Salafistes : l'Etat tente une nouvelle fois de censurer le documentaire de François Margolin

Alors que la censure s’est rarement aussi bien portée en France, grâce notamment à l’association Promouvoir, c’est au tour de l’Etat lui-même de jouer les empêcheurs de créer en rond.

Nous nous étions ému il y a quelques mois du sort réservé au documentaire Salafistes, co-réalisé par François Margolin et le journaliste Mauritanien Lemine Ould Salem. Ce film qui suivait les parcours, actes et discours de salafistes en Irak, en Algérie, en Tunisie, Mauritanie et au Mali est pourtant une œuvre forte, donnant au public à voir et comprendre la nature de la menace à laquelle certains pays, au premier rang desquels la France, font face.

Prétextant que l’absence de mise en perspective du discours salafiste dans le documentaire le rendait potentiellement dangereux, le film s’était vu accoler une interdiction aux moins de 18 ans, le condamnant de facto à une exploitation quasiment impossible.

Cette interdiction avait été levée le 13 juillet dernier par le Tribunal Administratif de Paris, qui dans sa décision déclarait que le documentaire « permet au public (…) de réfléchir et de prendre le recul nécessaire face à la violence des images ou des propos qui ont pu y être présentés ».

Mais le ministère de la Culture ne l’entend pas manifestement pas de cette oreille et souhaite ardemment rendre Salafistes invisible, puisqu’il a fait appel de cette décision, afin de rétablir l’interdiction aux moins de 18 ans. Le réalisateur, dont l'oeuvre est déjà sortie dans plusieurs pays s'est dit "scandalisé" à l'AFP.

Une attitude problématique, alors que la France vient de subir un attentat il y a quelques jours à peine. Alors que la nécessité de comprendre, conceptualiser et apprendre de la menace qui pèse sur la communauté nationale n’a jamais été aussi impérieuse, il nous semble particulièrement préoccupant que les autorités s’inquiètent plus de dissimuler la nature du danger que de facilité sa compréhension.

En outre, cette stratégie de l’Etat rappelle la censure menée par l’exécutif durant la Guerre d’Algérie, dont on ne peut pas dire qu’elle ait aidée le pays à digérer et intellectualiser les évènements auxquels il était confronté.