Machine : critique Mad Marx sur Arte

Mathieu Jaborska | 14 avril 2024
Mathieu Jaborska | 14 avril 2024

"Quand Karl Marx rencontre Kill Bill" nous promet la promotion de Machine, nouvelle série Arte. En bons staliniens podophiles, on a forcément sauté dessus. La création de Fred Grivois et Thomas Bidegain avec Margot Bancilhon et Joey Starr, récompensée par le public au festival SérieMania, est-elle à la hauteur de cette alléchante promesse ? Peut-être un peu trop.

PC Master race

Une fois n'est pas coutume, la comparaison n'est pas un simple effet d'annonce. Dès le premier épisode, une héroïne mystérieuse (Margot Bancilhon) enfile un bleu de travail floqué aux couleurs de Bruce Lee dans Le Jeu de la mort, à la manière de The Bride dans le film de Tarantino. Quant aux thématiques marxistes, elles sont citées dans le texte par un ex-héroïnomane converti à la bonne parole rouge (Joey Starr). Lorsque la première, en cavale, trouve un emploi dans la même usine que le second, ils se lient d'amitié. Leur duo va se dresser contre la délocalisation de la production et mettre en pratique à son échelle la lutte des classes.

L'objectif affiché est clair : aborder les préceptes de Karl Marx à travers le prisme de la pop culture. Un postulat qui comporte son lot d'incohérences idéologiques (quoique certains considèrent l'imaginaire hollywoodien comme le stade terminal de la radicalité gauchiste), mais qui rend l'ensemble plutôt divertissant. Le conflit qui oppose la bande d'ouvriers au grand patron coréen et à son armée de chiens de garde prend ainsi des proportions aussi artificielles qu'amusantes, a fortiori après le grand tournant de l'intrigue, à mi-parcours.

 

Machine : photo, Margot BancilhonJudge Dreads

 

Les scénaristes tournent rapidement le dos à toute forme de justesse habituellement revendiquée par le cinéma social et empilent les retournements de situation, grands discours et grosses bastons, jusqu'à un climax qui franchit avec plaisir les limites du plausible, le tout dans un décor directement inspiré de John Wick 3. De fait moins hypocrite que certaines oeuvres sur le même sujet, Machine assume son manichéisme, ses dialogues de série B (les punchlines insérées au forceps), ses emprunts au cinéma grand public et in fine défend la révolution à coups de poing, quitte à taquiner assez méchamment les gros syndicats. Une perspective discutable, mais qui a le mérite d'esquiver la traditionnelle défense du statu quo.

 

Machine : photo, Joey StarrOn se fait une petite scission ?

 

This Machine Still Kills fascists

Machine met les pieds dans le plat. Ou plus souvent dans la gueule, pour paraphraser un grand homme 100 % communiste. La vedette de la série, c'est bien le direct du gauche de Margot Bancilhon, mélomane éclectique qui défouraille du capitaliste aussi bien sur du K. Maro que sur du Chemical Brothers. La comédienne s'est entrainée 6 mois durant et dit avoir effectué ses propres cascades. Il faut reconnaitre que la demi-dizaine de séquences de baston comporte quelques chorégraphies généreuses, issues d'un amour du cinéma d'arts martiaux sincère, pour le moins rarissime sur le petit écran.

 

Machine : photoLe visage du capital

 

L'ensemble se suit donc sans déplaisir, pour peu qu'on évacue la question qui conditionne toutes les oeuvres de ce type : peut-on vraiment simplifier à ce point une mécanique sociale et politique, qui plus est à l'heure actuelle ? Car pour tenir en haleine le plus large public possible, la série caricature à peu près tous ses personnages, antagonistes... et protagonistes. L'ancien toxico repenti, le gilet jaune blogger-complotiste et la femme violentée par un mari alcoolique forment la traditionnelle galerie de prolos unilatéraux. Pas certain que les Français qu'ils sont censés représenter en aient vraiment besoin.

La question étant débattue par la critique depuis des dizaines d'années, ce n'est pas dans une brève sur 6 épisodes finalement très anecdotiques qu'on va la régler. Au public de trancher.

Tous les épisodes de Machine sont disponibles sur Arte.tv 

 

Machine : Affiche

Résumé

Quand Karl Marx rencontre Kill Bill, ça donne... un divertissement efficace, au risque de desservir les prolétaires qu'il érige en héros.

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Lecteurs

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commentaires
Move
22/04/2024 à 10:23

J’ai adoré, bien sûr au second degré. Hâte de voir la saison 2

Dominimarie
22/04/2024 à 07:00

Nous avons adoré !
Vivement la saison 2

Djonnouenn
21/04/2024 à 21:33

@Tonton : Fred Grivois indique en interview avoir fini par penser que cette déclaration était vraiment illégitime de la part d'E.Macron. Pour moi, il prend au pied de la lettre ce propos plutôt ironique, voire cynique, et utilise les codes du cinéma de genre pour créer un récit, fictif, au sein d'une "lutte des classes" toujours actuelle et bien réelle.
j'ai beaucoup aimé les références au fil des épisodes, notamment le "Subway" de L.Besson, la citation du "Prédator" de J.Mc Tiernan (raccord avec la coiffure de l'héroîne), le gimmick de la cigarette de J.Carpenter.
A ce propos, le personnage de Machine, outre le coté "Kill Bill", me semble être à la croisée d'un Snake Plissken, pour le background militaire, et d'un John Nada pour le contexte de l'histoire, "They live" se déroulant en pleine période post-reaganienne.

Tonton
21/04/2024 à 09:13

Que vient faire Macron à chaque épisode deee cette bastonnade ? A part ça très bon !

Fan de Machine
20/04/2024 à 19:15

Un grand film, même si c'est une série. D'actualité, plein de clin d'oeil sur la société et de l'action à revendre. Les acteurs sont formidables. Regardez cette série qui vous ouvrira les yeux sur le monde du travail, les pitres qui gouvernent et les problèmes récurrents de notre société. Un grand BRAVO

Danifort
19/04/2024 à 19:52

J.ai bien aimé cette série un mélange d’action
Plutôt bien orchestrée dommage pour la mort de Joey starr il apporte vraiment autre chose
Margot super vivement la saison 2

Catonoma
19/04/2024 à 18:32

Je me suis régalée ! Vraiment...
Les personnages sont aux petits oignons, très bien interprétés
Chapeau à Margot Bancilhon et Joey Starr! Tout est d'un haut niveau. Il ne faut pas trop chercher de réalisme bien sûr.
Et on se marre ! D'habitude je n'aime pas trop les scènes de baston mais là c'est réjouissant.
Super ! !! J'en veux encore !

Lili44
18/04/2024 à 23:48

J'ai adoré !!! À quand la saison 2 ?? Après Karl Marx, un autre courant de pensées sous fond de kung-fu est attendu!!! L'actrice est juste incroyable, charismatique.

Tanko
17/04/2024 à 16:41

On s amuse.gratis
Pas d ambition
Merci

Joeva
16/04/2024 à 22:57

Bah, moi j ai aimé...mon mari aussi d ailleurs..
Ça change , pas besoin de se prendre la tête pour comprendre..
Les acteurs, extra.
On attend une 2éme saison..merci

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