À part Pixar : 10 films d'animation géniaux, à (re)voir

La Rédaction | 29 décembre 2020 - MAJ : 11/03/2022 12:04
La Rédaction | 29 décembre 2020 - MAJ : 11/03/2022 12:04

Soul vient tout juste de débarquer sur Disney+ afin de réchauffer le coeur de tous les amateurs de Pixar. Mais parce que tout le monde n'est pas abonné au service de streaming de tonton Mickey, on s'est dit que l'occasion était trop belle de revenir sur 10 films d'animation pour petits et grands.

Le stuio Disney, qui règne sur l'animation grand-public depuis des décennies, est parfois perçu comme un gage de qualité telle qu'il en éclipse tous ses concurrents, quand ce ne sont pas ses puissantes stratégies marketing qui se chargent d'oblitérer le reste du paysage animé. Pourtant, de tout temps, des studio se sont frottés au formidable défi consistant à chasser sur les plates-bandes de Disney. Et si aucun n'est parvenu à prospérer aussi durablement que l'entreprise créée par un certain Walt, on trouve néanmoins dans leurs catalogues quantités de superbes pépites.

Bien sûr, un classement de dix oeuvres ne saurait prétendre à l'exhaustivité, et nous contraint à effectuer quelques choix douloureux. Ne vous émeuvez donc pas si certains de vos chouchoux manquent à l'appel, comme Le géant de fer, chef d'oeuvre de Brad Bird, très commenté ces derniers mois, et qui nous semblait pouvoir laisser sa place à quelques autres productions un peu moins reconnues (on lui avait d'ailleurs consacré un dossier rien qu'à lui).

 

photoUn film d'animation Soulé par la concurrence ?

 

 

Batman contre le fantôme masqué

De quoi ça parle : Plusieurs chefs de la pègre décèdent suite aux attaques d’une silhouette fantomatique qui rôde à Gotham City. Alors que les autorités de la ville accusent Batman de ces meurtres, Bruce Wayne doit affronter son passé quand son ex-fiancée, Andréa Beaumont, revient d'Europe.

Pourquoi les petits regardent : Dérivée de la mythique série d’animation des années 90, Batman contre le Fantôme masqué est un véritable délice pour les fans du Chevalier noir. Bruce Timm et son équipe créent une histoire autonome avec un méchant inédit et charismatique, tout en s'amusant avec l'écurie de vilains de Gotham (le Joker en tête).

Grâce à un scénario aux enjeux parfaitement dessinés, le film jouit d’une épure adaptée aux enfants en quête d’aventure palpitante, tout en proposant de multiples niveaux de lecture. Non seulement l’ensemble est magnifique de bout en bout, mais il ne prend jamais les marmots pour des jambons, et ose mettre en scène un Batman en difficulté dans un contexte aux frontières de l’horreur, pour une tension maximale. Et c’est pour ça qu’ils en redemandent !

 

photo Fantôme masquéNon, ce n'est pas un méchant de Scooby-Doo !

 

Pourquoi les grands restent devant : Avec Le Fantôme masqué, Bruce Timm parvient à pousser dans ses retranchements son esthétique dérivée du film noir, notamment en y accolant une science-fiction steampunk qui marque l’héritage des super-héros. En introduisant un parc d’expositions qui n’est pas sans rappeler le Tomorrowland de Disneyland, le film joue avec un certain sens du merveilleux, pour mieux le briser par la suite. En résulte d’ailleurs un combat final hautement jouissif au cœur d’une maquette, où Batman et son opposant deviennent littéralement des monstres géants qui détruisent la ville.

C’est par ces petites touches très malines que Le Fantôme masqué interroge la raison d’être de Batman, au point d’ailleurs d’en faire l’une des adaptations les plus matures de l’homme chauve-souris. Derrière une histoire d’amour qui met à nu ce cher Bruce Wayne, le long-métrage déploie une origin-story déguisée, où la naissance de Batman est perçue comme une tragédie, l’échec d’un homme dans le dépassement de son deuil. C’est quand même autre chose que le Martha de Zack Snyder !

 

photoBatman en icône tragique : Bruce Timm a tout compris !

 

La Tortue rouge

De quoi ça parle : À travers l’histoire d’un naufragé sur une île déserte tropicale peuplée de tortues, de crabes et d’oiseaux, La Tortue rouge raconte les grandes étapes de la vie d’un être humain.

Pourquoi les petits regardent : Réalisé par le Belge Michael Dudok de Wit, La Tortue Rouge est la première œuvre occidentale à recevoir le soutien du studio Ghibli, et plus particulièrement du génial Isao Takahata (Le Tombeau des lucioles, Le Conte de la princesse Kaguya). Cette association engendre un film d’une beauté sans pareille, où l’épure des traits n’a d’égale que celle d’une narration basée sur la robinsonnade. L’île déserte possède la magie d’un cocon inexploré, d’un lieu de tous les possibles.

Pour les enfants, La Tortue rouge est ainsi un pur récit dépaysant, aux couleurs chatoyantes et aux animaux mignons. Mais surtout, le long-métrage possède une force de frappe universelle, grâce à son absence totale de dialogues. Quel que soit votre âge, difficile de rester de marbre face à la nouvelle vie qu’essaie de se construire le naufragé.

 

photoL'édentée de la mer

 

Pourquoi les grands restent devant : Avec son sens de l’épure, le long-métrage est plus qu’un simple film de survie. Son animation interroge en permanence la reconstitution du mouvement, et la place du corps humain dans son environnement. En plus d’aborder des thématiques écologiques à propos, La Tortue rouge parvient magnifiquement à mettre en scène des concepts philosophiques, entre “l’état de nature” rousseauiste et “l’animal politique” d’Aristote. Le héros est non seulement incapable de vivre seul, mais il a besoin de son pouvoir de création. Le décor de carte postale n’est pas le réceptacle d'un bonheur indiscutable, mais bien un terrain d’expérimentations.

C’est d’ailleurs pour cette raison que le verbal est évincé au profit d’un pur langage corporel. L’interaction avec la nature nous renvoie à notre propre finalité, au besoin de trouver un sens à la vie et un bonheur en étant conscient de notre mortalité. L’amour, la famille, et l’héritage qu’on laisse derrière soi : La Tortue rouge aborde les passages centraux de la vie avec une fluidité déconcertante. Pas sûr que les parents en ressortent indemnes.

 

photoCette splendeur !

 

Les 12 travaux d'Astérix

De quoi ça parle : Jules César en a marre, et tente le tout pour le tout. Si les invincibles Gaulois sont vraiment des dieux, ils doivent le prouver en remportant douze épreuves, toutes plus absurdes et éprouvantes les unes que les autres.

Pourquoi les petits regardent : Parce que c'est un chef d'œuvre d'humour, tellement blindé de scènes cultes et irrésistibles qu'il n'y a pas une minute de répit pendant 1h15. La course avec Mérinos, le lancet de javelot avec Kermès le Perse, Cylindric le germain, les prêtresses du plaisir, le regard d'Iris, la grande bouffe de Mannekenpix le Belge, l'antre de la Bête, le laissez-passer A-38, les crocodiles du Nil, le Vénérable du sommet, la plaine des hanteurs légionnaires, et pour finir le cirque de Rome : c'est un festival de génie, du début à la fin.

Quasi 50 ans après, ces 12 travaux demeurent un modèle du genre, qui n'a pas pris une ride en terme de rythme et d'humour. Répliques, animation, couleurs, musiques, sens du timing : qu'un enfant des années 80 et des années 2010 puisse se retrouver devant le même spectacle, c'est bien la grande preuve du talent immense et éternel de René Goscinny et Albert Uderzo.

 

photoQui de nous deux est un sanglier ?

 

Pourquoi les grands restent devant : Uderzo et Goscinny, les papas d'Astérix, ont réalisé deux films tirés de leurs BD. Il y a eu Astérix et Cléopâtre, puis Les 12 travaux d'Astérix, né de leur vif désir de totalement contrôler l'œuvre cette fois. C'est pour cette raison qu'ils ont créé le studio Idéfix en 1974, pour asseoir leur volonté d'être les Walt Disney français. Et après deux années, 500 000 dessins, 400 décors, ils ont certainement offert leur chef d'œuvre, à bien des égards.

C'est une réussite formelle, portée par des comédiens au diapason (Roger Carel et Jacques Morel bien sûr), et d'une richesse folle à l'image. En bon Astérix digne de ce nom, Les 12 travaux s'amuse avec la complicité du public, que ce soit avec l'apparition de la station de métro Alésia ou la réplique "Brutus, cesse de jouer avec ce couteau". Et il suffit de revoir la scène où un soldat romain est poussé dans une malle magique, en pleine bataille finale, pour constater le goût de l'absurde de l'équipe - d'autant plus percutant quand il n'y a pas de dialogue et que tout repose sur le son et la musique.

"Mais je vous dis que le port est au bord de la mer !", "Et le petit toast qui va avec !", "Du nectaaare et de l'ammmbroiiisiiie", "La nuit ça doit être pratique pour lire au lit" : le film défend sans effort une place de premier ordre dans la panthéon de la culture française, avec un paquet de répliques cultes qui servent de cris de ralliement aux fans. De son succès à l'époque (plus de 2,2 millions d'entrées en France, mieux que Cléopatre) à ses multiples rediffusions, il a traversé les âges, et devrait logiquement résister à encore des décennies.

Notre dossier complet sur ce bijou d'Astérix, c'est par ici.

 

photo"Continuez sans mouaaa"

 

Le roi et l'oiseau

De quoi ça parle : Nabot mégalo qui règne d'une main de fer sur le royaume de Takicardie, le roi Charles-V-et-trois-font-huit-et-huit-font-seize décide qu'il veut épouser une bergère, qui a pris vie en sortant d'un tableau pour s'enfuir avec celui qu'elle aime, un ramoneur. Et le couple pourra compter sur l'aide d'un oiseau farceur, bien décidé à rendre fou ce vilain roi.

Pourquoi les petits regardent : Parce que c'est beau et merveilleux, tout simplement. Avec son château qui se dresse au milieu de nulle part, son facétieux oiseau à chapeau, ses courses-poursuites, son robot géant et son univers un peu fou, Le Roi et l'Oiseau est un délice magique, entre le conte de fées et le film d'aventure.

Le film de Paul Grimault a certainement inspiré le monde entier (notamment Hayao Miyazaki), mais il reste unique en son genre, et propose un voyage enchanteur qui ne ressemble à nul autre. A une époque où le film d'animation est devenu une usine, et où même Pixar a tendance à surexploiter ses marques et formules, ça en fait une expérience encore plus spéciale.

 

Photo Le roi et l'oiseauUn oiseau, un ramoneur et une bergère sont dans un château...

 

Pourquoi les grands restent devant : Parce que c'est un joyau intemporel du cinéma (français), fruit d'une association magnifique entre Paul Grimault (réalisateur et co-scénariste) et Jacques Prévert (co-scénariste et dialoguiste). Inspirés par La Bergère et le Ramoneur de Hans Christian Andersen, les deux hommes se retrouvent à la tête du premier long-métrage d'animation en France, avec l'intention de créer une fable destinée aux enfants et aussi (surtout) aux adultes.

L'histoire du film est presque aussi folle que celle des personnages, puisque Le Roi et l'Oiseau sortira dans une première version, La Bergère et le Ramoneur, en 1953. Résultat d'une production chaotique, le film sera renié par Grimault et Prévert, mais aura un succès retentissant à travers le monde. Des années plus tard, le réalisateur récupère les droits et relance la bataille, malgré la mort du poète. En 1980, le film qu'on connaît sortira, après des années de labeur. Une aventure étalée sur une trentaine d'années donc.

Au-delà de cet aspect historique passionnant, qui en fait une œuvre majeure, Le Roi et l'Oiseau se déploie comme un conte évidemment très politique et radical, d'une richesse thématique sans fin. En entremêlant la fantaisie pure à la fable sociale, avec une ambition visuelle extraordinaire pour l'époque, Paul Grimault et Jacques Prévert ont donné naissance à un classique éternel.

 

Photo Le roi et l'oiseauImage de fin légèrement traumatisante

 

L'ÎLE AUX CHIENS

De quoi ça parle : Un enfant part à la recherche de son fidèle toutou, exilé, avec tous les autres chiens du Japon, sur une île-décharge, avant de sauver les malheureux canidés de leur triste condition.

Pourquoi les petits regardent : Parce que si Wes Anderson est un metteur en scène maniériste, dont le cinéma parle avant tout aux adultes, quand il passe du côté de l'animation, comme il le fit avecle bouleversant Fantastic Mr. Fox, c'est à l'enfance qu'il s'adresse. Son portrait d'Atari passionne pare qu'on y retrouve l'intensité et la pureté des émotions qui président aux vies de nos chères têtes blondes. Et quelle surprise pour un jeune spectateur découvrant le film, d'être emmené au-delà de la fable sur l'amitié d'un petit garçon et de son courageux clébard, pour aboutir à une grande leçon de bravoure et de responsabilité. Un grand spectacle, visuellement épatant, et sentimentalement ravageur.

 

PhotoL'animation est le meilleur ami de l'homme

 

Pourquoi les grands restent : Anderson se pose souvent la question du lien entre les générations, leurs responsabilités les unes envers les autres et de l'engagement des plus forts pour soutenir les plus faibles. Un message qui touchera forcément les parents montrant L'Île aux Chiens à leur descendance, notamment lors de la dernière demi-heure du récit, véritable épopée émotionnelle aux enjeux plus forts à chaque séquence.

Mais pour le cinéphile accompli, cette nouvelle aventure en stop-motion (technique d'animation image par image, réalisée à partir de modèles réduits) est avant tout une réussite technique et artistique comme on en croise trop rarement. Le niveau de détail et d'expressivité des personnages est exceptionnel, souvent très supérieur à celui des blockbusters d'animation 3D. L'amour de l'artisanat, l'orfévrerie de l'ensemble est relevé par le fabuleux sens du cadre de Wes Anderson. Tantôt grave, tantôt poétique, il cite bien sûr les cinémas d'Akira Kurosawa et Ozu, mais c'est bien son immense délicatesse qu'on retrouve dans cette création éclatante.

 

PhotoLes 7 Chiens de la casse

 

Tempête de boulettes géantes

De quoi ça parle :  Flint Lockwood, un inventeur un brin barré, construit une machine pour convertir l'eau en boustifaille. Son invention marche, un peu trop même...

Pourquoi les petits regardent : Déjà adapté d'un livre pour enfants particulièrement apprécié, Tempête de boulettes géantes est un peu la recette ultime du meilleur de l'animation 3D. Les ingrédients sont nombreux, et mijotent dans un bouillon savoureux, pour qui aime la gastronomie cinématographique. On ne va pas vous raconter des salades, ni vous rouler dans la farine : grâce à un style visuel qui tranche avec les canons un peu rigides du genre, le film donne la pèche, quand on ne se fend pas carrément la poire devant lui.

Loin de pédaler dans la choucroute, le rythme est effréné, enchainant les gags sans lâcher la grappe au spectateur. La musique de Mark Mothersbaugh, quant à elle, ne compte pas pour du beurre, accompagnant les excès du personnage principal, auquel les têtes blondes plus portées sur les sciences que sur le sport s'identifieront comme des poissons dans l'eau. Et quand l'émotion ramène sa fraise, au détour d'une relation père-fils sublimée par une audace visuelle, ça sera la fin des haricots pour leurs glandes lacrymales et leur coeur d'artichaut.

Aussi efficace dans l'humour que dans l'émotion et parfois carrément palpitant, Tempête de boulettes géantes en fait tout un fromage, et c'est pour ça qu'on l'aime. Tout est complètement over-the top sans pour autant prendre le melon, C'est un feu d'artifice culinaire particulièrement adapté aux gosses en tous genres.

 

photoCopains comme cochons

 

Pourquoi les grands restent devant : D'ores et déjà une véritable madeleine de Proust pour beaucoup de jeunes adultes, le film de Chris Miller et Phil Lord est d'une telle maîtrise technique qu'il demande d'être goûté par petits et grands. Alors que beaucoup de navets animés se contentent de donner aux enfants ce qu'ils demandent, le long-métrage n'en fait jamais les dindons de la farce, multipliant les mouvements de caméra inédits et exploitant avec une inventivité folle les arrière-plans. De fait, tout le monde en profite, qu'il soit jeune, vieux, sobre ou beurré comme un p'tit Lu.

Mais évidemment, le coeur du récit s'articule autour d'une métaphore qui n'y va pas avec le dos de la cuillère, voire qui rentre dans le lard (le personnage du maire, sorte de parodie forte de café du même personnage dans Les Dents de la mer), mais qui se révèle émminament pertinente, à propos non seulement de la malbouffe, mais aussi de la façon dont la distribution alimentaire s'accomode du capitalisme et des comportements sociaux. La crème de la crème du double sens qui gagne en profondeur pour qui met la main à la pâte.

Cerise sur le gâteau, le duo de scénariste partage nôtre goût pour les calembourgs gratinés. Chaque visionnage fait repérer de nouveaux jeux de mots. Celui qui voudra tous les lister aura du pain sur la planche.

 

photoQuand tout baigne dans l'huile

 

L'étrange pouvoir de Norman

De quoi ça parle : Croyez-le ou non, Norman a un étrange pouvoir. Il peut voir les morts, un don pratique pour se faire des amis de tous âges, mais plus embêtant quand une malédiction s'abat sur la ville.

Pourquoi les petits regardent : La capacité de Laika, également responsable des tout aussi recommendables CoralineLes BoxtrollsKubo et l'armure magique et Monsieur Link, à captiver petits et grands n'est plus à prouver. Et ce Paranorman en est la preuve la plus évidente. La galerie de personnages qui défile ici, soigneusement animée image par image, s'avère absolument irrésistible, que ce soit dans les designs, toujours aussi génialement difformes, voire carrément inspirés de l'art de la carricature, que dans les différentes personnalités qui la composent.

Jamais infantilisant, le film se permet en plus de traiter de sujets graves (la mort, le deuil, la colère populaire) avec une intelligence rare, sans pour autant renoncer à un humour omniprésent et une frénésie presque épuisante. Enchainer les séquences à 100 à l'heure avec un certain appétit pour les idées visuelles délirantes pour se diriger vers un final très intimiste : la structure est ambitieuse mais très efficace.

 

photoUne dream team de clichés

 

Pourquoi les grands restent devant :  En plus d'une réflexion inspirée et sensible sur la mort et ses conséquences sociales, Paranorman est avant tout une déclaration d'amour exaltée au cinéma d'horreur et à ses poncifs, toujours plus complexes qu'il n'y paraissent. La frontière entre la parodie intelligente et la moquerie crasse est fine, et le long-métrage de Sam Fell et Chris Butler ne se permet jamais de l'outrepasser.

Si le scénario s'amuse à pasticher les codes de la série B d'épouvante, exploitant avec une ironie mordante et quelques références esthétiques subtiles les archétypes qui lui sont inhérents (tout y est, du casting stéréotypé au van dans la forêt, en passant par de savoureux plans débulés), c'est pour mieux exposer la force du genre, capable d'analyser la part d'humanité dans la monstruosité, sans même se réapproprier l'univers de Tim Burton, pourtant lui aussi passé maître dans cet exercice. En bref, un film fait par des passionnés, pour des passionnés.

 

photoAprès ce film, on dort sur nos deux oreilles

 

Calamity, Une enfance de Martha Jane Cannary

De quoi ça parle : D'une aventure pleine de dangers et riche en rencontres qui, étape par étape, révélera la mythique Calamity Jane.

Pourquoi les petits regardent : Calamity promet de se dérouler à hauteur d'enfant et tient sa promesse. Quand tous les personnages adultes maintiennent les femmes dans une position de subalterne et sont trop peureux pour reprendre ce qu'on leur a volé, Calamity n'hésite pas à quitter le groupe pour partir seule.

Refusant de partager les rêves de mariage et toutes les mornes ambitions des filles qui l'entourent, mais ne voulant pas plus de la lâcheté et de la masculinité violente des garçons, le personnage de Calamity est un pur exemple d'écriture. La débarasser des normes propres à un genre ou à l'autre permet d'en faire un personnage aussi vigoureux et courageux qu'attentif et loyal. Quand on a la chance de découvrir le film en salles, il faut voir comment les enfants y sont sensibles. Ils rient, ont peur, et sont emportés avec Calamity sans aucun temps mort.

Pourquoi les grands restent devant : Et on réagit autant, pour ne pas dire plus qu'eux. Malgré un scénario aussi épuré que l'ésthétique visuelle du film, Calamity est d'une densité hypnotique. Il n'y a pas la moindre seconde de relâchement dans le film. Le plus fou, c'est que le personnage ne cesse de frôler la mort. Mais pas une mort de dessin-animé pour enfant : une vraie mort. Calamity est coincée dans une calèche qui chute dans un ravin, elle fait tomber sa lampe torche et se perd au beau milieu d'une mine souterraine, et se retrouve les mains menottées dans le dos sur un cheval qui déambule dans un  paysage esseulé. Autrement dit, le film propose de vraies situations de suspens et même de peur, et la résolution est toujours intelligente.

Le film n'a rien qui relève d'une logique de quotas, qui fait qu'un personnage masculin est artificiellement remplacé par une femme sans que rien ne change dans le fond. Ici, le genre est questionné, performé, malaxé, ce qui permet de déployer les qualités du récit, les possibilités de scénario et de mise en scène. Quelques minutes suffisent pour comprendre pourquoi le film a reçu le Cristal du long-métrage, récompense suprême au festival d'Annecy en 2020. Même sans enfants, courez-le voir.

 

photoToi en quête du DVD de Calamity après avoir lu cette critique

 

BRISBY ET LE SECRET DE NIHM

De quoi ça parle : Du combat d'une souris pour sauver sa maison et sa famille des humains, l'amenant à s'allier avec les rats, à jamais changés par leur proximité avec les hommes.

Pourquoi les petits regardent : Parce que la constante des films de Don Bluth, c'est la capacité à prendre des thèmes extrêmement complexes, des sujets difficiles, pour les mettre à portée des plus jeunes. Du Petit dinosaure et la vallée des merveilles, en passant par Fievel et le nouveau monde jusqu'à Brisby et le secret de NIMH, il aura évoqué le deuil, la solitude, l'immigration, la révolution russe, l'Amérique des années 20, le sacrifice, la maternité et les expérimentations animales. Toujours à l'affût de symboles et d'images fortes, il sait enflammer l'imaginaire tout comme il le conjugue avec la culture collective, pour toujours s'inscrire avec force dans un grand récit évocateur.

C'est particulièrement le cas ici, ou refusant tout manichéisme, il traite toujours ses personnages en nuances, à travers l'ombre mais aussi la lumière. Un mélange savamment dosé, qui marque souvent les plus jeunes, tant certaines séquences sont impressionnantes, merveilleuses, ou inquiétantes. En outre, le film contient plusieurs scènes d'une grande puissance, où la mise en scène s'avère d'une richesse irrésistible. De la chanson de Brisby à la rencontre avec Nicodemus, toute droit sortie des Indes noires de Jules Vernes, le dessin animé sidère.

 

Photo BrisbyIl a pris cher Archimède

 

Pourquoi les grands restent devant : Difficile de ne pas rester bouche bée devant la débauche de talent à l'écran. Quand on sait que ce film, parmi les premiers entièrement dirigés par Bluth, fut réalisé à l'économie, on réalise l'étendue de sa maîtrise. Même dans les productions Disney les plus abouties, on aura rarement fait face à une telle avalanche de détails, à un trait aussi rigoureux et néanmoins chaleureux. En outre, pour le cinéphile amateur de découpage, le dessin animé demeure une véritable leçon de dramaturgie et de narration par l'espace.

En témoigne la séquence d'intrusion dans la cuisine des fermiers, sorte de classique du cartoon américain totalement revisité, qui se transforme en festival de suspense monté au cordeau. Et le métrage regorge de ces réussites, notamment grâce à sa gestion de l'empathie. Tandis que les petits seront logiquement sensible à la dimension aventureuse du récit, les plus âgés seront frappés par sa propension à traiter de la parentalité et de la responsabilité, mais aussi de la complexité des jeux de pouvoirs.

 

Photo BrisbyQuand les méchants sont vraiment méchants

 

HAPPY FEET 2 

De quoi ça parle : Un peu de banquise, beaucoup de pingouins, mais surtout de danse, de transmission et de solidarité.

Pourquoi les petits regardent : On ne va pas se mentir, avec une bande-originale endiablée, des chorégraphies hyper-actives et une avalanche de gags, les têtes blondes ont de quoi profiter d'un festin. mais au-delà de ce festival éreintant de délires multicolores, se cache une vraie réussite émotionnelle. En se focalisant sur le destin mouvementé d'un jeune pingouin, en ambrassant ses peurs et ses complexes pour se mettre à la hauteur de ce jeune héros, le film fait souvent écho aux agoisses sourdes des plus jeunes et les exorcice avec une sympathique bonne humeur.

Pourquoi les grands restent devant : Avec George Miller aux commandes, les cinéphiles sont servis. Le créateur de Mad Max s'est souvent illsutré par une impressionnante versatilité, mais après un premier Happy Feet réussi, on ne s'attendait pas forcément à ce que le metteur en scène fasse encore mieux à l'occasion d'une suite que personne n'attendait. Et pourtant, il fait preuve ici d'une inventivité en termes de découpage et de montage que peu de cinéastes peuvent espérer atteindre. Sa virtuosité est telle qu'elle fait largement oublier la décennie qui nous sépare de la sortie du film, au cours de laquelle les progrès technologiques de l'animation 3D aurait pu rendre le tout obsolète.

C'est donc bien à un pur moment de cinéma qu'il convie le spectateur, moment d'autant plus galvanisant qu'il s'autorise, une fois n'est pas coutume chez Miller, de purs délires parfois hilarants. Confiant régulièrement les rênes du récit à ses comédiens, méthode trop rare dans l'animation, il nous offre ici et là des pauses parfaites, en particulier les mésaventures de ses deux crevettes affamées, campées par Matt Damon et Brad Pitt.

 

Le pingouin, célèbre adversaire de BatmanQui aurait pu se douter qu'il deviendrait un des pires ennemis de Batman ?

 

 

Tout savoir sur L'île aux chiens

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commentaires
JoeLynn
04/01/2021 à 11:09

Pas mal des films conseillés sont un peu durs pour les boutchous. (Brisby, avant 8 ans, c'est chaud quand même...). Votre sélec s'oriente plutôt vers les 8-12 ans je pense.
Habituellement, pour savoir si je peux leur montrer un film, je vais sur filmspourenfants et j'enlève 1 ou 2 ans à la recommandation.

Pour les plus jeunes :
- Ernest et Célestine
- Le grand méchant renard
- Kiki la petite sorcière (ou Totoro bien sûr)
- Yakari
- Kirikou
- Astérix et Cléopatre et globalement tous les autres (même si les 12 travaux reste le meilleur ^^)

tnecniv
31/12/2020 à 23:42

Ça tombe bien , je suis en train de me refaire Batman animated serie, du coup je compte me retaper le fantôme masqué dans la foulée dont je garde un très bon souvenir. J'ai vu le géant de fer pour la première fois il y a peut être deux ans, et j'ai vraiment accroché à tout dans ce film, la patte est barjo, j'adore ce style. Bon par contre j'ai toujours pas vu le roi et l'oiseau mais ça ne saurait tarder, ça fait longtemps que ça me trotte ... Il serait temps.

Miel
31/12/2020 à 09:30

Abonné à Disney + ^^
T'en a vraiment qui payent Disney + , Netflix et Amazon ou HBO Go en même temps :D

Micju
31/12/2020 à 01:24

Mes enfants regardent encore aujourd’hui Coraline. Et ce même si mon plus vieux est rendu à 14 ans. Ils doivent le repasser deux trois fois par année.

Adagi
30/12/2020 à 21:58

@Pialco
peut-être "The Flight of Dragons" ?

Pialco
30/12/2020 à 20:22

Bonjour a tous , mou je cherche le titre de 2 dessin anime des 80 90 .un raconte l histoire d un homme qui cree un jeu de societe ou livre style donjon et dragon et sui se retrouve dans le.jeu ,et en deviens le heros.a la fin il combat un magicien ,je sait c est vague mais j aimerais bien le revoir par curiosité.etl autre c est un alladin Titre original : Sekai Meisaku Dowa - Aladdin to Mahou no Lamp (アラジンと魔法のランプ)

Année de production : 1982

Réalisateur : Yoshikatsu Kasai.
J aimerais bien revoir cette version

Simon Riaux
30/12/2020 à 14:42

@neuneu

Elle vous salue bien !

neuneu
30/12/2020 à 14:34

@ Simon Riaux : Mon petit com c'était juste du second degré, un petit troll gratuit en réponse à votre avertissement d'introduction et aussi pour faire honneur à mon pseudo ( d'où le :D à la fin ). En tout cas merci d'avoir pris le temps de me répondre, vous êtes bien sympathique et on se régale en regardant vos vidéos. Bonjour à votre maman. :D .Ciao.

Marvelleux
30/12/2020 à 13:33

@Mangeur de pierres
Batman contre le fantome masqué est sorti en blu ray, dispo à l'unité et dans le coffret de la serie en deluxe

Marvelleux
30/12/2020 à 13:31

Et Spider-man New Generation ? Entièrement d'accord avec Batman contre le Fantôme Masqué

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