Test Blasphemous 2 - encore un Miracle du jeu vidéo ?

Lino Cassinat | 23 août 2023
Lino Cassinat | 23 août 2023

Quatre ans après l'époustouflant Blasphemous premier du nom, le studio espagnol Team Kitchen revient avec un second opus, sobrement intitulé Blasphemous 2. Et comme l’équipe qui avait gagné n’a pas changé, c’est évidemment une franche réussite… mais on aurait aimé un peu plus de nouveautés et de prises de risques dans la zone de jeu.

qué horas son mi corazón ?

C’est peu de dire que Blasphemous avait marqué la rédaction, et probablement une grosse flopée de joueurs avides de challenge relevé, de beauté macabre et d’originalité tranchante. Si mélanger les codes des Soulsborne avec ceux du Metroidvania avait déjà été fait par l’indétrônable Hollow Knight, Blasphemous s’imposait moins grâce à son gameplay simple et efficace que grâce à son univers infernal remarquable inspiré du catholicisme espagnol qui en faisait un chef-d’œuvre pictural.

Évidemment, impossible pour le successeur Blasphemous 2 de s’éloigner d’une identité visuelle aussi forte et particulière, et honnêtement, on ne va pas s'en plaindre, tant on en redemandait.

 

Blasphemous 2 : photoOui bonjour, c'est la beauté

 

 Sans surprise, on replonge dès le premier écran dans une pseudo Séville qui évoque les cauchemars de Füssli, Caravage ou encore (surtout) Bosch. L’émerveillement est même décuplé, puisque les graphismes ont monté en grade. Blasphemous était à maints égards irréprochable, pourtant Blasphemous 2 a encore augmenté le niveau de détails de ses décors et la fluidité de ses animations. Mais la plus grosse amélioration technique (et la plus grosse amélioration tout court de ce deuxième jeu) sera à chercher du côté du gameplay, qui atteint un degré de raffinement proche du divin.

Plus clair, plus lisible et surtout plus riche grâce à l’introduction de trois armes utilisables qui ouvrent chacune toute une diversité de mouvements uniques particulièrement pratiques pendant les phases de plates-formes, Blasphemous 2 amène le soupçon de souplesse qui manquait à son prédécesseur, qu'il surclasse mécaniquement. D’aucuns diront que ce second opus en devient plus simple (surtout si, comme nous, vous privilégiez le gros encensoir / fléau à deux mains qui fait un gros SPROTCH très satisfaisant). On répondra que la courbe de difficulté sacrément raide du premier jeu a été étalée, et que ce n’est pas plus mal pour l’équilibre de l’ensemble. Mais il y a bien un mais.

 

Blasphemous 2 : photoViens... ici... que j'te bute... gniiii *SPROTCH*

 

DESPACITO

Blasphemous 2 propose une grande quantité de rééquilibrages, tous réussis et tous bienvenus, mais en dehors des trois armes susnommées, on ne peut pas vraiment parler de renouvellement ou de nouveautés. À bien y réfléchir, c’est à peu près le seul reproche que l’on fera à ce deuxième opus toujours jouissif, mais cet écueil est tout de même un brin embêtant à cause de sa portée systémique. Malgré tout l’amour que nous portons à Blasphemous, on ne peut que constater un certain surplace, en témoigne particulièrement la quantité d’éléments recyclés.

Le néophyte ne pourra pas s’en rendre compte (et tant mieux pour lui), mais il y a un sacré air de déjà-vu pour celui qui a fait le premier jeu. Si les boss et les niveaux ont changé, on retrouve peu ou prou le même bestiaire, les mêmes quêtes secondaires (le rosaire, les anges à libérer, etc.), et... la même histoire. 

 

Blasphemous 2 : photoEncore toi ?

 

Pour la faire courte, après sa défaite à la fin du premier opus, le Miracle revient, et il n'est pas content. Voilà, voilà. Alors, bien sûr, Blasphemous 2 en profite pour étendre le monde de Cvstodia et nous raconter plus en profondeur son univers aussi énigmatique que lugubre. Mais tout de même, on est un peu chagrin de ce manque d'inspiration, qui donne la sensation de reparcourir un mystère déjà élucidé.

L'élan narratif de Blasphemous 2 pâtit de son caractère cyclique, puisqu'on a déjà passé le premier jeu à élucider la vraie nature du Miracle et la cosmogonie de Cvstodia. Résultat : plutôt que d'intriguer le joueur, la narration cryptique et les lignes de dialogue ultra tarabiscotées ont cette fois quelque chose d'un peu artificiel, comme si la première moitié du jeu n'était qu'un détour avant d'enfin raccrocher les wagons avec le premier (le coeur dans le ciel, le destin de ce personnage adoré par les joueurs, etc.).

 

Blasphemous 2 : photoBureau des plaintes, j'écoute

 

seis seis seis

Par ailleurs, le manque d'inspiration se fait sentir également dans la direction artistique. Toujours dérangeante et cruelle, elle peine cependant à retrouver le niveau de grandiose morbide d'antan. Les graphismes ont mangé du lion, pour sûr, mais les concepts qui les habitent sont moins fascinants.

Bien sûr, les amateurs de charcuterie seront contentés par ce PNJ extatique dont la peau est petit à petit retirée comme un gant par des angelots au fur et à mesure que le joueur lui rapporte des upgrades de vie. Ceux qui aiment vomir dans leurs cornflakes apprécieront cet homme qui arrose son nourrisson mort de lait maternel sécrété par un sein greffé au gros fil de pêche à sa poitrine.

 

Blasphemous 2 : photoLe premier boss fait pâle figure, mais promis ça s'améliore

 

Mais avant son dernier tiers dévastateur (et notamment son ultime niveau qui fera plaisir aux fans de Slayer), Blasphemous 2 reste un peu sage comparé à la folie perverse dégoûtante du premier. Blasphemous 2 est clairement supérieur techniquement, mais son âme s'est un peu diluée et cette suite se vit parfois plus comme une (excellente) collection de niveaux supplémentaires, un gros appendice de luxe, plutôt qu'une suite justement. L'exemple qui exprime le mieux ce sentiment est le niveau de la Mère des Mères : d'une importance capitale dans le premier opus, il fait ici un retour inutile et sans grâce. Clin d'oeil appréciable, mais complètement oubliable.

Est-ce que tout cela justifie pour autant de passer à côté de Blasphemous 2 ? Absolument pas. D'ailleurs, on vous ordonne d'y jouer. C'est dit. L'univers de Blasphemous est si unique, si pervers, et ses mécaniques si perfectionnées que tout amateur de metroidvania, de gameplay exigeant et de surréalisme torturé a le devoir de mettre ses pouces sur ce petit miracle de jeu vidéo. Blasphemous 2 stagne un peu, mais stagne dans un palais de magnificence baroque. Il y a pire comme endroit où rester bloqué quinze heures, et considérant que Team Kitchen avait transcendé leur premier soft avec deux indispensables DLC, on ne peut que s'attendre à ce que Blasphemous 2 devienne encore meilleur.

Test réalisé sur Switch. Blasphemous 2 est disponible le 24 août sur Switch, PS5, Xbox X/S et PC

 

Blasphemous 2 : photo

Résumé

The Game Kitchen livre avec Blasphemous 2 un nouveau bijou de jeu vidéo, qui n'attend que ses probables DLC avant de s'élever à la hauteur du chef-d'œuvre qu'est son aîné. Les vétérans seront peut-être un poil déçus d'arriver en terrain déjà conquis et insuffisamment renouvelé, mais ce n'est cependant pas une excuse pour passer à côté. 

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commentaires
Cidjay
24/08/2023 à 12:14

Le premier était génial ! nul doute que sa suite le soit aussi !
En revanche, je ne craquerai pas pour la soi-disante édition physique limitée "limited Run".
Je l'ai pris en physique à 40 balles chez eux et genre 3 moi après, il était à 20 balles chez un autre éditeur un peu partout.
Il y avait déjà la même problématique pour "Street of Rage 4" !

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