Entergalactic : critique à la poursuite du bonheur sur Netflix

Arnold Petit | 4 octobre 2022 - MAJ : 05/10/2022 23:56
Arnold Petit | 4 octobre 2022 - MAJ : 05/10/2022 23:56

Initialement prévu pour être une série animée, Entergalactic est finalement sorti le 30 septembre sous la forme d'un "événement spécial" de 92 minutes sur Netflix pour accompagner l'album éponyme de Kid Cudi. Le projet, réalisé par Fletcher Moules (Clash of Clans : Revenge) et produit par Kenya Barris (Black-ish, Sacrées sorcières) et le rappeur (crédité en tant que Scott Mescudi) se présente comme un film d'animation touchant, entre romance, rêves et musique.

CUDI ZONE

Entergalactic, par son rapport avec Kid Cudi, est étroitement lié à la musique, et sa scène d'ouverture, planante et psychédélique, correspond parfaitement au thème d'introduction du huitième album de l'artiste. Tout au long du film, les morceaux rythment la narration et les images (et inversement) dans ce projet musical et visuel, avec des mélodies qui regroupent les différents styles du chanteur (le rap, l'électro, le rock alternatif ou le R'n'B) et une esthétique qui rappelle Spider-Man : New Generation (ou le travail de So_Me sur le clip de Day 'n' Nite, dans une moindre mesure).

Pour autant, de la même façon que l'album Entergalactic n'est pas une bande originale, le film Entergalactic n'est pas un objet promotionnel, un long clip vidéo ou même un album visuel, comme Sound and Fury de Sturgill Simpson, mais un long-métrage d'animation à part entière, qui existe avec sa propre histoire.

 

Entergalactic : photoMojo So Dope

 

Le scénario, écrit par Kid Cudi, Maurice Williams et Ian Edelman (créateur de la géniale série How to Make It In America, dans laquelle jouait le rappeur) s'articule autour d'un coup de foudre entre deux jeunes artistes noirs qui vivent à New York : d'un côté, Jabari (Kid Cudi), grapheur devenu dessinateur de bande dessinée, qui a emménagé dans un immense loft à Manhattan après avoir obtenu un contrat chez un gros éditeur de comics, et de l'autre, Meadow (Jessica Williams), une talentueuse et charismatique photographe qui prépare une importante exposition dans une galerie.

Il fume de l'herbe, se balade à vélo en rêvant et traîne dans les parcs avec ses amis Jimmy (Timothée Chalamet) et Ky (Ty Dolla $ign) qui lui donnent de terribles conseils en se basant sur leur propre expérience, tandis qu'elle organise des soirées, fait de la méditation et parle de désir sexuel et de relations sérieuses avec son amie Karina (Vanessa Hudgens). Comme une évidence, les deux personnages se rencontrent, se découvrent, apprennent à vivre ensemble et à mettre de côté leurs difficultés pour se faire confiance et s'aimer.

 

Entergalactic : photoYoung Lady


PILLOW TALK

En soi, Entergalactic est une comédie romantique on ne peut plus classique et le récit, divisé en plusieurs chapitres, reprend tous les poncifs du genre, du héros qui s'éprend de sa voisine à la balade romantique de nuit sous la pluie en passant par le retour d'une ex (Laura Harrier) et les différents obstacles qui viennent perturber leur romance jusqu'à la scène où ils courent dans les bras l'un de l'autre. Leur relation, qui se développe par des regards timides, des maladresses et des petites scènes intimes, est pleine de sincérité et saisit tout ce qui compose une histoire d'amour naissante, mais reste assez lisse et convenue.

Il n'y a pas particulièrement de complexité, de profondeur ou d'enjeux, et l'histoire n'essaie pas d'en apporter. Les doutes de Jabari à propos des compromis que l'éditeur lui demande de faire ne sont jamais explorés, comme sa part d'ombre qu'il représente à travers son personnage de Mr. Rager (Keith David). L'exposition de Meadow, les commentaires sur la culture afro-américaine ou les relations contemporaines finissent par n'être que des détails (qui étaient peut-être plus approfondis quand le projet était une série) et les personnages secondaires sont inexistants.

 

Entergalactic : photoFlight at First Sight 

 

Là où Entergalactic se distingue, c'est par son audace stylistique et son animation éclatante, qui amène de l'énergie, de la lumière et de l'émotion à cette histoire déjà vue. Entre rendu numérique, bande dessinée, street art et jeu vidéo (avec aussi des passages cartoonesques ou dans un style emprunté aux anime japonais), le film puise dans plusieurs formes de pop culture et différentes tonalités pour donner vie à son récit, comme lorsque Jabari et Meadow se laissent porter par leurs sentiments pour s'envoler vers l'espace ou quand l'artiste se retrouve poursuivi par ses démons dans un cauchemar..

À l'image du héros, qui utilise les rues et les murs de la ville pour laisser libre cours à sa créativité, Fletcher Moules présente un New York fantaisiste, avec des nuances de bleu, de rose, d'orange et une palette de couleurs vibrante. Par un simple montage, le réalisateur parvient à capturer toute la tendresse et la fragilité de l'histoire et plonge directement dans les pensées des personnages à travers des séquences oniriques ou hallucinées impressionnantes.

L'animation n'est pas toujours maîtrisée et les personnages manquent de fluidité et d'expressivité par moment, mais ces quelques imperfections n'enlèvent rien à la chaleur ou à la mélancolie qui se dégage du film et de ses paysages new-yorkais fantasmés, presque féériques.

 

Entergalactic : photoNew York City Rage Fest


SOUNTRACK 2 MY LIFE

Dès ses débuts en 2008, Kid Cudi a imaginé ses albums comme les différents chapitres d'une histoire consacrée à un personnage inspiré de lui-même et sa musique a toujours entretenu un lien avec le cinéma. Dans l'intro de sa première mixtape, A Kid Named Cudi, l'artiste se mettait en scène avec ses amis dans une salle de projection en reprenant la célèbre musique d'ouverture de Dreamworks pour lancer les aventures de son héros venu de la Lune.

Man on the Moon : The End of Day, son premier album sorti l'année suivante, était conçu comme un "film audio", avec un générique, une bande-son et un narrateur (incarné par Common). Puis, pendant qu'il a continué de parler de dépression, de solitude et d'amour dans Man On the Moon II : The Legend of Mr. Rager, Satellite Flight : The Journey to Mother Moon ou Man on the Moon III : The Chosen, l'artiste a entamé une carrière d'acteur dans plusieurs films et séries avec des rôles plus ou moins importants (Need For Speed, Westworld, We Are Who We Are ou le film d'horreur X, plus récemment).

 

Entergalactic : photoUp Up & Away

 

Le scénario imaginé par Kid Cudi est écrit d'après sa propre histoire et plusieurs thèmes qu'il a évoqués dans sa musique se retrouvent dans le film d'animation et son dernier album, avec une vision plus idéaliste que d'habitude cependant : son arrivée à New York, sa notoriété soudaine, sa signature dans un gros label, son alter ego maléfique, sa recherche du bonheur et sa quête du grand amour.

D'une certaine manière, Entergalactic condense tout ce qui fait Kid Cudi et pourrait donc être vu comme l'oeuvre d'une vie (ou du moins, de celle d'un trentenaire solitaire et torturé qui s'est assagi et qui rêve encore d'une fin heureuse alors qu'il arrive à un nouveau tournant de sa vie et de sa carrière). Le résultat est peut-être inabouti et aurait probablement été différent si le projet était devenu la série qu'il ambitionnait, mais cette balade romantique entre film et musique, rêve et réalité, amour et complications, réussit à créer un monde envoûtant, poétique et réconfortant, comme celui de son auteur.

 

Entergalactic : Affiche officielle

Résumé

Entergalactic reprend tous les éléments d'une comédie romantique basique, mais la mélancolie et la sincérité qui se dégage de sa direction artistique pétillante et de ses personnages en font un film d'animation tendre et envoûtant, à l'image de la musique de son auteur.

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Lecteurs

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commentaires
Schtroumpfette
08/10/2022 à 16:00

C'était tout à fait sympathique à regarder, mais j'admets que si cela n'avait pas été un film d'animation, ce long métrage ne m'aurait pas intéressée. J'ai beaucoup apprécié les dessins et les décors, qui m'ont rappelé l'excellent Spiderman version animée.

Maz
06/10/2022 à 09:24

Merci pour cet article, ce film est une belle parenthèse pour peu que l'on se laisse porter par cet univers musical et fantasmé.

Winel_509
06/10/2022 à 01:43

Moi ! J'ai regardé, je le trouve très cool, comme tu le dis les personnages secondaires sont très fort sur tt les amis de Kane. L'animation est bonne et ça me fait pensé énormément avec "Spider-Man new génération". J'aime vraiment ce film surtout c'est 90℅ afro-américaine

Franken
05/10/2022 à 16:15

Ouais, moi je regarderai pas parce que le perso principal porte un sweat rouge et j’aime pas le rouge !!

Bon, Jean Bon
05/10/2022 à 10:43

casting eclatax. hors de question que je regarde quoi que ce soit avec Jaden smith dans le projet

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