58 minutes pour vivre, Cliffhanger, Peur Bleue... où est passé le super-bourrin Renny Harlin ?

Simon Riaux | 14 mars 2021
Simon Riaux | 14 mars 2021

58 minutes pour vivre, Cliffhanger : Traque au sommet, Au revoir à jamais, Peur bleue... il s'en est fallu de peu pour que Renny Harlin ne devienne un grand réalisateur d'action. Second couteau particulièrement affûté de l'action hollywoodienne, on lui doit quelques-uns des films les plus divertissants des années 90. Pourtant, sa carrière a pris un tour bien différent, tant et si bien que rares sont les spectateurs à connaître aujourd'hui le nom du metteur en scène. Toujours actif, mais totalement sous les radars, où est-il passé ?

 

photoRenny sourit quand Jackie vanne

 

C'EST QUI ?

Son nom ne vous dit peut-être rien, mais il y a peu de chances que vous ayez échappé à ses travaux, dont certains demeurent éminemment populaires. Ses premiers coups d'essai ne furent pas exactement des coups d'éclat, et ni Frontière Interdite ni Prison ne lui valurent de grandes reconnaissances. À bien des égards, son travail sur Le Cauchemar de Freddy aurait même pu signer la fin de son aventure hollywoodienne, tant la critique vit dans ce chapitre une régression notable par rapport au troisième volet, parmi les plus populaires de la franchise. Mais le film est très rentable, l'impose comme un chef de projet capable d'évoluer dans un environnement hollywoodien synonyme de forte pression, et lui permet d'aiguiser un certain goût pour les mises à mort sadiques.

Autant de qualités qui vont faire de lui l'homme de la situation sur 58 Minutes pour vivre. La production est mouvementée, et le studio cherche un exécutant capable de tourner un film d'action complexe, dans un laps de temps réduit, et si possible en se hissant à la hauteur du phénoménal succès de Piège de cristal. Le résultat est étonnamment réussi étant donné ses conditions de fabrications et ne démérite pas auprès du public. L'occasion pour Harlin de parfaire sa maîtrise formelle et d'emballer encore de fort belles mises à mort, dont un coup de stalactite éminemment saignant. Une équation qu'il multiplie sur ses films suivants.

 

photo, Au revoir à jamaisUn des plus réjouissants films d'action des 90's

 

Cliffhanger compte aujourd'hui encore parmi les films les plus appréciés de Sylvester Stallone. Considéré comme éminemment spectaculaire, il fit beaucoup pour empêcher la star de sombrer durant les années 90. En dépit d'un bide stratosphérique, L'île aux pirates demeure un très plaisant film d'aventure, qu'il est urgent de redécouvrir. Mais c'est véritablement avec Au revoir à Jamais et Peur Bleue que Renny a le plus contribué au grand temple du fun.

Le premier est l'adaptation survoltée, hyper intense et jubilatoire d'un des meilleurs scripts imaginés par Shane Black. Six ans avant la naissance de Jason Bourne, le cinéaste en traitait déjà toutes les thématiques, forgeait une héroïne originale (incroyable Geena Davis) et ringardisait James Bond (lisez donc notre dossier consacré à cette belle claque).

Quant au second, c'est tout simplement un des seuls films de requins valables. Rien qui puisse se mesurer au mordant des Dents de la mer, mais un jeu de massacre enlevé, bourré d'idées et invraisemblablement divertissant. De 58 Minutes à Peur Bleue, Renny Harlin aura encapsulé toutes les années 90, de la mutation du spectacle typique des années 80's jusqu'à la décomplexion amorcée dans les années 2000, toujours avec une joie communicative.

 

photoGare au requin

 

LA DERNIÈRE FOIS QU'ON EN A ENTENDU PARLER

Cruel fut le sort du réalisateur, qui ne parvint pas à trouver un équilibre entre les désirs du public et les potentialités offertes par la révolution numérique en cours à Hollywood. Chacun de ses films se mua donc en une plantade plus inexorable que la précédenteDriven fit brièvement parler de lui pour sa spectaculaire nullité et son immondice plastique, mais le miracle accompli lors de la précédente collaboration avec Stallone resta lettre morte. Et ce n'est pas le côté con-con cool-cool de Profession profiler qui allait lui permettre de retrouver les grâces du box-office.

Le réalisateur ne s'est jamais retiré des voitures, mais en dépit de ses efforts, presse comme public l'ont progressivement oublié. Son dernier long-métrage à avoir généré un peu de curiosité (et connu un gros bide) n'est autre que 5 days in august. Projet cher à son coeur, qui aurait pu, enfin, lui permettre d'être accueilli comme un auteur, il relatait le conflit qui opposa la Russie et la Géorgie en 2008. En dépit d'un investissement sincère et évident de Harlin, le film fut accueilli dans une relative indifférence, et marqua la quasi-disparition de l'intéressé dans les médias.

 

photo, Profession profilerChristian Slater, à la recherche de sa carrière

 

Aucun de ses projets suivants, qui allèrent d'épisodes de séries à un found footage frelaté, n'imprimèrent la rétine de quiconque. Le comble de la traversée du désert aura lieu avec La Légende d'Hercule, indigne d'une sortie grand écran, programmé la même année que Hercule de Brett Ratner, qui rendit le naveton proprement invisible. Et il existe peu d'humiliations plus cruelles à Hollywood que d'être effacé par Brett Ratner. Renny Harlin ne correspond plus à ce que cherche l'industrie, et celui qui ambitionna de devenir un brillant réalisateur d'action en est conscient, comme il l'expliqua en 2010 dans nos colonnes :

"Maintenant, les films se font avec plusieurs équipes de tournage, et par exemple avec les grosses adaptations de comics, le réalisateur ne tourne pas les scènes d'action. C'est le directeur de seconde équipe qui s'en occupe. Donc comment peuvent-ils se faire appeler ou même se considérer comme des réalisateurs de films d'action ?"

 

photoUn dernier petit tour et puis s'en va

 

LA PROCHAINE FOIS QU'ON POURRAIT EN ENTENDRE PARLER

Après quelques commandes effectuées à la tête de production chinoise, dont aucune ne provoqua la plus petite émotion en occident, il pourrait bien effectuer son retour sur grand écran.

En effet, le nouveau film de Harlin est déjà terminé, et à bien des égards, pourrait sonner comme une belle surprise aux yeux des nostalgiques d'un certain cinéma d'action à l'ancienne. Intitulé The Misfits, il y sera question d'un vol de lingots d'or aux ramifications complexes, mené par un célèbre cambrioleur. Rien de foncièrement original, mais on se dit que c'est précisément le type de feuille de route classique que le réalisateur est capable de sublimer.

 

photo, Geena DavisLe bide aux pirates

 

Ajoutons que si The Misfits n'a toujours pas de date de sortie, avec à l'affiche Pierce Brosnan et Tim Roth, le film ne manquera pas d'arguments pour attirer les distributeurs, mais aussi titiller les cinéphiles ou les fans hardcore de GoldenEye. Reste désormais à espérer que Harlin aura bénéficié d'un scénario à la hauteur de ces compétences. Difficile de se prononcer pour le moment, tant les auteurs Kurt Wimmer et Robert Henny ont pu se montrer inégaux par le passé, mais leur expérience joue clairement en leur faveur, et on voit mal comment les deux compères ne pourraient pas aboutir à une matière première réjouissante et fonctionnelle.

Au final, et si plusieurs voyants sont au vert pour permettre un retour du cinéaste, à commencer par la nostalgie qu'engendre ses meilleurs films, la grande inconnue demeure le rapport qu'entretient le grand public avec le cinéma d'action. À l'heure où les super-héros triomphent toujours et constituent la quasi-totalité des blockbusters, l'avenir peut sembler bouché. Quoique, affamées de projets variés et divertissants, moins coûteux que ceux des majors de cinéma, les plateformes, à commencer par Netflix, pourraient bien accueillir Harlin comme un pourvoyeur d'explosions au doux parfum de victoire.

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commentaires
Pat Rick
16/03/2021 à 12:22

Tiens j'ai justement revu L'Ile aux pirates, j'en avais gardé un bon souvenir mais cette fois-ci je l'ai trouvé très bourrin, poussif et sans imagination.

Symbole
15/03/2021 à 14:00

Symbole d'un des derniers grands artisans de films d'action à l'ancienne, et donc d'une époque révolue. Idem pour McT, Walter Hill, Richard Donner, Martin Campbell, stefen Sommers, Joe Johnston, Jan de Bont, Verhoeven.. Tous à la trappe, et tous ayant en commun d'avoir de vraies références cinématographiques, un vrai savoir faire (à l'ancienne pré ère Marvel), et d'avoir régaler le public des années 80 aux années 2000. Depuis 2010 c'est plié pour tous les artisans digne de ce nom, places aux réalisations et scénarios sous intelligence artificielle

Mx
15/03/2021 à 13:55

Stephen sommers, pour moi, c'est 3films: un cri dans l'océan, le livre de la jungle, et la momie.

Tom’s
15/03/2021 à 10:54

Il a laisser son empreinte sur le ciné us indélébile, 58 mn + Cfiffhanger & Au revoir à jamais constitue le meilleur du blockbuster des 90’, revoir le second en HD permet de comprendre le tour de force qu’esT ce formidable film d’action

Brosdabid
15/03/2021 à 09:19

Un peu la même trajectoire que Stefen Sommers, porté disparu comme Chuck Norris

Alex styles 77
14/03/2021 à 20:39

Son dernier film, Funeral killers un huis clos d'action bien énervé Hong Kongais dans une morgue passe crème. Je le conseille.

Qc
14/03/2021 à 16:39

@MX

Cliffhanger : Traque au sommet ou La Falaise de la mort au Québec (Cliffhanger)
Tous dépend du pays.

Thierry
14/03/2021 à 15:27

Perso, je trouve qu'on a été fort injuste avec Renny Harlin. Je n'ai jamais compris ce dédain pour "L'ile aux pirates" qui est un grand film d'aventures, bien mieux que pirates des caraïbes.

Mx
14/03/2021 à 14:56

La falaise de la mort??

tu parles de cliffhanger, là, le film n'a jamais eu ce titre, le nom complet étant cliffhanger ,traque au sommet!!

Cinégood
14/03/2021 à 14:35

Parler de Renny Harlin sans citer son film le plus cool : Les aventures de Ford Fairlane, franchement Simon, là c'est le faux pas. ;-)
Il a tourné ce film dans le foulée de 58 minutes pour vivre et se permet justement un hommage à Piège de cristal avec sa scène finale sur l'emblématique Capitol Tower !
C'est une excellent série B grâce à son humour, sa Direction Artistique qui est une satyre des années 80, son casting et son second degré.
Même le fond est intéressant et pertinent avec sa critique du milieu de la musique qu'il dézingue sans vergogne.

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