Spider-Man : la version abandonnée de Cannon Films

Mathieu Lapon | 13 décembre 2021 - MAJ : 13/12/2021 15:11
Mathieu Lapon | 13 décembre 2021 - MAJ : 13/12/2021 15:11

En 1985, la société Cannon Films est en passe de produire un film Spider-Man qui n'aboutira jamais. À quoi devait ressembler cette version du Tisseur ?

Avant la légendaire trilogie de Sam Raimi, qui marquera non seulement un tournant pour le genre super-héroïque, mais le cinéma tout entier, d'autres prétendants ont été en lice pour adapter sur grand écran l'Homme-Araignée. Différents metteurs en scène de renom ont été envisagés pour porter un tel fardeau (comme David Fincher et sa version préliminaire abandonnée ou James Cameron et "son meilleur film qui ne verra jamais le jour"), mais aussi des studios, et pas des plus glorieux.

Dans les années 1980, la société Cannon Films, connue alors pour ses productions à petits budgets, acquiert les droits de faire un film sur l'Araignée sympathique du quartier. Des prémices horrifiques du projet jusqu'à un versus plus classique avec le Docteur Octopus, à quoi aurait pu ressembler un film Spider-Man estampillé Cannon, le studio maître de la série B ?

 

Spider-Man : photoQuand l'horreur l'appelle au loin

 

Genèse à huit pattes

Comme le rappelle Digital Spy, c'est donc au milieu des années 1980 que Cannon Films fait son affaire, en s'arrogeant les droits de produire un film Spider-Man pour une bouchée de pain, à savoir 225 000 dollars. Une aubaine d'autant plus grande que le personnage est loin d'être un tâcheron dans le calendrier de Marvel, et garantirait moult revenus à la société de production. Néanmoins, ce droit n'est valable que cinq ans, ce qui pose un compte à rebours pour développer le film.

Le réalisateur Tobe Hooper, alors connu pour avoir fait dix ans plus tôt Massacre à la tronçonneuse, est attaché au projet. C'est un choix qui peut paraître surprenant (autant que Sam Raimi et sa saga Evil Dead, après tout), mais qui fera totalement sens avec les intentions de la production... qui veut faire de son Spider-Man un film horrifique. Mais comment adapter l'histoire du Tisseur de façon horrifique ? À cela, Cannon répond : "En n'adaptant pas l'histoire du Tisseur". On s'accroche parce que c'est de la bonne, comme on dit.

 

Spider-Man : Photo Tobey MaguireRenfilez vos lunettes, vous aurez besoin de le voir pour y croire

 

Hooper et Cannon balayent dès les prémices du projet les ingrédients typiques d'un film Spider-Man. Exit l'écolier, la morsure de l'araignée radioactive, le super-héros en collants qui sert la veuve et l'orphelin, et place à Peter Parker, immédiatement journaliste. Il se voit, pour on ne sait quelle raison, enlevé par un maléfique savant fou du nom de "Docteur Zork". Dans toute sa vilenie, Zork transforme Peter en monstre à huit pattes.

Peter, horrifié d'être devenu La Mouche de David Cronenberg (une référence souvent ressortie pour décrire le projet), est une abomination littéralement arachnéenne, qui ne peut tellement pas supporter sa propre vue qu'il en développe des pensées suicidaires. Mais plutôt que de mettre fin à ses jours, il décide d'utiliser les capacités de sa monstrueuse mutation pour empêcher Zork de déchaîner d'autres abominations qu'il a pu concevoir, et qu'il compte utiliser pour dominer le monde. Un programme fort original.

 

Spider-Man : photo, Cliff RobertsonEt Ben Parker était un synthézoïde conçu par une espèce alien pour surveiller Peter, aussi ?

 

Retour aux sources

Face à ce Spider-Man qui ne l'est que de nom, Stan Lee, scénariste et éditeur de légende chez Marvel, a utilisé son complexe de dieu à des fins salvatrices, puisqu'il a appelé tout ce beau monde à recentrer le film autour des idées classiques qui ont forgé la mythologie Spider-Man. Le message était clair : un peu de fidélité au matériau d'origine ne ferait pas de mal, sans quoi on courait vers la catastrophe.

La doléance étant entendue, le scénario est repris de zéro. Hooper quitte le navire et est remplacé par Joseph Zito (Vendredi 13 : Chapitre final). Cette fois, les idées de base sont plus sobres. Peter Parker est à l'université, avec pour professeur de sciences le célèbre Otto Octavius, qui deviendra le mortel Docteur Octopus. Sans qu'on sache comment, la genèse super-héroïque de Peter et super-vilaine d'Octavius étaient entrecroisées. Aussi, May Parker devait être relativement jeune (le modèle apparemment recherché était celui de Katharine Hepburn adulte).

 

Spider-Man : Homecoming : Photo Marisa TomeiPas si avant-gardiste que ça

 

Autre détail qui paraîtra stupide, mais qui figure tout de même dans le lot de connaissances qu'on a du projet, Octavius avait comme tic de dire "Okey Dokey !". Comment ? Pourquoi ? On n'en sait rien, et on est d'accord sur le fait que ça interroge sur le sens des priorités des équipes du studio, qui sont quand même parvenues à décréter un détail aussi inintéressant et questionnable. Mais, en vérité, plein de petites idées du genre fourmillaient (on voulait par exemple que Peter ait un chien, mais c'était un coût trop onéreux pour la production).

Parmi les anecdotes un peu plus croustillantes, il se disait que Tom Cruise, alors petit nouveau dans l'industrie cinématographique, aurait pu camper Peter Parker. Finalement, le studio aura casté Scott Leva. On parle aussi de Bob Hoskins en Octopus, mais surtout de Stan Lee qui aurait bien voulu tenir le rôle du journaliste John Jonah Jameson (dieu soit loué, la première interprétation connue du personnage sera celle de J.K. Simmons dans l'imaginaire collectif).

 

Spider-Man : photo, Scott Leva (version Cannon)Un premier rendu aux airs de Superman

 

Super-débandade

Pitrerie mise à part, il est intéressant de savoir que le film était suffisamment avancé pour se permettre d'avoir une bande-annonce. Ou plutôt, une sorte de teaser, qui annonçait qu'un film Spider-Man allait entrer en production et arriver sur grand écran. C'est dire la confiance que le studio avait dans son produit, alors qu'il n'aboutira jamais. Alerte "qualité dégueulasse" :

 

Affiche Cannon Films

 

Mais pourquoi le projet s'est effondré, d'autant qu'il avait le budget huppé (pour l'époque et pour un tel studio) de 20 millions de dollars ? En 1987 sortent Superman IV : Le Face-à-face et Les Maîtres de l'Univers, tous deux produits par Cannon. Malheureusement, les films se révèlent être de bons gros échecs critiques et commerciaux, qui font remettre en question l'efficacité du genre super-héroïque au cinéma, parmi les pontes du studio.

En découle une coupe budgétaire de dix millions de dollars pour le film Spider-Man, soit la moitié de l'argent qui lui était alloué. En accusant ce coup dur, Joseph Zito est dégoûté et, 1,5 million de dollars injectés plus tard dans le projet, il le quitte. Cannon gèle immédiatement la pré-production du film. Le temps passe, et les cinq ans de droit à la production d'un film Spider-Man se perdent, revenant à Marvel. Fin du projet. Quelques années plus tard, Cannon bat de l'aile et prend une pause dans le secteur du cinéma pour se restructurer.

Tout savoir sur Spider-Man

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commentaires
Bubble Ghost
13/12/2021 à 22:54

Telliac, je parie que c'est par là que tu trouvera la réponse :

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Homme_araign%C3%A9e_(film)

Telliac
13/12/2021 à 21:25

J'ai pourtant vu Spider-man en "live action" étant gamin, sur une VHS... Il se battait contre le "caïd", il y avait l'origin story, mais de mémoire l'ensemble était très cheap et Peter arker avait le charisme d'une huître sous tranxène... C'était quoi alors, ce truc ?