Cannes wars – Épisode 6

Thomas Douineau | 17 mai 2005
Thomas Douineau | 17 mai 2005

Ce lundi, deux grandes pointures, et aussi deux habitués du festival, sont venus présenter leur dernier film : Lars Von Trier et David Cronenberg. Avec Manderlay, le réalisateur fondateur du dogme signe le deuxième film de sa trilogie américaine. Le film est une suite directe de Dogville et reprend le film là où nous avions laissé Grace (Nicole Kidman) et son père (James Caan). Cette fois Grace est interprétée par Bryce Dallas Howard (révélée par Le Village de M.Night Shayamalan) et son père, par Willem Dafoe. Il s'arrête dans la plantation de Mandarlay où Mam (Lauren Bacall) traite encore les noirs comme des esclaves. À la mort de Mam, Grace décide de s'occuper de la plantation et de rendre la liberté aux esclaves pour le meilleur comme pour le pire.

Manderlay ne bénéficie pas comme de Dogville de l'effet de surprise en découvrant une ville sans décors avec des maisons tracées à la craie. Lars Von Trier essaie d'aller encore plus loin, notamment en montrant des plantations juste signifiées par des lettres, des portes invisibles qu'on ouvre et qu'on ferme. Il se permet de superbes zooms arrières qui montrent la ville en plan d'ensemble et en plongée. Une démarche artistique qui peut certes rebuter mais qui permet de capter toute l'intensité du jeu des acteurs. La caméra est toujours tremblotante et pourtant en plan fixe tandis que le montage n'arrête pas d'expérimenter les faux raccords. La fille de Ron Howard joue remarquablement bien et confirme tout le bien que l'on pensait d'elle, épaulée par Danny Glover et Willem Dafoe, eux aussi convaincants, tandis que le rôle de Chloé Sevigny ne se résume qu'à de la figuration (a t-elle été victime de scènes coupées ?). Seul problème, malgré son talent, Bryce Dallas Howard n'est pas encore assez mûre pour transcender son jeu alors que Nicole Kidman nous avait époustouflé. Si, dans Dogville, Lars Von Trier était allé sacrément loin, jusqu'à traiter littéralement l'une des plus grandes stars hollywoodiennes comme une chienne, le cinéaste se contente ici de signer un pamphlet sur l'esclavage assez ambigu qui se termine par des photos de noirs victimes de toutes les atrocités sur la chanson de David Bowie Young americans. Le réalisateur venu présenter son film avec Bryce Dallas Howard, Danny Glover, Willem Dafoe et William Hurt a été longuement applaudi au cours d'une standing ovation.

Le film le plus étonnant de cette journée est sans doute celui de David Cronenberg qui, avec son History of violence, nous narre l'histoire d'un homme père de famille (Viggo Mortensen) qui après s'être défendu contre des agresseurs va être rattrapé par son passé. Le film du réalisateur de Crash traite de ses habituelles préoccupations : la violence et le sexe mais sur un mode totalement nouveau et bien plus académique. Car History of violence est bien un vrai film de genre, une efficace série B. La réalisation est très sobre et se permet notamment un splendide plan séquence d'ouverture. Si le film fonctionne très bien dans sa première partie, on regrettera que la deuxième ne soit que survolée. Assez étonnant de la part d'un réalisateur qui nous a habitué à aller très loin dans sa réflexion sur la violence. S'il nous gratifie de scènes assez gores, on aurait pu croire que Cronenberg puisse pousser plus loin sa réflexion.

Mr Brown

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