Adieu les cons : critique pas totalement teubé

Simon Riaux | 11 septembre 2022 - MAJ : 12/09/2022 18:38
Simon Riaux | 11 septembre 2022 - MAJ : 12/09/2022 18:38

Jadis anti-héros aiguiseur de pelles sur bretelles d’autoroute, Albert Dupontel a atteint avec Au revoir là-haut un statut convoité au sein du paysage artistique hexagonal, celui d’artiste complet, accompli et populaire, capable de faire roucouler public et critiques sur une même note. Et son nouveau film, Adieu les cons, récompensé de sept César dont meilleur film et meilleur réalisateur, devrait prolonger cet état de grâce. 

ALBERT, LE 5e MOUSQUETAIRE

Punk cartoon, aussi à l’aise quand il s’agit de brocarder les puissants, écorner les ambassadeurs d’un système brutal et absurde, que quand vient l’heure de dérégler le monde à coup de grand n’importe quoi burlesque, Albert Dupontel est l’auteur d’une des filmographies les plus singulières de France. Entre maestria technique, tentation du geste parfait et boulimie anar, il est le tenant d’un univers jamais bête, faussement méchant, qu’il nous tardait de retrouver après le formidable Au revoir là-haut, sa première incursion du côté de l’adaptation littéraire et du long-métrage historique. 

Débarrassé des pesanteurs de la reconstitution historique, il peut laisser libre cours à son amour des personnages déviants (au sens propre, en cela qu’ils choisissent ou doivent agir en dehors du carcan balisé par la norme). Et chez Dupontel, l’amour est toujours un mouvement d’appareil, une idée de mise en scène. On retrouve ainsi la présence d’innombrables surfaces réfléchissantes, qui démultiplient ou redéploient le regard, provoquant de passionnants soubresauts visuels. 

 

photoVirginie Efira, parfaitement à l'aise dans l'univers de Dupontel

 

Rarement la caméra du réalisateur aura à ce point totalement maîtrisé la technicité de ses ambitions, et leur impact poétique. Que le visage de Nicolas Marié se superpose au décor qu’il croit décrire dans un collage absurde, ou que le directeur de la photo Alexis Kavyrchine feigne de reproduire le halo orangé des lampadaires, pour mieux nous plonger dans un environnement surréel, tout ici est dosé à la perfection, jusque dans le trop-plein.

En témoigne ce plan déjà iconique, où Virginie Efira et Marié montent à toute vitesse un escalier en colimaçon, au diapason de la caméra, précipitant l’intrigue et le spectateur dans une fantasmagorie où pointent des émotions inédites chez Dupontel. 

 

photo, Albert Dupontel, Virginie Efira"Mince, on a fait pleurer le débile d'Ecran Large"

 

LE RÉCRÉATEUR   

Mais que le découpage du cinéaste s’avère un poil plus virtuose, son montage mieux maîtrisé encore qu’à l’accoutumée, voilà qui n’est finalement pas bien surprenant, de la part d’un artiste qui n’aura eu de cesse de creuser son propre sillon et de toujours l’affiner. Non, ce qui frappe dans Adieu les cons, c’est la bascule qu’opère le metteur en scène du côté du pur mélo. Un type prêt à tout pour en finir, une femme qui se désole de ne pouvoir aller plus loin et un aveugle clairvoyant. Un trio qui ne dépareillerait pas dans une poilade un peu rance, mais dont Dupontel extrait surtout la sève fataliste, de petites vexations en échecs existentiels.

 

photo, Albert Dupontel, Virginie EfiraUn duo parmi les plus irrésistibles imaginés par Dupontel

 

Bien sûr, on rit et de bon cœur, mais les zygomatiques ne sont jamais là que pour attendrir le visage du spectateur avant de le surprendre avec un torrent de larmes. Et pour parfaire son dispositif émotionnel, Dupontel a recours à un ingrédient traditionnellement plutôt faible dans son cinéma (ou peu mis à contribution) : les dialogues. Ils sont désormais au cœur du dispositif, tant narratif que sentimental, dont ils assument à la fois la beauté et la candeur. Et quand le créateur transforme les artefacts techniques du quotidien en autant de pièges remuants, c'est pour mieux laisser à ses protagonistes le soin de mettre leur âme à nu.

On se souvient que la dernière tentative du réalisateur de se frotter au verbe s’était soldée en verbiage (Le créateur), tout comme ses décharges émotionnelles avaient du mal à se départir d’une énergie communicative, mais très potache (Bernie). Que d’évolution avec cet Adieu les cons, qui dénoue le cœur et vise juste presque à chaque séquence. Un geste plastiquement somptueux, narrativement accompli, qui laisse à ses brillants comédiens la responsabilité de nous achever sur une note de fraternité tragique. 

 

Affiche française

Résumé

Film le plus émouvant de son auteur, où le punk cartoon se marie étonnamment bien avec des émotions aiguës, dont la justesse impressionne, Adieu les cons ne laisse pas indemne. 

Autre avis Alexandre Janowiak
Comédie drôle et attachante tout autant que satire sociale profonde et impactante, Adieu les cons est une perle survitaminée faisant de l'absurde une triste (et délirante) réalité.
Autre avis Arnold Petit
Avec un charme absurde irrésistible, Adieu les cons nous embarque dans une quête existentielle burlesque et bouleversante, entre beauté et ingénuité.
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Lecteurs

(3.4)

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commentaires
Pfffff
13/09/2022 à 14:08

Pauvre cinéma Français !

Nay
16/10/2021 à 00:04

Bcp aimé

Pulsion73
15/10/2021 à 18:36

Nicolas Marié est merveilleux comme bien souvent et notamment dans les films de son pote Dupontel. C'est un acteur que j'adore. Dupontel est également un de mes acteurs et réalisateur préférés. C'est souvent tragiquement drôle, une réelle empathie piur les personnages. Dans ce film Virginie Efira est très touchante.

Rico
15/10/2021 à 18:22

Pire film de son auteur, mal écrit, mal joué, effet/fond vert aux fraises...nul sur 20 !

Francis Bacon
24/05/2021 à 00:52

Plutôt beaucoup aimé moi aussi.
Je rejoins certaines critiques sur la progression chanceuse du récit mais je ne m attendais pas à un drame réaliste donc pas déçu.
He remarque que Dupontel commence à attiendre une vraie maestria dans la mise en scène : le superbe plan de l'escalier en colimaçon, les nbreux plans "miroir" (notamment un tres beau plan d'Efira reflétée sur ... le couvercle de sa poubelle). La mise en scène m'a semblé baissée en qualité dans la seconde moitié et j'espère voir Dupontel maintenir l'exigence esthétique de la 1ere partie sur tout un film.
L'émotion est très maîtrisée, chacun des personnages - tous des marginaux archétipaux (dans le bon sens du terme, qui represente un personnage-type sans le simplifié) - laissant timidement entrevoir - entre les scenes de gags (globalement bonnes) - une profondeur et une mélancolie touchante.
La scène du flashback sur la grossesse d'Efira, en pantomime et en accélérée et avec ce grain de l'image si particulier (qqun sait quelle technqiue est utilisée?), est très belle visuellement, profite idéalement de la dynamique impulsée par la musique et est diablement efficace dramaturgiquement (ça va vite, ça parle pas mais on comprends tout, l'idéal pour une scène de flashback).
Bravo et j'attends déjà le prochain projet de notre cher Albert

Kika
20/05/2021 à 20:25

Film qui promet au début mais c du n importe quoi très vite et il ne mérite pas tout le tapage fait autour

Marc
20/05/2021 à 11:51

Ce que j'ai apprécié c'est les clins d'œil a Terry Gilliam et il joue le chasseur dans le film,
Souvent on rit des situations de ce duo improbable , des longueurs des moments d'émotions quand la mère retrouve Adrien quelques a enfin retrouvé . La fin du films ma laisser justement sur ma fin j'en dis pas plus pour ma gâcher ceux qui l'on pas vu. Dupontel toujours excellent un talent énorme !:)

Moi
19/05/2021 à 21:29

Comme Kyle Reese, film du déconfinement. J'avais juste entendi parlé de la pluie de récompense et du duo à l'affiche, finalement que dire ?
D'un coté, un drame extrêmement touchant (le personnage de V Effira), de l'autre un environnement totalement absurde. C'est bien fait et parfois beau, mais ça manque terriblement de liant (les scènes des gests sont marrantes ((enfin, on sourit), mais terriblement mal amenées comme l'on dit plusieurs personnes. et surtout sans surprise (les mecs du Palmashow fait du Palmashow, le mec de Bref joue comme à l'époque C+ ...).
Et puis la fin à l'eau de rose, que dire ? entre le fils qui est une copie parfaite du personnage de Dupontel (alors qu'un retour avec le mec de la 1er adresse dont elle ne veut pas aurait montré une autre facette du personnage) qui comme lui finit par se dévoiler après le discours larmoyant et le "Bonnie & Clyde" final (si pour Effira ça semble une fin acceptable, Dupontel semblait plus dans un axe "renaissance/ouverture au monde").
Le coté "critique de police" revendiqué par Dupontel ? tout le caractère "réaliste/critique" qui pouvait apporter de l'eau à son moulin disparait après l'échange téléphonique (déjà qu'avec les déductions de "l'enquêteur en chef" l'ambition avait du plomb dans l'aile).
Le coté "critique de la place de l'informatique" semble uniquement présent pour justifier les avancées du récit sans avoir à développer quoique ce soit, "le personnage est un génie" étant la solution instantanée à tous les blocages.

Donc au final une petite déception : de bonnes idées, quelques belles images et des acteurs efficaces, mais une histoire qui ne donne pas envie de revoir le film. Et au passage de gros doutes sur l'industrie du Ciné français qui a tant récompensé ce film qui malgré une ambition certaines passe à coté de ses sujets (à mon avis).
J'espère que l'ersatz d'Intouchables et/ou le Dernier Voyage me conviendront bien, sinon il faudra que j'envisage d'arrêter de voir autre chose que du potache pour le ciné "Made In France"

Kyle Reese
19/05/2021 à 19:33

Le film du déconfinement pour moi, séance de 16h, on est sans doute 20 à tout casser.
J'ai voulu faire honneur au cinéma français et à Dupontel. Me suis dit que c'était le moment d'aller voir un de ses films, car Bernie ça ne compte pas j'ai juste vu quelques extraits. Ben oui, j'avais beaucoup aimé Dupontel le comique de one man show mais j'ai toujours hésité à aller voir ses films. Le trip Bernie ne m'ayant pas convaincu ... à l'époque. En plus des césars ... alors, go !
Je ne sais pas si c'est le film idéal après 7 mois de salles fermées car même s'il est assez drôle c'est pas non plus très gaie ni hilarant. Il y règne une sacré mélancolie tout du long avec l'importance du temps et de la vie qui passe ne pouvant être rattrapé. Je m'attendais à plus délirant. Mais c'est pas grave. Dupontel est top, Effira est touchante. Les situation sont souvent assez étonnantes mais pas vraiment rocambolesque. On sent l'inspiration et l'admiration de Dupontel à de nombreux moment pour les Monty Pyton, Guillian y fait une apparition comique remarqué. C'est plutôt bien filmé, belle photo, belle maitrise du cadrage à une exception près qui m'a vraiment choqué pour l'une des scènes les plus importante du film dans l’ascenseur à la fin. Un champ contre champ qui transgresse les règles de base sans aucune justification ou signification, et qui m'a même sortie de la scène et de l'émotion qui devait arriver. J'avoue ne pas comprendre, C'est un mystère alors que Dupontel pourtant semble bien maitriser la grammaire cinématographique, bien mieux que nombre de ses collègues réalisateur. Le film est plutôt réussi niveau émotion et ambiance, mais je le trouve un petit peu mou, la faute peut être à un rythme un peu trop lent et à une histoire peut être un peu trop simple ou pas assez dense. Je rejoins Flo sur les cotés schetch des scènes reliées par de nombreux croisement coup de chance, il y a un petit coté artificiel dans l'ensemble qui me gène, et je ne sens pas les 2 persos vivre en dehors du film, mais c'est peut être ça le cœur du film en fait, tout 2 n'ont pas vécu leur vie. La fin est assez abrupte, elle fait mouche bien que sa radicalité me déconcerte un peu dans un film au ton pas si radical à la base. Bref néanmoins une bonne tragi-comédie avec une bonne dose d'amertume, mais vu les éloges je m'attendais à mieux. En tout cas Dupontel a toujours de sacrés ambitions.

Sanchez
18/05/2021 à 16:47

Un film trop simplet dégoulinant de bon sentiment . Quand on pense que c’est le real de Bernie .... il aurait fallu plus travailler , notamment le scénario

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