L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford : l'anti-western par excellence, par Andrew Dominik

Arnold Petit | 13 juillet 2021 - MAJ : 19/07/2021 15:44
Arnold Petit | 13 juillet 2021 - MAJ : 19/07/2021 15:44

Aucun suspense. Comme le révèle d'emblée son titre à rallonge, L'Assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford montre bien comment le célèbre Jesse James a été tué par Robert Ford le 3 avril 1882 d'une balle tirée dans son dos. Mais l'acte en soi n'importe pas tant que les événements qui y ont conduit ou que la relation qu'ont entretenue ces deux hommes avant cet instant fatidique qui a changé leur destin.

Et c'est exactement ce qu'Andrew Dominik raconte avec grâce et sensibilité dans son film porté par Brad Pitt et Casey Affleck. Un western qui n'en est pas un, sorti dans l'indifférence à l'époque, réhabilité par ceux qui l'ont vu comme un chef-d'oeuvre négligé et un des plus grands films américains de ces 20 dernières années tant il est sublime, dense et bouleversant. Autant de bonnes raisons pour en reparler avec tout l'amour  qu'il mérite.

 

photo, Brad PittMémoires d'un criminel

 

IL ÉTAIT UNE FOIS DANS L'OUEST

Directement rattaché à l'histoire des États-Unis, le western représente l'idéal de la conquête de l'Ouest. S'emparant de cette vision encensée du Far West que la littérature avait déjà popularisée comme divertissement avec les dime novels et des romans comme Le Dernier des Mohicans (adapté plus tard sur grand écran par Michael Mann), les caméras ont changé les habitants du Nouveau Monde en acteurs d'une grande épopée historique et mythologique vers cette fameuse Frontière à repousser toujours plus loin, dans l'espoir de mener une vie tranquille, faire fortune ou connaître la gloire. Déjà, la poursuite exaltée d'un certain rêve américain.

Comme le western, la figure de Jesse James s'est écrite entre fiction et réalité. Alors que ses nombreuses victimes le considéraient comme le dangereux criminel qu'il était, la presse et les nouvelles à 5 cents l'ont érigé en héros animé par une cause juste, avant que le cinéma n'alimente sa légende de "brigand bien-aimé" pendant des décennies. Dès 1939 avec le long-métrage du même nom réalisé par Henry King, puis en 1957 dans celui réalisé par Nicholas Ray, mais aussi avec J'ai tué Jesse James en 1949, La légende de Jesse James en 1972, jusqu'à American Outlaws en 2001. John Ford n'expliquait-il pas dans ce chef-d'oeuvre qu'est L'homme qui tua Liberty Valance (auquel on a consacré un dossier ici) que "quand la légende surpasse la réalité, imprimez la légende" ?

 

photo, Brad PittUn regard qui porte le poids d'une vie passée à fuir

 

À l'inverse, plutôt que de s'intéresser au glorieux passé du criminel, fait de braquages et de fusillades spectaculaires, Andrew Dominik déconstruit le mythe de celui qui est devenu une des plus grandes figures du western à travers les yeux de son futur assassin. En 1881, Jesse James (Brad Pitt) vient d'avoir 34 ans. Déjà connu et recherché pour ses nombreux méfaits, il prépare son dernier coup en compagnie de son frère, Frank James (Sam Shepard), et d'autres bandits recrutés sur le tas : son cousin Wood Hite (Jeremy Renner), Dick Liddil (Paul Schneider), Ed Miller (Garret Dillahunt) et deux des frères Ford, Charley (Sam Rockwell) et Robert (Casey Affleck).

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commentaires
Francis Bacon
15/07/2021 à 04:17

En effet un chef d'oeuvre du genre, bien au dessus du Django de Tarantino ou de True Grit des Coen.
Dommage en effet que Dominik n'ait pas eu une meilleure carrière par la suite

beyond
13/07/2021 à 23:28

Après Brokeback Mountain, ce film nous rappelle pourquoi il ne faut jamais tourner le dos à un cow-boy.

CuchulainBzh
13/07/2021 à 14:14

Quel grand film, sublime photographie et rythme délicat, on peut toujours rêver d'une version DC de 4 heures en 4K HDR ? Dommage que l'engouement ne soit pas le même que pour Justice League. #releasethedominikcut

Moi
13/07/2021 à 14:01

Je ne suis pas membre et ne peux donc pas lire l'article. Quoiqu'il en soit, j'adore ce film. Photographie magnifique, acteurs au top et une musique qui accompagne le tout magnifiquement.

Je suis souvent en désaccord avec mes amis quand je parle de ce film. Peu d'entre eux l'ont apprecié. Le film est lent, contemplatif mais justement, contrairement au titre de l'article, j'y vois moi la la quintessence d'un western. toute la lourdeur de la situation de Jesse James, l'assassinat qui va arriver, on le sait, et comment, sont narrés progressivement jusqu'à l'inevitable. Et malgré tout, il reste fascinant.

Faurefrc
13/07/2021 à 12:40

Film sublime. J’avais été d’autant plus déçu par « Cogan » qui réunissait Dominik et Pitt.