Blade Runner : et si on faisait le point sur toutes les différentes versions de ce monument ?

Geoffrey Crété | 1 juin 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Geoffrey Crété | 1 juin 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Alors que la version Final Cut débarque sur Netflix, retour sur les multiples versions de Blade Runner de Ridley Scott.

Sept versions. Le classique de Ridley Scott adapté du livre du fantastique Philip K. Dick a eu une vie compliquée, de sa sortie initiale en 1982 (un échec au box-office avec environ 33 millions de recettes pour un budget de 28) à ses multiples éditions vidéo, créant autour de Blade Runner un nuage de mystère et de classique obscur pour certains spectateurs.

Alors que Denis Villeneuve a depuis rouvert les portes de cet univers fantastique avec Blade Runner 2049, qui a là encore été une déception au box-office, retour sur les versions de ce chef d'œuvre de la science-fiction, qui hante encore trente ans après l'imaginaire des cinéphiles.

 

Affiche

 

VERSION 1 : LA VERSION WORKPRINT

Durée : 113 minutes

Il y a d'abord la version workprint : la version du film utilisée lors de la post-production (le premier montage de Ridley Scott, uniquement montrée au studio, avoisinait les quatre heures), et montrée lors des premières projections-test en mars 82. C'est suite aux retours négatifs de ces premiers spectateurs que le studio remontera Blade Runner.

Différences principales : titre différent, texte d'introduction absent avec seulement une définition des Replicants affichée, moins de gros plans de l'oeil sur la ville, Gaff qui insulte Deckard lorsqu'ils arrivent au QG de police, Bryant explique que non pas un mais deux Replicants sont morts électrocutés, pas de séquence de rêve de licorne lorsque Deckard joue du piano, montage différent de la mort de Batty et voix-off de Deckard qui explique l'avoir regardé mourir toute la nuit, pas de happy end.

 

photo Harrison Ford, Daryl HannahSursaut dans 3, 2, 1...

 

VERSION 2 : LA PREVIEW DE SAN DIEGO

Une version perdue, d'une durée peu précise, montrée en mai 82 lors d'une unique projection preview à San Diego, au Cinema 21. Le montage est très proche de la version sortie en salles aux Etats-Unis, à l'exception de trois scènes qui n'ont depuis pas été réutilisées.

Différences : une présentation de Roy Batty dans une cabine VidPhon, Deckard qui recharge son arme après que Roy lui ait brisé les doigts, un plan de Deckard et Rachel s'éloignant vers un coucher de soleil (de quoi connecter au happy end).

L'absence de ces plans dans toutes les éditions depuis semble indiquer qu'ils sont perdus, ou inutilisables.

 

Photo Rutger HauerVersion officielle attendant d'être libérée

 

VERSION 3 : LA VERSION AMERICAINE

Durée : 116 minutes

La version sortie dans 1290 salles américaines le 25 juin 1982. La version originale officielle donc.

La grande différence est la fin, surnommée happy end depuis puisqu'elle montre Deckard et Rachel s'enfuir dans la nature. Si une fin de ce type avait été présente dans quelques versions du scénario, Ridley Scott ne voulait pas clore l'histoire de cette manière. C'est le studio qui a rajouté la séquence, contre son avis et avec un Harrison Ford lié par contrat.

Différences : plan du spasme de la main de Roy, happy end avec voix off de Harrison Ford. Gaff laisse Deckard et Rachel s'enfuir, et le héros annonce qu'elle survivra.

Ridley Scott n'a pas tourné cette fin, montée grâce à des plans non utilisés de Shining que Kubrick a accepté de laisser utiliser. La voix off a été enregistrée parce que le public des projections-test disait avoir du mal à comprendre le film. Ford sera le premier à déclarer qu'il trouve l'idée très mauvaise.

 

 

VERSION 4 : LA VERSION INTERNATIONALE

Durée : 117 minutes

Une version sortie en Europe, similaire à la version américaine mais avec des plans plus violents.

Différences : la mort de Tyrell est plus graphique (plans des pouces de Roy dans ses yeux avec plus de sang), l'affrontement entre Deckard et Pris est plus violent (plans des doigts de Pris dans son nez, Deckard lui tire dessus trois fois et non plus deux, elle remue de manière hystérique après avoir été abattue), plans de Roy avec un clou dans la main. 

 

Photo Sean YoungRachel, dont le "retour" dans B2049 est bluffant

 

VERSION 5 : LA VERSION TV

Durée : 114 minutes.

Diffusée une première fois le 8 février 1986 sur CBS, qui a remonté le film pour atténuer la violence, la nudité et d'autres mauvaises choses selon les réglementations ("Christ", "goddamn", "fucker", les seins de Zhora). A l'époque, Blade Runner a été précédé d'un message qui présentait l'univers, et insistait sur le fait que Deckard n'était pas un Replicant. 

Différences : le texte d'introduction est lu en voix off (pas celle de Harrison Ford), et comporte quelques différences.

 

PhotoLa version qui donne envie de dormir

 

VERSION 6 : LA DIRECTOR'S CUT

Durée : 116 minutes

La version approuvée par Ridley Scott en 1992 est née suite à un mauvais coup de la Warner. En octobre 89, Michael Arick, un spécialiste de la restauration des films, tombe par hasard sur la copie 70mm de Blade Runner. Enchanté par la découverte, le cinéma Cineplex Odeon Fairfax demande au studio la permission de projeter le film en mai 90. Découvrant qu'il s'agit d'une version différente de celle sortie en salles (il s'agit en réalité de la toute première, la workprint), la Warner décide de créer l'événement dans une quinzaine de salles en parlant de la director's cut.

Sauf que Ridley Scott n'a pas du tout validé cette version, et déclare publiquement que ce n'est pas la director's cut - citant notamment un montage non définitif, l'absence d'une scène importante et de la musique de Vangelis pour le climax, avec un morceau de La Planète des singes composé Jerry Goldsmith à la place. Le studio annule quelques projections pour réagir.

Face au mécontentement de Scott et surtout à l'engouement du public face à ces séances, la Warner décide de lancer une véritable director's cut pour une ressortie en salles en 92. Michael Arick est chargé de la monter, encadré par Ridley Scott (qui envoie ses notes) et l'assistant monteur du film, Les Healey. 

Différences principales : les voix-off de Deckard retirées, ajout de la séquence de rêve de la licorne (la version prévue à l'origine par Scott étant inutilisable, une autre sera montée), suppression du happy end imposé par le studio.

 

PhotoLa licorne de la discorde

 

VERSION 7 : THE FINAL CUT

Durée : 117 minutes

La version 100% validée par Ridley Scott qui a cette fois-ci pu la gérer lui-même. Une version remasterisée, avec un travail sur les effets et le son, qui a permis de découvrir des détails dans l'image. Le réalisateur a retravaillé le film et le montage par petites touches à de nombreux endroits.

Différences principales : l'introduction a été retravaillée de manière quasi imperceptible, le rêve de la licorne en entier pour la première fois, et en version restaurée (avec Deckard éveillé, ce qui était l'intention initiale de Scott). Rajout de tous les plans dits violents de la version européenne, coupés à l'origine dans la version pour les Etats-Unis.

Ridley Scott a également retourné des plans de la mort de Zhora, incarnée par Joanna Cassidy. En 1982, la scène avait été tournée avec une doublure, et Scott n'était pas entièrement satisfait des images. En 2007, il filme donc Cassidy, de retour dans son costume, qui répète les mouvements de la doublure sur fond vert. Son visage a ensuite été rajouté sur la séquence.

 

Photo Joanna CassidyZhora recut

 

La version Final Cut est ressorti en salles pour les 25 ans du film, avec une large édition en DVD, HD DVD et Blu-ray. Le coffret inclut la version workprint, la version américaine, la version internationale, la version director's cut remasterisée, la version final cut, et des heures de bonus.

Beaucoup de versions pour finalement peu de points majeurs ou exceptionnels donc, la chose se résumant finalement à une version cinéma plus lourde, dictée par un studio peu sûr de lui, et une version plus noble et complexe conçue par le réalisateur.

Une assurance néanmoins : Blade Runner 2049 ne devrait pas avoir la même vie, puisque Denis Villeneuve soutient la version qui sortira en salles (de 2h31 sans générique). Que le cinéaste ait au préalable affirmé ne pas avoir le director's cut pour autant nuance l'opposition parfois caricaturale et simpliste entre les méchants producteurs et les artistes malmenés.

 

Photo Sean Young

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commentaires
Necroko
09/10/2023 à 03:53

et quelle édition en Blu-ray faut-il acheter pour avoir "The Final Cut" (et disponible aussi) ?

Marc
25/07/2022 à 16:34

Sur TMC Cinéma BLADE RUNNER plusieurs version de 1982 , le finale cut.et le Director's Cut toujours le film qui sera pour moi avec ALIEN les plus grands Chef-d'oeuvre . Il es intersellant de voir les différences de colometrie de certaines scènes et des rajouts dans la version Final Cut .

Marc
02/06/2020 à 19:04

@Pierre
Les premiers films au Ciné qui la marqué c'est Le Dernier Jedi puis Tron je trouvais ce film incroyable tellement en avance de tout ce qui se faisait au CINÉMA. Puis je le pris deux claques atomique ALIEN de Ripley Scott et dans la foulée BLADE RUNNER ce fut un choc de Cinéma une émotion incroyable .
Comme toi Ghost in The Shell est également une claque mais le manga j'ai la chance de l'avoir vu au Ciné AKIRA nous étions au max 10 dans la salle. A la sortie de AKIRA je savais que j'avais vu un Chef-d'oeuvre je n'avais pas tout saisi mais quel film. Puis d'autre films Terminator ALIEN 2 Predator Abysse et d'autres film qui ont changé le Cinéma a tout jamais.

Pierre
01/06/2020 à 23:56

La première grosse claque que je me suis pris en regardant un film quand j'étais gamin.
J'avais rien compris, mais j'adorais ce film.

La seconde grosse claque c'était en regardant le premier film de Ghost in the Shell.

J'ai visioné la version 4K récemment, qu'elle claque d'avoir une ci belle image pour un film aussi "vieux".

tuk
01/06/2020 à 23:33

J'aime la version ou il semble vouloir sauvez Rachel, mais trouve un origami qui lui rappel la voix de son mentor qui dit ; " On doit tous mourir un jour !".... Il semble alors changer d'avis la porte d l'ascensseur se ferme sur le générique final.
Moralité : un androide sauf sa vie en lui expliquant que meme courte, elle est précieuse et lui n'a rien compris. La machine est devenue plus humaine que l'homme, qui lui à l'inverse est devenue une machine à tuer, sans aucun réves...

jorgio6924
01/06/2020 à 15:30

Une histoire incroyable. Il s'agit véritablement d'une expérience sensorielle très lancinante.
Mais si tu es happé... Bon voyage !!

Il y a tellement de reprises d'idées de ce film sorti il y a presque 40 ans dans les films et séries actuelles comme Westworld... Un classique.

Yamcha
19/04/2020 à 15:58

Une plongée lancinante dans un univers dystopique, il faut certes être prédisposé.

Jojo
19/04/2020 à 07:11

@Rudy Mako Pour info c'est une suite et non un remake !

Rudy Mako
19/04/2020 à 02:51

Mon avis est tout simple. Ce film n'aurait jamais dû avoir un remake

Marty
18/04/2020 à 22:12

Je l'avais acheté en BR et je m'étais ennuyé comme un rat mort devant ..
Pourtant j'aime sortir de ma zone de confort et regarder des trucs "autres" genre le film " Stalker " par ex .

Blade Runner, je l'ai juste trouvé beau visuellement ..

Faudrait que ré essai par ce que ca commence a faire et peut etre que ..

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