Vers les étoiles : critique pour l'éternité sur Amazon

Lino Cassinat | 30 mai 2022 - MAJ : 30/05/2022 12:29
Lino Cassinat | 30 mai 2022 - MAJ : 30/05/2022 12:29

Créée par les deux illustres inconnus Holden Miller et Daniel C. Connolly, Vers les étoiles réunit J.K. Simmons et la bien trop rare Sissy Spacek dans une surprenante fable de science-fiction crépusculaire. Et si les péripéties ont bien du mal à convaincre, il est étonnamment impossible de ne pas se laisser emporter par cette touchante invitation à la contemplation. De l'espace, de la distance entre les êtres, du temps, de la mort, de l'éternité, mais aussi d'un duo vieillissant à l'alchimie sidérante. Sortez les mouchoirs.

LE COSMOS À PORTÉE DE JARDIN

Ni plus heureux, ni plus malheureux que n'importe quel couple de grands retraités, Franklin et Irene ont tout de même un mérite que n'ont pas tant de mariages que cela : ils ont su préserver leur amour. D'ailleurs, ils s'aiment comme au premier jour où leurs regards se sont croisés pour ne plus se quitter, comme s'ils s'aimaient déjà avant même de se rencontrer, à travers le temps et l'espace.

Un amour éternel. D'ailleurs, cela fait une éternité qu'ils sont mariés, une éternité qu'ils ont passé à fonder un foyer, faire des projets, puis un enfant, qui s'est tragiquement suicidé en laissant derrière lui une petite fille, désormais sur le seuil de l'âge adulte.

 

 

Une éternité passée ensemble, une œuvre achevée, qu'ils contemplent du haut (du bas ?) de leur cellier, qui cache un passage secret donnant sur une autre planète et d'où ils regardent paisiblement la voûte céleste. L'existence continue, comme une énigme : quelle nouvelle éternité peut attendre Irene et Franklin, eux qui ont tout fait, tout vécu ? Quelle est la suite pour eux, quel est leur prochain seuil à passer ? N'y a-t-il que l'éternité de l'attente de la mort désormais, elle qui se fait sentir derrière chaque pilule, chaque prothèse, chaque aide pour accompagner la fin de vie ? Si je vis encore, c'est qu'il y a encore quelque chose, à voir, à faire. Quoi donc ?

Pour Franklin, c'est simple : sa tâche ultime, c'est chérir Irene. Elle est sa boussole. Mais Irene est une boussole déboussolée, et pour elle, comme pour toute personne assoiffée de sens, désespérée d'espérer, la vérité est ailleurs. Elle veut croire même, pourrait-on dire. Pas aux ovnis non, ni même à la résurrection de son fils - littéralement ou par substitution - mais simplement à l'existence d'un sens dans les majestueuses, mais glaciales éternités qu'elle contemple. Celle de sa mort annoncée, celle du cosmos... mais aussi dans celle de l'amour qu'elle voue à Franklin. Car si cet amour est autotélique, si l'existence est une fin en soi, à quoi bon les mener ?

 

Vers les étoiles : photoLa fin de vie, la fin de l'univers ? 

 

AD ASTRA... PER ASPERA

Il règne sur Vers les étoiles une bien étrange mélancolie, de celles engendrées par le contraste opéré par la juxtaposition de questions existentielles plus raides que Space Mountain, et des espoirs fous que suscitent le moindre début de réponse à ces questions. Vers les étoiles parvient à être réconfortante tout en étant incroyablement, effroyablement vertigineuse... du moins, dans ses moments les moins prosaïques. Car il n'y a pas que des concepts dans cette série, il y a bien une intrigue également, et elle est assez frêle.

Pour une œuvre dont l'essence même demeure dans une forme d'errance existentielle et contemplative, il peut sembler un peu vain de s'en prendre au récit, puisque l'action n'est pas le cœur de l'histoire - c'est même plutôt l'inaction, le temps qui passe. Certes, mais tout de même : en dehors des époux Franklin et Irene, Vers les étoiles s'échine à construire un scénario avec plusieurs sous-intrigues plus ou moins importantes, comme le ferait toute bonne série classique américaine. Et le fait est que sur ces séquences plus narratives, Vers les étoiles ne convainc pas vraiment.

 

Vers les étoiles : photo, Adam BartleyAttention, une intrigue secondaire

  

Non pas qu'elles soient mauvaises, mal écrites ou mal filmées, loin de là. Simplement, elles indiffèrent, peut-être à cause d'un trop grand nombre de mystères, accompagnés de trop peu d'indices ou d'éléments de contexte - un défaut que les fans d'un certain Damon Lindelof reconnaîtront facilement. Là, une table disparaît au contact d'une boule magique. Ici, une secte/culte/organisation secrète. Par là-bas encore, une capsule contenant un liquide bleu fluo brisée sur le bord d'un évier. Comment ? Pourquoi ? Là aussi, les réponses sont ailleurs, en dehors de la logique du scénario. Donc, de la mauvaise manière cette fois.

 

Vers les étoiles : photo, J.K. Simmons, Sissy SpacekJ.K. Simmons et Sissy Spacek, plus classes que jamais

 

I BELIEVE I CAN LIVE

Reste que, quand on n'y réfléchit pas trop, Vers les étoiles captive. On pourrait même dire que, moins elle bouge, plus la série happe son spectateur, qui a désormais tout le loisir de se laisser aller à une forme d'admiration de ses deux protagonistes, comme on admirerait le moindre détail de deux statues. Vers les étoiles doit d'ailleurs quasiment tout à ses deux marbres, aux incarnations et aux visages sculpturaux de J.K. Simmons et en particulier Sissy Spacek. Si le gros plan est l'équivalent d'un solo pour un acteur de cinéma, tous deux livrent ici leurs meilleurs récitals, déploient des trésors d'expressivité devant la caméra qui n'hésite pas à leur consacrer de longs aria.

C'est dans ces gros plans, dans la relation qui lie ces deux êtres que se terrent les tourbillons d'émotions de Vers les étoiles. Chaque preuve de dévouement est une source de joie infinie. Chaque contrariété, un déchirement insupportable. D'après l'autre, ce qui définit la grâce, c'est le mouvement, et le fait que l'on soit happé par la moindre micro-expression faciale de Franklin ou d'Irene, que le moindre tressaillement du visage suscite l'émoi... en dit long sur le petit miracle auquel on assiste.

 

Vers les étoiles : photo, Sissy SpacekDonnez-lui plus de rôles bon sang

 

Vient alors la question à un million : puisque la planète mystique de Vers les étoiles marche dans les traces de Rencontres du troisième type et Solaris, pourquoi diable avoir choisi le format sériel ? De toute évidence, l'intrigue n'est là que pour donner un support, voire un marchepied à une entreprise d'abstraction qui ne peut que souffrir de devoir s'étaler dans un temps aussi long. Et vu la volonté très clairement affichée par le scénario de faire une saison 2, il apparaît très peu probable que le petit miracle survive longtemps.

Bicéphale, Vers les étoiles navigue entre deux langueurs : celle, romantique, de deux personnages confrontés à tous les absolus de l'existence ; celle, laborieuse, de toute la toile de fond qu'il faut bien continuer de tisser. Et plus la curiosité que cette toile de fond suscite pendant la première moitié se transforme en ennui poli pendant la seconde moitié, plus la langueur se transforme en attente. Comme disait Terry Pratchett, l'éternité, c'est long, surtout sur la fin.

Vers les étoiles est disponible en intégralité sur Amazon Prime Video depuis le 20 mai 2022 en France

 

Vers les étoiles : photo, J.K. Simmons, Sissy Spacek

Résumé

On a vraiment envie d'aimer Vers les étoiles, mais elle est un peu comme le beurre étalé sur la tartine trop longue de Bilbo. Une réflexion téléologique incroyablement pertinente et touchante sur l'existence, qui ne laisse pas indemne... mais aussi un délice si allongé que sa saveur se perd en cours de route. Dommage, car dans ses instants concentrés, Vers les étoiles est vraiment renversante.

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Lecteurs

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commentaires
LeRoiBoo
25/06/2022 à 09:25

@GraalParci

je ne vois pas ou j'ai rien compris ???
Attends, tu vas me faire croire que son voisin est perdu dans cette planète et ensuite il ne dit rien et ne fait rien ?
Et la petite fille qui est avec sa grand mère dans la machine, se casse, comme ça sans rien ???
Tu trouves ça logique ??
Et pareil, les 2 sociétés secrète qui se battent, comme ça sur une autoroute ?

GraalParci
23/06/2022 à 01:14

ATTENTION SPOIL
Wow, moi j'ai pris du plaisir à regarder cette serie ! Je reviens juste sur le commentaire de "LeRoiBoo" qui n'a visiblement pas compris grand chose à cette série.

"Sisi Spacek, trouve Jude dans la machine - Son mari non ce n'est pas possible .... mais ne va pas une fois dans 6 épisodes voir si il y a du sang dans la machine .... et c'est le 2 ème épisode"
Bah en fait comme il le dit si bien dans la série, il aime sa femme comme personne d'autre n'aime sa femme donc il lui fait confiance pas besoin d'aller vérifier,même s'il est sceptique à l'annonce de cette nouvelle.

"J K Simmons laisse son voisin crever sur la planète .... balec je reviendrais une autre fois
J K Simmons (toujours) voit son voisin un couteau dans le coeur sur la planete.... 5 minutes plus tard balec total. Il y a la saison 2. Je rigole avec ma femme"
Là t'es complément à côté de la plaque. La personne que tu vois un couteau dans le coeur n'est absolument pas son voisin, c'est la personne qu'on voit dans les flashs de Jude et qui le poursuit, c'est de lui que provient le sang retrouvé sur Jude par le couple de retraité... Ça me paraissait assez obvious pour le coup.

"J K Simmons, j'ai plus d'oxygène, et je vais clamser. Il est sorti il y a 3 minutes de la bulle"
Il prend bien le temps de dire à sa femme qu'il y a un soucis avec sa réserve d'oxygène, donc je vois pas en quoi c'est une incohérence. En fait je me demande si tu as regardé la série en VO ? Car c'est plutôt clair dans cette dernière, la VF serait elle si mauvaise ?

"Je parle pas du fait qu'au départ, il a dit que des souris étaient morte (donc pas d'oxygène) mais balec la aussi.
Sur chaque épisode, il y a au moins une dizaine d'incohérence"
Il y a plein de raisons qui pourraient expliquer la mort des souris sans pour autant que l'air sur la planète ne soit pas respirable par l'homme.
Les incohérences que tu relèves me semble plus être dû à de grosses incompréhensions de ta part. La série est plutôt bonne dans l'ensemble avec un jeu d'acteur globalement solide (VO). Hâte d'en savoir plus sur cette planète et sur le rôle de ces fameux gardiens.

LeRoiBoo
19/06/2022 à 00:33

Je me suis fait chier, mais à un point j'ai eu du mal a terminer la 1ère saison.
Elle possède absolument tout des séries, sympa sur le papier. Mais vu qu'il faut absolument faire 8, 10 ou 12 épisodes.
Alors on fait des sous intrigues, il se passe des trucs mais tout le monde s'en fout. Et le pire, c'est que personne ne se pose des questions.
Et encore et encore ces histoires de 2 société secrètes qui s'affrontent, avec la moitié de la planète qui est impliqué.

Sinon, pour montrer comment le scénar est tout peté et s'en bats les reins de la logique (attention ça va spoiler) :
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Sisi Spacek, trouve Jude dans la machine - Son mari non ce n'est pas possible .... mais ne va pas une fois dans 6 épisodes voir si il y a du sang dans la machine .... et c'est le 2 ème épisode

Sisi Spacek à sa petite fille, tu es dans une machine à voyager dans l'espace. Sa petite fille non ce n'est pas vrai vous m'avez menti, je me casse..... 1h plus tard. Bon je vais avec toi, t'es un inconnue, t'es bizzare mais on part dans une contrée lointaine .... en Asie

J K Simmons laisse son voisin crever sur la planète .... balec je reviendrais une autre fois
J K Simmons (toujours) voit son voisin un couteau dans le coeur sur la planete.... 5 minutes plus tard balec total. Il y a la saison 2. Je rigole avec ma femme

J K Simmons, j'ai plus d'oxygène, et je vais clamser. Il est sorti il y a 3 minutes de la bulle.

Je parle pas du fait qu'au départ, il a dit que des souris étaient morte (donc pas d'oxygène) mais balec la aussi.
Sur chaque épisode, il y a au moins une dizaine d'incohérence

Mezz
14/06/2022 à 06:13

Clairement une de mes oeuvre préférée sur Prime vidéo (avec notamment Tale from the loop).

Mezz
14/06/2022 à 06:08

Je mets 3*
Pas pour la série mais pour l'article.

jack jack
11/06/2022 à 00:20

Beaucoup de commentaires négatifs de la part de gens qui n’ont visiblement rien compris à la série . Quand on la compare à Stargate ou Jumper, on s’est clairement trompé de chaîne! Poésie et mystère sont bien exprimés. Il y a toujours cette curiosité d’en savoir un peu plus, de découvrir qui est à l’origine de ce portail enterré. Et où est Byron???

Sylvievue
31/05/2022 à 20:12

Vers les étoiles, une bonne série ou la table est mise pour la saison 2.

Pi
30/05/2022 à 20:00

@ Ange Beuque - Rédaction

Ange Beuque - Rédaction
30/05/2022 à 18:59

Des défauts chez Damon Lindelof ? Voilà qui semble bien peu plausible.

Pi
30/05/2022 à 18:39

Je m'attendais à quelque chose de bien meilleure. Ça se regarde mais on trouve le temps long.

Au final, c'est un croisement batârd entre Stargate et Jumper, le tout sur un rythme poussif, des sous-intrigues qui ne servent à rien à base de psychodrames familiaux, des acteurs qui ne jouent pas très bien, des effets spéciaux plus que moyens et des incohérences dont la plus flagrante éclate à la fin. Globalement on nous explique qu'un truc n'est pas possible au tout début alors que si à la fin, mais sans que ça semble gêner, ni les personnages, ni les scénaristes.

Les personnages, justement. Celui de J.K Simmons est antipathique au possible et il agit de manière totalement stupide. Difficile dés lors d'avoir de l'empathie pour un type pareil. Sissy Spacek est la seule qui tire son épingle du jeu.

Tous les autres personnages sont soit mal écrits, soit ne servent à rien dans l'intrigue.

Je suis donc déçu parce que je suis très fan de ce type de SF où le mystère est introduit dans le quotidien par petites touches.

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