Cobra Kai Saison 4 : critique du retour du retour de Karaté Kid sur Netflix

Mathieu Jaborska | 3 janvier 2022 - MAJ : 03/01/2022 18:24
Mathieu Jaborska | 3 janvier 2022 - MAJ : 03/01/2022 18:24

Toujours forte d'un succès proportionnel à son capital sympathie, Cobra Kai revient sur Netflix pour satisfaire les amateurs de bastons adolescentes, qui n'avaient pas autant pris leur pied depuis Battle Royale. Fidèle à sa réputation, cette saison 4 martyrise encore un peu son casting et la suspension d'incrédulité, notamment grâce à l'arrivée d'un énième transfuge des Karaté Kid : Terry Silver, campé par Thomas Ian Griffith.

Cobra Kai never dies

Au beau milieu d'une culture populaire largement tournée vers le passé, Cobra Kai a toujours fait figure d'exemple, du moins pendant ses deux premières saisons. Sa nostalgie était brute de décoffrage, format web-série oblige, mais maligne, puisqu'elle redistribuait modestement les cartes de la madeleine de Proust à laquelle elle succédait. Après 30 épisodes, est-il toutefois possible de tirer encore quelque chose de la saga Karaté Kid, pas exactement une grande oeuvre séminale ?

Techniquement, oui : tant que chaque figurant de la quadrilogie (oui, on attend encore Hilary Swank) n'aura pas fait son come-back au gré d'un cliffhanger, Josh HealdHayden SchlossbergJon Hurwitz et leur petite armée de scénaristes ne s'arrêteront pas de leur inventer des retours en force absurdes et des traumas enfouis. Au point que les personnages eux-mêmes sont forcés désormais d'ironiser sur ce recyclage de carrières industriel. Recyclage qui motive en grande partie les enjeux de la saison 4, via le retour du trouble (et plein aux as) Terry Silver, diabolique antagoniste de Karaté Kid 3, auquel le scénario global se réfère régulièrement.

 

Cobra Kai : photo, Thomas Ian GriffithDe retour, pour jouer un mauvais tour

 

La recette, désormais bien connue, est suivie à l'ingrédient près. Nouveau sensei qui prend un peu trop à coeur son job, nouveau jeune premier en quête d'identité, nouveaux harceleurs, nouveaux gentils corrompus et nouveaux méchants tentés par le côté zen du Karaté sont au menu. Les inconditionnels des tribulations de Johnny Lawrence et Daniel LaRusso, forcés de faire équipe afin de défaire John Kreese et son nouvel associé, ne seront pas dépaysés, à condition de tirer un trait sur ce qui démarquait les premières saisons du tout venant nostalgique.

Celles-ci jouaient parfois habilement des accointances entre les codes du teen movie des années 1980 et les problèmes que doit affronter la jeunesse actuelle, quand elles ne dressaient pas directement un parallèle pertinent à travers le personnage de Kreese, pur produit regeanien dont la soif de compétition dangereuse était très adaptée à certains discours à la mode. Un propos politique s'appuyant sur l'influence de la culture populaire pour s'emparer des dynamiques de pouvoir qui s'insèrent violemment dans l'adolescence et du poids qui pèse sur les épaules de ses mentors.

 

Cobra Kai : photo, William ZabkaOui, encore

 

Les préalables au prolongement de l'aventure auront majoritairement eu raison de ces réflexions, malgré quelques pistes intéressantes (l'évolution du personnage de Kreese, prisonnier de ses propres manipulations). Ensevelie sous un humour toujours aussi lourd (Stingray est de retour...), mais surtout les innombrables personnages et leurs arcs narratifs, cette saison préfère gentiment se moquer des problématiques de ses ados plutôt que les comprendre. Elle résume les mésaventures de leurs vies respectives à un sac de noeuds d'intrigues secondaires qui devront bien sûr se dénouer lors du tournoi final, moins motivée par une approche thématique du teen movie que par la nécessité de se dépêtrer avec sa propre mythologie.

Vu le nombre de conflits à résoudre, certains d'entre eux sont clairement sous-traités (le pauvre Hawk) et Cobra Kai perd peu à peu ce qui avait fait sa popularité : la mise à jour des thèmes de son matériau original. Un mal pour un bien : ne pas mettre à jour Karaté Kid et surtout ses suites, de plus en plus convoquées, c'est aussi ressusciter leur délicieuse improbabilité.

 

Cobra Kai : photo, Dallas Dupree YoungNouveau personnage, nouveau harcèlement

 

I know karate

La saison 3 citait allégrement Rocky 3 pour en prélever la combativité. La saison 4 fait à plusieurs reprises référence à Bloodsport, peut-être pour lui chiper sa brutalité déconnectée. Déjà sérieusement mise à mal après 20 épisodes, la crédibilité de cet univers avait volé en éclats dans la suite et cette dernière salve pisse sur sa tombe avec nonchalance.

De plus en plus fonctionnels, les personnages se muent en simples rouages d'un univers où le tournoi de Karaté local semble aussi important qu'un match d'Olive et Tom, où des gosses se transforment en quelques mois en Chuck Norris miniature et où aucun parent ne réagit au fait qu'un quarantenaire fini à la 8.6 exige de sa progéniture qu'elle saute entre deux usines irradiant le tétanos. Un monde très éloigné du nôtre donc, et par ailleurs franchement divertissant.

 

Cobra Kai : photo, Gianni DecenzoCe sont littéralement des punching-balls(s)

 

Après le double point de non-retour de la baston dans l'école, puis dans la maison, la série n'essaye même plus d'entretenir l'illusion, marchant de fait dans le sillage des divertissements des années 1980 et 1990, insultes au concept même de plausibilité. La "Valley" s'est transformée en quasi-zone de guerre de gangs à boutons et kimonos où trois crétins égomaniaques se servent de morveux régulièrement rossés pour assoir leur vision du monde à coups de high-kicks juvéniles. Et ça suffirait presque à les rendre aimables, eux et leurs psychopathes miniatures (tout le monde endosse le rôle du harceleur, même les héros ayant accompli leur rédemption).

Ce parti pris toujours plus décontracté sied bien au format 30 minutes, insufflant un vrai rythme au tout, et fait presque pardonner les innombrables défauts de la série, à commencer par le jeu maladroit de la majeure partie du casting, enfants comme anciens enfants, et une mise en scène encore très télévisuelle quand ça ne se bastonne pas. Quant aux excès de kitsch épars, ils explosent dans le fameux tournoi final, où se multiplient les ralentis, voire même les triples plans dignes des meilleures van dammeries, les envolées musicales épiques et les retournements de situation ubuesques, le tout avec en fond des chorégraphies franchement travaillées, une fois de plus.

 

Cobra Kai : photo, Peyton ListFist of fury

 

Pour qui y cherche la dernière émanation de l'insouciance du feel-good movie à l'ancienne et quelques droites dans le faciès de mioches insupportables, ces deux derniers épisodes seront à la hauteur, d'autant qu'ils annoncent une saison 5 encore plus rentre-dedans, et espérons-le bien plus à la page. Les ultimes minutes ont en tout cas piqué notre curiosité.

 

Cobra Kai : Affiche

 

Résumé

Cobra Kai se dépatouille bien mieux avec Karaté Kid qu'avec son propre univers. Heureusement, l'irresponsabilité générale de ses héros et l'absurdité de ses péripéties en font toujours un divertissement honnête.

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commentaires
NemesisTheWarlock
31/01/2022 à 11:10

Comme Decebe, j'ai 47 ans, et je m'éclate sur cette série avec mon fils de 13 ans... Comme tout le monde, j'adore ce plaisir coupable qui ne se prend pas au sérieux et qui ne colle en rien à la réalité. Je trouve également que les scénaristes sont d'une intelligence rare. Ils arrivent à nous donner ce que nous voulons, tout en nous surprenant, ce qui est loin d'être facile ! En résumé, c'est du sucre rapide, du plaisir immédiat et intense, et on a bien conscience que ça ne va pas nous rendre plus intelligents, mais on s'en tamponne.

Guizmo
11/01/2022 à 15:32

Je voulais me faire une idée après avoir tant lu dessus et résultat…. J’ai bouffé les 4 saisons en 1 semaine… j’ai vu les 3 films au cinéma à l’époque et j’avais adoré étant ado. Du coup j’ai envie de me racheter un bonsaï !
A ne voir qu’en VOST pour vraiment apprécier ce plaisir coupable et addictif

Dinoboy
10/01/2022 à 13:11

J'ai été très agréablement surpris par cette série. Comme beaucoup, j'ai vu les films originaux sans en être vraiment fan, mais j'ai l'impression que la série "bonifie" le film! Il y avait vraiment un vrai risque de faire une série inintéressante (comme beaucoup d'autres tentatives pour d'autres titres auparavant..), mais pour Cobra Kai, l'exercice est plutôt réussi. Beaucoup plus réussi que la tentative de remake du film avec le fils de Will Smith ...
Il ne reste plus qu'à espérer qu'il reste encore de la créativité en réserve chez les créateurs pour la saison 5!

SnipeNico
10/01/2022 à 12:49

Rien ne se passe pendant cette saison 4, un ennui total, sauf pour les 30dernières minutes où ils ont mit le paquet pour garder l'audiance pour la saison 5. Ils auraient du s'arrêter à la saisoin 2.
C'est malheureux de voir de chouette séries tirées en longueur uniquement pour les sous...

pc
04/01/2022 à 22:59

Évidemment amoureux du Karaté Kid original, je suis étonnamment surpris par la qualité et la narration de cette mini série. Pourtant j y allais en marche arrière ? 4 ans plus tard je viens d avaler la saison 4 avec gourmandise. Quel pied ! C est dingue comme cette série est adictive (les scénaristes sont vraiment malins). Vivement la saison 5.

Poupon
04/01/2022 à 18:03

Super à quand la série 5
Que du plaisir

L'autre
04/01/2022 à 17:26

Ma série coupable et un peu honteuse....mais je kiffe....

Decebe
04/01/2022 à 14:21

Du haut de mes 46 balais, je tiens à indiquer que….. j’adooooooore cette série. Trop fun, surtout que je la regarde avec mon fils de 14 ans. Merci Cobra Kai.

Mastakony
04/01/2022 à 14:16

Je ne dirais pas que c'est la meilleure série que j'ai regardé, mais de loin celle pour laquelle je prends le plus de plaisir.
Sûrement mon ange et la nostalgie des nanars que je regardais ado...
Je trouve que cette série est sans prétention et rafraîchissante, au milieu des codes des "bonnes séries"

Hâte de votre la saison 5

Fred 56
04/01/2022 à 12:36

Tres bonne serie quitte me fait replonger dans le passé j adore......

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