Hellboy : critique infernale

Geoffrey Crété | 10 avril 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 10 avril 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Guillermo del Toro en avait tiré deux très beaux films, devait clore sa trilogie, mais le business en a décidé autrement. Hellboy, le héros créé par Mike Mignola, a donc droit à un reboot réalisé par Neil Marshall (The Descent). David Harbour alias le shérif de Stranger Things reprend le rôle de Ron Perlman, et affronte Milla Jovovich en sorcière. Curiosité et fébrilité.

INFERNAL AFFAIR

Il y a eu le deuil de ce Hellboy 3, conclusion prévue des films de Guillermo del Toro où le personnage créé par Mike Mignola devait lâcher l'enfer sur Terre, comme annoncé dans Hellboy II : Les Légions d'or maudites. Retardée, menacée, discutée, cette fin de trilogie a été définitivement enterrée en février 2017. Il n'aura fallu que quelques mois pour que le reboot soit officialisé avec une nouvelle équipe.

Le contexte a du sens face à ce Hellboy 2019, coincé entre redite, remix et réinvention. Mis entre les mains de Neil Marshall, lequel n'a jamais véritablement décollé suite au carton de The Descent en 2005, ce reboot a été piloté par Mike Mignola, plus impliqué que sur les films de Del Toro. D'où un ton voulu neuf, à la fois plus léger et horrifique, qui échoue malheureusement à presque tous les niveaux.

Que l'une des meilleures scènes lorgne ouvertement vers l'univers de Del Toro, et rejoue l'idée de Hellboy qui ouvre les portes de l'enfer sur Terre pour réaliser la prophétie du chaos, en dit long sur l'incapacité de ce reboot à se trouver. C'est d'autant plus frappant que le mariage entre l'univers de Mignola et celui du réalisateur de La Forme de l'eau et Le Labyrinthe de Pan était harmonieux sur les deux précédents films. Au mieux très moyen, au pire grotesque, Hellboy 2019 est un raté.

 

photo, David HarbourDavid Harbour est le nouveau Hellboy

 

LE DÉMON DE L'ENNUI

Neil Marshall était la principale raison d'attendre ce Hellboy avec curiosité, vu sa filmo orientée horreur et spectacle sanglant au cinéma, mais aussi sur le petit écran (Westworld, Hannibal et Game Of Thrones). Mais il y a plus de Dog Soldiers que de The Descent dans ce reboot qui parade avec son Rated R, devenu un argument de vente parfois bien bête.

Certes, il y a des images sanglantes et plus de victimes assumées que dans les blockbusters actuels, mais ça n'est jamais qu'un effet d'esbrouffe. Dans le climax, il y a même une séquence entière de massacre qui peut être entièrement retirée, sans avoir d'incidence sur le reste. Le sang et la violence ne servent pas l'ambiance ou l'univers, mais semblent posés maladroitement pour tenter d'amadouer le public.

C'est à l'image de l'antagoniste, la Blood Queen interprétée par Milla Jovovich. Associée au Z de Resident Evil, l'actrice a montré par le passé qu'elle était capable de nettement mieux en présence d'un bon scénario et d'un rôle digne de ce nom. C'est loin d'être le cas ici, tant cette sorcière médiévale est ridicule.

Look miteux, dialogues sans aucune personnalité, motivations basiques, pouvoirs pas très clairs : Nimue est un ratage dans les grandes largeurs, qui n'a jamais l'occasion d'être autre chose qu'une poupée bien coiffée et bêtement méchante. Sa relation supposée ambiguë avec Hellboy est si survolée, que c'en est finalement risible. C'est d'autant plus significatif que dans les comics, Nimue est une adversaire de taille.

 

photo, Milla JovovichResident Hell

 

HELLBOY'N THE HOOD

La source du problème est bien au-delà de Neil Marshall et des interprètes, tant ce reboot laisse l'impression d'être passé sous un rouleau-compresseur jusqu'à devenir un produit grisâtre sans âme. Le nouveau Hellboy incarné par David Harbour illustre très bien le problème : l'acteur propulsé par Stranger Things passe son temps à parler très fort pour exister, sans jamais apporter la moindre émotion. C'est particulièrement problématique dans un film bâti sur l'ambiguïté de Hellboy, tiraillé entre son humanité et sa face démoniaque.

Tout semble empilé et donc survolé, avec notamment une utilisation lourde de flashbacks qui casse le rythme. Et aucun personnage n'y échappe. La relation de Hellboy avec son père adoptif (pourtant interprété par l'excellent Ian McShane) se résume à quelques scènes sans saveur, quand Ben Daimio (Daniel Dae Kim) n'est qu'un outil relégué au troisième plan.

C'est encore pire du côté d'Alice Monaghan, plus que sous-exploitée malgré une belle idée de casting avec Sasha Lane, révélation d'American Honey. Sa place dans l'équipe est un brin ridicule, surtout quand le film réduit ses pouvoirs à si peu. En voulant échapper à la dynamique romantique classique, au centre des films de Del Toro avec Liz Sherman (qui était en plus un solide joker en terme de pouvoir), ce reboot se tire une balle dans le pied.

 

photo, David Harbour, Daniel Dae Kim, Sasha LaneSeuls ou ensemble : trois personnages ratés

 

L'ENFER, C'EST LES FAUTES

La moindre des choses était alors de foncer tête baissée dans le spectacle gargantuesque, bête et méchant. C'était la seule excuse à des personnages si creux, et une intrigue si banale. C'était même logique de la part du réalisateur de Doomsday, qui a démontré sa capacité à filmer la violence, la bataille et la sueur ensanglantée.

Là encore, douche froide. Hellboy oscille entre quelques belles choses, des effets spéciaux pas très satisfaisants, et des images proprement immondes. C'est un film où se croisent un gros sanglier humanoïde bien énervé (au maquillage excellent et avec la voix géniale de Stephen Graham), et une espèce de vomi psychique qui fait parler les morts (l'un des idées les plus laides vues sur les écrans hollywoodiens depuis des années).

Neil Marshall essaie bien d'emballer deux scènes d'action spectaculaires (dont une qui sert d'épilogue), construites sur la même idée d'une caméra virevoltante, mais le résultat manque de finesse, et souffre d'une direction artistique pauvre.

 

photoUne séquence à sauver

 

S'il y a bien un moment qui sort du lot, c'est la courte confrontation entre Hellboy et Baba Yaga. Ce personnage de sorcière présent dans les comics donne lieu à un très beau moment, où le frisson le dispute au malaise. Le maquillage est bluffant (signé Joel Harlow), la mise en scène inspirée et l'ambiance, ensorcelante. Mais c'est finalement cette scène marquante qui symbolise le mieux l'échec du film.

Cette parenthèse au-delà du réel n'a aucune autre utilité narrative que de livrer grossièrement un indice à Hellboy, et donc permettre à l'intrigue d'avancer bêtement d'un coup. Et avec son goût plaisant pour les maquillages, les matières, les clairs-obscurs, et ce personnage aussi fascinant qu'affreux, le souvenir de Guillermo del Toro revient de plus belle.

Résumer l'échec de ce reboot à la comparaison avec Hellboy et Hellboy II : Les Légions d'or maudites serait aussi paresseux que simpliste. Ça n'arrange pas l'affaire, mais le vrai problème est ailleurs : Hellboy 2019 est bancal et insipide, et n'a rien à proposer.

 

Affiche française

Résumé

Même sans la comparaison avec les films de Guillermo Del Toro, ce Hellboy 2019 est un raté souvent grotesque. Du gore mais pas de sensations, des gags mais pas de rires, de l'action mais pas d'excitation : le film se cherche sans se trouver.

Autre avis Simon Riaux
Ratage à presque tous les niveaux, ce Hellboy fait d'autant plus mal au coeur qu'il distille par endroit un amour du pulp et du serial qu'on rêverait de retrouver dans un écrin digne de ce nom.
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Lecteurs

(2.7)

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commentaires
Chesswick
17/02/2023 à 11:08

Et beh tiens, je l'ai vu il y'a quelques semaines à peine, et mouais, ça m'a un peu divertit quand-même.

Alors déjà, je pense qu'en ayant attendu si longtemps et avec la masse de critiques négatives qu'il y'a eu ça m'a permis: de digérer le fait que ce n'est pas la suite que j'attendais par Del Toro;
- que ce ne serait pas bon.

Et c'est pas bon hein, ça se voit. Maiiiiiis bon j'ai passé un petit moment sympathoche avec quelques effets un peu gorasses qui me parlent et une sorcière en morceaux qui m'a bien fait marrer (à ses dépends hein...)

Bref, sur une plateforme de streaming un dimanche après-midi de gueule de bois et une pizza, pourquoi pas.

Vu qu'ils viennent d'annoncer un nouveau reboot, peut-être vont-ils corriger le tir pour nous donner un vrai bon film? mouais... :)

Nico1
25/06/2020 à 23:16

Une bouse, une ineptie sans nom, humour débile, scénario inepte et Mike Mignola s'est plus impliqué sur ce film? Incompréhensible.

Flo
30/01/2020 à 10:14

« You want to know my name,
You want to see my face,
I m the devil,
Ah ah ah ah ah ! » ????

Bon, tout est dit alors que ce film se tape quasiment une sortie technique en France: c’est pas aimé du tout, « la poésie de del Toro lalalalala », « purée ce que c’est beauf! »…
Et Hélas, on est obligé de faire la comparaison… pour mieux préciser que c’était peut-être bien plus beauf chez le mexicain, la faute à une amourette d’adolescents qui n’a rien à faire là (il fait un peu la même erreur que Raimi sur ses Spidey) , faisant encore plus ressortir cette beauferie nous faisant croire que c’est l’Amour et le modèle de famille à l’américaine qui peuvent sauver le Monde…

Eeeeet, il y a un peu de ça aussi dans ce nouveau film, sauf que là ce sont les c***lles » qui sauvent le Monde, dans l’esprit d’un prof « Broom » complètement retourné par Ian McShane.
Pour le reste, David Harbour fait bien le job, mais en ce mettant trop dans les pas de Ron Perlman (encore ces trucs de « père »?), et en ayant un maquillage frontale trop penché vers l’avant… au moins, on le remercie de penser à s’interroger sur la nature de sa mission, entre les sacrifices de ses proches et le fait qu’il tue ses semblables.
Même ses apartés solo indispensables, où il s’en prend plein la figure et se fait « téléporté » contre son gré par des tas d’affreux tentant de de le corrompre, sont fidèles au comic… mais bien peu transcendées pour le grand écran.

Sinon, Alice est bien sympa, Daimio pas assez pète-sec (3ème apparition « comic live » pour DD Kim tout de même), Jovovich « a de beaux restes », la Baba Yaga est bien dégueulasse (mais moins intéressante que l’autre qui revient bientôt… ben oui, John Wick ???? ), Gruagach fait effectivement un peu trop « Rocksteady » dans les TMNT…

Tout ça, ça n’a rien de d’extraordinaire, car partout on s’en plaint, à l’identique…
Y compris le petit avantage de ne pas avoir un film trop vide grâce à l’inclusion de scènes multiples tirées de comics, pour satisfaire un peu les fans…
Et de trouver dans ce film du gros Pulp bien jouissif, (les apparitions de « LJ »), tout ce qui manquait au film Shazam!
De l’action vénère, qui tâche (c’est pas non plus Venom)… mais un peu trop de Gore poisseux « in your face » (le comic est moins « baveux » que ça) surtout sur la fin, et avec des jurons qui sont aussi hyper forcés.
Comme pour la mise en scène, à peine énergique… c’est bien de la racole, pour les gamers et fans de Resident Evil (les films par contre, pas les jeux).

Le problème avec « eul’Boy » filmique reste toujours que tout ça manque sacrément de classe et de noblesse… celle des héros prolo/émigrés/col bleus, qui font leur boulot comme ils viendraient s’occuper de votre lavabo (avec ceinture multi-fonction et tout)…
mais néanmoins avec une belle dignité masquant une lassitude profonde.

Peu de chance de voir les spin-off et suites « prévisibles » (pour accélérer l’arrivée vers la fameuse Apocalypse – la Trilogie « L’Appel des Ténèbres – La Grande Battue – L’Ultime Tempête »)…
ou bien avec moins de budget, avec plus de maîtrise, avec un autre réalisateur…

Alors que la meilleure chose à faire, c’est plutôt de le réaliser en Animation, tout simplement. Mieux que les DTV déjà faits sur Hellboy, qui étaient plutôt pas mal.

En attendant, c’était quand même assez marrant…

youssef
14/10/2019 à 17:08

le film fait honte aux deux derniers hellboy , tant dans l'apparence du personnage que dans son rôle.

Angyone
02/09/2019 à 00:49

Film gore,rien à voir avec du Del Toro.aurait dû porter un autre titre et un autre héros.extremement décevant quand on ne penses pas avoir affaire à ce genre surtout si on n’ad Pas au gore .sa revient à forcer les gens a voir ce qu’ils ne veulent pas.

anthony
26/08/2019 à 13:46

quoi dire .. pas de hellboy 4 please vraiment un dechet hellboy ressemble a un viel alcoolique la couleur de sa peau heuuuu son surnom est rouge et la bha orange les reboots sont pourries la mort de son pere est decalé avec l'histoire enfin moi qui suis fan des films de super heros bha je ne recommande pas celui la et je vote pour ne pas avoir de 4eme

Gacho
04/08/2019 à 12:15

Le niveau du cinéma actuel fait froid dans le dos...

Noebetis
01/08/2019 à 23:07

Honnêtement le film été super je trouver c nul au début de gâcher la fin des deux premier qui été excellent mais au final ça a été si on oublie les deux premier et que l'on voit lui en s'imaginant que c le premier et qu'il n'y en a pas eu avant vous aller voir que tout et génial voilà merci

Mathéo Chevais
29/07/2019 à 00:20

J'ai trouvé ce film très cool. Le look des perso sont badass mise appart Nimue qui laisse à désirer; mais niveau animation, le film est génial. Du gore, du sang, des flammes; les effets spéciaux sont magnifiques. Cependant, malgré que le scénario reste très bon, le gros problème dans ce film c'est le manque de personnalité des personnages. Le caractères des personnages n'est pas exprimés; Hellboy est censé être une tête de mule colérique qui trace lui-même sa route avec un humour sale, ce qui n'est pas présent dans le film. Idem pour Nimue qui n'est pas du tout développé. Les scènes restent donc plates et l'histoire tourne presque au ridicule.
En conclusion, ce reboot a du potentiel mais qui n'est malheuresement pas développé. Un Hellboy 2 serait donc envisageable mais en approfondissant les traits de caractère des personnages. Plus d'humour, plus de casse, plus de rage et de colère. LE CARACTERE ET LES SENTIMENTS SONT CE QUI FONT VIVRE !!!

TomTom
11/07/2019 à 23:17

Bestiaire très intéressant, surtout la partie avec les 3 géants qui m'a rappelé le film sur Jack le tueur de géants. En plus le film est bien gore, c'est cool.

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