De Paranormal Activity à Invisible Man : Blumhouse a t-il dérivé et abîmé le cinéma d'horreur ?

Mathieu Jaborska | 16 février 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Mathieu Jaborska | 16 février 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Une maison où tout lévite, une porte qui claque, une petite fille flippante, une ampoule qui pend au plafond... Vous aurez reconnu le logo Blumhouse.

 

BOOGEYMAN POP

Ce 26 février, Invisible Man, relecture moderne menée par Leigh Whannell du célèbre Universal Monster L'Homme invisible arrive en salles. Grâce à l’importance du personnage, au passif du studio vis-à-vis de ces figures iconiques, au CV de son réalisateur, à l’actualité du point de vue et tout simplement aux moyens investis, le film est probablement la production Blumhouse la plus attendue du moment. On a bien dit "du moment".

Le remake de L'Ile FantastiqueNightmare Islandest encore en salles, et pour l’instant, quatre autres longs-métrages sont également prévus pour cette année, dont American Nightmare 5Halloween Kills et Boogeyman PopTrois projets mine de rien assez éloignés même s’ils appartiennent au même genre. Voilà qui résume bien la production de la firme de Jason Blum ces dernières années.

 

photo, Elisabeth MossComplètement à la Moss

 

Celle-ci est désormais partout, ce qui signifie qu’elle squatte les salles bien sûr, mais aussi parfois d’obscurs sites de VOD ou même la cérémonie des Oscars. Face à des studios ultra-riches et généralistes ou des sociétés indépendantes limitées à un genre, elle fait tache, perdue entre ces deux extrêmes. En effet, Blumhouse ne s’est jamais limité à l’horreur. Néanmoins, ce style de production reste au cœur de son ADN. Depuis l’épopée délirante de la Cannon à Hollywood, peu de sociétés avaient autant réussi à s’incruster autant dans l’industrie. Et cette fois-ci, de bons films sont même au programme !

Reste qu’il y a à boire et à manger dans ce catalogue. Nightmare Island est officiellement un échec critique cuisant. Si, si, regardez sur l’affiche, c’est Skyrock qui en dit du bien ! Le cas Blum s’avère donc extrêmement intrigant. Pour parvenir à ce niveau en si peu de temps, il faut forcément tenir une formule, une recette de la série B rentable. Quelle est cette recette ? Quelles sont ses limites ? Pour comprendre, il est nécessaire de retracer la trajectoire de Blumhouse, des humbles débuts à l’explosion tous azimuts des années 2010.

 

photo, Lucy Hale, Austin StowellNightmare Island, un titre très bien trouvé

 

THE INVISIBLE MAN

Blumhouse, c’est avant tout un homme : Jason Blum. Après une petite carrière dans le joyeux monde de la distribution indépendante, notamment avec Arrow Releasing, pour qui il a avoué avoir acheté tout et n’importe quoi, tant que ce n'était pas cher, il s’est vu confier le rôle de chargé des acquisitions pour le gros studio Miramax, boite déjà très importante au niveau du cinéma d’horreur puisqu’elle est par exemple derrière les suites du cultissime Hellraiser ou d'Halloween. Un chargé d’acquisition est tenu de gérer les films et les franchises que la firme convoite ou possède. En d’autres termes, il est prié de donner sa chance à des projets potentiellement rentables.

C’est de là que vient une des plus grosses erreurs de sa vie professionnelle. Juste avant et pendant le festival de Sundance de 1999, un film microscopique produit pour à peine 60 000 petits dollars se cherche un acheteur. Blum, comme beaucoup d’autres, n’y voit pas un grand intérêt. Finalement, l’affaire est réglée au festival pour une somme dérisoire. Quelques mois plus tard, il sort en salles et amasse 248,6 millions de dollars dans le monde, devenant donc instantanément le film le plus rentable de tous les temps (en tout cas à l'époque) : Le Projet Blair Witch. Blum se souviendra de cette expérience désagréable, et ses patrons aussi. Dans un entretien accordé à Nightmare Magazine, il explique qu’il s’est bien fait réprimander pour son acte manqué.

En 2000, il crée Blumhouse et produit cinq films entre 2004 et 2008, The Fever de Carlo Gabriel NeroThe Darwin Awards de Finn TaylorGriffin et Phoenix de Ed StoneGraduation de Michael Mayer (oui oui) et Un mari de trop de Griffin Dunne, qui rapporte quand même 22,7 millions grâce à son casting constitué de Uma Thurman et Colin Firth. Rien de bien transcendant cependant. Mais sa rencontre avec Oren Peli en 2004 va être la clé du succès de la firme.

 

photoJason Blum ne Blair pas ce Projet

 

AMERICAN NIGHTMARE

En 2009, Blumhouse sort Paranormal Activity. Malin, le script s’inspire directement de Projet Blair Witch, lui collant les codes de la maison hantée. La recette : des comédiens à peine payés, d'interminables plans fixes sur des bourgeois américains endormis et des traces de farine sur le parquet, le tout emballé pour à peine 15 000 dollars, soit le budget jus d’orange de n’importe quelle production hollywoodienne qui se respecte. La promotion du film est particulièrement efficace.

Plutôt que de montrer le vide absolu qui caractérise les 1h26 de métrage, les bandes-annonces s'attardent plutôt sur les réactions de spectateurs particulièrement terrifiées par l’écran, en plus de spoiler grassement les quelques sursauts de l’intrigue. Grâce à Peli, Jason Blum tient sa revanche. Le film lui rapporte 193,3 millions de dollars au box-office américain, soit un retour sur investissement de 1 289 000 %, et remplace Blair Witch en tant que long-métrage le plus rentable de l’histoire.

Toute la formule Blumhouse des débuts découle de ce succès. Il faut que ce soit un high concept, c’est-à-dire un concept fort sur lequel vendre le titre (le found footage pas assumé), des cinéastes jeunes, déjà rôdés et plein d’idées, mais surtout un budget très restreint. Le producteur intraitable est ainsi devenu célèbre pour ne pas investir par principe plus de 1 million, 3 millions puis 5 millions dans un projet, suites exclues.

 

 

Sur ce modèle, il produit deux autres gros cartons, Insidious et American Nightmare.

Pour le premier, il fait confiance au débutant James Wan, remarqué avec Saw, également un modèle du "high concept, low budget, high profit". Les deux hommes étaient faits pour se rencontrer. Ce remake très sympathique au final jouissif de Poltergeist est réalisé pour la modique somme de 1,5 million de dollars. Il rapportera presque 100 millions. À partir de ce film, Wan lancera son propre univers régnant désormais sans partage sur le monde de l’horreur mainstream, la saga Conjuring. Blumhouse est bien à l’origine de tout.

Pour le deuxième, il mise tout sur un des plus gros concepts jamais développés : une fois par an, les américains organisent une « purge », une nuit où le crime devient légal pour officiellement baisser la criminalité, officieusement buter les criminels et les pauvres. L’idée est géniale, mais la formule Blum commence déjà à s’essouffler sur le plan artistique. Malgré le délire promis par le pitch, le long-métrage ne quitte jamais son huis clos et reste poli, voire maladroit dès qu'il lorgne sur la satire sociale. Qu’importe : produit pour 3 millions de dollars, il en rapportera 89,3 !

 

photo, Patrick WilsonConjuring premier du nom

 

Les trois franchises débutées avec fracas ont justement engendré un beau paquet de suites, toutes également très rentables. Entre 2010 et 2014, trois films et un spin-off de Paranormal Activity ont vu le jour, reprenant toujours l’exacte même formule avec succès, avec cependant un budget autrement plus cossu que l’œuvre originale, oscillants entre 3 et 5 millions. La saga met donc en scène les mouvements de draps les plus chers de l’histoire du cinéma. On déconseille le marathon.

Insidious aussi a eu le droit à sa suite avec par exemple un Chapitre 2 bien moins bien reçu par la critique. Encore une fois, la principale limite de la méthode Blum est apparue très vite. Pour tirer des suites d’un high concept, deux solutions s’offrent au producteur en quête de recettes : refaire exactement la même chose ou revenir au classique en ne conservant que la marque de la franchise. Paranormal Activity se situe dans le premier cas, Insidious dans le 2e. Une seule constante : ça continue à cartonner.

 

photoInsidiousWan more time

 

UPGRADE

Couronné nouveau roi de la série B, Jason Blum multiplie les projets, toujours sur le même principe. Si on ne compte pas la co-production Babymakers, comédie romantique détruite par la critique, Blumhouse est à l'origine de Sinister de Scott DerricksonThe Bay de Barry LevinsonDark Skies de Scott Stewart ou encore Plush de Catherine Hardwicke.

Sinister, peut-être la plus efficace des histoires de maison hantée produites par le studio avec son final ultra glauque, est un nouveau bingo. Le budget de 3 millions rapporte 82,5 millions au box-office. Dark Skies, tentative feignante de concilier Poltergeist et Rencontres du troisième type s’avère également largement rentable, pas assez cependant pour mériter une suite ("ouf", on nous chuchote dans l’oreillette). Avec un tel capital, la société est prête à quelques déconvenues, et heureusement pour elle. Les paris ne réussissent pas à tous les coups.

 

photo, Josh HamiltonNous après avoir vu Dark Skies

 

L’échec de The Bay est d’autant plus rageant que le produit final est l’exemple parfait de ce que Blumhouse pouvait produire de mieux à cette époque. Le long-métrage de Barry Levinson est bourré de gros concepts : une forme d’horreur graphique très particulière, un style dit « docu-fiction » assez différent des found footages qui pullulent alors dans les salles et surtout des effets visuels rares, mais très efficaces.

En traitant de cette épidémie parasitaire absolument dégoutante avec un recul documentaire, le cinéaste parvient à tirer le meilleur de ces concepts en créant une peur presque rétrospective. Un rapide passage obligatoire sur Google après la projection permet de confirmer que les fameux isopodes géants décimant la baie du Maryland sont bien réels… Le film ne rapporte que 1,5 million pour un budget de 2 millions. Plush, quant à lui, n’a presque pas été distribué et il est encore impossible de le voir en France sans passer par l’import.

En 2013, la firme fait également un vrai pari : accompagner la sortie du dernier film de Rob Zombie. Certes, le dieu du cinéma d’horreur vénère est au sommet de sa gloire après La Maison des 1000 mortsThe Devil's Rejects et ses remakes d’Halloween. Mais The Lords of Salem est clairement son œuvre la plus controversée, tordant progressivement la logique du récit pour se transformer en sorte de patchwork sale et arty de références bis.

L’objet a valu aux amateurs du genre des joutes pour le moins musclées. Fascinant, il n’aurait clairement pas pu exister sans la boite de Jason Blum, qui perd beaucoup d’argent sur le coup. En effet, le film rembourse à peine son budget de 1,5 million de dollars. Néanmoins, on pourrait presque considérer l’expérience comme un coup d’essai. Jason Blum a dit à Filmmaker magazine ne pas avoir une appétence particulière pour le genre, mais être attiré par le cinéma indépendant. Il va très vite le prouver.

 

photoUne des nombreuses images délirantes de The Lords of Salem

 

GRADUATION

Dès 2014, il est difficile de détailler tout ce que Blumhouse produit. La firme explose. Chaque année, elle est derrière entre 11 et 14 films. À partir de là, la deuxième formule Blum, bien moins assumée, apparait. Plutôt que de continuer avec ses quelques franchises très lucratives et souvent horrifiques, elle voit très grand et commence à produire un peu tout et n’importe quoi, à toutes les échelles. La règle du plafond de 5 millions ne change pas, mais le soin donné au développement de l’ensemble n’est plus tant au rendez-vous.

D’où vient le déclic ? On serait tenté de dire Whiplash. Lorsque Blumhouse permet à Damien Chazelle d’adapter son court-métrage, il s’éloigne drastiquement du cinéma d’horreur pour proposer une histoire très tendue, mais surtout très originale. Réalisé pour 3,3 millions, le résultat marche au-delà de leurs espérances. Non seulement il récolte 48,9 millions dans le monde, mais il incruste surtout le studio à la cérémonie des Oscars, où il remporte trois statuettes : meilleur acteur dans un second rôle pour J.K. Simmons, meilleur son et meilleur montage. Blum est lui carrément nommé pour l'Oscar du meilleur film, une expérience grisante.

Après La La Land et First Man et avant Babylon, Damien Chazielle est probablement actuellement le plus gros succès de l’écurie Blumhouse. Quant aux qualités de Whiplash, tout le monde les connait, et si le lecteur de ce texte n’a pas encore gouté à la tension psychologique archi-maitrisée du long-métrage, on lui conseille d'acheter tout de suite son DVD.

À partir de là, Blumhouse commence à convoiter des auteurs déjà reconnus plutôt que de se contenter de figures montantes. Ainsi, en 2015, il permet à Eli Roth de concrétiser ses fantasmes cannibalesques avec The Green Inferno, hommage gore à Cannibal Holocaust et satire de sale gosse du beau monde de l’activisme.

 

PhotoRegardez The Green Inferno, ça ne mange pas de pain

 

ASCENSION

Il permet aussi de sauver la carrière de M. Night Shyamalan, qui croule alors sous les bides après After Earth et Le Dernier Maître de l'airThe Visit est un petit found footage au concept fort anecdotique (des enfants se rendent compte que leurs grands-parents ne sont pas ce qu’ils paraissent), mais parfois efficace. Et peu importe le pitch, c’est surtout un retour aux sources pour un réalisateur lessivé par les majors et désireux de se reconnecter à son public.

En 2017, c’est chose faite. Split, autorisé à dépasser un peu les 5 millions après le carton de The Visit, réconcilie un paquet de cinéphiles avec le maître des twists et des doubles-sens. La trilogie qu’il forme désormais avec Glass (aussi une production Blumhouse) a beaucoup fait parler d’elle, souvent en bien. Shyamalan semble y développer à loisir ses idées sur la narration au cœur du divertissement, se risquant au tout scénaristique avec le dernier opus. Encore une fois, Blumhouse est à la manoeuvre, et il empoche gros au passage.

 

Photo James McAvoyJames McAvoy, partie intégrante de la réussite de Split

 

Évidemment, le symbole tout trouvé pour ces ambitions nouvelles, c’est le cas Jordan Peele. La star de Key & Peele, une série de sketchs diffusée à la télévision américaine, cherche à produire un film d’épouvante sociale. Autant dire que ce n’était pas gagné. Blumhouse relève le défi et son patron revient à la cérémonie des Oscars triomphant pour voir son poulain repartir avec la prestigieuse statuette du meilleur scénario original. Get Out est l’un des seuls films d’horreur à avoir jamais effleuré ne serait-ce que l’espoir d’une récompense pareille, ce qui en fait un vrai film historique et surtout un nouveau pur carton : 255,4 millions de dollars de recette pour 4,5 millions de dollars de budget.

Son second film, Us, est l’une des plus grosses sorties récentes made in Blumhouse, avec des recettes comparables pour un budget de 20 millions et une autre reconnaissance critique impressionnante. Parfois vraiment spectaculaire, très auteurisant et à la fois totalement identifié comme film d’épouvante dès sa sublime scène d’introduction, il s’agit tout de même d’un produit très original, une sorte d’anomalie hollywoodienne rendue possible par le décalage entre les méthodes empruntées au monde de la distribution fauchée et les ambitions orgueilleuses permises par le succès des Paranormal Activity et autres franchises aux œufs d’or.

 

photo, Lupita Nyong'oUs, une leçon de mise en scène

 

LOWRIDERS

Et pourtant, il s’agit de la face visible de l’iceberg. Loin des projecteurs, du strass, des paillettes et du champagne gratuit, Blumhouse devient officiellement un pur générateur de séries B dont l’existence même est motivée par le profit, emballées en vitesse par des techniciens dont la trombine orne les cibles de fléchettes des cinéphiles. Si les suites de American Nightmare ne s’en sortent pas si mal en sortant enfin du huis clos, doit-on mentionner 13 Sins, Ouija, Unfriended, Lazarus Effect, Ma, et Action ou vérité ?

La plupart de ces produits censés parler à un public jeune grâce à des narrations par l'écran et autres malédictions numériques sont des bides critiques. Loin des glorieux nanars fauchés produits par Roger Corman dans les années 1960 et 1970, ils sont plutôt des monuments d’ennuis aux intrigues aussi stupides que prévisibles. Avec les innombrables spin-offs remplis à ras bords de jumpscares éreintants du Conjuringverse, il s’agit des produits les plus détestables de l’industrie actuelle.

Les suites de franchises se suivent et se ressemblent également, entre une saga Insidious de moins en moins intéressante, une saga Paranormal Activity qui ne l’a jamais été et un Sinister 2 qui fait insulte à son modèle. Dans ce tas, on trouve même des anomalies totales, comme la version long-métrage de Jem et les Holograms, non-sens produit pour 5 millions, mais qui en rapporte moins de la moitié ! Beaucoup de ces productions n’arriveront heureusement jamais sur les terres sacrées de Dany Boon ou se cantonneront à une sortie vidéo limitée.

 

PhotoSinister 2, de sinistre mémoire

 

Au milieu de ce grand écart digne de Jean-Claude Van Damme himself, il y a la vraie richesse de Blumhouse, c’est-à-dire les seules réelles grosses séries B américaines actuelles. The Mirror, film d’épouvante super malin jouant sur différents niveaux de narration va notamment propulser Mike Flanagan (The Haunting of Hill House, c’est lui). La saga Happy Birthdead est avec Edge of Tomorrow l’une des meilleures utilisations de la boucle temporelle d’Un jour sans fin et sa simplicité assumée en fait un petit plaisir fort recommandable et finalement plutôt rare.

Enfin, Upgrade est peut-être l'une des plus grosses réussites du studio d’un point de vue artistique. Jamais pédant, super violent et mine de rien assez avant-gardiste dans la mise en scène de l’action, l’essai de Leigh Whannell (réalisateur de Invisible Man) évoque le meilleur de la SF fauchée des années 1990. Les fans de petits plaisirs coupables l’ont clairement vu comme une véritable bouffée d’air frais dans un monde ou les films du genre, à mi-chemin entre le bis ultra-fauché et le blockbuster boursoufflé, se comptent sur les doigts de la main bionique.

 

photoUpgrade et ses scènes d'action auto-guidées

 

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Le Blumhouse moderne est donc plus versatile et surtout moins régulier. La règle énoncée par le producteur n’a pas changé : la quasi-totalité de ses films coûte moins de 5 millions de dollars. Quand ce n’est pas le cas, c’est parce qu’il s’agit d’une suite… ou d’une co-production.

La firme joue désormais avec les grands et il lui est déjà arrivé plusieurs fois de s’associer avec de gros studios comme, par exemple, Miramax sur le dernier Halloween ou encore Universal sur Glass et Invisible Man. Blumhouse est une solution toute trouvée pour Universal. Depuis des années, la firme tente de mettre en place un Dark Universe capable de concurrencer Marvel avec des monstres classiques et des budgets énormes, sans succès. Désormais, elle réduit les coûts en confiant aux pros des petits budgets la tâche de concevoir un produit au rapport qualité-prix imbattable.

Après la sortie de chacune de ces productions débarquant en salles en grande pompe comme American Nightmare, on retrouve régulièrement des analyses traitant du scénario sous l’angle de la fameuse « méthode Blumhouse », référence de la série B d’horreur moderne. C’est un peu aller vite en besogne puisque le studio a quand même produit BlacKkKlansman, le dernier Spike Lee, reparti avec le Grand Prix du festival de Cannes2018 et un Oscar du meilleur scénario adapté ! L’horreur n’est plus tant au centre des préoccupations.

 

photo, Adam DriverAdam Driver, très drôle dans BlacKkKlansman

 

Elle est peut-être là, la limite de la formule. À force de manger à tous les râteliers, elle ne devient plus qu’un outil mécanique et plus un carcan permettant à de jeunes cinéastes de se développer.

Certes, Paranormal Activity et ses suites ne sont pas au goût de tout le monde, mais un certain soin était apporté à leur développement. Les « high concepts » en question avaient une vraie valeur artistique. Désormais, les vraies séries B produites par Blumhouse sont tout de même très souvent des produits génériques destinés à faire tourner la machine entre deux projets prestigieux ou deux co-productions de masse. D’ailleurs, plusieurs dizaines d’entre eux n’ont même pas eu les honneurs d’une sortie en France. Les bonnes surprises sont rares, mais rien que pour le plaisir de leur découverte, on ne se risquerait pas trop à bousculer toute cette organisation.

Ironiquement, le studio a explosé au début des années 2010, à une époque où le cinéma d’horreur était parasité par une vague de remakes indécents comme l’horrible Freddy, les griffes de la nuit. Beaucoup y voyaient un moyen pour le divertissement filmé de se recycler un petit peu. Et ils avaient raison. Mais aujourd’hui, Blumhouse est coupable de Black Christmas, remake high concept et PG-13 d’un slasher culte.

 

photo, Aleyse ShannonPetit caméo de Fatalis dans Black Christmas

 

VIRAL

Néanmoins, comme la Hammer à la bonne époque ou A24 en ces temps béni, la firme peut se vanter d’avoir réussi à devenir une marque, une franchise en soi. Action ou vérité est sorti aux États-Unis sous le titre « Blumhouse’s Truth or Dare ».

Mieux, en un peu plus de 10 ans, l’entreprise a produit des séries, des émissions et même des livres et des comic-books. Un véritable Disney de la série B. Il existe une branche intitulée Blumhouse Television, ayant produit des shows comme Eye Candy en 2015, Sharp Objects en 2018 et même une série The Purge depuis 2018. Il existe aussi une petite firme d’édition, Blumhouse Books, à l’origine de neuf parutions dont The Blumhouse Book of Nightmare, une anthologie de nouvelles écrites par des auteurs, des scénaristes et des acteurs.

Les prochaines sorties Blumhouse sont pour la plupart encore des suites. Halloween, Paranormal Activity et American Nightmare seront une fois de plus à l’honneur. Parmi les quelques autres projets (hors le prochain Invisible Man), un retient notre attention : The Hunt de Craig Zobel, repoussé à cause de certaines tueries américaines. Serait-on en présence du film sur 10 à vraiment nous faire aimer Jason Blum ? Une fois de plus, le suspense est de mise.

 

affiche 2

Tout savoir sur Invisible Man

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commentaires
Hananou
13/05/2020 à 14:05

Honnetement ce que jm chez blumhouse c l efficacité il faut leur reconnaitre qu ils vont droit au but...des films ss prise de tête!

TynlaSoie
03/03/2020 à 11:11

Très très bon article, comme très souvent sur ecranlarge!
Un petit rectificatif cependant : vous mentionnez certains fours de films destinés à un public jeune, voire ado : un grand nombre d'entre eux s'est vautré, pour sûr, mais assurément pas Unfriended, qui a été un succès commercial à son échelle, mais aussi critique! Il a quand même rapporté 62M de $ pour même pas 1 M$ de budget (en rappelant qu'il avait en face Furious7)!
Ce film est sauvé par son originalité, ses acteurs qui font un boulot plus qu'honorable, un sens du rythme efficace et sans fioriture mais aussi et surtout , le parti pris de sa conception, ingénieux et jamais vu!

Numberz
18/02/2020 à 08:32

Je me joins à mes comparses pour vous féliciter de votre article. Les putclick, même si c'est râlant, c'est de bonne guerre.

Geoffrey Crété - Rédaction
17/02/2020 à 20:22

@Ch

On met pas mal d'énergie dans ces articles, qui demandent bien plus de temps qu'une news Marvel vous vous en doutez :)
On en publie chaque week-end, avec chaque semaine des critiques et articles de fond. Pour tenir l'équilibre, constamment !

Ch
17/02/2020 à 13:23

Ahah j'imagine ! C'est pour ça que je n'en dit pas du male, ces article sont nécessaire je n'en doute pas ! Mais ça fait plaisir quand un article comme celui ci ou le précédent sur le manga jujutsu kaisen (que je ne connaissais pas mais que vous m'avez grandement donné envie de lire) popent.

Geoffrey Crété - Rédaction
17/02/2020 à 11:31

@CH

On vous laisse donc imaginer la comparaison niveau succès-clic-intérêt des lecteurs (et la bataille au quotidien qui va avec) ; vous êtes sur la bonne voie ;)

CH
17/02/2020 à 11:26

Permettez-moi la comparaison Blumhouse/Ecran large : pour 10 articles inutiles sur un aspect sombre de star wars, disney ou DC (comme la potentielle orientation sexuelle d'un des personnages ou le n-ieme tweet de Snyder sur justice league) nous avons un ou deux articles de grande qualité comme ce superbe article sur le studio Blumhouse.

sylvinception
17/02/2020 à 06:26

Petit cour de langue Française pour le stagiaire: dans ce cas précis il faut écrire "nous chuchote-t-on dans l'oreillette", et non pas "on nous chuchote dans l’oreillette".

(De rien, bis)

sylvinception
17/02/2020 à 06:20

"Si, si, regardez sur l’affiche, c’est Skyrock qui en dit du bien!"
Ah ah ah ah ah!!!

(P.s. : de rien, vieux...)

Maurice Escargot
16/02/2020 à 19:42

En fait, j'ai l'impression que les seuls films Blumhouse réussis, ou tout du moins intéressants, sont ceux avec de vrais auteurs aux commandes : Shyamalan, Chazelle, Peele, Zombie, ou même Wan et Wahnnell...
Leurs produits plus génériques et confiés à des anonymes interchangeables sont d'un autre côté imbuvables.
Cela prouve au moins que la boîte laisse une vraie liberté à ses artistes ; alors si pour profiter d'un Lords Of Salem ou d'un Split, il faut se taper dix Paranormal Activity et des Action ou Vérité en parallèle, et bien ainsi soit-il...

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