L'anti-Dahmer : mode d'emploi pour adapter un fait divers sans racolage cinématographique

Un fait divers effroyable touchant à la question sensible de la transidentité, un positionnement à la lisière du drame et du biopic tragique : toutes les conditions étaient réunies pour faire sombrer Boys Don't Cry dans le sensationnalisme racoleur. Le film, magistralement interprété par Hilary Swank, évite pourtant brillamment le piège pour s'imposer comme un uppercut d'une force démentielle.

Le 31 décembre 1993, deux hommes traquent et assassinent Brandon Teena, un jeune transgenre de 21 ans. S'étant toujours senti plus à l'aise dans la peau d'un garçon, celui-ci avait profité de son arrivée dans le Nebraska pour repartir d'un nouveau pied, adopter une gestuelle et une physionomie masculine et débuter une histoire d'amour avec une jeune femme nommée Lana Tisdel. Mais deux de ses "amis" découvrent sa véritable identité, l'humilient puis le violent.

Encouragé par Lana, Brandon les dénonce à la police avant d'être victime de leurs représailles. C'est le cheminement menant à ce crime haineux que Boys Don't Cry ausculte. Loin de se laisser aspirer par le sensationnalisme facile qu'aurait pu susciter un tel sujet, sa réalisatrice Kimberly Peirce en fait un petit précis de traitement digne, sensible et jamais complaisant.

 

Black Swan(k)

 

Un coup de foudre post-mortem

Lorsque Kimberly Peirce découvre le récit de ce fait divers, il la frappe intimement. Non par attrait morbide, mais parce qu'il lui permet, de son propre aveu, de "tomber amoureuse de Brandon Teena et de son désir de vivre et d'aimer librement, à une époque et dans un lieu où cela était impossible".

Si elle contribuera par la suite à des séries telles The L World, son CV cinématographique est alors vierge. Dès 1995, elle tire de ce drame un court-métrage, mais aspire à davantage : à compter de cet instant, elle n'a de cesse de travailler à la concrétisation de ce qui deviendra son premier long.

 

Hilary de bon cœur