex Vincent, l'éternel Andy persécuté par sa poupée, et bien sûr Brad Dourif au doublage de ladite poupée.

 

PhotoAndy, bien loin de Toy Story

 

Le résultat : C'est le fruit d'une capitalisation flagrante, tout en proposant un spectacle très abouti. Certes, rien de bien nouveau dans la formule Chucky. On suit toujours un gosse pas très bien dans sa peau incapable de faire entendre raison à des adultes qui regrettent très vite de ne pas l'avoir écouté. Mais on ne change pas une équipe qui gagne et le scénario de Don Mancini est toujours très efficace quand il s'agit de martyriser le pauvre gosse.

Comme beaucoup de bons films du genre, Chucky 2 fait très bon usage de sa durée limitée (87 minutes, générique compris) et condense son action pour un tour de montagne russe familier, mais toujours amusant, aidé par une mise en scène parfois inventive et des effets spéciaux qui fonctionnent étonnamment bien, même aujourd'hui.

Mieux encore : il propose quelques scènes vraiment fun, toujours ponctuées du langage châtié de la poupée, et se démarque de son prédécesseur en plongeant pour la première fois dans le gore qui tâche à l'occasion d'un dernier acte d'anthologie. Si Jeu d'enfant fut vite précédé d'un petit culte, c'est définitivement cette suite qui a fait entrer la poupée Brave Gars au panthéon des méchants de films d'épouvante.

 

PhotoTiens, il y a Christine Elise, aussi

 

Le meilleur/pire moment : Impossible de ne pas s'attarder sur le climax du film, véritable morceau de bravoure parodiant sans vergogne l'acte final du Terminator de James Cameron, climax enchâssé compris. C'est à cette occasion que Lafia et Mancini ouvrent les vannes du bain de sang, notamment en dotant leur antagoniste d'un corps mutant mi-poupée mi-vivant qui se fera salement malmener dans différentes machines.

Décidément très client d'un humour noir qui s'assume, le duo use et abuse du décor pour pervertir au dernier degré la magie d'une fabrique de jouets. Ils conçoivent des monstres, installent des manivelles à torrents d'acide (la sécurité avant tout) et font passer des adultes sur la table d'opération synthétique. La définition même d'un pur plaisir régressif, soit la marque de fabrique de la saga, un des petits sommets de divertissement irrévérencieux de cette époque.

 

photoRambo au rayon jouets

 

Freddy contre Jason

Le prétexte : Ça devait être l'affrontement ultime, un crossover pour les gouverner tous, un crossover pour les trouver, un crossover pour les amener tous et dans les ténèbres les lier. Au Pays du slasher où s'étendent les ombres.

En 1988, après un gros paquet de films qui sombrent de plus en plus dans le nanar pur et dur (L'Ultime Retour est encore plus stupide que son titre le laisse présager), la licence Vendredi 13 est rachetée par New Line qui, à l'époque, n'a pas encore dans son catalogue Le Seigneur des Anneaux. Elle compte surtout sur une franchise phare qui l'a propulsée sur le devant de la scène après le succès des Griffes de la nuit : Freddy.

La firme possède ainsi les deux boogeymen de slasher les plus célèbres, si on exclut Michael Myers. Évidemment, les dieux du genre exigent une rencontre au sommet, et c'est ce qu'elle annonce plus ou moins en clôturant sa première vraie production Vendredi 13, le soporifique Jason va en enfer, par un des cliffhangers les plus excitants de l'histoire du cinéma d'horreur : les griffes du tueur d'Elm Street agrippent le masque de hockey...

Mais il faudra attendre bien plus longtemps que prévu pour voir cet affrontement sur grand écran. Faute d'un scénario satisfaisant, New Line ne laisse pas le génie des effets spéciaux Rob Bottin à la mise en scène et prend le temps de sortir un autre Freddy (Freddy sort de la nuit) et un autre Vendredi 13 (Jason X).

Finalement, c'est Ronny Yu, auteur de quelques grands films hong-kongais mais surtout du succès La Fiancée de Chucky, qui est sélectionné derrière la caméra. Un plutôt bon choix contrebalancé par une grosse déception pour les fans : le maboul Kane Hodder ne récidive pas dans le rôle de Jason, remplacé par Ken Kirzinger, le cuisinier de L'Ultime retour (oui).

 

Photo JasonHockey boomer

 

Le résultat : On peut aborder Freddy contre Jason sous deux angles, qui conditionnent considérablement notre appréciation de la chose. D'abord, on peut le voir comme le 11e Vendredi 13. Dans ce cas, après un marathon constitué à 90 % de catastrophes filmiques ronflantes et même parfois délestées de leurs effets gores les plus gratinés (censure américaine oblige), le film ressemble presque à un soulagement. Bien mieux torché que la moyenne grâce au talent indéniable de son réalisateur, il a le mérite de ne jamais se prendre au sérieux et de proposer enfin une menace crédible à Jason. Parce que non, la sous-Carrie dépressive du 7 ne compte pas.

Par contre, quand on le voit comme le 8e Freddy, la déception est de taille. La saga initiée par Wes Craven, si elle n'a jamais brillé par son intelligence, avait pour elle de proposer des séquences de cauchemar toutes plus délirantes esthétiquement les unes que les autres, du moins jusqu'à un Freddy sort de la nuit qui n'a certes pas convaincu tout le monde, mais qui reste une expérimentation assez originale. Freddy contre Jason n'a ni le goût de la scène qui tue des premiers opus, ni la réflexion méta du dernier.

Il reste morne malgré tout, et continue à faire de Freddy un personnage presque sympathique, alors qu'il s'agit quand même d'un pédophile notoire. Ici, l'élément perturbateur n'est rien d'autre que son ennui profond. Et le combat final très cartoonesque ne justifie pas tout non plus.

 

photo Freddy contre JasonJe te tiens, tu me tiens...

 

Le meilleur/pire moment : On aurait pu citer le fameux affrontement final, bien trop long pour se résumer à "un moment", mais la séquence où Jason débarque en pleine rave party est bien plus symptomatique de la sympathique débilité qui siège au coeur des deux franchises. Au-delà de la vision de la fête étudiante, plus clichée que le plus cliché des teen movies en ce bas monde, et des dialogues des fêtards ("Pourquoi tu ne te trouves pas un cochon à baiser ?", la classe), on retient un meurtre tout droit sorti d'un Tex Avery et l'image d'un tueur en flammes découpant des ados aléatoirement.

Plus drôle encore : le scénario était bien obligé de trouver une faiblesse au tueur du vendredi, présenté depuis des années comme invincible. Et c'est l'eau qui a été retenue. Une idée débile puisque le premier Vendredi 13 se terminait sur un meurtre aquatique, le seul vraiment perpétré par Jason. De fait, lorsqu'il faut interrompre son immolation, il donne un coup de machette dans un fut de bière. La boisson parfaite pour s'infliger profiter de ce crossover pas très malin, mais parfois divertissant.

 

photoLe feu, cette teuf

MORTELLE SAINT-VALENTIN

Le prétexte : Scream 3 a déjà un an, et sa solidité au box-office motive Hollywood pour continuer à exploiter le filon des tueurs masqués amateurs de carpaccio humain. Ça tombe bien, le réalisateur Jamie Blanks est dispo et le CV du monsieur aiguise les appétits, puisqu’on lui doit Urban Legend.

Car en ce début de troisième millénaire, l’attention du public est toujours attirée par les descendants du néo-slasher de Wes Craven. Signe des temps, Mortelle Saint-Valentin est encore aujourd’hui le film le moins cher à avoir obtenu un spot publicitaire durant la très convoitée mi-temps du Super Bowl. Et qu’un film à “seulement” 10 millions de dollars puisse concurrencer les blockbusters d’alors indique combien la case “tueur fétichiste” générait d’excitation.

Ajoutons que si le métrage ne manque pas de défauts, il a pour lui un certain flair et parvient à réunir un joli casting de gueules attachantes de stars en devenir, ou à la carrière en plein décollage. Retrouver Denise Richards, David BoreanazMarley Shelton ou encore Katherine Heigl est un plaisant shoot de nostalgie. Nous suivons donc une tripotée de copines, victimes d’un tueur en série sévissant à l’approche de la St-Valentin, déguisé en chérubin. Or, les amies ont traumatisé un adolescent quelques années plus tôt, l’accusant à tort de viol après lui avoir fait subir un violent râteau collectif. Souviens-toi qui tu as largué... 

 

photo, Denise Richards, Marley SheltonAttention chérie, ça va trancher

 

Le résultat : La critique n’a pas été tendre avec Mortelle Saint Valentin et gageons que ces réactions glaciales ont été largement causées par le scénario de Donna Powers, inspiré du roman de Tom Savage (dont les droits ont été achetés uniquement), avec un concept central épais comme du gros sel. 

Presque 20 ans avant #MeToo, présenter la gent féminine comme particulièrement cruelle et violente envers les hommes est une chose ; mais le faire en caractérisant si pauvrement ses héroïnes est indigeste. Toutes sont plus ou moins insupportables et terriblement caricaturales, mais surtout, ce beau monde affiche une stupidité qu’on a rarement vue à l’écran, même du temps de la gloire du slasher, peu avare en dégommage de protagonistes bovins. Leurs réactions sont systématiquement outrées, voire absurdes, et on a bien du mal à comprendre le schéma suivi par les neurones de ces humains. 

En revanche, dès qu’il est question de massacre, le film se transforme en Fort Boyard du meurtre éminemment ludique. Qu’il s’agisse de la variété des exécutions et l’énergie avec laquelle elles sont soudain mises en scène, Mortelle Saint Valentin retrouve des couleurs qui en firent un charmant plaisir de vidéoclub. Égorgement, hache, tir à l’arc, jacuzzi pimpé à coups de perceuses... les séquences de mises à mort sont variées et permettent de compenser la timidité en matière de gore (qui brille par son absence), conséquence directe de la fusillade de Colombine, qui venait de traumatiser les USA. 

Et comme toujours avec une série B sympatoche, c’est du côté du design du tueur que le métrage s’illustre. Son assassin chérubin jouit d’un look authentiquement inquiétant, grâce à l’apparence de son masque faussement innocent, mais surtout grâce au jeu qu’il induit sur les proportions, comme si le meurtrier était doté d’une tête minuscule par rapport au reste de son corps. Enfin, sa manie de saigner du nez à travers le masque quand il est ému ou excité achève de lui conférer un véritable magnétisme horrifique, parfaitement exploité lors du final. 

 

photoGuillaume Tel, adult edition

 

Le meilleur/pire moment : La séquence au cours de laquelle Denise Richards est enfermée dans un jacuzzi, mutilée à la perceuse et finalement exécutée, est souvent considérée comme une des plus remarquables du film. Mais il en est un autre qui symbolise encore plus les forces et faiblesses de Mortelle Saint-Valentin

Nos copines se retrouvent à une exposition d’art contemporain, au cours de laquelle Lilly présente à ses keupines son artiste de petit ami.  Nous avons droit à un festival parfaitement surjoué de toxicité masculine (littéralement tous les personnages et figurants semblent sur le point de dévorer sexuellement les héroïnes). Le tout étant écrit par un enfant de huit ans, le processus culmine alors que dans les alcôves d’un dispositif vidéo tout droit sorti des années 90, le petit ami artiste propose un plan à trois au débotté à sa compagne, pas super emballée. 

Et alors qu’elle se perd dans les couloirs, le tueur au masque de Cupidon l’attaque, armé d’un arc (sic). Il lui décoche brutalement plusieurs flèches, qui l’expulse hors de l’espace d’exposition, pour la précipiter dix étages plus bas... dans une poubelle. Grand-guignol, surligné au stabilo, utilisant à bon escient un décor particulier et se concluant sur un meurtre assez inattendu dans son exécution et cruel dans sa conclusion, cette scène qui ne respire pas l’intelligence est un joli moment de slasher débilo. 

 

photo, Marley Shelton, David BoreanazC'est quand même la Saint-Valentin quoi 

 

Stay Alive

Le prétexte : Le producteur hollywoodien moyen est toujours à la recherche de bonnes idées juteuses, et c’est bien connu, pour attirer le public ado, il faut leur parler de ce qu’ils aiment le plus, à savoir les jeux vidéo. Et là où ça devient rigolo, c’est quand ceux qui veulent appâter le gamer s’avèrent ne rien connaître à l’univers en question. En même temps, il s’agit de l’unique slasher produit par Disney, via sa filiale Hollywood Pictures... ceci expliquant peut-être cela. 

Stay Alive est donc un festival ininterrompu de clichés, où on croise du geek pas propre, du geek un peu propre, du geek à lunettes, du geek puant, du geek rigolo, de la geekette gothico-sexy. Côté pur jeu vidéo, c’est aussi la fête à neuneu avec de la violence gratuite inutilement emphatique, des graphismes indigents et des codes visuels qui indiquent que les producteurs ne connaissaient pas grand chose au monde du survival horror. Et il en va de même pour la communauté ou les usages des jours en ligne, alors largement inconnus (et méprisés) des médiums grand public. 

Il y sera donc question d’une bande d’amis, tous joueurs, qui mettent la main sur un mystérieux jeu après le décès non moins mystérieux d’un des leurs. Ils lancent alors une partie, et découvrent rapidement que la grande méchante de l’aventure, une version polygonée de la comtesse Bathory, les massacres dans le monde réel comme dans un mauvais The Ring.

 

photo, Stay AliveLes jeux vidéo, c'est le mal, okay ?

 

Le résultat : Trouver la recette de la nullité sympa ou du navet mûr à point n’est pas donné à tout le monde, mais Stay Alive y parvient plutôt bien. Notamment parce qu’en dépit de son empilement de clichés gentiment foireux, le récit et son tempo sont si décomplexés qu’ils transcendent souvent cet écueil, pour finir par lui conférer une sympathie contagieuse. Avec à peine 1h25 au compteur, l’ensemble file à toute vitesse et ne passe jamais plus de quelques minutes sans massacrer ses multiples protagonistes. 

Et son scénario a le bon goût de lui autoriser quantité de mises à mort variées, allant du piétinement par calèche à l’égorgement, en passant par la pendaison et la destruction crânienne très barkerienne. Voir le scénario s'efforcer de zigouiller les personnages dans des circonstances absurdes, plus proches d'un Destination finale que d'une partie de Counter Strike, a quelque chose de presque innocent en terme de débilité ado.

Reste l’ambiguïté du film quant à son statut. Sa version cinéma est parfaitement anodine côté violence, ce qui dope encore la dimension un peu ridicule de la chose, mais on ne peut pas tout à fait mettre de côté le director’s cut de William Brent Bell. Plus long d’un quart d’heure, essentiellement riche de nouveaux sévices, de mises à mort plus graphiques et rallongées, le film gagne un côté plus abrasif, nettement plus violent. Mais il perd une partie de son charme, et cette dimension adolescente et anodine, qui lui conféraient ses airs initiaux de petit nanar qui renarde la vieille croûte de pizza. 

 

photoNerd, sale et méchant

 

Le meilleur/pire moment : Il y a bien une séquence mémorable. À l'époque, le comédien Frankie Muniz achevait tout juste la série Malcolm, véritable phénomène de société, chéri par toute une génération, dont le culte a grandi jusqu'à aujourd'hui. Enfant star, petit génie, chouchou des mômes comme de leurs parents, Frankie avait tout de la jeune star à laquelle rien ne résiste. Et donc, dont on rêve en secret qu'un scénariste lui fasse subir les pires atrocités.

 

photo, Sophia Bush, Stay AliveVas-y Frankie, c'est bon !

 

C'est le cas ici, où le comédien s'amuse à écorner - gentiment - son image. Joueur efficace et doué, mais assez immature et roublard, il pourrait être vu comme une version vaguement lobotomisée du héros qui le rendit célèbre. Et quand il tente par tous les moyens de retrouver une connexion, pour échapper à la comtesse Bathory 2.0 à ses trousses, la panique qui s'empare de lui est passablement jubilatoire. Alors que lui et ses compagnons d'infortune sont pris dans un piège diabolique, les obligeant à explorer une vaste demeure, tout en retrouvant la piste des uns et des autres, le scénario s'emballe, mélange un peu n'importe comment effets 3D tout flingués et prises de vues réelles. Et quand on pense les personnages tirés d'affaire, c'est pour mieux laisser ce malheureux Frankie aux prises avec une comtesse pas franchement fair-play.

"Bitch that's cheating !" (Tu triches, salope !) lance-t-il misérablement quand le dispositif se referme sur lui et que la grande méchante lui propose un pas de deux à coups de ciseaux, après l'avoir poursuivi en calèche. Eh oui, il aura quand même fallu que Disney s'y colle pour que ce bon vieux Malcolm se mette à jurer avant de se faire massacrer. Et rien que pour ça, on peut tirer notre chapeau à Tonton Mickey.

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commentaires
Fred_NTH
29/11/2020 à 22:26

J'ai tellement ri à propos des "apparitions flashs" dans 13 fantômes;

Trent420
04/11/2020 à 22:33

Très très sévère cette liste...

Fraise
01/11/2020 à 09:21

Il y a vraiment quelque chose dans The Craft qui me chiffonne, quelque chose de vraiment raté, mais je ne sais pas quoi. C'est vraiment dommage, parce que oui c'est un film culte, mais il y a ce je ne sais quoi trop classique, trop facile, j'arrive pas à l'expliquer.

Dash
29/10/2020 à 02:55

Curieux de présenter Stay Alive comme le seul slasher de Disney alors que Dimension Films leur appartenait et que c'est donc bien Disney qui a produit les 3 premiers Scream ainsi que les Halloween 5 à 7. C'était certes une filiale mais comme l'est aujourd'hui Marvel ou Lucasfilm dont vous n'hésitez pas à présenter les productions comme des Disney.

Yed
27/10/2020 à 12:13

Merci 1000 good merci de me replonger dans ces films qui ont fait mon adolescence !!! Keur keur keur sur vous EL

RobinDesBois
27/10/2020 à 00:43

"Avec le recul, la mini-série oscille entre le bon et le très mauvais, avec une grille de lecture qui peut finalement être très simple : les apparitions de Pennywise sont plutôt bien, et le reste, plutôt pas bien."

Je trouve le reste tout aussi excellent. C'est vrai que la partie adulte est moins prenante, les enfants sont beaucoup plus attachants et mieux développés que leur version adulte mais les personnages dans l'ensemble restent vraiment bien écrits et interprétés. La première partie est parfaite de A à Z en tout cas.

tnecniv
26/10/2020 à 22:15

Pour Chucky 2 je rajouterai la bande son que je trouve vraiment très bonne , surtout sur l'intro quand la poupée est remise à neuf , je trouve ce deuxième film moins sombre que le premier mais je l'aime tout autant . Et puis cette scène de cache cache avec l'institutrice qui se fait taper dessus à coup de règle hahaha j'aime beaucoup la manière dont le final de cette scène est filmé avec ce plan extérieur qui cadre la fenêtre .

BadTaste
25/10/2020 à 20:46

Merci de proposer des dossiers originaux pour Halloween.
Ça change des sempiternels : "10 films d'horreur incontournables pour le soir d'Halloween", avec toujours les mêmes films cités, continuellement.
Excellent dossier !

Daddy Rich
25/10/2020 à 16:22

Chucky 2: La Poupée Sanglante et Dangereuse Alliance, j'apprécie toujours de les revoir!
Ils restent de très corrects classiques de cette époque!
Sinon, j'ai toujours trouvé Urban Legend supérieur à Souviens Toi l'2te dernier! Comme quoi... ;-)
Et enfin, je n'ai aucune objectivité sur le Freddy vs Jason! Même si ma déception fut grande en sortant de la salle! J'ai toujours plaisir à revoir le brûlé se friter avec le colosse masqué! (même si j'avoue trouvé le film nul!)

Kelso
25/10/2020 à 14:08

Dommage a un an près (le film est de 89) vous auriez pu mettre le très sympa "Shocker" de Wes Craven avec Peter Berg dans le rôle principal, dommage qu'il ne fait plus que des apparitions rapides dans ses propres film, je l'aimait bien comme acteur.