Les Ardennes : le polar, ce genre français que la Belgique réveille

Sophie Sthul | 29 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Sophie Sthul | 29 mars 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Les Ardennes fait partie de nos récents coups de cœur. Ce mélange de film noir et de thriller nous a tapé dans l’œil et illustre à merveille l’emprise actuelle de la Belgique sur un genre bien de chez nous : le polar.

C’est qu’en matière de film noir, de thriller et autres mésaventures de gangster, l’Hexagone n’a pas à rougir. Historiquement, le polar est même un produit du terroir. De Melville à lautner en passant par Miller, Verneuil, Chabrol, Corneau, Clouzeau, Boisset… On ne compte plus les metteurs en scènes qui ont fait du film noir tricolore un genre parmi les plus importants du médium.

Mais aujourd’hui à bien y regarder, le polar Belge semble sacrément plus vivace. Comment et pourquoi la Belgique est-elle parvenue à devenir le nouvel El Dorado du polar ?

 

Robin Pront

Des univers à part

Non pas que le genre soit porté disparu en France, mais on doit bien se rendre à l’évidence, souvent, nous nous retrouvons face à des œuvres qui se cherchent, et souffrent de certains tropismes embarrassants. Le plus souvent situés à Paris, fréquemment sous inspiration de thrillers anglo-saxon, il n’est pas évident de définir les spécificités du noir franchouille.

Du côté des Belges en revanche, on note une appropriation des espaces et d’un territoire qui force l’admiration. Dans les Ardennes, si bien sûr l’héritage des Coen, d’un Tarantino ou d’un Winding Refn se fait sentir, c’est avant tout la nature terrible où évoluent les personnages qui imprègne le récit.

Il en allait de même dans Les Premiers, Les Derniers de Bouli Lanners, ou encore dans La Raison du plus Faible de Lucas Belvaux, qui se réappropriait un décor urbain sinistré.

 

Robin Pront

Des personnages acérés

On tremble encore à la simple évocation du héros tourmenté et gonflé de stéroïdes de Bullhead. De même, Les Ardennes nous offre une galerie de personnages dont les caractères rêches impriment immédiatement la mémoire des spectateurs. Descente aux enfers d’un trio amoureux composé de deux frères confis dans la frustration et la rage, liés par une femme qui aspire à échapper à une existence promise à la catastrophe.

C’est ce sens, non pas nécessairement de l’authenticité, mais du léger décalage, de la note dissonante qui hisse un anti-héros hors de sa simple condition de looser/petite frappe, qui confère au polar belge sa densité humaine.

 

Robin Pront

Des scénarios qui détonnent

Des mercenaires envoyés sur la piste d’un téléphone portable égaré, un tueur qui perd la mémoire, un jeune homme émasculé qui se retranche derrière un corps qu’il sculpte jusqu’à devenir monstrueux… Le polar Belge est sorti depuis longtemps de l’opposition flics/voleurs.

C’est un cinéma des désenchantés, le terrain de jeu sanglant des damnés de la Terre. A ce jeu-là, Les Ardennes fait fort en évoquant tour à tour une tragédie intimiste, un drame social, avant de dévoiler sa nature de film de genre plus tardivement, avec une noirceur absolue.

Encore une fois, c’est ici une mécanique de précision qui se joue, et permet à la Belgique de redéfinir presque à elle seule le polar.

Elle l’amène ainsi sur un terrain souvent moins urbain, peu verbeux, dans une ruralité dont les habitants semblent sur le point d’exploser. On serait tenté d’écrire que ce n’est pas demain la veille que la France nous ravira les mirettes de la même manière, mais comme Eric Valette tourne actuellement son thriller rural dans nos vertes contrées, peut-être l’antidote arrivera-t-il plus tôt que prévu.

Robin Pront

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commentaires
stivostine
30/03/2016 à 15:30

Pareil que Yacbond,super decu,

Yacbond
29/03/2016 à 20:04

Film très moyen, chiant. En voyant les screens shots, ça m'a donné envie. Mais au final, y'a une ou deux idées dans tout le film, le reste c'est du remplissage. Ca veut ressembler à Animal Kingdom ou James Grey, mais ça n'en a pas le talent.

Grift
29/03/2016 à 19:21

Merci Ecran large.
Depuis quelques jours j'ai l'impression que je retrouve le site que j'aimais beaucoup :)
Ca fait plaisir. Merci merci.