YOU saison 4 partie 2 : critique perverse sur Netflix

Let’s twist again

Exit la partie de Cluedo à l’anglaise, le ronron du whodunit classique et la patience envers les gosses de riches pervers gâtés. Le retournement de situation qu’on attendait lors de la première partie de saison et qui n’était jamais venu arrive en réalité au cours de cinq derniers épisodes. Ainsi, celui qu’on croyait être le nouveau méchant de la série s’avère être en fait la part sombre refoulée de Joe, qu'il tient pour responsable de ses propres meurtres. C'est ce qui explique que Joe donnait à voir exclusivement (ou presque) ses bons côtés, n'étant plus conscient de ses actes criminels et ne les incluant plus dans son point de vue donné au spectateur.

2 en 1 et 1 en 2

Si le retournement de situation est bien opéré, il arrive malheureusement très tard, après avoir laissé penser aux spectateurs durant toute la première partie que le psychopathe Joe Goldberg s’était changé en agneau du jour au lendemain, ce qui est dommage (et la personne qui écrit ces lignes s'était totalement laissée berner). L’idée est bonne, mais pas suffisamment préparée par les premiers épisodes, ce qui a pour effet de presser le twist et le dénouement sur trop peu de temps et donc de raconter ce bond en avant capital de manière assez grossière.

Au-delà de la facilité scénaristique à représenter un trouble de la personnalité multiple à travers un personnage entièrement différent (incarné par Ed Speleers) et extérieur à Joe, tout en surexpliquant la manière dont seul Joe a finalement été en interaction avec lui depuis le début de la série, YOU tombe dans les affres de la psychologie de comptoir. Elle bâcle alors ce qui aurait pu être une géniale évolution du personnage de Joe et de sa dangerosité.

C'est donc ça, se faire coffrer

So long, Marienne

Pour autant, la série reste suffisamment agréable à regarder et bien interprétée pour qu’elle satisfasse tout de même son spectateur. Un (gros) bon point est attribué pour la récupération de l’une des intrigues de la saison précédente qui avait été laissée en suspens dans la première partie : l’axe de Marienne, qui se retrouve bel et bien victime de son ex et permet à Tati Gabrielle de ne pas s’être déplacée pour rien. Ici, elle a l'occasion de porter à elle seule des séquences au suspense palpable, et de donner du relief à un personnage jusque-là un peu trop lisse.

Tati bien compris ?

C’est le retour de la fameuse prison de verre au sous-sol, un grand classique à la Goldberg, et de tout le jeu psychologique entre transparence et faux-semblants qui va s’y jouer. Un peu redondant sans doute, l’artifice reste efficace, et il fait craindre plusieurs fois sérieusement pour la vie de Marienne, car le souvenir de ce qui est arrivé à Beck dans la première saison est encore vivace.

La conclusion de la saison laisse espérer qu’on retrouve Marienne pour la suite, puisqu’elle survit encore, et ce serait une première pour cette série de faire revenir un personnage féminin sur trois saisons afin de le développer davantage et d’opposer enfin une antagoniste solide et positive à Joe, de plus en plus puissant et intouchable. Marienne semble être la plus susceptible de prendre cette direction et de vouloir empêcher Joe de nuire, après qu’elle soit sauvée de sa séquestration grâce à la sororité d'une étudiante de Joe qui va risquer sa vie pour la sienne.

Kate sera sera

Les beaux rôles

Ce personnage de l’étudiante (plus enquêtrice hyper-intuitive que simple élève) fait partie de la galerie de femmes qui entourent Joe, qui sont de plus en plus en alerte vis-à-vis de lui et cherchent enfin à le mettre hors d’état de nuire. Il était temps ! Même si l'intention reste encore lettre morte à l'issue de cette quatrième saison.

Peut-être pour contrebalancer l’étrange discours glorifiant envers Joe lors des premiers épisodes, cette deuxième partie insiste largement sur le karma féminin qui s’abat sur le voyeur : son étudiante et Marienne qui ont (presque) toujours une longueur d’avance sur lui ; les fantômes de ses précédentes conquêtes qui reviennent le hanter (l’occasion pour Victoria Pedretti et Elizabeth Lail de passer faire un coucou) et de potentielles victimes collatérales comme Phœbe qui finissent par échapper à son influence et vivre heureuses loin de lui.

The Haunting of Joe Goldberg

Un revirement agréable (même s’il ne dure qu’un temps puisque Joe reste redoutable et que certaines et certains en font les frais) qui donne envie d’en voir davantage malgré l’épaisseur des ficelles et les problèmes d’écriture mentionnés précédemment. Du côté obscur de la force, Greg Kinnear nous fait l’excellente surprise de rejoindre le casting dans un rôle à contre-courant, mais qui lui va comme un gant. Charlotte Ritchie, qui incarne Kate, la petite amie de Joe, voit son personnage se complexifier et elle n’est pas à l’abri de se retrouver avec l’un des meilleurs personnages de la série d’ici à la prochaine saison.

Si ces bonnes pistes et qualités ne rachètent pas complètement l’ensemble plus que boiteux et écrits à la truelle de ces deux parties de saison qui n’auraient jamais dû être séparées, elles font de YOU une série qui parvient à se maintenir relativement à niveau (contre toute attente). De quoi donner juste assez envie d’être là au prochain rendez-vous, avec une impression de “pas génial, mais pourquoi pas”.

L'intégralité de la saison 4 de YOU est disponible sur Netflix depuis le 9 mars 2023.