Mickey Mania : pourquoi c'est le meilleur jeu vidéo de Mickey

JL Techer | 2 août 2022 - MAJ : 02/08/2022 18:26
JL Techer | 2 août 2022 - MAJ : 02/08/2022 18:26

Sorti en 1994 sur Mega Drive et Super Nintendo, Mickey Mania est un jeu vidéo doublée d'une déclaration d'amour dédiée à la mascotte de Disney.

À la fin des années 80 et au début des années 90, l'équipe des canards de Disney avait plus que le vent en poupe. Porté par l'excellente série La Bande à Picsou, Donald et consorts ont connu la gloire vidéoludique grâce à Duck Tales sorti sur NES en 1989, puis à QuackShot starring Donald Duck en 1991 sur consoles 16 bits. 

Mickey a même dû partager l'affiche avec Donald dans World of Illusion Starring : Mickey Mouse & Donald Duck sur Mega Drive en 1992. Après le très moyen The Magical Quest Starring Mickey MouseDisney s'est dit qu'il était grand temps que la souris la plus célèbre de l'univers ait de nouveau un jeu à sa gloire, avant de se faire définitivement voler la vedette par une bande d'oiseaux aquatiques ansériformes. 

Bien décidé à mettre toutes les chances de leur côté pour produire un jeu d'exception, en 1993 Disney se rapproche de la firme Traveller's Tale, fraîchement auréolée du succès du jeu de plateforme Puggsy, sorti en 1993, et connu pour ses jeux d'action Leander et Bram Stoker's Dracula, adaptation du film du même nom. Le projet était on ne peut plus ambitieux : il fallait coûte que coûte célébrer l'intégralité de la carrière de Mickey.

 

Mickey Mania : photoUn look inimitable


Epic Mickey

Le projet Mickey Mania, de son nom complet Mickey Mania: The Timeless Adventures of Mickey Mouse, est né de l'envie des cadres de Disney de créer un jeu vidéo pour célébrer les 65 ans de leur mascotte. Bien qu'ayant sous la main la division Walt Disney Computer Software, auteur de Les Aventures de Rocketeer (1991) et de Hare Raising Havoc (1991), l'adaptation de Roger Rabbit, les dirigeants de la firme ont préféré faire appel à de véritables professionnels pour produire un titre d'exception. 

Après des contacts avec quelques studios indépendants, ils jettent leur dévolu sur Traveller's Tales, le studio britannique fondé en 1989 par Jon Burton et affilié à Psygnosis. Sa vision du jeu de plateforme, mêlant phases d'action et séquences d'adresse pures, séduit Disney. Malgré tout, il n'a pas eu les coudées franches, la firme américaine a préféré confier à l'entreprise Sony Imagesoft (futur Sony Interactive) la gestion de la production et de l'édition du jeu, afin d'être sûre que la qualité attendue soit au rendez-vous, et que les délais soient tenus.

 

Mickey Mania : photoExemple de calcul des délais chez Disney

 

Et dès le départ de cette collaboration entre Sony Imagesoft, Traveller's Tales et Disney, les premiers problèmes apparaissent. Disney souhaite que le jeu Mickey Mania soit livré en octobre 1993, pour accompagner les célébrations du 65e anniversaire de la souris. Un délai jugé intenable par Jon Burton au vu du cahier des charges fourni par Disney, car cela aurait laissé moins de six mois à son équipe pour accoucher du produit final. Soit Disney rallongeait le délai, soit le jeu allait être bâclé

Jon Burton obtient gain de cause, et la date de sortie est reportée d'un an. Dorénavant, Burton visait octobre 1994, ce qui lui laissait suffisamment de temps pour réaliser un titre qui répondrait à son propre niveau d'exigence, mais aussi à celui de son nouveau collaborateur issu de Sony Imagesoft : un certain David Jaffe. Crédité au poste de designer sur Mickey Mania, Jaffe est aujourd'hui connu comme étant le co-créateur de la série Twisted Metal aux côtés de Mickael D. Jackson, et est le père de la saga God of War

 

Mickey Mania : photoQui aurait pu imaginer un lien entre Mickey et Kratos

 

Sept d'un coup !

Afin de rendre hommage au mieux aux plus grandes heures de la souris au short rouge, Traveller's Tales a fait le choix de consacrer chacun des sept niveaux de son jeu à un des courts-métrages parmi les plus marquants de la carrière de Mickey. À la suite de multiples rencontres avec la compagnie Disney et Sony, Jon Burton a fini par arrêter une liste de sept dessins animés, tous censés représenter des aspects différents du héros, et qui permettraient au studio de créer des niveaux suffisamment différents pour ne pas lasser les joueurs. 

Le premier niveau a été consacré à Steamboat Willie, métrage datant de 1928 qui est considéré comme l'acte de naissance officiel de Mickey. Dans le jeu vidéo, Mickey apparaît comme un personnage colorisé sur un film en noir et blanc, l'écran étant encadré par les perforations de la pellicule. À mesure que le héros progresse, il amène des couleurs dans ce monde en niveau de gris. Une belle trouvaille artistique qui a marqué le public à la sortie du jeu. 

 

Mickey Mania : photoUn premier niveau inoubliable

 

Le deuxième niveau explore le dessin animé The Mad Doctor de 1933. Un stage qui projetait Mickey dans un gigantesque laboratoire de savant fou dans un château gothique, et qui réserve une phase de train de la mine assez inattendue, suivie d'une séquence où le héros descend une grande tour dans un effet de simili 3D totalement bluffant, avant de se terminer dans un duel face au professeur aux faux airs de Jafar en blouse blanche. 

The Moose Hunters (Chasseurs d'élans - 1937) offrait son cadre au stage suivant. Il s'agit d'un niveau divisé en deux parties, et basé sur des séquences de réflexes. Dans sa première moitié, accompagné de Pluto, Mickey doit esquiver des pierres et des élans, dont l'apparition est indiquée par un aboiement de Pluto. Sa seconde partie voit le héros devoir fuir des élans en une course effrénée face caméra. 

The Lonesome Ghosts (Les Revenants Solitaires - 1937) donnait lieu à un niveau sur le même modèle que la maison hantée de Super Mario Bros 3 . Puis Mickey and the Beanstalk (Mickey et le Haricot Magique - 1947) permet à la souris de parcourir un stage de pure plateforme en étant minuscule dans un monde immense, d'abord végétal, puis constitué par la table du géant de l'histoire originale.  

 

Mickey Mania : photoFast and Furious


The Prince and the Pauper (Le Prince et le Pauvre - 1990) fermait la marche, et proposait d'explorer un château, avec une séquence stressante où de la lave montait du bas de l'écran, forçant le héros à aller toujours plus haut à l'aveugle. Le jeu se terminait avec un duel face au Capitaine Pat Hibulaire.

Quid du septième niveau ? The Band Concert (La Fanfare - 1935) était un stage caché, accessible en faisant toute une suite de  manipulation au cours du niveau Beanstalk. 

 

Mickey Mania : photoThe Band Concert, un enfer de plateforme

 

Fantasia

Mickey Mania a été salué à sa sortie pour sa beauté graphique et sa direction artistique. David Jaffe et Jon Burton ont mis la barre très haut pour ce qui est de la qualité d'animation du héros, de celle de ses ennemis. Les effets 3D de certains passages, dont les séquences de tour en 3D ou la course-poursuite avec l’élan, et la qualité des scrollings différentiels ont également marqué la presse.

Livré sur Mega Drive et Mega CD en novembre 1994, le titre n'avait pas à pâlir face à la rude concurrence de l'époque : Sonic 3 sur MD, Sparkster, ou Donkey Kong Country sur SNES. De plus, il avait pour lui l'aura Disney, qui lui a assuré une belle visibilité auprès du jeune public. 

Pour des raisons étranges, les versions européenne et japonaise du jeu sur SNES n'ont pu trouver le chemin des étals que six mois plus tard, en avril 1995. Cette itération SNES a été adaptée par Capcom, et si globalement les jeux sont les mêmes, puisque Traveller's Tales avait fourni l'intégralité du code de jeu à la firme japonaise, la version SNES s'est tout de même vue amputée du niveau The Band Concert

 

Mickey Mania : photoC'est beau à pleurer

L'autre point qui avait été largement mis en avant par la presse de l'époque est la bande originale du soft, composée par Andy Blythe et Marten Joustra, un duo pour lequel il s'agissait du premier travail de commande dans le jeu vidéo. Malgré les limitations techniques des hardwares SNES et Mega Drive, Blythe et Joustra ont livré un magnifique OST, fait de compositions originales respectant le plus pur esprit Disney old school. 

La BO était partagée entre des morceaux très enjoués et lumineux, comme Steamboat Willie (wharf), qui auraient très bien pu être sur la bande originale de courts-métrages des années 30 à 50, et d'autres plus sombres comme The Lonesome Ghosts (Ghosts 1) avec ses roulements de caisse claire, qui n'aurait pas dépareillé sur l'OST d'un Castlevania

 

 

 

Si les versions SNES et Mega Drive sont très honnêtes au niveau de la bande originale, c'est dans son itération Mega CD que Mickey Mania déploie véritablement ses ailes. Le support CD aidant, les compositions de Blythe et Joustra prennent une tout autre ampleur. Secondés par un jeune Michael Giacchino, les compositeurs délivrent un OST magistral, où s'épanouissent les cordes et le piano pour un festin audio. La piste Mickey and the Beanstalk est d'une telle qualité de production qu'il est difficile d'imaginer qu'il s'agit d'un jeu vidéo datant de 1994.

Cette version Mega CD n'était pas qu'un simple portage, les sprites étaient plus détaillés, l'animation plus fluide, et les couleurs toujours plus chatoyantes. C'est à croire que c'est cette seule et unique itération qui aurait dû voir le jour, où que celle-ci fût la version développée au départ, et qu'ensuite elle a été l'objet d'une dégradation pour être portée sur MD et SNES. 

 

 

Mickey Maniac

Face au succès critique et public de Mickey Mania : The Timeless Adventures of Mickey Mouse, en 1996, Disney a décidé d'effectuer un portage du titre sur la PlayStation de Sony, alors en plein essor. Pour l'occasion, le soft a été rebaptisé Mickey's Wild Adventure, et était au moins aussi qualitatif que la version Mega CD de Mickey Mania

Cependant il ne s'agissait pas d'un portage paresseux pour autant. Les sprites avaient été retravaillés, les séquences 3D bénéficiaient dorénavant d'une véritable modélisation 3D et dans le niveau Mad Doctor, de nouveaux éléments, comme des caisses arrivant des extrémités de l'écran, avaient été ajoutés. 

 

Mickey Mania : photoUn Mickey encore plus beau pour Mickey's Wild Adventure

 

La collaboration entre Disney et Traveller's Tale pour Mickey Mania a été le début d'une longue entente entre les deux firmes. Dans les années qui ont suivi, la société de Jon Burton a réalisé les adaptations de Toy Story, 1001 pattes, et Le Monde de Nemo. Le plus grand coup d'éclat de Traveler's Tales a été LEGO Star Wars, le jeu vidéo en 2005, un carton planétaire sur PC, PS2, Xbox et GameCube.

Désormais spécialiste du développement de jeux sous licence LEGO, Traveller's Tales, désormais renommé TT Games, a bouclé la boucle avec LEGO Star Wars : The Skywalker Saga. Sorti en 2022, le titre a été produit pour le compte de Warner Bros., et conçu sous l'égide de Disney, détenteur de la licence Star Wars

Nimbé de nostalgie, Mickey Mania fait partie de ces titres capables de parler tout autant aux enfants qu'à leurs parents, ce qui est l'une des marques de fabrique de Disney. Si la jeune génération se délectait d'un jeu de plateforme bien conçu et à sa portée en termes de difficulté, Mickey Mania devenait une machine à voyager dans le temps pour les joueurs plus âgés. À ce jour, il reste une merveilleuse porte sur l'histoire de Mickey et une perle de jeu de plateforme.

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commentaires
@sofian
04/08/2022 à 11:21

Article très sympa. Mais il est dommage de ne pas évoquer Castle of Illusion, qui est tout de même le jeu fondateur en matière de jeux basés sur Mickey Mouse, tant sur le plan technique que du gameplay.
Et que dire de la difficulté abusive de Mickey Mania ? De mémoire, le jeu avait reçu un accueil critique global assez moyen à l’époque. Loin en tout cas des lauriers tressés à Castle of Illusion, Quackshot, Aladdin ou même à Magical Quest.

Marco85
04/08/2022 à 10:11

Bel article, je ne possédais pas la megadrive étant petit, j'ai eu la chance d'avoir la snes. Cet article a éveillé ma curiosité, je vais de ce pas tester ces pépites.

Sultano
03/08/2022 à 13:41

@insgardoced Je ne me fais pas de souci vis-à-vis de leur connaissance du média vidéoludique, les analyses ici sont bien souvent plus qualitatives que celles de la "presse spécialisée". Pour preuve, on retrouve un petit clin d'oeil à Epic Mickey, un jeu qui a eu son petit succès sur Wii à l'époque mais dont plus grand monde se souvient aujourd'hui...

Ray Peterson
03/08/2022 à 12:37

Mickey Mania est certes superbe mais en terme de gameplay et de fun je lui préfère The Magicl Quest plus inventif et mieux jouable. Sa suite The Great Circus Mystery était franchement pas mal non plus (et jouable à 2). Après question de goût.

Hildegarnic
02/08/2022 à 22:57

Euh non, vous dites n'importe quoi : le meilleur Mickey, c'est The Magical Quest (en dehors d'évidemment Castle of Illusion)

Aktayr
02/08/2022 à 20:35

@insgardoced

"Une honte que vous n'en parliez même pas"

Justement, il en parle en début d'article...

Aktayr
02/08/2022 à 20:30

Voilà un classique à côté duquel je suis totalement passé. C'est vraiment cool quand vous prenez le temps de revenir sur la genèse d'un jeu. C'est aussi intéressant que le jeu en lui-même. Et visiblement, ils ont vu les choses en grand pour ce dernier !
Et c'est vrai que la piste "Mickey and the Beanstalk" est magnifique.

Merci pour cet article JL Techer !

Pseudo1
02/08/2022 à 18:28

Il était d'une difficulté affolante pour un gosse ce jeu ! Digne des vieux Tintin d'Infogrammes.
Mais effectivement sublime visuellement.