See saison 2 : critique qui scie et charcute à l'aveugle sur Apple TV+

Simon Riaux | 25 octobre 2021
Simon Riaux | 25 octobre 2021

Après avoir passé une première saison à poser son concept, puis à le diluer dans une sous-intrigue un peu mollassonne, voire franchement décevante, See nous est revenue sur Apple TV+, avec l’ambition de tirer les leçons de cette première salve et d’affirmer plus avant les forces de ce projet singulier et ambitieux.

FRÈRES ENNEMIS 

Dans un monde post-apocalyptique, où l’humanité a perdu la vue, reconstruit des embryons de civilisation tout en traquant quiconque était doué de vision, comment narrer l’avènement de voyants et le bouleversement qu’ils génèrent ? C’était à la fois l’originalité et l’évidente limite de la saison inaugurale, qui avait beaucoup de mal à rendre tangible un univers dont la mythologie se dévoilait trop progressivement pour sur un personnage de fornicateur Jedi plutôt embarrassant. 

Jason Momoa a très rapidement pris une place énorme au sein de la série, qui lui doit une grande part de son magnétisme ainsi que de sa puissance épique. Tout en fébrilité, sensibilité rédemptrice et rage contenue, il est une nouvelle fois le coeur émotionnel de ce vaste dispositif, et s'avère probablement son meilleur interprète, tant il trouve là la partition idéale le concernant. Capable d’assurer des performances extrêmement exigeantes physiquement, une partie de ses cascades et la réalisation de joutes délicieusement brutales, il lui fallait un antagoniste à sa mesure, sous peine d’étouffer tous les enjeux à venir. 

 

photo, Dave BautistaJeu de mains, jeu de bourrin

 

C’est chose faite en la personne d’Edo, frangin vengeur interprété par Dave Bautista. Lui aussi d’une physicalité appréciable, il permet à chacune de ses apparitions de se muer en une menace comparable à celle incarnée son héros de frère. Parallèlement, et comme Momoa, il jouit d’une interprétation tout en sensibilité animale qui, si elle n’est pas franchement d’une subtilité totale, confère à son personnage une épaisseur émotionnelle indiscutable. 

Le mélange d’opportunisme politique et de haine recuite envers Baba, ainsi que la menace belligérante qu’il constitue, suffit à en faire un adversaire de taille, mû par des dilemmes finalement bien humains, et idéaux pour relancer régulièrement notre intérêt. 

 

photo, Dave BautistaUn raseur pas rasoir

 

LES BORGNES SONT ROIS 

La gestion de la mythologie constitue un des atouts essentiels de cette seconde saison, tant elle réussit rapidement à donner de la chair à des cultures imaginaires, des rituels inventés, et autres clans conçus à la manière de patchworks ludico-historiques. En témoigne le chasseur de sorcières Toad, la guerrière Wren, qui, non-contents d’enrichir la narration, parviennent à nuancer les personnages qu’ils rencontrent au cours de l’aventure. 

Le désir de les retrouver sitôt l’ensemble achevé est d’autant plus grand qu’on sent leur indiscutable potentiel effleurer juste ce qu’il faut pour les faire exister puissamment, sans épuiser leur potentiel. On pourra regretter que certains seconds couteaux pourtant aiguisés ne survivent pas, tant leur présence, comme sidekicks ou intervenants de premier rang, eût été souhaitable. De même, le scénario ne gère pas toujours bien les dévoilements de pans entiers de son univers. 

La preuve avec les derniers rebondissements de son ultime épisode, qui laissent clairement penser qu’il est des empires entiers qui nous restent à découvrir, voire encore moult factions agissant dans l’ombre. La comparaison avec Game of Thrones se fait alors d’autant plus évidente que c’est clairement le modèle que veut suivre See. Une proximité qui s'incarne jusque dans le goût de la série pour les coucheries incestueuses mêlant pouvoir, tassage de vertèbre et faux parfum de scandale.

 

photo, Dave BautistaEyes wide butt

 

Avec ses armées, ses souverains, ses puissances spirituelles, régaliennes ou superstitieuses, la production Apple TV+ déborde de l’envie de proposer à son tour une odyssée capable de fédérer des millions de spectateurs et qui sait, de laisser son empreinte sur la pop culture internationale. Une ambition tout ce qu’il y a de plus noble, mais, pour intense que soit souvent le récit de Steven Knight, il est encore très loin de la cohérence et de la variété de la série née des écrits de George R.R. Martin. 

En effet, malgré l’arrivée de personnages excitants ou d’enjeux renouvelant – un peu – les forces en présence, notamment quand il est question de la vision et de son statut, la narration accuse toujours de sévères baisses de rythme. Passé les quatre premiers chapitres, la deuxième saison fait même tout ce qu’elle peut pour repousser un affrontement annoncé, dont tous les éléments semblent déjà bien installés. La gestion de la reine déchue par exemple, demeure problématique tant sa seule raison d’être demeure de gagner un peu de temps, tout en dilatant la dimension politique de l’ensemble, quand il semble bien invraisemblable que personne ne lui ait réglé son compte plus tôt. 

C’est finalement quand tout ce petit monde lâche enfin les chiens que See retrouve sa raison d’être. 

 

photoUne influence japonaise toujours plus affirmée

 

PONCER DU GLOBICÉPHALE A LA DISQUEUSE 

La qualité jamais prise en défaut de la série, et au contraire croissant perpétuellement, c’est la généreuse qualité de sa gestion de l’action. La bourrinerie atteint ici des proportions remarquables. Systématiquement gore, mise en image à la faveur de longs plans, souvent spectaculaires, toujours composés avec soin, quand ils ne sont pas techniquement ahurissants, les affrontements demeurent la première raison de suivre le récit, malgré la grande mollesse de son axe central. 

Simples duels, conquêtes, évasion ou rixes infiniment cruels, la dureté de l’univers de See innerve et énerve régulièrement une intrigue qui patine bien trop et joue trop fréquemment la carte du mystère mystérieux plutôt que celle d’une rigoureuse construction. 

 

photo, Nesta CooperCette enfant est une flèche

 

Mais surtout, après avoir régulièrement gagné en ampleur comme en créativité dans la mise en scène de ses batailles, See se risque enfin à une figure imposée du divertissement épique : la super-bataille rangée entre factions luttant pour la domination politique. Réussir à renouveler ce stéréotype grâce au handicap de l’écrasante majorité des personnages n’allait pas de soi, et à ce titre, le final de la saison est une éclatante leçon de plaisir rugueux. 

La bataille qui occupe une bonne moitié de cet épisode final est une petite leçon d’utilisation intelligente de décor, de variété dans les modalités de combat. On y énuclée à coup de cornes de brume, quand on n’y crame pas des hordes d’adversaires, avant de geler ce petit monde comme il se doit. Le tout, en repensant chaque vague de combattants comme un défi visuel et sonore. 

See s’impose alors pour ce qu’elle ne devrait pas chercher à maquiller : un réjouissant spectacle de grosses brutes poilues décidées à s’équarrir dans la bonne humeur.

La saison 2 de See est disponible en intégralité sur Apple TV+ depuis le 15 octobre 2021 en France. La saison 1 est toujours disponible sur Apple TV+.

 

photo

Résumé

Encore trop longue pour ce qu'elle a à raconter et souffrant d'un violent ventre mou, la série See sait se faire brutalement divertissante dès qu'elle assume sa veine guerrière et aventureuse.

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Lecteurs

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commentaires
Mkm
05/11/2021 à 09:41

Surprenante saison deux, la violence du premier épisode donne le ton. Decor, ambiance, combat : ca fait vraiment bien le taff.
je ne vois pas spécialement l'interet ni la pertinence de comparer cette dernière à Got par contre.

Tra
02/11/2021 à 01:58

Ça raconte pas grand chose , les personnages sont bêtes pour la plupart , des aveugles qui mène des batailles épiques sans tué le gars de sa team alors qu'ils peuvent pas distinguées un ami d'un ennemis ... Tout ça n'a aucun sens mais bordel c'est vraiment pas mauvais comme série c'est bien réalisé bien interprèté les personnages sont charismatique les chorégraphies sont vraiment bien foutus on en redemande vivement la saison 3 . Et spécial mention pour Jason momoa qui porte le programme sur ses épaules et qui finalement est un bon acteur quand t'il le veux et qu'il est bien dirigé

Pulsion73
27/10/2021 à 14:49

3 fois rien mais : rectifications :
- "se dévoilait trop progressivement pour sur un personnage de fornicateur Jedi plutôt embarrassant. "
- "menace comparable à celle incarnée son héros de frère...".

Bon sinon, même à la fin de l'article j'hésite toujours à voir cette série. Ces 2 titans dans le même jeu a de quoi captiver et m'inonder de bonheur jusqu'au plafond mais c'est peut être le thème abordé, le contexte, je ne sais pas.

See to me
26/10/2021 à 21:22

Cette série aura du potentiel si on sait l'orienter. Jason M. Incroyable, Impressionnant (je me rappelle de sa presta dans Stargate Atlantis, Dune...), toujours égal à lui-même. Il donne une réelle dimension à la série. Le jeu des jumeaux, franchement, il faudrait l'améliorer_ pas reluisant. Ça manque d'épaisseur. Pour des voyants, c'est une insulte à notre intelligence. Quant à Sibeth, une Cirsei L. en miniature. Mais pas très réussie. Chapeau bas aux personnages de Ombre et du traqueur Gl. C'était un Kiff cette série. Les combats sont vraiment impressionnants...Dans l'ensemble, Bravo. Hâte de voir la suite!

Lord Sinclair
26/10/2021 à 11:42

Cette série c'est absolument n'importe quoi, mais c'est terriblement divertissant.
Les + : mise en scène, ampleur, décors, barbarie des chorégraphies. Momoa, magistral. Rien que ça façon de se mouvoir, sa gestion du combat au raz du sol compte tenu de sa carrure mérite le respect. Ce genre de travail, en Silat, et plutôt fait par des petits gabarits.
Les + : certains personnages font absolument n'importe quoi. Les 2 enfants voyants sont aussi débiles l'un que l'autre. La reine essaie tellement de surpasser Cersei Lannister que ça en devient marrant. Elle a surtout une sacrée capacité à faire disparaitre les corps de ses victimes. Elle en fait quoi ? Elle les mange ? Par contre l'actrice fait un sacré boulot pour interpréter une telle frappadingue.
Bref, y'a des moyens, du grand spectacle, mais ça reste quand même sacrément c**.
(je n'évoque même pas le fait qu'ils sont soit disant aveugles...)

DavosCoco
26/10/2021 à 11:27

Cette saison 2 est nettement plus réussie que la 1. Les longueurs ne se font pas trop ressentir et permettent même une respiration entre 2 combats bien gore et bourrins. Visuellement et techniquement cette S2 est irréprochable, en 4K Dolbyvision , l'image est juste sublime. Effectivement,on se rapproche de GOT dans les enjeux politiques et de conquêtes. Alors la S2 n'est pas parfaite mais elle est d'un très bon niveau.

adel1 10
26/10/2021 à 08:17

Cette série fait passer DAREDEVIL pour un voyant, non je n'ai pas pu

les mec qui evite les fleches et les coup de sabre faut arrêter , c'est too much
un gros ratage

Baba
26/10/2021 à 07:45

Etonné qu’on ne parle pas de la beauté des images. C’est vraiment ce qui m’a le plus souvent marqué dans cette série.

Incognito
26/10/2021 à 05:14

Il vaut mieux que ca monte crescendo et que ça se termine en beauté que ca commence magistralement et se termine en catastrophe (GOT).

Psycho
26/10/2021 à 03:57

Je kiff cette série g hâte je la saison 3 Arrive Merci à tous

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