Sylvester Stallone, un mythe hollywoodien

David Da Silva | 16 août 2010
David Da Silva | 16 août 2010

Sylvester Stallone (Sly pour les intimes) revient le 18 août au cinéma avec le film très attendu Expendables : unité d’élite. C’est l’occasion de s’attarder sur la carrière chaotique d’une légende du cinéma, d’un véritable mythe. De l’Oscar du meilleur film à ses débuts jusqu’à des bides retentissants (et un statut de paria à Hollywood), la filmographie de l’étalon italien retrace assez bien la complexité d’un véritable artiste (acteur, scénariste, réalisateur, peintre…). Très croyant, la figure christique est omniprésente dans son cinéma et ses personnages seront toujours en quête de rédemption (Rocky, Rambo, Over the top, Assassins, L’Expert, Haute sécurité, Cliffhanger…).


Né le 6 juillet 1946 dans un quartier pauvre de New-York, la vie du petit Sly commence difficilement car il souffre d’une légère paralysie faciale (et cela lui vaudra beaucoup de moqueries de ses camarades). Peu passionné par les études, Stallone quitte assez tôt le lycée pour prendre des cours d’art dramatique. Il multiplie les auditions, écrit des scénarios… Mais la vie est tellement difficile qu’il décide de tourner dans un film érotique pour gagner un peu d’argent (L’Etalon italien). Après des petits rôles dans des séries B (La course de la mort de l’An 2000 ou Capone), le jeune Sly écrit un scénario sur un boxeur minable qui va montrer au monde son grand courage (c’est le combat de boxe qui oppose Chuck Wepner à Mohammed Ali qui a inspiré cette histoire). Un budget modeste et un tournage rapide ne laissent pas imaginer le triomphe du Rocky de John G. Avildsen. Trois Oscars, dont celui du meilleur film, et c’est Stallone qui met KO Hollywood (la critique américaine le compare déjà à Al Pacino). Sly analyse ainsi le triomphe du film : « Le succès du premier Rocky s’explique sans doute par l’époque de sa sortie. L’Amérique d’après l’affaire Watergate avait besoin d’un héros, d’une figure bénéficiant d’un sens éthique très développé. Jamais l’Amérique n’a pu oublier un tel personnage car sa soif d’un tel héros est intarissable. On aimera toujours les gens honnêtes surmontant les obstacles et les idées reçues. Fort de ces principes, Rocky est devenu un exemple sur lequel s’appuyer. Il était, est, et restera un modèle, à l’écran comme dans la vie quotidienne ». 

L’acteur enchaine les tournages comme acteur (F.I.S.T. de Norman Jewison) mais aussi comme réalisateur (son premier film La taverne de l’enfer est très autobiographique). Stallone essaie de varier les genres (le polar avec Les faucons de la nuit ou le drame avec A nous la victoire) et le succès mondial de Rocky II confirme l’énorme popularité de l’acteur. Après Rocky Balboa, Sly ajoute un autre rôle culte à sa filmographie avec Rambo de Ted Kotcheff. John Rambo, le vétéran du Vietnam, devient le martyr d’une petite ville américaine : « Rambo est issu du versant noir du subconscient. Il est le bras vengeur de ce que je considère comme une éthique dans la vie : le soldat patriotique ». L’acteur a souvent déclaré qu’incarner Rocky et Rambo lui a permis de représenter les deux facettes de l’humanité (l’Eros et le Thanatos) : « Je n'ai jamais rien vu de tel. Il y a d'une part un citadin pas très futé, et d'autre part un animal sauvage...».

 Le comédien choisit la facilité, il va s’enfermer dans les séquelles de ses grands succès (Rocky III, IV et Rambo II, III) et il reconnait lui-même aujourd’hui son erreur, Catalogué action star, l’acteur aura beaucoup de mal à sortir de cette image. Totalement mégalo, au sommet de la gloire, l’acteur est connu pour mener la vie dure à ses réalisateurs : il renvoie Gary Nelson du tournage des Faucons de la nuit, Russell Mulcahy de Rambo III, Andrei Konchalovsky de Tango et Cash et John G. Avildsen de Rocky V… Il est amusant de noter que le réalisateur John Flynn a exigé que Stallone le laisse tranquille sur le plateau de Haute sécurité. L’acteur James Woods (qui devait être la vedette du film initialement) a joué l’intermédiaire : « James Woods m‘avait confié que Stallone ne désirait en rien se consacrer de près ou de loin à la mise en scène mais simplement jouer comme autrefois » explique John Flynn. Stallone reconnait aujourd’hui son erreur, ses rapports de forces avec les cinéastes l’ont empêché de travailler avec de très grands réalisateurs (sa collaboration avec William Friedkin pour les projets avortés  Gangster et The executioner s’est mal terminée).

 

 

Stallone va connaitre de gros échecs (Cobra, Over the top, Haute sécurité ou Rocky V sont des bides retentissants) et le public semble lui préférer son rival Arnold Schwarzenegger (qui arrive à alterner les films d’action et les comédies avec le même succès). Sly va également s’essayer à la comédie (L’Embrouille est dans le sac et Arrête ou ma mère va tirer) : « A l’époque où je faisais Rambo et Cobra, quand quelqu’un se faisait descendre dans la rue, les gens se référaient à mes films. Je me suis aperçu que le public ne comprenait pas du tout les intentions initiales de Rambo, qu’il n’en retenait que la violence. Maintenant, je me rends compte qu’il est nécessaire de prendre une certaine distance avec ce type de personnage. C’est pourquoi j’ai décidé de me consacrer un an ou deux à la comédie. Au cinéma, je préfère d’ailleurs la comédie… ». Mais l’échec est toujours au rendez-vous. Il décide de revenir au film d’action et il s’associe avec le réalisateur finlandais Renny Harlin pour Cliffhanger (qui obtient un gros succès commercial) : « Gabe Walker aspire à la rédemption. Il trouve au fond de lui-même les ressources nécessaires à son propre respect » affirme le comédien.

Sly pense que sa carrière redémarre et il multiplie les tournages : Demolition Man, L’Expert, Assassins, Judge Dredd ou Daylight sont tous des échecs ou des modestes succès au box-office malgré des budgets assez colossaux (80 millions de dollars pour Daylight). La star des années 80 n’arrive pas à s’imposer dans les années 90. Pour retrouver un peu d’intégrité artistique, il partage l’affiche du polar Copland de James Mangold avec Robert De Niro, Harvey Keitel et Ray Liotta. L’acteur livre une prestation formidable (il prend 25 kilos pour le rôle) : « Pour moi, le rôle de Freddy Heflin constitue un retour aux sources. Comme Rocky et Rambo à leurs débuts, Freddy Heflin a grandi au bas de l’échelle. Comme eux, il a aussi grandi dans la douleur, le chagrin et les regrets ».

Après les bides de Driven, Get Carter, Mafia love et surtout D-Tox (qui ne sort pas en salles aux Etats-Unis), Stallone se consacre à des seconds rôles (Spy Kids 3, Les maitres du jeu et même une apparition dans Taxi 3 !) mais il est ostracisé à Hollywood, considéré comme un has-been. Toutefois, l’italo-américain a beaucoup de ressources et il décide de reprendre sa carrière en main (il décide de réaliser lui-même les films qu’il interprète, à la manière d’un Clint Eastwood). A plus de 60 ans, il incarne une sixième fois Rocky dans Rocky Balboa. Le film est un grand succès critique et public : « Rocky est quelque chose de différent et je voulais terminer sa carrière sur une note « juste ». Je crois l’avoir trouvée. Il m’a juste fallu toutes ces années pour la composer… ». John Rambo, le quatrième volet très violent des aventures de l’autre personnage fétiche de Sly, confirme que l’acteur-réalisateur possède un réel talent : "Tout ce que vous voyez dans le film, j'ai vu pire dans la réalité, voilà tout. J'ai essayé de faire un film aussi réaliste que possible, pas un simple film d'action. Je voulais quelque chose de dérangeant, de très dérangeant. Et je suis heureux de la façon dont ça s'est passé ".

Ces deux succès permettent à Stallone d’enchainer sur le projet ambitieux Expendables où il réunit une flopée de stars de l’action (Jet Li, Dolph Lundgren, Jason Statham, Mickey Rourke, Bruce Willis, Arnold Schwarzenegger…). Un film vraiment attendu comme les projets de la star (un film sur le poète Allan Edgar Poe, le gangster John Gotti ou sur le génocide arménien). Stallone, un mythe hollywoodien qui n’a pas dit son dernier mot.

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