The Wrestler : faux Stallone, faux Rocky, vrai bon film

Déborah Lechner | 18 juin 2023 - MAJ : 30/01/2024 12:37
Déborah Lechner | 18 juin 2023 - MAJ : 30/01/2024 12:37

The Wrestler, de Darren Aronofsky, a remis Mickey Rourke sur le devant de la scène, ou plutôt du ring, ce qui n'a pourtant rien d'une belle histoire à la Rocky Balboa.

Difficile de séparer le mythe, le schéma narratif du combattant sur le retour ou de l'outsider en rédemption de Sylvester Stallone de celui de son homologue fictif, Rocky Balboa. Du premier film de 1976 au dernier volet de 2008, la série de films sur l'Étalon Italien s'est imposée comme la saga de sport ultime, la référence officielle ou officieuse de nombreux longs-métrages de sports de combat (Fighter, Real Steel, Warrior) ou d'autres disciplines comme le bobsleigh dans Rasta Rockett (oui) ou la course automobile dans Driven, avec Stallone à l'affiche pour mieux forcer le rapprochement.

Cette assimilation presque instinctive à Rocky peut être flatteuse ou recherchée, mais aussi réductrice, voire insensée, comme pour The Wrestler, réalisé et écrit par Darren Aronofsky. Mickey Rourke y incarne une vieille gloire du catch qui après une vie d'excès remonte sur le ring pour un ultime match. Sur ce simple pitch, la comparaison paraît évidente. Surtout que, comme le premier Rocky, The Wrestler commence sur un combat sans envergure dans un gymnase fauché où un loser à la gueule esquintée est payé une misère après avoir été salement cogné. On pourrait aussi le comparer à Rocky Balboa, vu qu'il s'agit d'une autre icône démodée qui veut retrouver les honneurs en montrant qu'elle peut toujours encaisser les coups.

La caractérisation de Randy, ce bon gars un peu simplet qui a fait tous les mauvais choix, n'est d'ailleurs pas sans rappeler celle de Rocky. Comme un clin d'oeil involontaire, les scènes de combat ont même été tournées à Philadelphie, la ville emblématique de la franchise de boxe. Cependant, à bien des égards, The Wrestler est construit en totale opposition à Rocky et Rocky Balboa, s'érigeant comme leur versant tragique et leur relecture la plus nihiliste.

 

The Wrestler : photo, Mickey RourkeDe bad father au bad de Mother

 

POING DE DÉPART VS POING FINAL

Rocky est l'histoire d'un diamant brut qui, à mesure qu'il est taillé, se révèle de plus en plus solide et brillant. C'est un conte de fées protéiné sur une Cendrillon à gros bras qui baigne dans le sang et la sueur autant que dans la crasse. C'est aussi et surtout la révélation de Sylvester Stallone, et donc le sacre d'une double légende. Et c'est là la première divergence majeure avec The Wrestler qui emprunte le chemin opposé. Au premier abord, la genèse des deux films et leur dimension méta semblent pourtant aller dans le même sens.

Le rôle de Randy a été écrit pour Mickey Rourke de la même façon que celui de Rocky a été écrit pour (et par) Sylvester Stallone. Dans les deux cas, les producteurs ne voulaient pas qu'ils soient les têtes d'affiche, préférant des acteurs plus populaires (Nicolas Cage dans le cas de The Wrestler) alors même que les deux personnages étaient intrinsèquement liés à leur vie. 

 

The Wrestler : photo, Mickey RourkePlus tellement une gueule de porte-bonheur, surtout pour les producteurs

 

Pour Stallone, Rocky a d'abord été un tremplin après des débuts compliqués, puis l'occasion de se remettre en selle au milieu des années 2000 après un long passage à vide. Pour Mickey Rourke, The Wrestler était une sorte de chant du cygne plus qu'une réelle renaissance après une perdition de presque 15 ans.

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commentaires
Seb Natch
19/06/2023 à 07:13

Très belle critique.

Hasgarn
18/06/2023 à 23:06

Les films de Darren Aronofski sont de très grosses expérience pour moi.
A 2 exceptions près, je n’ai vu chacun de ses films qu’une seule fois (sauf Mother et Thé Wale pas encore vu).
Chaque fois, c’est d’une grande intensité.
Tellement fort que les voir une fois me suffit : je ne les oublie pas.

The Wrestler, c’est exactement ça.
Puissant, déprimant, négatif…
Mais une belle leçon de cinéma !

TOCAP
18/06/2023 à 21:31

Dernier grand rôle de Stanley White...euh Mickey! Merci Darren!

kast_or
18/06/2023 à 21:04

Un film que j' ai lancé un soir en me disant : "pff, un film sur les catcheurs... Aucun intérêt"
Je me suis pris une bonne baffe. Superbe film, très touchant, très juste

Vomito
18/06/2023 à 20:37

Superbe film intimiste.