Last Night in Soho : on a vu le délire horrifique et fantastique de Edgar Wright

Alexandre Janowiak | 6 septembre 2021 - MAJ : 06/09/2021 11:46
Alexandre Janowiak | 6 septembre 2021 - MAJ : 06/09/2021 11:46

Après un prestigieux festival de Cannes, Ecran Large s'est décidé à faire un tour sur le Lido de Venise pour la 78e édition de la Mostra. Si Dune y était le grand film attendu (et notre critique est déjà là), le reste de la sélection y est tout aussi dingue. Alors que le festival dévoile un peu plus ses films chaque jour, c'est l'heure pour nous de vous livrer notre avis à chaud sur Last Night in Sohothriller horrifique et fantastique présenté en hors-compétition.

 

 

De quoi ça parle ? Eloise alias Ellie est une jeune femme passionnée de mode et de design, et lorsqu'elle reçoit une lettre lui annonçant qu'elle est acceptée dans une prestigieuse école londonienne, elle quitte sa campagne natale pour exaucer son rêve. Mais tout n'est pas rose sur place et pour mieux se réconforter, elle s'évade dans le Londres des années 60 qu'elle chérit tant pour ses musiques et son style. Mais s'aventurer trop longtemps pourrait avoir des répercussions sans précédents, et son fantasme devenir un pur cauchemar.

 

photo, Thomasin McKenzieAttention à ne pas s'aventurer trop loin

 

C’était comment ? C'est peu de dire qu'il était attendu ce nouveau film de Edgar Wright. Après avoir conclu sa trilogie Cornetto avec Le Dernier Pub avant la fin du mondele cinéaste s'était plongé dans un jeu musical ultra-rythmé avec Baby Driverplongeant le spectateur dans un récit mêlant comédie et action, romance et thriller. Des thématiques qu'il ne connaît que trop bien dont Edgar Wright semblait vouloir se détourner en s'immisçant dans le monde de l'horreur avec Last Night in Soho.

Découvrir le Britannique dans un nouveau registre était plus qu'intrigant et force est de constater que c'est une petite bénédiction. Last Night in Soho démarre comme un conte de fées avec cette lettre salvatrice qui va bousculer la vie de la jeune Ellie et la mener dans les rues londoniennes. Mais très vite, le conte de fées se transforme en désillusions pour Ellie lorsqu'elle comprend que la capitale britannique est un territoire hostile, sexiste, faux, oppressant et risqué.

D'une manière assez rapide (peut-être même trop) et assez nébuleuse, le personnage d'Ellie va alors se transporter dans les années 60, sa nostalgie de cette période lui faisant croire à un monde meilleur, celui qu'elle a toujours imaginé. Et c'est ici que Edgar Wright commence véritablement à impressionner. Sa mise en scène était jusqu'ici propre, même si un peu surdécoupée à quelques reprises (une discussion entre filles), elle devient un festival de virtuosité.

 

photo, Anya Taylor-JoyUne séquence folle parmi d'autres

 

Avec une maestria dingue et une myriade de plans-séquences ingénieux, jouant avec les miroirs, les espaces, les portes, les ombres, les regards (cette danse à deux, mais trois visages)... le Britannique impressionne à chaque instant. Jamais il n'a été aussi habile avec une caméra, et indubitablement, tout est démultiplié lorsqu'il bascule complètement dans le fantastique et finalement le giallo.

Sans surprise, l'hommage aux oeuvres de Dario Argento (et d'autres) est évident (le film commence presque comme Suspiria d'une certaine manière). Le jeu de couleurs instauré dès le changement d'appartement par l'enseigne lumineuse d'un bar donne rapidement la note d'intention visuelle (la photo de Chung Chung-hoon est un délice pour les yeux), et la réflexion qui en découlera.

Car en plongeant dans un rêve qui va se muer en cauchemar diabolique paranoïaque (voire schizophrénique) au fil des séquences, Last Night in Soho propose une vision fascinante des mondes/passés idéalisés et met un coup de poing en plein visage des chantres du "c'était mieux avant". La co-scénariste du film, Krysty Wilson-Cairns, avait expliqué que le long-métrage parlait in fine de l'exploitation des femmes dans différentes interviews et c'est en effet ce qui fait la force du film.

 

photo, Anya Taylor-Joy, Matt SmithUn monde enchanté dont la noirceur va se révéler plus vite que prévu

 

S'il convoque avec amour l'aura de cette époque reine et multiplie les références à son cinéma (du Répulsion de Roman Polanski à L'invasion des morts-vivants de John Gilling ou encore Ne vous retournez pas de Nicolas Roeg et Inferno de Argento, même s'ils sont plus récents), le long-métrage se pose comme une version moderne de ces délires fantastiques. Plus féministe et particulièrement en phase avec son temps, l'hommage à tout un pan du cinéma montre son vrai visage.

Alors évidemment, il y a des défauts dans cette aventure psychédélique. Ainsi, l'enquête qui naît des pérégrinations temporelles de Ellie (Thomasin McKenzie décidément une future grande) et de ses balades nocturnes avec Sandie (Anya Taylor-Joy capable de tout jouer) se révèle un peu téléphonée par moment. Pire, l'intrigue y est complètement surexpliquée dans le dernier tiers alors que le scénario aurait pu jouer une carte plus sensorielle et éviter les dialogues trop illustratifs. Par ailleurs, si la musique est souvent géniale (pas surprenant avec Wright), sa surabondance vient parfois gâcher quelques effets.

 

photo, Thomasin McKenzieThomasin McKenzie impressionne

 

Toutefois, cela n'empêche pas de prendre son pied devant ce thriller psychologique au climax complètement déjanté, convoquant des images tout bonnement terrifiantes. Bref, un sacré voyage lyrique entre rêve et réalité, passé et présent, qui donne très envie de voir Edgar Wright poursuivre des expérimentations horrifiques.

Et ça sort quand ? Dès le 27 octobre dans les salles françaises, de quoi en faire un programme tout trouvé pour Halloween.

Tout savoir sur Last night in Soho

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commentaires
Kyle Reese
06/09/2021 à 21:06

Oh cette Mostra mamamia !
Avec Dune, le film que j'attends le plus cette année ! Ca va être bon tout ça.

Szalem
06/09/2021 à 19:25

Dire que j'ai hâte serait un euphémisme!