J - 2 avant Le Hobbit, la Désolation de Smaug

Simon Riaux | 7 décembre 2013
Simon Riaux | 7 décembre 2013

Alors que nous nous apprêtons à découvrir La Désolation de Smaug dans une grosse poignée d'heures et à vous livrer nos impressions dans la foulée, l'heure est venue de faire un point sur les attentes que suscite le film, ainsi que les premiers retours sur LE grand spectacle de cette fin d'année. Sans véritable concurrence face à lui, le deuxième volet de l'épopée du Hobbit semble promis à un véritable raz de marée en salles, pourtant, tout n'est pas rose en Terre du Milieu et le film devra faire oublier nombre de reproches émis suite à un épisode introductif qui aura été accueilli pour le moins fraîchement.


Suite à un développement pour le moins rocambolesque, fait de désistements, d'incertitude, de reculade et de retournements de situation, c'est finalement Peter Jackson, qui n'entendait pas réaliser la chose de prime abord, qui s'est une fois de plus retrouvé à la barre. Sanctifié à raison gardien et promoteur de l'œuvre de Tolkien, le metteur en scène néo-zélandais aura grâce à la trilogie du Seigneur des Anneaux révolutionné les schémas de productions hollywoodiens, imposé l'heroic fantasy comme un genre à part entière (sur grand écran, la littérature et d'autres médias ne l'ayant évidemment pas attendu) et accouché d'une triplette fantastique, une aventure d'une ampleur toujours inégalée au cinéma. Des accomplissements, une dévotion qui ne lui auront cependant pas servi de bouclier. En effet, les voix qui s'étaient tues devant le succès massif du Seigneur des Anneaux n'ont cette fois-ci pas mâché leurs mots. Le Voyage inattendu aura été taxé de poussif, trop long, ampoulé, gangréné par le numérique, voire perçu comme une simple redite de la précédente trilogie, dont il partage la structure et la direction artistique. Plutôt que d'y voir de la cohérence, nombreux sont ceux qui considérèrent l'ensemble comme une entreprise passablement plus mercantile, moins inspirée, trop enfantine, allant jusqu'à s'interroger sur les motivations de Jackson et son envie réelle de porter en personne cette odyssée à l'écran.

La Désolation de Smaug n'en est pas moins extrêmement attendu, en témoigne l'effervescence dans la presse comme les réseaux sociaux, à l'arrivée de la moindre info, de la plus petite vidéo ou trailer. Nos lecteurs ne se sont ainsi pas fait prier lorsque nous leur avons demandé qu'elles étaient leurs craintes ou désirs quant à cette itération supplémentaire. Plusieurs souhaitent qu'à l'instar de la trilogie originale, « le récit s'emballe », qu'il en finisse tout à fait avec « sa très longue exposition », bref, un paquet de gens veulent que ça démastique de l'Orc sévère. « À condition que les CGI soient mieux gérés » précisent certains ; car une partie des spectateurs a eu le sentiment d'assister avec le premier métrage à une déferlante numérique pas tout à fait maîtrisée, à tort ou à raison, les aventures du Hobbit, si elles ont impressionné visuellement, ont laissé un goût d'irrégularité dans la bouche d'une partie du public.

Après une première tentative que les mauvaises langues avaient qualifié de désastreuse, quand il était bien trop tôt pour juger de viabilité du procédé, cet opus décidera largement du sort du fameux HFR. Le public sera-t-il plus réceptif à cette technique ? Cette dernière sera-t-elle suffisamment maîtrisée pour, couplée à la 3D, ne plus demander un si copieux temps d'adaptation. Les avis très tranchés que nous avons recueillis laissent craindre que bien des spectateurs optent pour le "plus jamais ça" suite au souvenir de projections à leur goût trop coûteuses et déceptives. Si quelques lecteurs témoignent d'une "grande curiosité pour un procédé qui change quand même beaucoup de choses", la capacité des spectateurs à accepter cette nouveauté est encore un grand point d'interrogation. À ce titre, la fraîcheur avec laquelle la démarche de Jackson, encore une fois à la pointe de l'innovation technique (comme un certain James Cameron) en dit long sur les préjugés du moment et la défiance avec laquelle sont accueillis les travaux de réalisateur adulés il y a à peine quelques années.

Et si la question des effets spéciaux se fait ici prégnante c'est bien sûr parce que Jackson a toujours fait office de maître autant que de pionnier en la matière, mais également parce que le métrage qui nous intéresse doit relever un défi de choix : donner vie à Smaug. Une impatience qui prouve que quelques soit le scepticisme de l'époque ou les réserves d'une frange du public, tout le monde croit Jackson à la hauteur du challenge. Sa présence symbolise à elle seule ce que désire nombre de fans, « une véritable envolée dans l'aventure et l'héroïsme », une dimension épique qui efface totalement le sentiment persistant d'avoir assisté il y a un an à un petit précis de « Tolkien pour les nuls ». Preuve du magnétisme qui entoure le projet, cette phrase lapidaire d'un camarade distributeur (personne n'est parfait) : « Je veux voir le dragon. »

Au sein même de la rédaction d'Ecran Large, les avis sont tranchés. Du « de toute façon y aura pas de nichons, ni de scène de triolisme nain-elfe-orc » de Tonton BDM, en passant par le « depuis que Klapisch a abandonné la réal je m'en cogne » de Sandy Gillet, sans oublier le « un dragon et Liv Tyler ? Je signe ! » de notre rédac chef, ou encore le « mon avis ? On s'en cogne puisque ce sera génial mais moins bien qu'Hunger Games » de Stéphane Argentin, les préjugés sont aussi nombreux que pluriels. Une excitation monte néanmoins bel et bien, rehaussée par les premiers bruits qui nous sont parvenus, singulièrement contradictoires.

Alors que les premiers échos nous parviennent d'Amérique, tandis qu'une poignée de nos confrères ont d'ores et déjà découvert le film, tout laisse à penser que les opinions seront extrêmement tranchées et plutôt divergentes entre américains et français. En effet, si le Time a immédiatement intégré le film à son top annuel, que The Hollywood reporter, Variety et Empire y voient une séquelle infiniment plus réussie qu'Un Voyage inattendu, les retours hexagonaux que nous avons pu collecter sont, eux, tout à fait catastrophiques. Arbitrer avant visionnage ou interpréter qui serait plus sincère ou dans le vrai n'aurait logiquement aucun sens, il nous tarde néanmoins de voir comment un « Jackson une fois de plus au sommet de son art » (Empire) peut bien cohabiter avec « le récit décousu et artificiel » qu'on nous a décrit ou comment cette œuvre « qui s'avère en tout point une amélioration de la précédente » (The Hollywood reporter) pourrait bien s'avérer « une pure entreprise mercantile décérébrée ».

Quoi qu'il en soit, l'attente est énorme, de la part des détracteurs comme de ceux qui attendent La Désolation de Smaug la bouche en cœur. Peter Jackson, de l'avis de tous ceux que nous avons contacté, amateurs, fans, professionnels et profanes, doit néanmoins impérativement relever un ultime défi : « nous expliquer pourquoi il a rajouté des personnages et une amoureuse à Legolas, alors que l'acteur n'a même pas lu les bouquins ». Non mais.

 

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