Le Collège Noir : critique Love, Death & Cantal sur ADN
Trois anciens étudiants des Gobelins ont brillamment évolué depuis leur film de fin d'études. En 2013, ils ont fondé le studio La Cachette, spécialisé dans l'animation 2D et ont participé à Love, Death & Robots, fabriqué les dernières séries de Genndy Tartakovsky et réalisé un épisode de Star Wars : Visions. Oussama Bouacheria, Julien Chheng et Ulysse Malassagne lancent désormais leurs premières créations originales. Ulysse Malassagne ouvre la voie avec Le Collège Noir, adaptation audacieuse de sa propre bande dessinée sur ADN. Malgré quelques cassures narratives, l'animation et la mise en scène impressionnent.
UN RETOUR AUX SOURCES INÉDIT
En 2023, La Cachette marque une étape cruciale avec Le Collège Noir, étant sa première production maison. Au-delà de l’aspect financier, ce projet pose les fondations de l'identité du studio. Ainsi, Le Collège Noir réveille subtilement une ère dorée de la japanimation à travers l'utilisation de la 2D et de sa narration visuelle. L'esquisse du trait sert une mise en scène incarnée et pittoresque. Et ça tombe bien tant cette aventure horrifique, où des collégiens tentent de retrouver leur ami disparu, explore la richesse des contes et des figures de l'héritage populaire français.
Aussi, Ulysse Malassagne aspire à immerger le jeune public dans une ambiance sombre et archaïque, tout en rendant hommage à son Cantal natal et au cinéma d'animation tranchant de son enfance, en particulier celui de Don Bluth. Dès la bande dessinée, l'objectif était aussi de s'inspirer des créateurs japonais contemporains qui transmettent et réinterprètent leur mythologie. De fait, Le Collège Noir confronte formidablement ses jeunes personnages (et spectateurs) à l'imaginaire provincial, illustrant le passage à l'âge adulte dans des vestiges au cœur de forêts montagneuses.
Ce conte horrifique est entrelacé d'une profonde introspection et des rêveries tirées de l'enfance de son créateur et réalisateur. Dans Le Collège Noir, l'empreinte autobiographique est palpable, les personnages émergent partiellement du réel et les lieux cantaliens sont minutieusement reconstitués. Partant d'une architecture rurale fidèle jusqu'à la reviviscence du folklore auvergnat, l'authenticité qui imprègne Le Collège Noir frappe et enchante. À tel point que les influences, qui passent de Tolkien à l'esthétique du jeu vidéo, se révèlent bien plus pénétrantes que l'on aurait pu le croire. Et c'est à cet endroit que réside toute la vaillance de ce petit bijou animé.
LE JUSTE ÉQUILIBRE DE L'ANIME ÉCONOMIQUE
La présence de la légendaire Toei Animation à la production (reconnue pour Goldorak et Albator) revêt une importance particulière. Malgré un budget restreint, Le Collège Noir impressionne par la qualité de son animation, qui puise dans les contraintes économiques ayant marqué l'industrie de l'animation japonaise des années 90. C'est précisément au cours de cette période que le style distinctif de la Toei a de nouveau brillé, avec ses mouvements limités et ses passages à vide dynamiques.
Ainsi, cet héritage confère à la série d'Ulysse Malassagne une singularité éclatante, Le Collège Noir prenant le temps d'installer ses cadres et de développer des perspectives audacieuses. De plus, la série surprend par son aspect artisanal, son trait crayonné et son travail dans l'illusion du mouvement. La mise en scène, jouant perpétuellement avec la profondeur, se révèle brillante et invoque une forme d'animation traditionnelle. Celle-ci cherchant à ranimer un style proche du croquis ou d'une esquisse imparfaite, offrant une esthétique sidérante.
L'EXPOSITION FORCéMENT FRUSTRANTE
En tant que première œuvre originale, Le Collège Noir est chargé d'ambitions, surtout quand on connaît la richesse de la bande dessinée originale. La décision d'Ulysse Malassagne de diviser cette histoire en deux parties, en collaboration avec la scénariste Magali Pouzol (Le Sommet des Dieux), ne parvient pas à éviter une certaine frustration. Et malgré une narration audacieuse et métatextuelle, inspirée de la structure des jeux vidéo, la progression de l'histoire est parfois très soudaine, à l’image de l’apparition de certaines figures folkloriques.
Le Collège Noir est tiraillé entre une exposition nécessaire et la réalisation de son plein potentiel. Inévitablement, le récit souffre par instants de détails confus et décousus qui affectent la série dans son ensemble. Les premières scènes, déroutantes et verbeuses, peinent à introduire émotionnellement la disparition de Jonas et perturbent la narration. C'est particulièrement vrai pour les révélations finales. Bien qu'émouvantes et passionnantes, celles-ci perdent considérablement de leur impact potentiel. Malgré tout, à la fin du générique, le magnétisme de cet univers vise juste et suscite une grande attente pour la suite de cette complainte d'Auvergne.
Le Collège Noir est disponible en intégralité sur ADN depuis le 14 novembre 2023.
Lecteurs
(4.5)29/11/2023 à 17:19
Après, en lisant vos commentaires, il y a un moyen d'exposer la série ! Ça s'appelle le bouche-à-oreille :)
Même si ADN n'a pas la puissance d'un Netflix, charge à ceux qui ont aimé la série de la faire découvrir. Moi, c'est ce que je fais, étant un très grand fan du studio et de la série.
29/11/2023 à 08:33
@Infinity20001 : ADN est un truc de passionnés et donc de niche, cest loin davoir la notoriété dun netflix ou amazon. Cest un peu comme comparer Hollow knight a call of duty en terme de popularité.
28/11/2023 à 19:04
ADN à une grosse notoriété dans la communauté manga. Ils ont plusieurs centaines de milliers d’abonnés à leurs plateforme. ADN c’est la meilleure plateforme pour regarder de l’animation. Et j’étais abonné à beaucoup d’autres sites avant. (Chrunchyroll, Wakanim etc…). ADN c’est très connus. Si cette série ne marche pas , c’est pas parce que ce n’es pas bien mais parce qu’adn est spécialisé dans l’animation japonaise, les gens qui payent un abonnement adn , c’est pour voir de l’animation japonaise principalement. Et c’est un abonné de longue date d’adn qui vous le dit.
28/11/2023 à 18:47
J’ai beaucoup apprécié malgré le final un peu rushé, j’espère voir plus d’animation dans ce style
28/11/2023 à 18:02
Encore la preuve que très peu d'étudiants ont de réelles capacités artistiques pour percer.
J'imagine que les autres sont issus de familles friquées sinon que font ils ?
28/11/2023 à 17:40
Dommage, cantonné à ADN, le truc est bien parti pour sombrer dans l'anonymat.
J'espère qu'ils trouveront un diffuseur avec plus de notoriété.