In the mood for Cannes - épisode 8
Disons-le, durant la grand mess du cinéma, le critique est un suiviste sans vergogne. Pas par incompétence, encore moins par manque d'imagination, et certainement pas par absence de conviction, mais avec quasiment une centaine de films répartis sur quatre sections, impossible de tout voir simultanément. Par conséquent (merci les réseaux sociaux), tout le monde scrute les réactions des petits copains, et s'engouffre dès qu'un début d'ombre de buzz se profile dans le lointain.
Holy Motors ayant littéralement déchaîné les passions et quasiment fait l'unanimité lors de sa première projection de presse, la seconde est instantanément devenue The Place To BE, avant de rencontrer un succès comparable. Nous ne sommes plus qu'à quelques heures de sa projection officielle, en présence de l'équipe, où la foule pourra réellement se déchaîner. Le public, beaucoup plus divers (se côtoieront festivaliers, invités, professionnels et “civils“) aura été chauffé à blanc par les rumeurs de la journée précédente, et attendra avec délice de réagir le plus fortement possible. Quand on sait que le film de Carax est une œuvre aux frontières de l'expérimentation, passablement déviante et hallucinée, nous tenons les ingrédients d'une ovation tonitruante, ou d'une huée au parfum de scandale.
Il en va ainsi de l'Histoire de Cannes et du Septième Art, faite de spasmes, de soubresauts et de retournements. Une Histoire qui fait des héros des ratés, des parias des rassembleurs. Voilà la marque d'un grand Festival, d'une manifestation parmi les plus vivantes et imprévisibles qui soit, dont le prochain palmé pourrait bien être le film dont on aura le moins osé parler jusqu'alors.