L'Ange de la vengeance : men are trash, le film

Mathieu Jaborska | 26 novembre 2022
Mathieu Jaborska | 26 novembre 2022

L'impétueux Abel Ferrara des débuts s'attaque au rape and revenge dans Ms .45, a.k.a L'Ange de la vengeance. Mais pas question pour lui de flatter les bas-instincts masculins.

Un loubard armé d'une quelconque batte, acculé. Deux grandes jambes galbées, à peine vêtues d'un léger porte-jarretelles et de chaussures à talons visiblement inconfortables. À leur sommet, une nuisette ouverte aux 4 vents. L'affiche de Ms .45, retitré L'Ange de la vengeance chez nous, est caractéristique du cinéma d'exploitation de l'époque. Sa catchline, "It will never happen again" prend en français une tournure encore plus racoleuse : "Aucun mâle ne sera épargné".

Qui pénétrait dans la salle en quête de rape and revenge lubrique risquait d'en sortir déçu, voire même un peu perturbé. Car en bon pirate du cinéma underground et crapoteux new-yorkais, Abel Ferrara n'a pas hésité à prendre directement à parti son public le moins recommandable pour lui coller le nez dans ses propres déjections. Et plus de quarante ans après, elles empestent encore.

 

L'Ange de la vengeance : photo, Zoë LundWarrior nun, l'originale

 

Rapts et revanches

Tout est dans le titre ! Le bien nommé "rape and revenge" est un sous-genre du cinéma d'exploitation qui a souvent suscité débats et réappropriations. Avancer qu'il a toujours eu pour objectif de nourrir les fantasmes du public des salles de la 42e rue, c'est ignorer qu'il est plus ou moins né de La Dernière Maison sur la gauche et du scandale qu'il a provoqué. Or, le film de Wes Craven adopte un style très réaliste et s'attache surtout à briser en mille morceaux les repères de la famille bourgeoise américaine.

C'est après, à cause de ses nombreux imitateurs, qu'il s'est développé au détriment du corps des femmes, éternelles victimes d'un cinéma qui ne leur était pas destiné. Le principe (une femme subit un viol, puis entreprend de se venger dans le sang) a vite fait office de prétexte pour servir les trois ingrédients principaux du cinoche d'exploitation : la nudité féminine, l'absence totale de consentement et la violence. Les exemples sont nombreux : I Spit on your Grave, Carnage, Raped by an Angel côté HK....

 

La Dernière maison sur la gauche : photoIt's only a movie, it's only a movie...

 

Au cours des années 2000, le genre a étonnamment survécu à la quasi-disparition du bis crado. D'abord dépossédé de ses icônes par des cinéastes nostalgiques (Quentin Tarantino), puis déconstruit complètement par des expérimentations narratives (Irréversible), il s'est même fait complètement retourner par des longs-métrages comme The NightingalePromising Young Woman, le méconnu, mais génial Violation ou, pour citer les plus bourrins, The Woman et Revenge. Son ambiguïté morale (tout dépend de la manière dont sont filmées les exactions) est désormais utilisée pour inverser complètement les rapports de force, parfois avec une radicalité jouissive.

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commentaires
Pat Rick
28/11/2022 à 14:34

Un des meilleurs films d'Able Ferrara.

Rorov94m
28/11/2022 à 09:39

Paradoxalement son meilleur film est un téléfilm avec Ken Walh (WISE GUY/UN FLIC DANS LA MAFIA) intitulé GLADIATOR.
Vigilante movie avec un lambda qui fait justice sur les routes avec un pick-up blindé...
Passé sur feu la 5 en 1988.

Rorov94m
28/11/2022 à 09:34

Sinon Ferrara est surestimer.
Arty-borderline-new yorkais-toxico sans filtres sociaux....bref une escroquerie intello.
Seuls THE KING OF NEW YORK, BODY SNATCHERS sont sympas à regarder.
Mais bon...il a LA carte...

Flash
26/11/2022 à 19:52

Ray Peterson@ j’étais ado quand je l’ai vu.
En effet, vaut mieux le prendre au second degré ( la scène avec la bonne)

Ray Peterson
26/11/2022 à 12:21

Pas mon Abel Ferrara préféré de cette période mais ça reste bien vénère. Et ce délire avec les nonnes qu'il reprendra en thématique dans le justement cité Bad Lieutenant, WTF?

@ Flash, Death Wish 2, un des plus grands souvenirs traumatiques de mon adolescence.
TOUS les potards sont à fond!!! La séquence avec la fille de Branson... Faut être accroché si tu le prends au 1er degré.....

Kyle Reese
26/11/2022 à 11:43

Excellent souvenir, avec une très belle actrice hors norme possédé par le rôle .
Quand #metoo prend les armes, ça fait mal.
Triste fin pour cette actrice poétesse morte à 37 ans d'une overdose qui avait co-écrit le terrible Bad Lieutenant.

Flash
26/11/2022 à 10:40

Un qui n’est pas piqué des hannetons dans ce style de film, c’est " Un justicier dans la ville 2 ".