Les Bienfaits de la colère : Critique

Laurent Pécha | 4 août 2005
Laurent Pécha | 4 août 2005

Acteur et cinéaste peu connu que beaucoup ont découvert récemment en France en vedette de la série Journal intime d'un homme marié (trop facilement catalogué comme un Sexe and the city au féminin), Mike Binder s'est au fil des années imposé comme un auteur talentueux qui atteint avec ces Bienfaits de la colère, la seuil de la maturité. 

À partir d'un sujet et des thèmes éminemment casse-gueule (le danger de tomber dans le drame sirupeux était énorme), Binder signe une comédie dramatique à la fois poignante et terriblement convaincante. Magnifiquement écrit (tous les personnages sont d'une telle richesse que l'on pourrait croire le scénario tiré d'un roman), brillamment interprété, Les bienfaits de la colère est assurément l'une des plus belles surprises de l'année. Et les raisons sont multiples.

 

 

Tout d'abord, le film de Mike Binder offre l'opportunité à la trop rare et sublime Joan Allen de composer un portrait de femme d'une complexité comme on en voit que trop rarement. Il faut voir ce grand bout de femme en apparence solide (elle tente constamment de garder la face devant ses quatre filles) mais qui se fissure de toutes parts avec une dignité et une capacité à nous toucher incroyable. Jouant avec autant de bonheur sur toutes les palettes d'émotions (aussi craquante quand elle pète un plomb que lorsqu'elle succombe aux affres de l'alcool), Joan Allen réussit une performance digne d'un Oscar dans l'aspect le plus noble de la récompense.

 

 

À ses côtés, on retrouve un Kevin Costner impérial. Ayant désormais le vécu de son personnage d'ex-star du base-ball porté sur la bouteille qui attend sans jamais la chercher une seconde chance, le comédien semble nous parler au plus profond de sa chair, à tel point que l'identification entre l'acteur et l'homme se fait presque naturellement. Émouvant comme il ne l'a jamais été auparavant dans sa chaotique carrière, Costner forme avec Joan Allen l'un des plus beaux couples de cinéma de ces dernières années, chaque séquence les mettant aux prises (il faudra du temps à ces deux êtres brisés pour s'apprivoiser) constituant les moments les plus forts mais aussi les plus amusants et attendrissants des Bienfaits de la colère.

 

 

Autour du couple, se greffent les quatre filles de Terry Wolfmeyer interprétées par la fine fleur de la jeune génération d'actrices américaines : Erika Christensen (Traffic), Evan Rachel Wood (Thirteen), Keri Russell (la série Felicity) et Alicia Witt (Urban Legend). La force de Mike Binder est ici d'avoir su non seulement réunir de jeunes comédiennes extrêmement talentueuses mais de leur avoir proposé des rôles plus que consistants. Chacune des jeunes femmes (Witt) ou filles (Wood) a ainsi un vrai personnage à défendre, permettant non seulement d'exister à l'écran en tant que tel mais aussi éclairant encore plus les failles de leur mère.

 

 

Car, et c'est bien là le nœud d'émotions qui cimente le récit des Bienfaits de la colère : cette incroyable lutte affective, le plus souvent interne, pour gagner le cœur des gens qui vous entourent. Avec une sensibilité féminine sidérante et une belle maîtrise du scope, Mike Binder dresse ainsi le portrait de femmes qui s'aiment mais qui ont du mal à se le dire : il nous renvoie ainsi avec douleur mais aussi avec joie à notre simple existence, celle de tout un chacun au moment de dire aux personnes qui nous sont le plus proches ses simples mots : « je t'aime ». 

 

Résumé

Les Bienfaits de la colère est tout simplement le plus beau mélodrame de cette année.

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