Avatar : pour James Cameron, la technologie de Gemini Man n'est pas l'avenir du cinéma

Mathieu Jaborska | 24 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Mathieu Jaborska | 24 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

HFR ou pas HFR ? Les avancées techniques promises dans les suites d'Avatar pourraient être moins ambitieuses que prévu.

Montré au grand public pour la première fois dans la trilogie du Hobbit par Peter Jackson, le procédé du High Frame Rate (HFR) a beaucoup refait parler de lui récemment. Le cinéma use habituellement d'un format de tournage de 24 images par secondes. Cependant, beaucoup veulent profiter des avantages du numérique pour changer ça. Ainsi, les adaptations de Tolkien étaient visibles à leur sortie en 48 images par seconde, ce qui permettait surtout de mieux utiliser la 3D, chère au cinéaste néo-zélandais.

 

Photo Martin Freeman, Benedict CumberbatchSmaug en 3D HFR, une sacrée expérience.

 

Le dernier auteur à s'y être collé est Ang Lee. Dans Un jour dans la vie de Billy Lynn, sorti en 2017, il expérimentait le 120 images par seconde. Mais le réalisateur de L'Odyssée de Pi (déjà un beau tour de force technique) s'était écrasé sur le mur de l'exploitation. En effet, le réseau de distribution n'était pas à même de proposer la meilleure expérience possible et le film a, de fait, été difficile à voir dans des conditions optimales.

Mais il ne s'est pas découragé, et a sorti en 2019 Gemini Man, toujours en salles, où deux Will Smith s'affrontent, pour un succès pas forcément au rendez-vous non plus. Le film d'action est lui aussi conçu pour le 120 images par secondes, et les spectateurs ayant eu la chance de le découvrir dans ce format peuvent au moins attester de l'intérêt de la technologie.

 

photo, Will Smith120 photos de Will Smith par seconde, le rêve américain.

 

Reste la question d'Avatar. Le développement interminable de ces suites laissait présager que James Cameron allait, comme à son habitude, repousser les limites. Les théories les plus folles ont circulé à ce propos : on a parlé par exemple de 3D sans lunettes (la nouvelle a été démentie) mais surtout de HFR. Le cinéaste ne cache pas son intérêt pour le procédé. Beaucoup ont avancé que la franchise allait en faire un argument de vente. Mais on vient d'apprendre que ça ne sera pas le cas.

Dans un entretien à Collider, le metteur en scène a défendu sa position vis-à-vis d'une technologie qui fait couler beaucoup d'encre.

"Je veux dire, j'ai une philosophie personnelle à propos du high frame rate, qui est que c'est une solution spécifique à des problèmes spécifiques en rapport avec la 3D."

Selon, lui, le HFR est donc une solution technique. Mais il va encore plus loin.

"Je ne pense pas que ce soit un format. C'est juste moi, personnellement. Je sais que Ang Lee ne voit pas ça de cette façon. Je ne pense pas que ce soit le prochain 70 mm ou le prochain gros truc. Je pense que c'est un outil à utiliser pour résoudre des problèmes liés à la projection en 3D. Et je l'utiliserai modérément tout au long des films Avatar, mais ils ne seront pas en high frame rate."

 

PhotoSam Worthington et Zoe Saldana version Navi' performance capture, de retour dans Avatar 2.

 

C'est donc confirmé. La 3D d'Avatar 2 sera soignée, mais le film devrait se contenter d'un format de 24 images par secondes dans sa grande majorité. Le réalisateur pense qu'il n'est pas nécessaire de maintenir le procédé HFR pour l'entièreté d'un long-métrage. L'idée est plus de s'en servir épisodiquement, sur certains plans ou séquences très ambitieux.

"Pour moi, plus le sujet est banal comme deux personnes qui parlent dans une cuisine, moins ça marche parce que vous sentez que vous êtes dans un décor de cuisine avec des acteurs maquillés. C'est à ce point que c'est réel, vous savez ? Mais je pense que quand vous avez des sujets extraordinaires qui sont filmés pour de vrai, ou même à travers des CGI, cette hyper-réalité marche en votre faveur.  Donc pour moi, c'est une baguette magique que vous secouez à certains moments et que vous utilisez quand vous en avez besoin. C'est un outil de création."

La messe est dite. On saura donc à quel point le réalisateur a secoué sa baguette (euh...) le 15 décembre 2021 pour Avatar 2. Et pour encore plus de secouage, rendez-vous le 20 décembre 2023, le 17 décembre 2025 et le 15 décembre 2027, du moins si Disney autorise les deux derniers morceaux de cette fresque à l'ambition démesurée.

 

James CameronLe boss en action.

Tout savoir sur Avatar 2 : La Voie de l'eau

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commentaires
Gmalamonciné
26/10/2019 à 12:39

Certains ici compare le réal de Piranhas 2 avec Fritz Lang de manière sérieuse ?
Certes, Terminator, Abyss...
Mais Avatar !? C'est les Schtroumpfs pour ados votre licence. Pas plus profond qu'un mauvais Disney.

Captainnobody
25/10/2019 à 16:47

Le cinéma est de plus en plus une perpétuelle expérience, qui cherche à a apprivoiser des outils donnant au fil du temps, des possibilités se rapprochant le plus possible, de l imagination débordante de nos cerveaux .
Cameron est un savant fou du cinéma comme le furent fritz lang ou Hitchcock.au meme titre que Ang Lee. Ils expérimentent, poussent les barrières de l impossible .chacun a leur manière mais avec une sincérité presque enfantine qui offre au cinéma, ses plus belles prouesses techniques et esthétiques. On peut critiquer l air de la technologie au cinéma mais on doit bien reconnaître, que cela permet de nous rapprocher au plus de nos fantasmes de spectateurs friands de grands manèges cinématographiques.

Hasgarn
25/10/2019 à 14:21

@ mikegyver :

Tu as compris tout seul, c'est cool pour toi.
J'avais été très clair dans un post un peu plus tôt mais Grift avait besoin qu'on développe, ce que j'ai fait.
On est d'accord sur le fait que c'est beaucoup pour pas grand chose mais je ne vois pas où je me contredis dans les 2 premiers paragraphes et en quoi expliquer une rampe de vélocité est inutile.

Ceci étant dit, si tu sais mieux vulgariser, je suis impatient de te lire.

mikegyver
25/10/2019 à 13:52

@hasgarn:

un paté pour dire qu'on peut faire ce qu'on veux niveau image par seconde. Et en plus tu le dis mal, tu te contredis dans les 2 premiers paragraphes.

C'est bien de vouloir faire le mec qui touche, mais bon sachons restons simple, et surtout ne pas ecrire pour rien dire, en gros la question i/s ne meritait pas un developpement en fait, on avait tous deviné la reponse.

Hasgarn
25/10/2019 à 12:10

Grift :

En montage, tu mets tes rushs dans ce qu'on appelle une timeline.
Actuellement, cette timeline est déterminée avec une résolution unique de sortie et un frame rate défini en amont et définitif lui même.
Je confirme donc ce que tu soulèves, le frame rate est définitif, c'est soit 24i/s ou 120i/s mais pas les 2, il n'y a pas de variation dans un film en diffusion. Et donc, pour avoir 10% de film avec un intérêt réel à 120 i/s, il faut supporter 90% de Benny Hill.

Par contre, dans la timeline, tu peux avoir toutes les résolutions et tous les frame rates que tu veux. Faut pas faire n'importe quoi non plus, mais c'est fréquent et tous les logiciels de montage ou presque l'accepte et le gère.
Par exemple, quand un plan passe de vitesse normale à ralenti, tu peux le faire de 2 manières : tu augmentes le nombre d'images à la caméra ou ton rush est en haute fréquence tout du long et tu décides de ralentir la vitesse en cours du plan ce qui te permet de gérer comment tu fais ton ralenti.
Concrètement, je crois que c'est comme ça que Zack Snyder a shooté les scènes d'action de 300. Au montage, c'est ultra souple et créatif. Ça permet d'accélérer le mouvement aussi d'ailleurs et de ne pas te préoccuper de ça au tournage. Imaginons que tu doives refaire ton plan parce que l'opérateur a accéléré le frame rate trop tard, ça devient vite lourd. Autant tout tourner à très haute fréquence de suite.

Tout ça existe dans la timeline, avec tous les frame rates possible et imaginable.

Si on veut avoir un film avec un frame rate variable, il suffit de pouvoir exporter la timeline sans conversion du frame rate puisqu'on a les infos. On a déjà les moyens techniques de monter des films avec une fréquence variable.

Ce qu'il faut, ce sont des projecteurs capables de s'adapter à la fréquence d'images (facile, qui peut le plus peut le moins, faut juste le logiciel dédié) et un codec de diffusion qui s'interface avec la machine (pas une gageure non plus).
On a ainsi le beurre (2 pelés et un tondu qui causent dans la cuisine sans avoir l'effet Benny Hill), l'argent du beurre (scènes d'actions fluides) et le cul de la crémière (les 2 ensembles dans un même film).

Fox
25/10/2019 à 11:57

Je pense pour ma part qu'il n'y a pas vraiment de débat à avoir autour des propos de James Cameron.
S'il considère que le HFR n'a d'utilité que sur une partie de son métrage, alors il a raison. Et si Ang Lee souhaite de son côté l'utiliser sur l'intégralité de son film car il pense que ça rajoute à l'immersion, alors il a également raison. Pourquoi ? Parce que, comme l'a très bien dit Cameron, il s'agit d'un outil et non d'une fin en soi (je n'ai d'ailleurs pas le sentiment qu' Ang Lee prêche le contraire d'ailleurs...). Donc chaque artiste l'utilise comme bon lui semble, en fonction de sa sensibilité. C'est comme Christopher Nolan qui ne jure que par l'IMAX et la pellicule, alors que Fincher bénit l'arrivée du numérique car elle lui a permis de s'affranchir des temps de développement de pellicule pour pouvoir contrôler instantanément ses rushes. Personne n'a tort non plus dans cette histoire, c'est juste un question de goût et du réa' (et du chef op', il ne faut pas les oublier !) et du spectateur. Beaucoup ont détesté de visuel de Collateral de Michael Mann car ils n'aimaient pas ce rendu numérique très prononcé, alors que de mon côté j'ai adoré toute cette palette de couleurs la nuit (parasités habituellement par l'ajout de lumières d'appoint pour apporter plus de luminosité aux scènes).
Donc Cameron ne souhaite pas utiliser le HFR à "outrance" ? Soit ! C'est son choix. Chaque spectateur appréciera - ou pas ! - sa démarche en salle. D'autre part, et sans remettre en cause ses qualités d'excellent technicien, il n'est pas toujours un bon prophète. Il y a 10 ans, lorsqu'il a sorti Avatar, il jurait que la 3D était l'avenir du cinéma. Or, en 2019, le constat est pour l'instant très contrasté. En termes de quantité, après une explosion du nombre de films en 3D, beaucoup de spectateurs - et de producteurs ! - en reviennent. Un perte d'intérêt pour le procédé se fait clairement sentir, en cause la qualité au mieux moyenne, au pire médiocre, de cette technologie sur le rendu final. La faute à des conversions bâclées, des projecteurs pas assez lumineux combinés à des lunettes bas de gamme, et vraisemblablement un problème de cadence par oeil (24 images/sec, est-ce suffisant ?) aboutit quasi systématiquement à une bonne migraine en sortie de séance ! Quelques exceptions viendront cependant contredire mon propos (Gravity, L'Odyssée de Pi, Pacific Rim...), mais tout ça pour dire que Cameron est encore loin d'avoir amorcé une véritable "révolution" en 2009 avec Avatar.
Pour revenir à l'idée initiale de "débat", je dirais qu'il est plus intéressant de le placer non pas sur le point de vue des réalisateurs, mais plutôt sur le ressenti des spectateurs. Chacun peut alors débattre sur "j'ai préféré tel film, car j'ai trouvé cette technologie plus immersive" ou sur "Gemini Man a un rendu de démo d'écran OLED à la Fnac" ! Pour ce qui est de mon avis (si on me le demande, sait-on jamais ?), je suis resté hermétique à Avatar car, justement, et malgré une technologie dingue, j'ai eu le sentiment d'un film d'animation avec des fonds verts à gogo ou absolument rien n'était vrai. A l'inverse, j'ai trouvé le HFR très convaincant sur Gemini Man (après un léger temps d'adaptation toutefois) et ce sur bon nombre de scènes, avec une gestion de la 3D et de la profondeur de champ assez folle (détail anodin : rien que le modelé de la lunette du fusil de précision sur la première scène m'avait scotché !).
Si je devais conclure mon propos afin qu'il soit plus clair, c'est que chacun a raison, les réas comme les spectateurs. On peut être sensible à toutes sortes de procédés, technologies ou bien à un seul (ou à rien, mais dans ce cas il faudrait se poser la question de savoir si on aime vraiment le cinéma !). Mais ce qu'on doit avant tout se demander pour savoir si c'est utile ou pas (et les réas font, je pense, cette démarche) c'est : "cela a-t-il rendu le film, l'expérience, plus immersive, plus vivante POUR MOI ?

alex
25/10/2019 à 10:50

Il a absolument raison, les ourils et la technologie ne font pas un film à eux seuls, ça doit servir une histoire et non pas représenter le seul interet du film qui sans cette particularité serait d'une banalité folle ...

Grift
25/10/2019 à 10:25

@hasgarn : merci pour votre ajout au sujet.
mais ca ne répond pas a tout.

Si on se dit que c'est a la sorti du logiciel ca veut dire qu'on se retrouve avec soit :
- Un film en 24 image par seconde et on pert l'intérêt du tournage en 120 i/s sur les "bonne scène". Bon ok pourquoi pas.
- Soit un film en 120/i par seconde avec ptet 10% du film qui exploite la technologie. Et donc on mise sur le fait que les salles vont s'équiper pour des films qui utilisent que très partiellement le truc ? Ca me parait difficile à faire "prendre" cette techno vu comme ça.

Quelque chose m'échappe dans ce que dit Cameron.

Madolic
25/10/2019 à 09:56

En même temps c'est totalement en raccord avec votre critique de Gemini Man @Ecranlarge
Vous aviez admis que le côté négatif était que le décor faisait carton pâte pendant les scènes plus banales.

captp
25/10/2019 à 07:44

Pour le coup quand Cameron parle technique je l'écoute avec attention.

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