Top science-fiction n°15 : La Guerre des étoiles

Jean-Noël Nicolau | 1 décembre 2009
Jean-Noël Nicolau | 1 décembre 2009

Pour lancer le compte à rebours avant l'évènement Avatar qui sortira sur nos écrans le 16 décembre prochain, la rédaction d'Ecran Large a remis le bleu de chauffe et a recommencé à se plonger dans une classement impossible. Après vous avoir proposé notre classement des 31 meilleurs films d'horreur dans l'histoire du cinéma, nous avons opté pour l'univers de la science-fiction et ainsi d'élire ce qui sont pour nous les 31 meilleurs films du genre. La règle de ne pas avoir plus d'un film par cinéaste ne s'applique pas ici (c'était au dessus de nos forces pour certains réalisateurs). La seule règle que l'on a décidé d'appliquer (et qui sera critiquable comme beaucoup de règles) : un film qui était déjà dans notre classement de l'horreur ne pouvait pas réapparaître dans ce nouveau classement.  14 membres de la rédaction ont donc été invités à envoyer leur liste de leurs 70 films préférés. A partir de ces listes, on n'a gardé que les films cités plusieurs fois par chacun d'entre nous. On a alors resoumis la liste finale à un vote pour obtenir le classement final que nous allons vous faire découvrir quotidiennement jusqu'au 16 décembre 2009 qui révèlera le numéro 1 de la rédaction. Un éclairage par jour durant 31 jours sur des incontournables du cinéma de science-fiction.  Et en guest star pour commenter nos choix, on retrouve Vincenzo Natali, le réalisateur de Cube, Cypher, Nothing et du très attendu Splice, étant un parfait ambassadeur du futur de la science-fiction au cinéma.

 

 

15 - La Guerre des étoiles (1977) de George Lucas

 

 

Vincenzo Natali : Pour moi c'est le plus important de tous. C'est le film qui a débuté ma passion pour le cinéma. J'avais huit ans quand je l'ai découvert et cette expérience est ce qui s'est rapproché le plus d'une révélation religieuse. Evidemment, je n'étais pas le seul dans ce cas. Star Wars est entré profondément dans l'inconscient collectif avec ses thématiques intemporelles. Cela s'est produit à un moment où l'Amerique voulait échapper au cynisme né de la guerre du Viet Nam et du Watergate. Dès que je croise une personne de ma génération, peu importe son origine, nous partageons le même amour pour Star Wars. C'est comme si la Force, un pouvoir invisible, nous réunissait. Je serais toujours reconnaissant envers George Lucas, même s'il a commis ces trois horribles préquelles. Un nouvel espoir demeure en mon coeur comme la première et la meilleure expérience de Star Wars.

Ilan Ferry :   

Une épopée galactique magique et trépidante.

Laurent Pécha :

On ne fait plus et on ne voit plus le cinéma de la même façon après Star Wars. Mythique !

Jean-Noël Nicolau :

Tout commença ici. A revoir avec les yeux d'un gosse. Un émerveillement.

Sandy Gillet :

Impossible d'être objectif quand on a découvert Star Wars à 7 ans. Impossible non plus de nier que pour beaucoup c'est avec ce film que tout a commencé...

 

 

 

La Guerre des étoiles, dans les années 80, ce n'était pas encore Star Wars. Mais c'était le plus grand film du monde, sous sa forme de trilogie dont on ne pouvait séparer aucun des éléments. Etant môme, l'esprit critique était annihilé par ces images jamais vues ailleurs. Il semblait que l'on avait tous découverts le cinéma à effets spéciaux avec cet épisode IV et son attaque de L'Étoile Noire. La magie de ce temps était composée de notion de Force, de Jedi, de côté obscur. On rêvait de droïdes et de princesse avec des macarons sur la tête. Et surtout, on rêvait d'avoir un sabre laser à la ceinture, l'objet le plus cool de tout l'univers.

Avec La Guerre des étoiles, un monde nouveau, inédit, inconnu, riche de millions de possibilités se dévoilait. Pour sûr, il valait mieux découvrir tout cela étant môme, avec l'âge adulte le regard devient plus acerbe. Mais la première trilogie finit toujours par nous cueillir à la force de la nostalgie. Il s'en dégage une telle innocence, une telle naïveté, que l'attendrissement est inévitable. On se plaît à revivre les émois que nous ont parcouru à la première apparition de Dark Vador ou lors de l'horrible suspens dans les égouts de l'Etoile Noire.

 

 

 

La légende a depuis longtemps brouillé les pistes remontant vers la genèse de Star Wars. Parfois Lucas affirme avoir eu l'idée de cet univers après le tournage de son premier long-métrage, THX 1138, en 1971, à d'autres occasions il estime y avoir pensé bien avant. On sait qu'à l'origine le réalisateur souhaitait mettre en scène sa version de Flash Gordon, les comics et serials bien connus. Il recula devant le prix des droits de l'œuvre, beaucoup trop onéreux à l'époque.

Dès les premières phases d'écriture, l'essentiel de ce qui allait composer les deux trilogies fut posé. Notamment des personnages qui n'apparaîtront que bien plus tard (Mace Windu étant le plus célèbre d'entre eux). Cependant le premier synopsis, nommé Le Journal des Whills n'entretient que peu de rapport avec les scénarios que nous connaissons. Vexé qu'on lui ait répondu que son histoire était trop difficile à comprendre, Lucas repris tout à zéro en s'inspirant grandement de La Forteresse cachée d'Akira Kurosawa. A tel point que le réalisateur envisagea un moment d'acquérir les droits du film japonais.

 

 

 

D'abord débuté pour le compte de la United Artists puis d'Universal, le projet Star Wars atterrit finalement chez la 20th Century Fox en 1973. Le premier scénario complet arriva en mai 1974, cette version réintroduisit les concepts de Jedi et de Sith, absents du précédent script. Han Solo y est alors un énorme monstre vert et Chewbacca est créé à partir du chien de Lucas, le fameux Indiana. Ce n'est qu'en août 1975 que le scénario nommé The Star Wars : From the adventures of Luke Starkiller proposa un déroulement très proche de la version définitive.

Après le succès d'American Graffiti, Lucas obtint à la fois les droits sur les suites de Star Wars en cas de succès et sur les produits dérivés. Inutile de préciser que ce fut un moment clef... La Fox offrit alors un budget de 8 millions de dollars, qui fut dépassé au point d'atteindre les 11 millions, ce qui créa beaucoup de tensions entre le réalisateur et les producteurs.

 

 

 

C'est en 1975 que George Lucas fonda Industrial Light & Magic (ILM) qui allait devenir la plus grande maison de production d'effets spéciaux de l'histoire du cinéma. Le premier travail d'ILM fut donc Star Wars. Avec la technique de la « motion control photography » toutes les scènes dans l'espace furent conçues grâce à des maquettes de vaisseaux fixes. C'est la caméra qui bouge autour des objets et non l'inverse.

Le casting de Star Wars s'effectua en parallèle de celui de Carrie de Brian De Palma. La plupart des comédiens participèrent ainsi aux deux sélections. Ainsi, Carrie Fisher et Sissy Spacek furent en concurrence aussi bien pour le rôle de Léia que pour celui de Carrie. Luke Skywalker aurait pu être interprété par William Katt, qui obtint finalement le premier rôle masculin du film de De Palma. Lucas souhaitait privilégier les jeunes acteurs inconnus, c'est pour cela qu'il mit d'abord de côté Harrison Ford avec lequel il avait déjà travaillé pour American Graffiti. Cependant Ford participa au casting en donnant la réplique aux autres comédiens. Impressionné, Lucas le choisit finalement dans le rôle de Han Solo, à la place de Kurt Russell, Nick Nolte, Christopher Walken et Billy Dee Williams (qui eût sa revanche plus tard). A noter que Jodie Foster postula aussi pour incarner la princesse Léia.

 

 

 

Le tournage débuta en mars 1976 mais fit immédiatement face à de nombreux incidents. Entre les problèmes techniques, une tempête en plein désert Tunisien et les accidents de costume, le film commença à prendre du retard. Plus tard, ce fut la majeure partie de l'équipe qui se désintéressa de l'œuvre en cours, la considérant comme un « film pour gosses » et se moquant du travail à effectuer. Même Harrisson Ford émis des réserves auprès de son ami George. « Tu peux rédiger ces dialogues là, lui expliqua le futur Indiana Jones, mais tu ne peux certainement pas les dire. »

Lucas devint de plus en plus aigri sur le tournage, se disputant avec le directeur de la photographie, Gilbert Taylor, puis se plaignant de tout et n'importe quoi. Il ne parlait presque plus aux acteurs, ne leur donnant quasiment aucune indication sur la manière de jouer. Malgré le stress de plus en plus handicapant, Lucas parvint à achever le film dans les temps. Néanmoins l'expérience dégoûta le réalisateur de se relancer dans une telle aventure... jusqu'à La Menace fantôme !

 

 

 

La sortie du film fut repoussée de Noël 1976 à l'été 1977, ce qui laisse le temps à Lucas de travailler sur plusieurs montages différents. La richesse des effets spéciaux était aussi inédite et leur création fut effectuée dans une certaine panique. Pourtant de nombreux grands noms firent leurs premières armes ici, dont Ben Burtt, devenu depuis une légende du design sonore.

Sur les conseils de Steven Spielberg, le seul ami de Lucas à croire en Star Wars du début à la fin, John Williams fut engagé pour créer la musique du film. La bande-originale mythique fut enregistrée en 12 jours avec le London Symphony Orchestra. Elle devint l'un des plus populaires du 7e art, jusqu'à être élue meilleure BO de l'histoire du cinéma par l'American Film Institute. Faites un test, écoutez la fanfare de la 20th Century Fox, vous attendrez toujours le thème de Star Wars après !

 

 

 

Lors de sa sortie, Star Wars devint un succès immédiat. Les revenus de la Fox doublèrent, passant de 37 millions de dollars à 79 millions en 1977. Le triomphe fut international, renforcé par une abondance inédite de produits dérivés. En ajustant les chiffres du box-office, Star Wars est actuellement le second plus gros succès de tous les temps aux Etats-Unis, derrière Autant en emporte le vent.

Le film fut d'abord présenté sous le nom de La Guerre des étoiles, sans sous-titre. Ce n'est qu'après la sortie de L'Empire contre-attaque que les nouvelles versions virent l'apparition de la précision « Episode IV, Un nouvel espoir ». En 1997, Lucas proposa une « édition spéciale » du film, ajoutant une scène avec Jabba The Hutt et Han Solo, modernisant les effets spéciaux et altérant ici et là l'expérience d'origine. La modification la plus polémique demeurant le fait que c'est Greedo qui tire en premier lors de sa confrontation avec Han, alors que dans la version d'origine, c'est l'inverse, rendant le personnage plus ambigu.

 

 

 

Le culte débuta immédiatement, vampirisant à toute vitesse la secte des adorateurs de Star Trek et faisant entrer définitivement le cinéma dans une nouvelle ère : celle des blockbusters. Impardonnable pour certains, George Lucas s'enferma dans sa tour d'ivoire, donnant toutes les apparences de capitaliser de manière fort cynique sur sa franchise. Le rôle du méchant lui allait comme un gant et jusqu'à aujourd'hui, tout ce qui va mal dans le cinéma Hollywoodien semble lui être imputé (alors que c'est Spielberg tout seul comme un grand qui produit les Transformers).

Le culte délirant des fans, la polémique entourant la seconde trilogie et les innombrables thèses et antithèses qui ont succédé à La Guerre des étoiles ont profondément modifié notre perception du film. Pourtant, et c'est sans doute là le propre des classiques, il est possible de faire abstraction de tous les a priori et de toutes les critiques pour replonger dans ce qui demeure le mythique (et réussi ?) des space operas de l'histoire du cinéma.

 

 

 

Il y a un avant et un après Star Wars, la façon de concevoir des films à Hollywood ne fut plus jamais la même. Cela annonçait aussi la fin du règne des « auteurs » durant les années 70 et le début de l'hégémonie du cinéma de divertissement, qui dure encore aujourd'hui. Avec sa mythologie inoubliable, ses personnages tous brillamment développés et attachants, son sens du rythme et de l'imaginaire, La Guerre des étoiles s'impose comme l'une des œuvres les plus marquantes du 7e art.

 

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