American Horror Story saison 12 : critique d'une première partie qui rate son coup sur Canal+

American Horror Story tente de faire peau neuve pour sa saison 12, mais le relooking est plutôt raté.

La grève des scénaristes et des acteurs d'Hollywood n’a épargné personne, même pas notre précieuse American Horror Story, qui sortira donc en deux parties. Si les deux créateurs de la série, Ryan Murphy et Brad Falchuk, s'occupent toujours de leur bébé, aussi bien à la production qu'au scénario, cette saison 12 a été confiée à une nouvelle showrunneuse, Halley Feiffer.

American Horror Story : Delicate voit revenir de nombreux acteurs de la troupe de Ryan Murphy, dont Emma Roberts, et introduit aussi de nouvelles têtes dont celle de la célèbre Kim Kardashian. Pour la première fois, American Horror Story adapte une oeuvre préexistante, le roman Delicate Condition de Danielle Valentine. Tentative sincère de renouvellement ou aveu d'échec et d'épuisement de la série ? Sûrement un peu des deux.

Tentative de renouveau

Tous les fans d'American Horror Story s'accordent à dire que la qualité de la série a drastiquement baissé depuis les premiers épisodes, même si personne n'est d'accord sur le moment où la série a basculé. Malgré tout, certaines saisons détestées de certains ont été très bien reçues par d'autres, comme la sixième, Roanoke, ou la saison 11, NYC (qu'on considère comme réussie de notre côté). Il est donc à peu près certain que cette saison 12, Delicate, fera autant débat que les dernières. Si la saison 11 n'a donc pas emballé tout le monde, elle a quand même ravi les spectateurs lassés des mêmes histoires de sorcières. Dans un premier temps, ces nouveaux épisodes promettent aussi du changement.

En plus d'adapter un roman, American Horror Story : Delicate introduit un nouveau protagoniste dans l'équation, la showrunneuse Halley Feiffer. On veut donc croire à cette envie de renouveau. Contrairement à certaines saisons très peuplées en personnages, principaux ou secondaires, celle-ci se concentre sur Anna Alcott, jouée par Emma Roberts, une actrice à un moment décisif de sa carrière, puisqu'elle a des chances d'être nommée aux Oscars, mais aussi de sa vie personnelle, car elle souhaite tomber enceinte.

Après Roanoke, Roaccutane 

Aussi, l'histoire d'horreur de cette saison 12 est plus psychologique et moins démonstrative. L'entourage d'Anna la pense folle et elle pense l'être aussi à un moment donné. Anna semble en tout cas seule dans sa potentielle psychose. Ces premiers épisodes arrivent à créer une atmosphère de mystère, le spectateur doute des intentions de tous les personnages, même ceux qu'on pensait être les alliées de l'héroïne. Sans créatures surnaturelles, ni tueurs en séries, American Horror Story : Delicate se détache de son modèle. La terreur naît dans le ventre d'une mère.

Maternité et horreur ont toujours fait bon ménage, de Rosemary's Baby, la référence, à d'autres oeuvres plus récentes comme la mini-série The Baby. C'est donc avec plaisir qu'on accueillerait le thème de la maternité dans cette nouvelle saison si celle-ci n'avait pas déjà fait l'objet de la saison 10 et que le penchant diabolique de la grossesse n'avait pas déjà été traité dans la première saison et dans un épisode entier du spin-off, American Horror Stories, dans lequel une femme tombe enceinte avec l'aide du diable. Nous aurait-on encore servi du réchauffé ?

Sept ans de malheur

Émancipation ratée

Avec ce personnage de starlette et tous les intéressés qui gravitent autour d'elle, la série critique aussi le star-système et les médias, notamment grâce au personnage de Kim Kardashian, Siobhan Corbyn, l'attachée de presse d'Anna. Ce rôle, si ironique tellement il semble adapté à cette star qui contrôle sans cesse son image, parait tout droit sorti de la série parodique Scream Queens, créée par Ryan Murphy et Brad Falchuk dans laquelle Emma Roberts tient aussi le premier rôle.

Cette saison avait donc assez de matière pour présenter une horreur inédite à American Horror Story, celle du système du divertissement, une horreur plus moderne et insidieuse. Mais le trop-plein de surnaturel a fait capoter le plan.

Kim K qui joue Kim K

Si Delicate avait de quoi se distinguer de la masse, la saison retombe dans ses travers et relie le récit à une légende ancestrale, des origines mystiques, des sorcières ou entités démoniaques, on ne sait pas vraiment. Tout ça pour ça. L’émancipation n’a finalement pas duré plus de trois épisodes. Parce qu'ils essaient de trouver un juste milieu entre le renouveau et l'ancrage dans la franchise, ces premiers épisodes n'arrivent pas à décoller. Passé ce générique qu'on retrouve avec grand plaisir chaque saison, il était inutile d'introduire ce côté magique ou satanique, et surtout de raconter – ou plutôt d'essayer de raconter – les origines du mal avec des flashbacks.

Que serait AHS sans quelques créatures non-identifiées...

L'horror story continue

Contrairement à la soporifique saison 10, Double Feature, cette saison coupée en deux ne racontera pas deux histoires différentes, et heureusement d'ailleurs. Le tournage de la série ayant été interrompu à cause de la grève des scénaristes et des acteurs, il est pour le moment impossible de prédire la date de diffusion des nouveaux épisodes. À vrai dire, on ne sait même pas combien il est censé en rester. Mais peu importe le nombre, on doute fort que les prochains épisodes éclaircissent l’intention de cette saison, qui n’arrive pas à se détacher de son modèle. La seule saison récente à l'avoir fait, la onzième, avec son horreur beaucoup moins mystique et plus ancrée dans le réel, n'avait pas fait l'unanimité. Mais on voit bien ici qu'il est temps de réinventer la formule.

Mrs Preecher veut-elle vraiment le bien d’Anna ? Celle-ci est-elle folle ? Siobhan et les autres sont-elles des entités maléfiques ? Et Sonia ? Ces premiers épisodes ne donnent aucune réponse. Les prochains devront donc répondre à de nombreuses questions.

Qui se cache derrière le mari parfait ?

Tout ce qu’il nous reste à faire, c'est attendre, et aussi se questionner sur cette surprenante stratégie de sortie. Car sans connaitre la date de diffusion de la prochaine partie, il est difficile de faire naître un quelconque sentiment d’impatience chez le spectateur. Chez Netflix par exemple, qui a pris l'habitude de couper en deux ses grosses séries (Stranger Things, The Witcher), la date de sortie de la partie 2 est toujours annoncée à l'avance, pour faire languir le spectateur. On se demande comment American Horror Story se relèvera de cette attente indéterminée.

Une nouvelle créatrice, un scénario adapté d'un roman... Malgré quelques tentatives d’émancipation, cette saison 12 d’American Horror Story n’arrive pas à se détacher de son modèle et l'on doute que les prochains épisodes arrivent à relever le niveau. 2,5/5

Les cinq premiers épisodes de la saison 12 d'American Horror Story sont disponibles sur Canal+