CoExister : critique hérétique

Simon Riaux | 30 août 2021
Simon Riaux | 30 août 2021

CoExister, ce soir à 21h15 sur C8.

Alors que tout un pan de la comédie française dite populaire se retranche, sous ses airs de bouffonnerie bon enfant, derrière un repli droitier et identitaire problématique, car jamais franchement assumé (À bras ouverts Le Grand PartageGangsterdam et le big boss Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ?), c’est forcément avec une pointe d’appréhension que l’on voit débarquer CoExister. Ce serait oublier que Fabrice Éboué est à la barre.

QUAND LA MUSIQUE EST CONNE

Coauteur et coréalisateur de Case départ et Crocodile du Botswanga, l’humoriste s’est fait le chantre d’un rire aussi décomplexé que sympathiquement agressif, renvoyant dos à dos sans amertume les antiennes communautaires et les présupposés mongolo-ethnico-cultureux. C’est le même traitement qu’il applique ici aux trois religions dites « du Livre » et à leurs représentants, avec une malice qui donne souvent le sentiment que CoExister a été pensé comme une réponse au toxique Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?

Fabrice Éboué, qui se donne ici le rôle d’une sorte de Scapin fatigué, réunit un simili-imam, un proto-curé, et un quasi-rabbin, avec dans l’idée de les transformer en icône du vivre-ensemble aisément consommable, afin de vendre des trillions d’un disque surfant sur une certaine bien-pensance de l’époque. Le procédé est idéal, en cela qu’il l’autorise à moquer l’idée de culte plutôt qu’une spiritualité, les ambassadeurs du religieux plutôt que ceux qui les suivent, tout comme il croque alternativement avec tendresse, puis rouerie un monde du spectacle vérolé par sa suffisance.

 

PhotoJonathan Cohen, arme de destruction comique

 

Pas donneur de leçon, son CoExister s’amuse – et nous avec – des illusions consenties par le corps social, de l’hypocrisie ambiante et de la médiocrité de son temps. La cible dessinée en creux par le film est une idée factice du vivre-ensemble, qui gommerait à la fois les différences de ses membres tout en écartant ceux qui n’en seraient pas dignes. Un positionnement qui confère au film une hargne tendre, et l’autorise à lancer des piques aussi drôles que bien senties.

 

Photo Fabrice ÉbouéToi, je t'aime

 

RIRE ET CHANSONS

Un équilibre qui tient essentiellement par la foi qu’il insuffle dans ses personnages, tous excellemment croqués, et qui ne manquent jamais d’humanité. Si on excepte Guillaume De Tonquedec, décidément trop attendu dans sa partition de franchouillard pur sucre, tous réservent au métrage quantité de trouvailles, comiques ou purement cinégéniques, particulièrement appréciables.

 

PhotoLes Trois de l'Apocalypse

 

À ce titre, Jonathan Cohen impressionne par la vélocité de son jeu, aussi vif dans le pantomime cocaïné que dans personnage toujours à contretemps, qu’il soit en sur ou sous régime. Il rappelle, souvent de brillante manière, que CoExister ne sacrifie jamais la satire politico-religieuse au pur comique de situation.

On regrettera en revanche que Fabrice Éboué encombre son récit de sous-intrigues (notamment sentimentales), qui ne servent d’autres intérêts qu’un remplissage artificiel et nuisent au rythme de l’ensemble. De même, les séquences musicales trop sages échouent à surligner les tics de l’industrie musicale. Elles alourdissent inutilement un ensemble qui demeure séduisant.

 

Affiche

Résumé

Fabrice Eboué, malgré deux trois anicroches formelles, prouve qu'on peut s'emparer des sujets les plus stérilement débattus dans ce pays et les transformer en un rire euphorisant et sincère.

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Lecteurs

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commentaires
RobinDesBois
31/08/2021 à 18:13

Film sympatoche. C’est pas génial mais ça se regarde, c’est assez prévisible, et convenu, Eboué a écrit le scénar en pilotage auto mais ça fait le job en parti grâce au casting plutôt bon.

Jo le clodo.
31/08/2021 à 12:02

Bien aimé les passages avec Cohen, un rabin sous coke, mort de rire.
Ramzy est pas mal non plus.

Francis Bacon
30/08/2021 à 18:38

@Le Waw
Il y a des tonnes de comédies fr de qualité chaque année, il faut juste éviter Clavier-Dubosc-Foresti.

Comme un avion, La fille du 14 juillet, Dans la terrible jungle, Les 2 alfred, Le discours, Tout simplement noir, les films de Kervern & Delepine, La lutte des classes, Encore heureux, Venise n'est pas en Italie, Place publique, Doubles vies, je pourrais continuer un moment.
C'est pas parce que vous voyez 3 films par ans que les films de qualité sont rares.
Après moi je suis assez friand aussi des comédies fr plusieurs tons en dessous des reussites que j'ai cité plus haut, du genre de Divorce Club ou Papi Sitter, mais plutôt comme des plaisirs coupables. Co-Exister pour moi fait plutôt partie de la catégorie des moyennasses

Flash
30/08/2021 à 17:47

Film drôle, voir même très drôle et comme d’habitude Eboué ne fait pas dans le consensuel, ce qui rend cet artiste intéressant.
D’ailleurs j’attends avec impatience son prochain film qui propose un sujet qui risque de me plaire fortement.

sylvinception
22/08/2019 à 17:44

Ben quoi, c'est pas la même famille ??
(désolé...)

sylvinception
22/08/2019 à 17:43

D'accord avec Satan, je ne vois d'ailleurs pas trop ce que lui trouvait notre cher Hubert Bonisseur de La Bath.

MystereK
22/08/2019 à 13:07

Et bien voilà un commentaire intilligent qui fait avancer le schmilblick... critiquer les gens sur leur physique alors qu'on parle cinéma.

Satan LaBite
22/08/2019 à 09:40

Audrey Lamy qu'est-ce qu'elle est laide ...

rorov94
22/08/2019 à 09:34

Des barres de rire!
Comme CASE DÉPART et LE CROCODILE DU BOSTWANGA d'ailleurs...
Après,ont peu aimer QU'EST CE QU'ON A FAIT...,BLACK MIC MAC,LA VÉRITÉ SI...,RABBI JACOB...bref,les comédies dites communautaires pour d'autres raisons.
L'essentiel c'est de rigoler pendant la projo'.

Le Waw
21/08/2019 à 22:49

Une des rares bonnes comédies française de ces dernières années.

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